Alestorm ne se prend pas la tête. Enregistrer un album, ça doit être spontané, simple et marrant. Surtout pour un album qui s’appelle Curse Of The Crystal Coconut, renvoyant à Donkey Kong qui a perdu sa noix de coco et qui comporte des morceaux comme « Shit Boat (No Fans) », compilation de une minute de jurons et de pirates sans queue ni tête. Il peut y avoir du défi, comme « Tortuga », ce mélange improbable entre Alestorm et du rap, mais l’objectif reste de se marrer et de provoquer un peu. Et le récit de l’enregistrement du disque en Thaïlande a de quoi concurrencer vos plans, quels qu’ils soient, de vacances…
On pourrait dire de beaucoup de groupes de metal qu’ils font de la musique sans se prendre la tête et pour provoquer mais n’y a-t-il pas une part de marketing derrière cette « rébellion contre le système » ? Christopher Bowes, le leader du groupe, a son idée derrière la tête. Et difficile de douter de la spontanéité de la démarche de ces mecs, de leur démarche punk, de leur liberté de ton et de création et de leurs canards géants.
« Ce n’est pas très dur de faire nos albums, nous faisons juste un peu de batterie, de basse, des guitares et du chant en studio. C’est facile. »
Radio Metal : Ce matin ma femme me demandait sur quoi j’allais travailler aujourd’hui, je lui ai répondu : « Je vais parler à ce gars qui se ramène avec un canard gonflable sur scène et qui sort un album qui s’appelle Curse Of The Crystal Coconut. » Elle m’a regardé avec beaucoup d’amour et un peu de désespoir…
Christopher Bowes (chant & clavier) : Oui, on a souvent ce genre de réaction [rires]. C’est bien d’être dans un groupe à propos duquel les gens parlent et disent : « Oh mon Dieu ! C’est ces gars… Bordel mais qu’est-ce qu’ils vont encore inventer ? » Personne ne veut être un groupe quelconque que tout le monde oublie, genre : « Ils ont sorti un album, je suppose qu’il était correct, il y avait des chansons, ça sonnait comme du metal, je m’en fous… » Surtout de nos jours, c’est la mort. Il se passe tellement de choses, il y a tellement de nouvelle musique qu’il faut faire quelque chose de différent et être unique.
Vous vous êtes rendus en Thaïlande pour enregistrer votre nouvel album. Comment c’était et pourquoi avoir été si loin ?
Nous y avons été pour plusieurs raisons. Par le passé, nous avons fait la plupart de nos albums au studio de notre producteur. Il s’appelle Lasse Lammert, il possède un studio à Lübeck en Allemagne. Nous nous retrouvons généralement à enregistrer en janvier et à sortir l’album en mai ou juin. En Allemagne, en janvier, je suis sûr que tu peux imaginer que la météo n’est pas très bonne. C’est une période assez épouvantable pour être loin de chez soi, dans le studio de quelqu’un d’autre, à vivre dans un petit appartement et ne faire que travailler. Nous avons donc décidé que nous voulions faire des trucs marrants ! Pour notre dernier album, No Grave But The Sea, nous avons pris l’avion pour la Floride, aux Etats-Unis. En janvier, c’est magnifique là-bas, il fait chaud et il y a du soleil, donc nous avons passé un excellent moment. Cette fois, nous nous sommes dit que nous devions faire encore mieux. Il fallait que nous trouvions un endroit extraordinaire et notre producteur a dit : « Que diriez-vous de la Thaïlande ? C’est sympa ! » et nous nous sommes mis d’accord pour aller là-bas. Nous avons trouvé ce studio, c’était un pur paradis. C’est une sorte de lieu de vacances cinq étoiles dans la jungle, avec une énorme piscine, tout était à proximité immédiate… On pouvait se réveiller, sortir du lit, passer le pas la porte, se laisser tomber dans la piscine, sortir de la piscine, aller directement dans le studio et enregistrer un peu de chant. C’était l’endroit parfait pour enregistrer. La météo a rendu le séjour agréable, il faisait chaud, donc nous n’étions pas inquiets d’avoir froid ou de tomber malades. Nous avons passé un moment très agréable à enregistrer, parce que c’était très détendu, très relaxant. Nous étions là : « Est-ce qu’il faut qu’on enregistre aujourd’hui ? Non, on fera ça demain ! » Ça a fait du bien parce que ce n’est pas très dur de faire nos albums, nous faisons juste un peu de batterie, de basse, des guitares et du chant en studio. C’est facile. Ça n’a jamais été un défi ou un risque, donc c’était super amusant.
