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Interview   

Amon Amarth au service de la régularité artistique


Dans l’éternel débat sur la liberté de mouvement artistique, Amon Amarth se situe du côté de la régularité. Tout en respectant les choix de ceux qui ont pris des risques vis-à-vis de leur fan-base en s’essayant sur d’autres terrains, le guitariste Olavi Mikkonen avoue être irrité par ces changements. En cela, il est le porte-parole d’un groupe qui a choisi de se tenir à un son qui a fait son succès en l’agrémentant de temps à autre d’éléments nouveaux mais discrets.

Pour ce nouvel album Deceiver Of The Gods, Amon Amarth a choisi de donner au son et au style dont le groupe est si fier une atmosphère live en l’enregistrant dans des conditions approchant celles des concerts et en travaillant avec le producteur Andy Sneap afin d’obtenir un son moins lisse et plus brut.

« Tout de suite après avoir enregistré Surtur Rising, on a décidé qu’il était temps de passer à autre chose. On n’avait rien à reprocher à Jens [Bogren, producteur], mais on avait envie de prendre une direction un petit peu différente en ce qui concerne la production. »

Radio Metal : Que penses-tu de ce nouvel album ?

Olavi Mikkonen (guitare) : Je le trouve génial ! C’est très cliché de dire ça, mais je pense que c’est notre meilleur album. J’étais très content des démos qu’on avait faites avant d’entrer en studio, et je suis très content de la production d’Andy Sneap. Je trouve qu’elle correspond parfaitement à notre style et à notre groupe. Je pense que c’est définitivement notre meilleur album, et je pense que tout le monde sera de cet avis-là après avoir écouté l’album plusieurs fois.

Justement, je voulais que tu me parles d’Andy Sneap : vous avez travaillé avec le même producteur, Jens Bogren, sur vos trois derniers albums. Pourquoi ce changement maintenant ?

À vrai dire, j’avais déjà un peu envie de changement après Twilight Of The Thunder God, mais après une réunion avec Jens, on a décidé de rempiler ensemble pour un troisième album. Tout de suite après avoir enregistré Surtur Rising, on a décidé qu’il était temps de passer à autre chose. On n’avait rien à reprocher à Jens, mais on avait envie de prendre une direction un petit peu différente en ce qui concerne la production. Ça faisait déjà un moment que le nom d’Andy Sneap circulait autour de nous, on l’a rencontré et ça s’est très bien passé. Il avait très envie de travailler avec nous, on avait très envie de travailler avec lui, donc le choix a été très facile.

Tu disais donc que vous aviez envie de quelque chose de différent au niveau du son…

Oui, au niveau du son, parce que généralement on écrit toutes les chansons et on fait tous les arrangements de notre côté, donc c’était une question de son. Je pense qu’avec Jens, le son était très bien, mais on voulait avoir un son plus proche de notre son live, un son un peu plus brut… Jens est très méticuleux, du coup le son a tendance à être trop propre, trop lisse, alors qu’on avait envie de quelque chose de plus brut. C’était exactement ce qu’Andy Sneap avait en tête. On a aussi enregistré plus souvent tous ensemble pour avoir cette vibe de groupe, ce son live.

L’une des caractéristiques de votre groupe est que vous êtes restés fidèles à votre style tout au long de votre carrière. Est-ce que c’est quelque chose qui est délibéré de votre part ? Est-ce que vous cherchez à garder votre son caractéristique, un peu comme AC/DC ou Motörhead ?

Oui, en quelque sorte. Personnellement, j’aime beaucoup notre son, le son qu’on a eu pendant toutes ces années, donc je veux qu’on garde plus ou moins le même. Je pense que tout le monde dans le groupe serait d’accord avec ça. On ne cherche pas à faire des changements radicaux mais, évidemment, on essaie de modifier certains détails pour pimenter un peu tout ça. Pour ce nouvel album, si un riff était un peu trop thrash, on se disait : « On s’en fout, il est très bien ce riff ! » Même avec un riff pareil, ça sonnera quand même comme du Amon Amarth. On n’est pas trop craintifs non plus. Par exemple, l’une de nos chansons, qui s’intitule « Father Of The Wolf », est très heavy metal, un peu dans le genre du heavy metal d’Accept. On s’est dit : « Rien à foutre! On aime ce riff et puis c’est tout. » On n’est pas aussi frileux, du coup cet album a un registre un peu plus large que les autres. On s’est plus lâchés.

