ENVOYEZ VOS INFOS :

CONTACT [at] RADIOMETAL [dot] FR

Interview   

Alice Cooper : le gosse de Detroit


Un peu plus d’un an après la sortie de l’EP Breadcrumbs, Alice Cooper revient à la charge et poursuit son hommage à Detroit, sa ville de naissance et de cœur. Une nouvelle fois produit par le légendaire Bob Ezrin, qui avait déjà marqué de son empreinte l’album Love It To Death, le premier succès de l’artiste il y a cinquante ans, Detroit Stories est une lettre d’amour à la Motor City et à sa jeunesse, composée et enregistrée avec une flopée de musiciens, dont des locaux tels que Wayne Kramer (MC5), Johnny « Bee » Badanjek (Detroit Wheels) ou Paul Randolph et les originaux du Alice Cooper Band.

De sa découverte du rock n’ roll à son aversion profonde pour la politique, en passant par son évolution artistique ou sa relation avec les producteurs Bob Ezrin et Desmond Child, nous reprenons notre discussion avec le Coop qui répond à nos questions avec la verve qu’on lui connaît et relate avec tendresse les souvenirs d’une époque désormais lointaine, mais toujours aussi vive dans son esprit.

Note : Interview parue initialement dans le second numéro du magazine Radio Metal. Le nouveau numéro sera disponible aux points de distribution et en commande dans notre shop à partir du 21 avril.

« Plein de groupes ne nous aimaient pas parce que nous menacions leur position mais, en dehors de ça, je n’ai jamais eu d’ennemi. »

Radio Metal : Après l’EP Breadcumbds, tu poursuis ton hommage à la ville de Detroit avec l’album Detroit Stories, un album réalisé à Detroit pour Detroit et par des habitants de Detroit. Qu’est-ce qui t’a motivé à te reconnecter à Detroit à ce stade de ta carrière ?

Alice Cooper (chant) : Je pense que qu’il y a un peu de nostalgie, mais à la fois, aux Etats-Unis, différentes régions étaient marquées par différents types de musique. Los Angeles avait les Doors, Love et Buffalo Springfield ; San Francisco avait les Grateful Dead et Jefferson Airplane; New York avait les Young Rascals. Tandis que Detroit a toujours été la capitale hard rock des Etats-Unis. Tous les groupes de hard rock venaient de Detroit. C’est là que nous nous sentions le plus à l’aise car c’est le genre de musique que nous faisions. En plus de ça, je suis né à Detroit et ensuite, le groupe y est revenu en 1969, nous y avons vécu et y jouions tout le temps. Tous les weekends, nous jouions au Grande Ballroom, au Eastown, au Fox, etc. Il y avait toujours Alice Cooper, Bob Seger, Ted Nugent et la tête d’affiche était les Who, les Kinks, Savoy Brown, etc. Nous étions tous de jeunes groupes qui n’avaient pas encore percé. Les Stooges, MC5 et Alice Cooper étaient uniquement populaires là-bas, à Detroit. Nous n’étions pas encore sur la scène nationale. C’est quand le hit « I’m Eighteen » est sorti que nous sommes devenus un groupe national. C’était une grosse étape mais encore aujourd’hui j’attribue ce succès à Detroit grâce à toute cette influence. Ça fait donc partie de mon ADN. Mon genre de rock n’ roll est très porté sur les guitares.

Nous cherchions quelque chose auquel raccrocher cet album. Bob Ezrin et moi travaillons beaucoup sur la base de concepts ; Welcome To My Nightmare, School’s Out et Paranormal étaient tous des albums conceptuels. Pour celui-ci, j’ai dit : « Pourquoi ne fait-on pas tout simplement un album sur Detroit ? Faisons-le à Detroit, avec uniquement des musiciens de Detroit. Les cuivres, les choristes, etc. tout doit venir de Detroit. » Le seul gars qui n’est pas vraiment originaire de Detroit dans l’album, c’est Joe Bonamassa. Si tu veux vraiment retrouver l’atmosphère de Detroit, il faut y être, et c’est là toute l’idée de cet album. Puis les personnages que j’ai inventés pour cet album étaient soit inspirés de gens que j’ai connus à Detroit, soit des gens que j’ai imaginés en sachant quel genre de personnes vivait à Detroit. Nous avons inventé plein de personnages pour cet album. J’ai trouvé que c’était un processus très créatif.