Votre musique est très amusante et festive. Or, composer de la musique et enregistrer un album peut être une expérience très stressante et frustrante, surtout si on compare à l’expérience live où on partage la musique directement avec les gens. Donc, malgré tout, vous parvenez à vous amuser durant les sessions d’écriture et d’enregistrement ?
Nous n’avons pas vraiment de session d’écriture. Généralement, je fais ça seul chez moi. Dès que j’ai une idée, je vais sur mon ordinateur, je l’écris et j’enregistre quelques trucs. Nous avons pris deux ans pour écrire cet album, très lentement. Je ne me presse jamais pour faire de la musique. Dès qu’une bonne idée me vient, je l’écris. Quand il semble que nous avons suffisamment d’idées, nous disons : « Faisons un album ! » C’est un processus de composition très relax. Pour ce qui est de l’enregistrement, comme je le disais, nos chansons sont faciles. Ce n’est pas dur de jouer des chansons d’Alestorm, donc tu te contentes de les enregistrer et c’est tout. Nous pouvons passer beaucoup de temps à faire des améliorations, plutôt que de galérer à jouer les parties, ce qui est amusant. Je pense que le pire moment, c’est cette période, là maintenant, car nous avons fini le mix et le master il y a un mois, et l’album ne sort pas avant deux mois. Du coup, nous devons rester plantés là pendant trois mois avant que les gens l’entendent et ça craint. Sachant que nous avons ce truc, j’ai envie de le partager avec tout le monde mais si je le faisais, je m’attirerais pas mal d’ennuis avec la maison de disques, donc nous sommes bien obligés d’attendre et de faire avec.
Comment parviens-tu à créer une telle musique avec une atmosphère aussi festive en composant tout seul chez toi ?
Les gens croient souvent que lorsqu’on écrit une chanson, si c’est une chanson un peu aventureuse par exemple, il faut être inspiré par des choses… Mais je ne sais pas. Je peux tout faire assis sur une chaise devant mon bureau, et écrire ces chansons épiques. Ces mélodies épiques me viennent naturellement. Dès que je m’assois et joue quelque chose, ça sonne comme Alestorm, c’est magique ! Mais on nous aide aussi beaucoup. Deux ou trois chansons ont été écrites par un ami qui est guitariste dans mon projet parallèle, Christopher Bowes And His Plate Of Beans. Il est très doué pour écrire des chansons, il apporte des idées très sympas et je travaille avec ces idées et les mélange aux miennes. C’est toujours sympa d’avoir des influences extérieures pour éviter de se répéter cent fois.
« C’est très amusant de faire quelque chose qui, quand on y réfléchit, est vraiment affreux et mauvais, mais il s’avère que c’est cette chanson qui reste en tête et que tout le monde adore. »
Tu composes donc presque tout et puis tu as participé et participe toujours à d’autres groupes et projets. Est-ce parce que tu apprécies d’avoir toutes ces responsabilités et d’être constamment pris sur quelque chose ?
Je ne sais pas. J’y ai beaucoup réfléchi. Généralement, j’écris un album d’Alestorm et dès qu’il sort, je commence à me dire : « Merde ! Il faut que j’écrive un album de Gloryhammer maintenant ! » Je le fais et ensuite, s’il reste du temps une fois que c’est fait, j’ai envie de faire d’autres projets marrants, donc j’écris autre chose. J’ai l’impression qu’il n’y a pas assez d’heures dans une journée pour concrétiser toutes les idées que j’ai envie de concrétiser. Je ne sais pas ce que je vais faire. J’espère que d’autres gens vont se mettre à écrire des chansons, peut-être dans Gloryhammer, pour que je puisse me mettre en retrait et me concentrer sur tous les trucs fous que j’ai envie de faire. On verra. Mais tout le monde s’attend à ce que, au moins, j’amène la plupart des idées. Evidemment, tout le monde contribue et comme d’habitude, notre claviériste Elliot [Vernon] aime écrire, donc il compose une ou deux chansons et contribue à d’autres, mais en majorité, c’est à ma charge de tout écrire, malheureusement. Je pense qu’on s’attend à ce que j’apporte la base des chansons et peut-être qu’ensuite, ils auront des idées. Ce serait sympa si c’était l’inverse, si tous les autres avaient des idées. Je trouve que je suis meilleur quand quelqu’un d’autre écrit quelque chose, j’aime faire des modifications, des ajustements et des améliorations. Je n’aime pas tellement tout écrire moi-même.