Est-ce que l’influence d’Andy Sneap a joué ? Comme le disait l’un des journalistes lors de la conférence de presse, il a tendance à tout faire sonner un peu plus thrash…

Oui, mais ce qui est marrant c’est qu’il n’a écrit aucun riff, on avait déjà tout composé avant d’entrer en studio. Mais encore une fois, quand on a su qu’on allait travailler avec Andy Sneap, ça nous a encouragé à écrire d’une certaine manière… J’écoutais beaucoup d’Accept et de groupes de thrash à l’époque, donc peut-être que cette influence vient d’un peu tout ça, je ne sais pas.

OK, donc c’est plutôt que vous vous êtes bien trouvés !

C’est ça !

« On avait envie de quelque chose de plus brut. C’était exactement ce qu’Andy Sneap avait en tête. On a aussi enregistré plus souvent tous ensemble pour avoir cette vibe de groupe, ce son live. »

Du coup, qu’est-ce que tu penses des groupes qui ont fait des changements de direction majeurs et radicaux au cours de leur carrière, comme Metallica ou Morbid Angel plus récemment par exemple ?

Manifestement, ces groupes avaient envie de changement puisqu’ils ont changé, et ça ne me pose pas de problème, ça ne me regarde pas. Je ne veux pas qu’Amon Amarth change parce qu’Amon Amarth, c’est Amon Amarth. On ne va pas se mettre à jouer autre chose. Si je veux écouter Slayer, j’ai envie d’entendre du Slayer, je n’achèterais pas un album de Slayer qui ressemblerait à autre chose, tu vois ce que je veux dire ? Moi, je vois les choses comme ça mais, encore une fois, je sais que beaucoup de groupes ont envie de changement… Par exemple, The Haunted ont complètement évolué ou changé, et j’ai trouvé ça naze ! C’était du rock, ça ne sonnait pas comme du The Haunted. Ça n’engage que moi mais, généralement, je trouve que quand les groupes changent complètement, c’est pour le pire. Si je voulais écouter le rock qui passe à la radio, j’écouterais la radio, je n’ai pas envie que The Haunted, ce soit du rock comme il en passe à la radio ! Ce n’est que mon humble avis, évidemment, les groupes peuvent changer s’ils en ont envie, mais avec un peu de chance, Amon Amarth ne fera jamais rien de tel. On sera peut-être amenés à faire des choses légèrement différentes ; sur cet album, par exemple, on a un morceau où chante Messiah Mercolin, on fera peut-être des choses dans ce genre-là, mais on ne changera jamais notre manière d’écrire des riffs et on ne demandera jamais à Johan de chanter en voix claire, ça n’arrivera jamais.

Justement, j’aimerais qu’on parle de Messiah qui apparaît sur un morceau de l’album. Est-ce justement une manière d’apporter de la nouveauté à votre musique sans changer de style pour autant ?

Oui, complètement. C’était vraiment la personne idéale parce qu’il est très mélodique, il a son propre style mélodique et, à côté de ça, on a Johan qui chante comme d’habitude, et les deux chantent ensemble, on entend le growl puis le chant clair de Messiah… Je trouve que c’est parfait. En plus, c’était super pour nous parce que j’avais 15 ans quand Nightfall est sorti, et comme ils viennent de ma ville, Candlemass était un groupe très important pour moi. Je pense que je parle au nom du groupe entier quand je dis que c’était vraiment cool de l’avoir sur notre album. On a passé tout un week-end en studio avec lui.

Comment ça s’est passé ? Est-ce que c’est vous qui êtes entrés en contact avec lui ?

Il est venu à un de nos concerts à Stockholm il y a quelques années de ça. On a discuté, et il nous a dit qu’il aimerait bien nous rejoindre sur scène à l’occasion si on en avait envie. On s’était dit : « Bien sûr, ce serait cool ! » , mais en général, c’est toujours ce que tu dis quand tu rencontres un autre musicien, donc on n’y avait pas vraiment repensé. Ensuite, quand on a composé la chanson « Hel », on a commencé à se dire que ce serait bien d’avoir quelque chose de plus sur cette chanson ; au début, on pensait à une chanteuse puisque Hel est une femme…

… Et en effet les deux voix collent bien avec l’image de Hel, avec ses deux côtés… [dans beaucoup de représentations traditionnelles, Hel est représentée comme à moitié cadavre, à moitié belle femme, ndlr]…

Exactement ! Donc, après cette idée de chanteuse, le premier nom qui nous est venu à l’esprit, c’était Messiah. On lui en a donc parlé et ça l’a tout de suite intéressé. Il a beaucoup aimé la chanson et ses paroles.

