Il y a des artistes dont la longévité force le respect, surtout au vu de la qualité de leur production musicale après tant d’années. C’est le cas de Deep Purple qui est revenu cette année avec un Infinite remarquable de fraicheur et de par le plaisir qui y transpire. C’est le cas également d’Alice Cooper qui lui emboite le pas avec Paranormal. Signe qui ne trompe pas : les deux groupes ont collaboré sur leurs albums respectifs avec Bob Ezrin, un vieux loup de mer de la production ; autant dire que la revanche des septuagénaires (ou presque) est bel et bien là. Mais contrairement à Deep Purple, la collaboration entre Bob Ezrin et Alice Cooper est un acquis de longue date et a fait ses preuves depuis Love It To Death (1971), en passant par les classiques School’s Out (1972) ou Welcome To My Nightmare (1975), jusqu’au plus moderne Brutal Planet (2000). Et même lorsqu’Alice aura fait des infidélités à Bob (ou l’inverse), il avouera lui-même avoir été requérir son avis.
Bref, à l’instar de Welcome 2 My Nightmare (2011), la fine équipe est en place. Mais en comparaison de l’album susmentionné, Paranormal est une œuvre beaucoup plus alignée sur les classiques des années soixante-dix. Une collection de dix chansons qui se tiennent d’elles-mêmes, sans concept, même si les personnages évoqués dans chacune d’entre elles ont pour point commun le caractère paranormal de leurs histoires. Une approche très organique dans le son et l’interprétation qui pourrait presque nous leurrer sur la date de confection du disque. Une basse chaleureuse qui sautille sur le hit « Paranoiac Personality », comme sur un « Department Of Youth », en plus « lourd ». Un rythme trépidant et vivifiant sur « Dynamite Road ». Théâtral sur « Holy Water », avec ses cuivres, sa batterie expressive et un côté presque cabaret. Même la participation de Billy Gibbons (ZZ Top), qu’on reconnaît immédiatement, bourré de son feeling habituel, sur « Fallen In Love » participe à cette sensation de remonter le temps vers les grandes années du blues rock. Et même si on pourra se laisser surprendre au départ par la voix très douce et pop d’Alice pour démarrer l’éponyme d’intiale, faisant remonter le souvenir d’ « I Am Made Of You » sur l’opus précédent et donnant l’illusion d’une ballade, très vite la magie guitaristique opère, apportant ce vent de « classique » qui souffle sur tout l’album. Puis « Dead Flies », groovy et entraînant en diable, et la locomotive heavy « Fireball » arrivent derrière pour dissiper tout doute. Un album vivant, de par la diversité des registres, sacrément rock n’ roll sur « Rats », plus dans la lourdeur sur « Private Public Breakdown » et flirtant avec le psychédélisme pink floydien sur « The Sound Of A » qui referme le premier disque.
Car oui, Paranormal vient avec deux disques, le second étant constitué de deux titres qui vont plus loin encore dans la démarche « rétro », offrant un début de collaboration avec les membres originels du Alice Cooper Band, quarante-quatre ans après Muscle Of Love sur lequel ils s’étaient quittés : Michael Bruce, Dennis Dunaway et Neal Smith, moins Glen Buxton malheureusement décédé en 1997. Deux chansons, « Genuine American Girl » très sixties jusque dans ses chœurs et « You And All Of Your Friends » aux quelques faux airs d’“Elected”, davantage là pour la symbolique car finalement assez anecdotique dans l’ensemble de l’œuvre. Plus anecdotique encore cette poignée de classiques enregistrés en live en 2016, mainte et mainte fois entendus, dont l’existence n’est justifiée que pour remplir l’espace du second disque. Mais qui peut le plus peut le moins, n’est-ce pas ?
Au bout du compte, Paranormal est un album sans prétention, sans ambition particulière, et c’est précisément, sans doute, ce qui constitue sa plus grande force : les plaisirs les plus simples sont parfois les meilleurs. Et c’est bien ce que tend à démontrer ici Alice Cooper.
Lyric video de la chanson « Paranormal » :
Chanson « Paranoiac Personality » en écoute :
Album Paranormal, sortie le 28 juillet 2017 via earMusic. Disponible à l’achat ici
c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes:avec Alice Cooper c’est d’autant plus vrai à l’écoute du 1er titre..