Ressens-tu une pression à cause de ça, parce que les gens comptent sur toi pour composer la musique ?
Oui, c’est un peu une pression ! Mais j’essaye de ne pas trop la ressentir. J’aime à chaque fois dire que tous les autres peuvent toujours écrire des trucs, composer un solo et me décharger un peu, car je ne peux pas éternellement composer. Mais jusqu’à présent, ça a fonctionné, donc je ne suis jamais trop inquiet, car je sais que nous parvenons toujours à faire un album au final et qu’il est toujours bon.
L’album voit la participation de quelques invités tels qu’Ally Storch de Subway To Sally, Captain Yarrface de Rumahoy et Vreth de Finntroll. Dirais-tu qu’un album, pour vous, c’est un peu une fête qu’on peut partager avec des amis ?
J’adore impliquer des gens. J’invite tous mes amis qui le peuvent à écrire des chansons pour nous. C’est presque une grande collaboration que nous faisons tous ensemble. En plus, la plupart de ces invités font des choses que, tout simplement, nous ne sommes pas capables de faire nous-mêmes. Par exemple, Ally de Subway To Sally est tellement douée au violon. Aucun de nous ne sait jouer du violon, mais nous avions besoin d’un violon, donc nous avons fait appel à elle et elle a donné vie à l’album. Ensuite, il y a Patty Gurdy qui fait toutes ces parties géniales de vielle à roue et qui a également chanté sur une chanson. Il y a deux ou trois autres invités que nous avons fait venir juste pour nous amuser, comme Vreth, le chanteur de Finntroll. Nous avons écrit la chanson qui s’appelle « Chomp Chomp » et ça sonnait comme une chanson de Finntroll, donc nous avons pensé que ce serait cool si nous avions le chanteur de Finntroll pour la chanter. Nous nous sommes saouler l’année dernière à un festival, nous lui avons demandé et il a accepté, et on connaît la suite ! Nous n’aurions pas pu faire l’album sans une grande partie de ces gens, donc c’est plus une part essentielle que de simples invités.
Il y a une chanson dans l’album intitulée « Tortuga » comprenant des influences hip-hop et R’n’B, des sons électroniques et du chant rap. Pour autant, le résultat sonne assez naturel. Ça a été un défi d’apporter de telles influences à votre musique ?
Cette chanson a été un gros défi. La base de cette chanson a été écrite par cet ami dont je viens de parler et qui est dans mon groupe Beans. Il avait écrit cette chanson qui était, en gros, un morceau de rap destiné à son groupe, mais il n’arrivait pas à le faire fonctionner. Il me l’a envoyé et je l’ai adoré, il avait un truc qui faisait que ça sonnait parfait. Je lui ai dit que j’allais essayer d’en faire une chanson d’Alestorm. Nous nous sommes tous dit que ce serait impossible parce que ça n’avait rien à voir avec Alestorm, mais j’ai eu une idée sur la manière de le faire : prendre quelques éléments et ajouter tous les trucs traditionnels d’Alestorm, tels que l’orchestre, les grosses voix de gang, quelques instruments folk et ma voix. J’ai aussi ajouté toutes ces paroles sur les pirates. C’était un vrai défi et, en fait, l’une des chansons les plus amusantes à écrire et enregistrer car elle s’est faite très différemment de nos chansons habituelles. En général, nous allons simplement en studio, nous jouons, la chanson est simple et nous savons à quoi elle va ressembler. Alors que pour celle-ci, nous n’avions aucune idée de ce que ça allait donner. Il a fallu énormément de créativité pour qu’elle fonctionne, avec les riffs néo-metal, tous les trucs hip-hop, le chant rappé… Je la trouve absolument incroyable. C’est possiblement l’une des meilleures chansons que nous ayons jamais faites ! Mais je sais que plein de gens vont la détester [rires]. Il y a plein de fans d’Alestorm qui vont péter un câble en entendant les parties rappées. Mais nous sommes totalement prêts à recevoir la haine. Nous avons fait un clip pour cette chanson, nous sommes tous habillés en pirates et faisons de vrais trucs de pirates, donc avec un peu de chance, les gens se diront : « Oh ouais, Alestorm, ce sont encore des pirates ! » J’ai hâte que les gens entendent ça, cette chanson va être dingue.