Detroit Stories est un album très varié : on retrouve du blues (« Drunk And In Love »), du punk (« Go Man Go »), du funk (« $1000 High Hell Shoes »), de la pop légère (« Our Love Will Change The World »)… C’est presque un résumé de l’histoire du rock !

[Rires] Je vois ce que tu veux dire ! La plupart des chansons sont quand même très centrées sur les guitares et sont des chansons de rock n’ roll, mais je vois presque la musique comme un morceau d’argile qu’on peut sculpter à l’envie. On peut la sculpter pour lui donner toutes sortes de formes. Quand je travaille avec différents compositeurs, je travaille avec des gars qui sont capables de faire ça, de tordre la musique. Si je dis : « Cette section B est trop longue » ou « Le refrain n’est pas assez exaltant », je travaille avec des gens qui répondent : « Essayons ceci et cela, et essayons ça par-là » jusqu’à obtenir ce qu’il faut. Parfois le résultat est drôle, parfois il est mélancolique, parfois il est très grave, et d’autres fois il est absurde. Mais tous les deux, toi et l’autre compositeur, vous devez vous poser, écouter et savoir quand la chanson fonctionne. Je pense que tous – les Beatles, Bob Dylan et tous les compositeurs – passent par ce genre de moment où ils changent ci et déplacent ça, c’est comme si on réarrangeait les meubles jusqu’à ce que ça fonctionne.

On retrouve donc une chanson comme « Our Love Will Change The World », qui est très joyeuse, excepté les paroles. Les paroles sont un peu subversives. Il y a beaucoup d’humour dans les textes de l’album avec des chansons comme « I Hate You ». Le groupe originel s’est séparé en 1974, mais nous nous sommes séparés sans rancune, en étant amis. Donc même après, Dennis [Dunaway], Neal [Smith], Michael [Bruce] et moi avons toujours travaillé ensemble sur différents projets. Vu que, généralement, dans tous les groupes les membres se détestent, nous avons décidé de faire une chanson où un gars chante à propos d’un des autres gars. Nous nous critiquons les uns les autres. J’ai trouvé cette chanson très drôle et, au final, elle était aussi touchante parce que nous parlions tous de Glen [Buxton] qui est décédé. Nous disions : « Le vide que tu as laissé sur scène est la raison pour laquelle nous te détestons le plus. » Il nous manque. C’est donc une chanson très touchante, mais plein de chansons ont un côté humoristique. La reprise du « Rock & Roll » de Lou Reed était vraiment parfaite pour cet album. Bob Ezrin avait travaillé avec Lou Reed et j’ai connu Lou Reed il y a longtemps, mais nous lui avons donné un coup de boost, nous avons mis Bonamassa et Steve Hunter aux guitares et nous les avons laissés se lâcher. Je trouve qu’un des meilleurs trucs dans cette chanson, c’est la batterie, Johnny « Bee » [Badanjek] joue comme un acharné sur cette chanson.

« Je pense que notre plus grande responsabilité, puisqu’on ne peut pas tourner, c’est de continuer à faire de la musique. Nous sommes des entertainers. »

Tu viens de parler de la chanson « I Hate You » : il se trouve qu’aujourd’hui, tu es un artiste très respecté, mais as-tu été confronté à beaucoup de haine au cours de ta carrière ?