« J’aime beaucoup notre son, le son qu’on a eu pendant toutes ces années, donc je veux qu’on garde plus ou moins le même. »

Ce n’est pas la première fois que vous travaillez avec des artistes d’un genre tout à fait différent, c’est déjà ce que vous aviez fait avec Apocalyptica sur « Live For The Kill ». Que recherchez-vous exactement avec ce genre de collaboration ?

On ne cherche pas à avoir des invités simplement histoire d’avoir des invités, on a suffisamment d’amis avec qui on pourrait travailler, mais ce n’est pas ce qu’on cherche. Il faut que la chanson s’y prête : on compose une chanson, et on se dit : « Oh merde, ce serait vraiment bien si on avait quelque chose comme ça là-dessus ! », et ensuite on réfléchit dans cette direction. Mais ce n’est pas comme si on invitait des gens rien que pour pimenter un peu nos chansons, ça ne fait pas partie du contrat [rires]. Je ne sais pas. On a eu des invités sur Twilight [Of The Thunder God], personne sur Surtur Rising, sur celui-là, on a Messiah, donc sur le prochain, on n’aura probablement personne non plus, parce que sinon, ça pourrait faire trop. Mais ce serait vraiment bien d’avoir plus de chanteurs en invités, parce que le growl, c’est très monocorde. C’est cool d’une certaine manière, mais en tant que compositeur, c’est intéressant aussi de composer des riffs pour du chant clair, comme dans le heavy metal traditionnel ou comme pour Messiah ou ce genre de chose. Qui sait ce qui se passera dans le futur ?

Est-ce que tu peux nous parler du titre de l’album, The Deceiver Of The Gods [Celui qui a trahi les Dieux] ?

Il fait référence à Loki. Loki est le plus mauvais – même si le mot n’est pas approprié – des dieux de la mythologie nordique. Il trahit tous les dieux. Pendant le Ragnarök, la fin du monde, Loki rassemble l’armée des morts contre tous les autres dieux. Quatre chansons de cet album sont directement consacrées à Loki, c’est pourquoi on l’a intitulé The Deceiver Of The Gods.

À la fin de l’année dernière, vous avez posté un message sur votre site internet. Il disait : « 2013 va encore être une année intense pour Amon Amarth. On dirait bien que ça va être un peu imprévisible et malicieux… »

C’est Loki. Loki est imprévisible et malicieux. Il change de forme [« Shape Shifter » en anglais, titre d’une des chansons de l’album, ndt], il a un côté bon mais aussi un côté mauvais. Dans la mythologie nordique, c’est un champion pour causer des ennuis aux autres dieux. Si quelque chose ne va pas, c’est de la faute de Loki, c’est qu’il est passé par là. Il crée des conflits, des affrontements entre deux camps… C’est un sacré malin !

Comment est-ce que ça se passe quand vous écrivez vos chansons sur un thème précis ? Est-ce que le thème – ici, Loki – vous donne l’inspiration pour vos chansons, ou est-ce qu’à l’inverse vous écrivez vos chansons en premier et ensuite vous vous rendez compte qu’elles collent bien avec un thème en particulier ?

Ça marche dans les deux sens. La plupart du temps, quand on écrit la musique tous ensemble dans notre salle de répèt’, Johan est là à nous écouter, et ça lui donne des idées. On a décidé très tôt que cet album serait axé sur Loki parce que, évidemment, il faut s’y prendre très en avance pour pouvoir ensuite réfléchir à la pochette de l’album, etc. Il faut que tout soit calé très tôt. On a donc décidé qu’on parlerait de ça… Il faudrait que tu en parles avec Johan parce que c’est lui qui écrit les paroles, mais il m’a dit que dès le début, il avait déjà trois chansons qui parlaient de Loki.