Avez-vous déjà essayé de travailler sur d’autres types d’expérimentations qui n’ont pas fonctionné ?
Là, c’est clairement le truc le plus fou que nous ayons essayé. Mais il est certain que ça va m’inciter à faire d’autres choses comme ça, à avoir d’autres idées vraiment bizarres auxquelles personne ne s’attend. Sur cet album, nous n’avons rien tenté d’autre, nous n’avons pas fait plus étrange que ça. Mais à l’avenir, je suis sûr qu’il y aura d’autres chansons qui feront passer celle-ci pour une chanson traditionnelle. Ça va vraiment partir en couille !
« Je déteste tout et tout le monde dans toute cette scène. On voit plein de groupes faire des petits communiqués de presse et on peut voir clair dans leur jeu. On sait que ce ne sont que des conneries mais ensuite, on voit aussi des fans qui adorent ça. »
A propos de cet album, quand vous êtes entrés en studio, tu as dit : « On sera là pendant les trois prochaines semaines pour enregistrer environ treize chansons, dont certaines seront absolument horribles et ne verront jamais le jour. » Du coup, quelles sont ces horribles chansons qui ne sont pas sur l’album ?
Nous avons vraiment composé et enregistré treize chansons. L’une d’entre elles, que nous trouvions horrible, s’est avérée être l’une de nos préférées, il s’agit de « Shit Boat (No Fans) ». Du coup, nous l’avons mise dans l’édition principale de l’album. Et l’une des chansons que nous trouvions bonne s’est avérée être très mauvaise, donc c’est devenu un morceau bonus dans une des éditions spéciales. Si vous achetez le coffret de dingue, on y trouve un vinyle gratuit avec deux chansons et ce sont les deux pires chansons. L’une s’intitule « Big Ship Little Ship », celle-ci est vraiment mauvaise, c’est juste une chanson stupide. Ensuite, nous avons fait une reprise d’une chanson de rap anglais. Je pense que nous sommes pas mal obsédés par le rap en ce moment, donc nous avons fait aussi cette chanson de rap. Elle est vraiment nulle, c’est de ce gars qui s’appelle Dizzee Rascal et nous en avons également fait un titre bonus. Ces chansons sont nulles mais à la fois, elles sont assez marrantes. Je ne voulais pas les mettre sur l’album, mais au bout du compte, j’ai envie que tout le monde entende tout ce que nous faisons, donc ça sort toujours d’une manière ou d’une autre.
Écoutes-tu du rap ?
Non, pas du tout. Ne vous inquiétez pas, je ne suis pas devenu un gars qui déteste le metal et écoute du rap. C’est juste que j’adore incorporer de nouvelles idées, essayer des trucs débiles et voir ce qui fonctionne.
Vers la fin de l’album, on retrouve une chanson épique de sept minutes, qui démarre sur des influences black metal et est très grandiloquente. A quel point était-ce différent de composer cette chanson, compte tenu de son approche et son format différents ?
Ça faisait longtemps que j’écrivais cette chanson, « Wooden Leg Part 2 ». Nous avons fait la chanson d’origine, « Wooden Leg Part 1 », sur notre quatrième album Sunset On The Golden Age, c’était la chanson la plus stupide que nous ayons jamais écrite à l’époque. Dès que nous l’avons faite, j’ai pensé que ce serait super d’écrire une suite à cette chanson qui serait radicalement l’opposé. Donc c’est une grande aventure heavy, extrême et progressive. Il m’a fallu six ans pour la terminer. C’était un gros défi de faire en sorte qu’elle fonctionne, avec toutes ces références et tous ces thèmes issus de l’ancienne chanson, mais incrustés dans du metal extrême épique. Il est possible que ce soit la meilleure chanson de l’album, meilleure que « Tortuga ».
Tu emploies souvent le mot « stupide ». On dirait que tu es constamment en train d’essayer de réaliser des choses stupides, pas dans un sens négatif, mais plutôt improbable, ou amusant…
Exactement. J’essaye toujours de faire quelque chose auquel les gens ne s’attendraient pas. C’est très amusant de faire quelque chose qui, quand on y réfléchit, est vraiment affreux et mauvais, mais il s’avère que c’est cette chanson qui reste en tête et que tout le monde adore. Des choses comme « Fucked With An Anchor », c’est une chanson pleine de jurons. J’adore quand nous faisons ça et que ça marche, c’est super quand on essaye quelque chose et que ça finit par être payant.