Au tout début, oui. J’ai commencé à réfléchir il y a quelques jours aux ennemis que j’avais mais, en fait, je n’en ai aucun ! Je ne me dispute avec personne, je n’ai pas vraiment d’ennemi. Au début, ce que nous faisions était si choquant que tout le monde soit était méfiant, soit ne voulait rien savoir à notre sujet. La raison était que les groupes avaient un peu peur de nous car peut-être qu’ils voyaient en nous le futur, peut-être qu’ils voyaient qu’ils ne pourraient plus se contenter d’être là à jouer leurs chansons. Ils allaient devoir faire quelque chose pour faire réagir le public car maintenant, il y avait Alice Cooper avec sa production scénique et tout le monde les regardait en disant : « Comment se fait-il que vous ne faites aucune production scénique ? » Plein de groupes ne nous aimaient pas parce que nous menacions leur position mais, en dehors de ça, je n’ai jamais eu d’ennemi. Marilyn Manson n’a jamais été un ennemi, [David] Bowie n’a jamais été un ennemi, Iggy [Pop] n’a jamais été un ennemi… Quand Kiss a débarqué, les gens ont toujours cru que nous serions ennemis parce que j’avais été le premier à me maquiller et ensuite ils sont arrivés et l’ont également fait. Nous étions amis. Je leur ai juste dit : « Si vous comptez vous maquiller, assurez-vous juste que votre maquillage ne ressemble pas au mien. » Je me suis attendu à ce qu’il y ait plein de groupes théâtraux après que nous ayons percé et eu des hits, donc je n’étais pas choqué par Kiss, Bowie, Manson et tous ces gens.

« Hanging On By A Thread (Don’t Give Up) » a originellement été publiée en mai pour évoquer la situation pandémique et donner de la force aux gens en ces temps difficiles…

En fait, « Hanging On By A Thread (Don’t Give Up » a d’abord été écrite pour l’album et traitait de suicide. Il s’agissait d’éviter des suicides et à la toute fin, nous donnons le numéro de la prévention anti-suicide car plein de gens envisagent cette idée. Il y a deux versions de la chanson et la seconde traitait de la pandémie. J’ai donc changé le second couplet et nous avons sorti cette version pour encourager les gens et dire : « Ne soyez pas des victimes, ne traitez pas ce truc comme des victimes et faisons en sorte de nous en débarrasser. Travaillons ensemble et débarrassons-nous de cette pandémie. » Ceci dit, la version qu’on retrouve sur l’album est celle sur le suicide car je pense que la pandémie s’en ira alors que le problème du suicide sera toujours là. Je me suis donc dit que la version sur le suicide était celle qui devait apparaître sur l’album.

D’ailleurs, comment Alice Cooper a-t-il vécu cette année de pandémie ?

La pandémie a pas mal changé le monde. Nous avons l’habitude de tourner dans cent quatre-vingt-dix villes par an, donc nous avons dû annuler cent quatre-vingt-dix concerts, et ça ne concerne pas que le groupe Alice Cooper, ça concerne aussi les Hollywood Vampires. C’est très étrange pour nous d’être en pause pendant toute une année. Peut-être que nous en avions besoin, peut-être que nous avions besoin de cette pause, mais comme pour tous les groupes dans le monde, c’est très inhabituel de rester assis chez soi. C’est la toute première fois dans l’histoire du monde moderne que tout s’arrête. Je pense que notre plus grande responsabilité, puisqu’on ne peut pas tourner, c’est de continuer à faire de la musique. Nous sommes des entertainers. Je n’ai jamais été politisé ; d’autres le sont, mais pas moi. Je crois au fait d’emmener les gens loin de leurs problèmes, au lieu de rabâcher leurs problèmes ou d’essayer de les résoudre à leur place. Pour moi, le divertissement est fait pour permettre aux gens de s’évader. Quand on va voir un film d’Harry Potter, de Star Wars ou autre chose, ils nous emmènent dans un nouvel univers, complètement ailleurs. Durant ces deux heures, on ne pense pas à la politique, on ne pense pas à notre prêt immobilier ou à la question de savoir si les enfants s’en sortent bien à l’école, on est emportés dans un monde imaginaire avec eux, et ensuite, ils nous ramènent chez nous. C’est donc un peu ce que j’essaye de faire. J’essaye de vous emmener loin de vos problèmes pendant un moment et de vous encourager. Même avec la pandémie, on peut toujours faire de la musique. On n’est pas devant plein de gens, mais on peut utiliser un microphone accompagné d’un autre gars qui gère le studio. On peut encore composer et enregistrer.

