Dream pop, shoegaze ou post-rock ce Shelter ? Le débat fera sans doute rage, mais une chose est sûre, ce n’est plus du metal. Mais alors, c’est quoi ? C’est tout simplement la nouvelle caractérisation du monde imaginaire de Neige, détaché de la blackgaze des albums et EP précédents d’Alcest (à l’exception De Souvenir D’un Autre Monde). Shelter se montre uniquement vaporeux, aérien, ayant perdu presque toutes les accroches provenant du monde metallique qui constellaient encore Les Voyages De L’Âme, et qui permettaient à l’auditeur amateur de musiques extrêmes de regagner de temps à autres ses pénates. Tout n’est plus qu’abstraction, et sur Shelter, plus personne ne touche terre.
Alors que le public metal était l’audience première d’Alcest dans le passé, on se demande où celui-ci se placera vis-à-vis de cet univers où les mélodies se tournent désormais vers un registre absolument pop et doucereux, où la très forte influence des Anglais de Slowdive se fait ressentir, jusqu’à la présence même de Neil Halstead sur « Away ». Peut-être se retrouvera-t-il dans l’aspect ambiant, atmosphérique, digne de musiques de films, où l’ombre de Sigur Ros plane franchement, notamment parce que l’opus a été enregistré dans les studios du groupe islandais sous la houlette de Birgir Jón Birgisson et en compagnie du quartet à corde Amiina.
Progressions d’accords mélodiques, boucles hypnotiques, trio delay-reverb-chorus à outrance… tout l’arsenal shoegaze est déployé. Mais la patte unique d’Alcest se dévoile tout de même progressivement et avec brio : profondeur des guitares et refrains d’« Opale », délicatesse progressive intense de « Voix Sereines », et magie mélodique nostalgique d’un « Délivrance » qui emporte définitivement l’auditeur avec son final enivrant et raccroche un peu, finalement, Shelter au passé discographique d’Alcest. Alors que sonne l’âge d’or d’un Deafheaven qui fait dans la blackgaze proche de l’Alcest d’antan, Neige a décidé que son embarcation prendrait l’autre large vocal, celui de l’échappée mélodique au-dessus des cimes.
Car de manière continue, Neige plane, haut dans un brouillard épais fait de ramifications d’arpèges, de claviers ambiants et de voix lointaines, proche d’une lumière qu’il semble constamment essayer de saisir. Shelter est l’ode ultime et musicalement unique à cette source lumineuse, un média qui doit permettre à Neige d’enfin attraper son idéal d’enfant. Alcest est une psychanalyse profonde de l’inconscient de Neige ; Shelter en est la phase mirifique, positive, le rêve douillet et molletonneux dans lequel il lui est désormais réconfortant de se plonger.
Ci-dessous le clip d’ « Opale » et le titre « Délivrance » :
Album Shelter, sorti le 17 janvier 2014 chez Prophecy Productions
Je suis épaté de toutes ces chroniques dithyrambiques pour cet album. J’ai du passer à côté. Personnellement, j’ai trouvé que c’était le pire album d’Alcest, une soupe simili-shoegaze, plus proche de Kyo que d’autre chose. où est l’inspiration? Les morceaux se ressemblent tous, le chant est pitoyable, l’ensemble est d’un chiant à mourir. On dirait que personne n’ose critiquer Neige. Je retourne à mon Clouds Collide…
Juste le meilleur album d’Alcest !
Quel album magnifique, je l’écoute en boucle….. Merci pour cette chronique!!!
À souligner : cet album est superbement bien produit. C’est ce qui a fait que dès le début, j’ai eu envie d’y revenir. Un son clair comme du cristal et chaleureux à la fois, très bien balancé… pas commun au style shoegaze d’ailleurs, il me semble. Ensuite au fil des écoutes, on se met à apprivoiser les mélodies et on réalise que chaque titre a son lot de subtilités…
J’avais trouvé « Les Voyages… » supérieur aux précédents, mais là on monte encore d’un cran. L’album le plus abouti d’Alcest selon mon ressenti.