L’orchestre des « hobos » du Kentucky sillonne les routes du monde moderne depuis plus de dix ans. Et s’il y a bien un lieu où ils font chauffer le thermomètre et excitent les foules, c’est bien sur les planches des salles de concert, avec des prestations enlevées et charismatiques. Mais tout ça ne serait pas possible sans son rock endiablé. Et voilà justement leur quatrième effort discographique qui, s’il ne fait pas d’entorse aux acquis du combo, confirme l’efficacité de la recette. « Me And My Mary Jane », le single abouti au refrain fédérateur résume l’entreprise. Black Stone Cherry est une entité équilibrée où chacun touche sa bille. Le chanteur lorgne du côté du post-grunge, à la poêle, on retrouve la chaleur du rock sudiste, tandis que la rythmique galope du côté du heavy metal. Le disque regorge de sonorité grunge et stoner mises en valeur par la patte experte du producteur Joe Baressi (QOTSA, Soundgarden). Et c’est une mornifle dans la gueule.
Même si le clan souffle le chaud et le froid, ce disque est survolé par des esthètes hirsutes qui n’ont de cesse de prouver qui est le meilleur. On n’est pas loin de la bande son du Projet MK-Ultra : avec une rythmique guitare/basse/batterie qui n’y va pas avec le dos de la cuillère. Le soliste survole les débats : ce fou de Lynyrd Skynyrd (« Never Surrender », « Bad Luck & Hard Love » avec son riff wah-wah) tricote des soli fantastiques (« Runaway », par exemple). En revanche, beaucoup de morceaux bien lancés se retrouvent alors plombés par des refrains fainéants hurlés à la sauce beauf redneck (« Magic Moutain », « Peace Pipe »). Cela rappelle ce rock US un peu déconfit des années 2000 qu’on pouvait entendre dans les séries américaines.
Mais l’incroyable technicité du groupe ravive la flamme; le cœur palpite à vive allure, les Black Stone Cherry ne prennent pas de pincette et grossissent le trait. Ça déménage dans les oreilles innocentes. « Dance Girl », le pic heavy de l’album, laisse imaginer un sacrifice tribal qui se déroulerait dans un strip club. « Hollywood In Ketucky » pastiche les Black Crowes avant un « Blow My Mind »- aux couplets lents et refrains hurlés – qui emprunte au grunge de Seattle. « Fiesta Del Fuego » est lui un morceau ultra « badass » où le groupe pète littéralement un boulard et emmène le navire vers les brumes épaisses des rivages psychédéliques. Le coup de grâce : cet arpège chargé aux psychotropes au début de « Remember Me » qui lance les musicos vers leur savoir-faire. Toute la bande est au diapason et chacun bat le fer tant qu’il est chaud pour éviter que leur bébé parte en vrille ; pour finir avec une minute d’expérimental… La chanson attendue depuis le début ! On est servi. Amis, il est temps de déverrouiller vos hermétismes car le mastodonte déferle chez nous ces jours-ci.
Voici le clip pour la chanson « Me And Mary Jane » :
Album Magic Mountain, sortie le 5 mai 2014 chez Roadrunner Records.