« [La chansoon « Elected »] était numéro un en Angleterre et dans pleins d’autres pays, mais il a fallu que j’explique aux gens que je ne voulais vraiment pas devenir président [rires]. »

En parlant de ne pas être politisé, tu as été jusqu’à dire que c’était un « abus de pouvoir » quand des musiciens exprimaient leurs positions politiques. Ton ami Dee Snider a de son côté exprimé son désaccord avec toi, disant que « nombre de [tes] héros et inspirations sont des gens qui se sont exprimés contre des positions politiques et [que ton] propre héritage [nous] poussait à remettre en question la norme ». J’imagine qu’il pensait à une chanson comme « Elected » par exemple…

Dee et moi sommes les meilleurs amis qui soient et les meilleurs amis ne sont parfois pas d’accord sur plein de choses. D’ailleurs, Dee m’a appelé après ça et m’a dit : « J’espère que je ne t’ai pas offensé. » Je lui ai dit : « Non, on a le droit d’avoir des avis opposés. » Dee et moi avons travaillé sur plein de projets ensemble, c’est l’un des mecs que j’aime le plus dans le rock n’ roll et il n’y a aucune rupture par rapport à ça. C’est juste que je trouve que quand on utilise son nom pour influencer les votes, ça revient un peu à dire que ton public est trop stupide pour penser par lui-même. Je ne vois pas des gens comme Dee, Springsteen, Sting et Bono comme étant politisés, je les vois comme étant humanitaires. Ils défendent ce qui est bon pour les gens qui ne peuvent pas prendre soin d’eux et se protéger. Je crois totalement en ça, absolument, mais ce en quoi je ne crois pas, c’est en ces célébrités ou ces acteurs qui vont à la télévision pour dire : « Si vous êtes fan de moi, vous voterez pour ce gars. » C’est un mauvais emploi de leur renommée, et encore une fois, c’est comme s’ils disaient à leur public qu’ils sont trop stupides pour penser par eux-mêmes. Sur ce point, je suis en désaccord avec lui. Je pense que le rock peut s’exprimer politiquement, on peut avoir une opinion, on en a tous une, mais dire à un public pour qui voter, c’est autre chose. Quand à « Elected », c’était très satirique. A l’époque, l’idée qu’Alice Cooper – qui était dix fois plus dangereux que Marilyn Manson – puisse se présenter aux élections était tellement absurde que c’était clairement une blague. Sauf que c’était un très bon album. D’ailleurs, quand nous avons fait l’album [Billion Dollar Babies], j’ai dit : « Faisons de cet album un genre d’hommage aux Who » avec ces gros power chords et tout. Nous n’avions pas vraiment réalisé que la chanson allait être un tel tube. Elle était numéro un en Angleterre et dans pleins d’autres pays, mais il a fallu que j’explique aux gens que je ne voulais vraiment pas devenir président [rires].

Tu es né à Detroit et y as vécu initialement jusqu’à l’âge de dix ans : quel genre d’enfant était Vincent Furnier en ce temps ?