La chanson « Shit Boat (No Fans) » qui dure à peine une minute est également un enchaînement de jurons. Tu as dit qu’au début tu détestais cette chanson…
A l’origine, les paroles étaient totalement différentes, elles parlaient d’autre chose. J’étais très en colère un jour, donc j’ai écrit une chanson de haine au sujet de quelqu’un. C’était très offensant et ça pouvait potentiellement m’attirer pas mal d’ennuis. C’était une vraie méchante diatribe d’insultes. Je l’ai montrée aux gars et ils ont dit que cette chanson était très cool, mais que nous ne pouvions pas la sortir parce que ça nous causerait trop de problèmes. Nous avons donc pensé que nous devions changer les paroles. Nous nous sommes posés un jour et nous avons réécrit les paroles pour que ça parle d’un bateau pirate. Nous avons conservé tous les gros mots pour rester sur le même genre de débit et faire la chanson la plus offensante que nous pouvions imaginer. Je pense que ce sera un gros succès en concert, car elle est courte, simple et facile. Les gens adorent crier des insultes ; c’est un truc que j’ai découvert, les gens adorent dire des gros mots !
C’est une chanson très punk, notamment parce qu’elle est courte. Le punk fait-il partie de vos influences ?
Tout l’album a un côté très punk. Le début du second morceau « Fannybaws », avec cette petite guitare mutée et les woh-oh, c’est de la pop punk classique de la fin des années 90. Je pense que j’ai beaucoup canalisé de ce style pour tout cet album, il y a de vrais riffs et vocaux punk, très agressifs, du genre « va te faire foutre ». Il y a clairement une connotation punk dans cet album. Quand j’étais bien plus jeune, j’étais un gosse punk hardcore, c’était ma musique de prédilection. Depuis, je suis passé au metal et à des trucs plus compliqués, mais j’apprécie toujours l’énergie et l’agressivité du punk, mais aussi ce sens mélodique. J’ai eu envie de ramener ça sur cet album.
« Certains groupes ont de la pyrotechnique, d’autres ont des décors de scènes de dingue, nous, nous avons un canard ! [Rires] C’est très efficace. »
Au sujet du titre de l’album, tu as déclaré : « On a peut-être ou peut-être pas piqué ce titre à Donkey Kong. » C’est quoi l’histoire là-derrière ?
Au départ, nous n’avions pas de titre pour l’album. Nous ne savions pas comment l’appeler. Mais ensuite, il y avait une chanson sur l’album intitulée « Pirate’s Scorn », qui est une reprise d’une chanson qu’on entendait dans l’émission pour enfant de Donkey Kong. Je ne sais pas si tu l’as déjà regardée mais il y avait cette super chanson sur des pirates qui essayaient de voler une noix de coco à Donkey Kong. Nous avons trouvé que c’était une excellente idée pour le titre de l’album, donc nous l’avons prise et c’est devenu Curse Of The Crystal Coconut parce que c’est cool. Sur la pochette de l’album, on retrouve la noix de coco de cristal – quand on joue à Donkey Kon sur Ninento 64, il faut récupérer les noix de coco –, on voit le corps mort de Donkey Kong dans un coin et tout un tas de références à Donkey Kong. Ce n’est pas vraiment un concept album mais c’était une image sympa que je voulais créer avec toute cette thématique.
Une question plus sérieuse : travailler dans l’industrie musicale est très éreintant et c’est un business qui peut être très cynique. Comment parvenez-vous à continuellement sourire et faire une musique aussi festive et rigolote dans ce contexte ?
Je déteste tout et tout le monde dans toute cette scène. On voit plein de groupes faire des petits communiqués de presse et on peut voir clair dans leur jeu. On sait que ce ne sont que des conneries mais ensuite, on voit aussi des fans qui adorent ça. Tout est faux, tout le genre musical, surtout quand il s’agit de ces groupes mainstream, y compris des groupes dans notre genre. Tout est faux et il y a de quoi devenir fou. Je pense que notre manière de le gérer, c’est en nous en fichant, nous ne faisons pas semblant, nous n’écrivons pas des messages du genre : « Merci tout le monde pour votre soutien ! », nous ne faisons pas toutes ces conneries. Nous faisons notre truc, si vous aimez, très bien, sinon, nous nous en fichons. C’est notre seule manière de faire face à toute cette industrie car elle est tellement pleine de conneries. Ça me rend dingue.