« Si je veux écouter Slayer, j’ai envie d’entendre du Slayer, je n’achèterais pas un album de Slayer qui ressemblerait à autre chose, tu vois ce que je veux dire ? […] Généralement, je trouve que quand les groupes changent complètement, c’est pour le pire. »

Durant toute votre carrière, vous avez toujours sorti vos albums très régulièrement, à peu près tous les deux ans. Est-ce que c’est délibéré ?

Quand un album sort, on passe un an et demi ou deux ans à tourner, puis ensuite, quand les tournées sont finies, on se met à travailler sur l’album suivant. C’est pour ça qu’il y a à peu près deux ans, ou plutôt trente mois, entre chacun de nos albums… Tu sais, si on n’est pas en tournée, il n’y pas grand-chose à faire chez nous, donc on se remet à écrire des chansons, on continue. Ce n’est pas quelque chose qu’on prévoit. Si on n’a pas assez de matière ou si on n’a pas suffisamment de bonnes idées, alors on travaille encore plus. Mais cette fois, cela n’a pas été trop difficile de composer de bonnes chansons.

Qu’est-ce qui, à tes yeux, ont été les temps forts du cycle qui s’est achevé, depuis la sortie de l’album précédent et la tournée qui a suivi ?

Je trouve que la tournée qu’on a faite en Europe en 2010 ou 2011, je ne me souviens plus, avec As I Lay Dying et Septic Flesh a été une super tournée. Le concert à Paris était complètement dingue, je ne me souviens plus du nom de la salle mais il faisait putain de chaud là-dedans ! Mais oui, c’était une tournée géniale, j’ai vraiment aimé tous les concerts. Ensuite aux États-Unis on a fait deux tournées sans première partie, juste nous. On jouait deux sets : d’abord Surtur Rising en entier, ensuite on faisait une pause de 10 minutes, puis on jouait un best-of. On jouait deux heures et demie chaque soir, ça a été une expérience vraiment cool. En fait, c’est plutôt agréable de ne pas avoir d’autre groupe avec soi, c’est une bonne expérience. On a voyagé dans pas mal de nouveaux endroits, on a joué dans plus de villes en Amérique du Sud que par le passé ; cette tournée en Amérique Latine était géniale aussi. On a joué au Japon en tant que tête d’affiche pour la première fois. Auparavant, on avait seulement joué une fois dans un festival là-bas, donc c’était fun. Donc oui… On n’est pas allés dans tant de nouveaux endroits que ça à part en Amérique du Sud et en tant que tête d’affiche au Japon, et puis en Roumanie où on a joué pour la première fois aussi. En général, aller dans de nouveaux endroits, de nouveaux pays, de nouvelles villes, c’est ce qui est le plus excitant, on découvre de nouvelles choses. Mais comme je l’ai dit, le dernier concert à Paris, ça a vraiment été un bon moment ! Je trouve que tout était bien ! [rires]

Que t’inspire le fait que votre fan-base grandisse toujours plus, et surtout que beaucoup de jeunes se mettent au metal grâce à Amon Amarth ?

Je trouve que c’est génial, bien sûr ! Ça fait maintenant vingt ans qu’on fait ça, et je ne me serais jamais imaginé à l’époque qu’on continuerait aussi longtemps, qu’on voyagerait dans le monde entier et qu’on aurait une fan-base de taille respectable à chaque coin du globe ! Je trouve ça fantastique, c’est génial. Ça nous pousse à continuer de composer de bonnes chansons !

Et maintenant, qu’est-ce qui vous attend ?

Là, j’ai hâte que l’album sorte, puis qu’on commence à jouer ces chansons en live.

Est-ce que vous avez déjà des dates de prévues ?

Oui, on a déjà un an et demi voire deux ans de tournée de prévus ! Mais parmi les choses qui sont, disons, officielles : on va jouer dans quelques festivals en Europe en juin, on va jouer au Sonisphère en France, puis en juillet-août on sera aux États-Unis pour une tournée de festivals, le Rockstar Energy Mayhem Festival (c’est un peu comme le Hellfest, mais chaque fois dans une ville différente). Donc on va faire ça cet été, puis à l’automne, on fera une vraie tournée en tant que tête d’affiche.

Interview réalise par Chloé en face-à-face le 3 avril 2013
Retranscription et traduction : Chloé
Intro et questions : Metal’O Phil

Site internet officiel d’Amon Amarth : www.amonamarth.com

Album Deceiver Of The Gods, sortie le 21 juin 2013 chez Metal Blade Records



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