Je suis né à cet âge d’or. J’avais environ sept ans quand j’ai vu Elvis dans l’émission d’Ed Sullivan. Je suis tout de suite retourné dans ma chambre et j’ai commencé à l’imiter devant le miroir. Ensuite, j’ai entendu Chuck Berry et je me suis dit : « Oh bon sang ! » C’était la première chanson que j’entendais avec une guitare mise au premier plan. Ce n’était pas des cuivres ou du piano, c’était du rock n’ roll avec de la guitare. Les paroles étaient amusantes, il racontait une histoire en trois minutes, donc je suis devenu un fan de Chuck Berry. Notre famille était très musicale, nous montions dans la voiture, allumions la radio et tout le monde chantait en chœur sur le doo-wop des années 50. Cet ADN de Detroit est resté ancré en moi. Quand j’ai intégré un groupe avec mes amis, il y avait une chose que nous aimions et c’était le rock n’ roll qui envoyait la sauce. C’est la chose que nous avions tous en commun. Nous ne voulions pas jouer du soft rock, nous voulions jouer du hard rock. Je pense que ça vient de Detroit, où je suis né.

Alice Cooper était-il déjà là quelque part dans ce gosse de Detroit ?

Je pense que c’était un prolongement, parce que j’étais tout le temps en train de faire des imitations. Je pouvais regarder un film et ensuite singer un gars que j’avais vu dans le film. J’étais toujours un genre de clown en classe. A l’école primaire jusqu’au lycée, j’étais toujours le gars qui faisait des commentaires et faisait rire tout le monde, y compris le professeur. J’étais assez convaincu que j’avais le show business dans le sang. Ensuite, quand j’ai été en position de pouvoir faire ça, j’en ai profité et j’étais très à l’aise sur scène. Être sur scène c’est normal pour moi, tandis que d’autres gens sont très tendus quand ils montent sur scène. Je suis très à l’aise quand je monte sur scène parce que je suis né pour faire ça. Je n’ai jamais le trac, je comprends que ça fait partie de moi. Mais Alice Cooper est arrivé au tout début quand j’étais simplement le chanteur de notre groupe : j’ai vu que le rock n’ roll avait besoin d’un méchant. On avait tous ces grands héros, mais moi je voulais être le méchant. J’ai dit : « Il faut créer un personnage qui serait un méchant. » Alice Cooper est donc né à ce moment-là. Il était androgyne, il n’y avait pas moyen qu’il vienne de cette planète [petits rires]. Nous abordions plein de choses qui étaient taboues pour les gens et le spectacle sur scène était très théâtral. Mais la base du groupe était que nous étions un groupe à la Yardbirds ou The Who, nous étions un groupe de hard rock. Pour moi, faire des hits et les mettre en scène dans un spectacle avec ce personnage était la combinaison gagnante. L’humour n’était pas obligatoire mais il fallait des albums qui soient des hits.

« Nous avions toujours cru que compliquer les choses les rendait plus cool mais nous étions complètement à côté de la plaque. La simplicité est toujours plus puissante que la complexité. »

Love It To Death, qui était ton premier succès commercial, est sorti il y a cinquante ans. C’est le premier album que tu as réalisé à Detroit et le premier avec le producteur Bob Ezrin. Dirais-tu que ces deux faits sont responsables de la magie qui a opéré sur Love It To Death ?

En fait, Love It To Death a été composé à Detroit avec Bob Ezrin. Nous avons écrit tout l’album à Detroit, mais nous l’avons enregistré à Chicago parce qu’il n’y avait pas de très bons studios à Detroit à l’époque, sauf pour la Motown. Les studios de la Motown étaient toujours très pris, il y avait The Four Tops et Stevie Wonder, tous ces gars utilisaient ces studios. Donc nous avons dû aller à Chicago pour enregistrer l’album, mais Love It To Death a été intégralement écrit à Detroit. Et tu as raison, cinquante ans plus tard, nous voilà de nouveau en train de faire un album sur Detroit ! Il y a des choses sur lesquelles on ne peut mettre des mots. Nous avons écrit des albums à Londres, New York, Los Angeles et partout dans le monde, mais Detroit a un truc bien à elle. Les chansons de Detroit sont très urbaines, elles ne sont pas très sophistiquées. C’est du rock très urbain et tout le monde peut les comprendre. Par la suite, nous sommes partis sur des albums qui étaient beaucoup plus éthérés ou cérébraux, mais pour une raison, les chansons écrites à Detroit sont de simples chansons de hard rock n’ roll. Peut-être est-ce parce qu’on y fabrique des voitures et que c’est une ville très industrielle. Les gens à Detroit n’aiment pas le soft rock, ils veulent du hard rock.