Et pourtant, le rock, le metal et le punk sont des genres musicaux censés être sincères et rebelles…
C’est presque une rébellion préemballée. Il y a plein de groupes dont toute l’image c’est : « On emmerde le monde ! On fait ce qu’on veut, démolissons le système ! » Mais ils sont le système ! Ce sont des artistes mainstream, et ils ont cette énorme économie qui brasse plusieurs millions de dollars et qui font d’eux qui ils sont. Et tu vois des gens dire : « Oh, ouais, ça c’est vraiment metal ! » Ce n’est pas vraiment metal, tout est conçu et calculé pour vendre des albums. Pour tous ces groupes, je te garantis qu’il y a toujours quelqu’un comme le management ou le label qui dit : « Vous ne pouvez pas dire ça ! Vous devez faire ça ! Notre étude démographique dit que vous devez faire les cornes du diable et dire ‘j’emmerde le système’ mais rien d’autre. » Je déteste tout ça !
Tu as déclaré que ce que tu adores une fois un album terminé, c’est de faire des clips et partir en vrille avec toutes les idées stupides que vous pouvez trouver. Aimerais-tu un jour carrément réaliser un film, genre le film le plus stupide d’Hollywood ?
J’adore faire des clips. Je trouve que c’est le partie la plus marrante dans la réalisation d’un album. Nous avons enregistré deux clips dans un studio, nous en avons enregistré un nous-mêmes et il y a une lyric vidéo. Nous nous sommes rendus en Serbie et avons fait deux clips vraiment extraordinaires pour cet album. Ils vont bientôt sortir. Je crois que le premier est prévu pour dans deux semaines. Il y a des très trucs vraiment détraqués. J’adore pouvoir envoyer un e-mail au réalisateur et lui dire : « Je veux qu’il se passe ça. » Dans celui-ci, il y a une femme qui me ressemble, elle a mon visage et je donne naissance à un bébé. Le bébé, c’est aussi moi et il chante la chanson. Nous faisons des trucs complètement barges ! [Rires] C’est vraiment ce que je préfère. Peut-être que les fans n’aimeront pas, car ils préfèrent toujours les clips où nous sommes juste des pirates, mais j’adore faire des clips fous. Ce serait cool d’avoir le budget et une idée pour faire un film. Je crois que Nightwish l’a fait avec Imaginaerum, ils ont fait une sorte de film qui accompagnait l’album. Ce serait extraordinaire de faire tout un film conceptuel qui suivrait une histoire tout au long d’un album. Ce serait mon rêve.
Dernière question et probablement la plus importante de cette interview : vous avez un canard gonflable sur scène. En avez-vous un de rechange au cas où le canard explose sur scène ?
En fait, nous avions l’habitude de balancer tous les canards dans le public et nous nous sommes retrouvés à court de canard. A chaque fois, nous avions un canard et nous le faisions exploser et l’envoyions dans la foule qui le déchiquetait. Mais il ne nous en restait plus et l’entreprise qui les fabriquait a arrêté d’en produire, donc nous avons dû trouver une autre entreprise pour leur commander ces canards sur mesure. Les nouveaux coûtent très cher et pèsent quarante kilos, donc nous ne pouvons plus les envoyer dans le public parce que ça tuerait des gens. Tout notre spectacle se résume à ce canard. Certains groupes ont de la pyrotechnique, d’autres ont des décors de scènes de dingue, nous, nous avons un canard ! [Rires] C’est très efficace.
Interview réalisée par téléphone le 24 mars 2020 par Philippe Sliwa.
Retranscription : Emilie Bardalou.
Traduction : Nicolas Gricourt.
Photos : Elliot Vernon.
Site officiel d’Alestorm : alestorm.net.
Acheter l’album Curse Of The Crystal Coconut.
Voila un groupe qui donne des billes à ceux qui prennent les métalleux pour des demeurés…
Je sais pas si c’est de la stupidité ou du génie mdr …
Je commence tout juste, mais cette première question est sans aucun doute la meilleure première question de l’Histoire de l’interview.
À encadrer.
Merci ! Des jours comme ça, on se demande vraiment si c’est bien sérieux de faire ça comme métier… 😉