Concernant Bob Ezrin, il faut savoir que nous n’avons jamais écouté un autre producteur. Frank Zappa est arrivé et c’était sympa qu’il soit là, c’était super et il nous a signés sur son label [Straight Records], mais nous n’avons jamais écouté ce qu’il voulait faire musicalement car nous avions notre propre idée de ce qu’était Alice Cooper. Frank voulait nous traiter comme une sorte de nouvelle bête curieuse, alors que nous étions convaincus que nous pouvions être tout aussi commerciaux que les Rolling Stones. Quand Bob Ezrin est arrivé, je ne sais pas pourquoi le groupe l’a écouté mais il a eu raison sur toute la ligne. Quand nous avons fait « I’m Eighteen », initialement elle était très compliquée, mais Bob n’arrêtait pas de dire : « Simplifiez-la. » Nous n’avons cessé de la simplifier jusqu’à ce qu’elle soit si basique que tout le monde pouvait y adhérer. C’était la première personne que nous écoutions et encore à ce jour, quand je compose des chansons, je les soumets à Bob Ezrin parce que c’est un peu mon George Martin, qui a travaillé avec les Beatles. Il s’y connaît beaucoup en musique. Quand nous avons composé ces chansons, ça a été une révélation pour nous : le fait d’éliminer des choses dans une chanson pouvait la rendre plus puissante. Nous avions toujours cru que compliquer les choses les rendait plus cool mais nous étions complètement à côté de la plaque. La simplicité est toujours plus puissante que la complexité.

Un autre producteur-compositeur qui a été important dans ta carrière, c’est Desmond Child. Il se trouve qu’il a révélé en juillet dernier qu’il travaillait sur de la nouvelle musique avec toi. Quelle est cette musique ?

Desmond est un grand compositeur. Nous avons fait l’album Trash ensemble. C’est ce que j’appellerais un « chirurgien de la chanson ». Il peut écouter une chanson et tout de suite savoir où il faut l’emmener. Il est tellement doué pour ça que dès que nous branchons les instruments, nous écrivons tout de suite différents types de chansons. Et maintenant, il a un album qui va sortir et il a dit : « Ça te dirait de chanter sur cette chanson ? » J’ai dit : « Bien sûr ! » Cette chanson n’est pas encore sortie parce qu’encore une fois, la pandémie a retardé tout le monde d’un an et demi. Sa chanson n’est pas du tout mon genre de musique mais ma voix semblait être celle qu’il fallait pour ce passage qu’il voulait que je fasse. Le résultat est très bon. Je ne sais pas quand ça va sortir. Travailler avec Desmond, c’est comme travailler avec Bob Ezrin, il s’y connaît beaucoup en matière de composition et surtout de mélodie. Je suis le parolier mais leurs mélodies doivent se marier aux paroles, donc il faut faire très attention à ce que les paroles ne disent pas quelque chose que la mélodie ne dit pas.

Interview réalisée par téléphone le 14 janvier 2021 par Nicolas Gricourt.
Retranscription : Emilie Bardalou.
Traduction : Nicolas Gricourt.
Photos : Jenny Risher.

Site officiel d’Alice Cooper : alicecooper.com

Acheter l’album Detroit Stories.



Laisser un commentaire

  • Arrow
    Arrow
    Gojira @Lyon
    Slider
  • 1/3