Il y a des idées géniales qui naissent sans même que leurs géniteurs ne comprennent vraiment d’où elles viennent. Monter un projet musical pour refondre l’œuvre de l’artiste pop par excellence, The Beatles, dans celle de l’artiste metal par excellence, Metallica, est une idée géniale en soit. « On se demande encore ce qui s’est passé ! » nous avait répondu le frontman Jaymz Lennfield la première fois que nous nous sommes rencontré, il y a près de cinq ans alors qu’ils sortaient tout juste leur premier album, et lorsque nous lui avons demandé comment cette idée avait germé dans leur tête.
La suite, c’est une histoire de quelques chansons enregistrées sur CD juste pour le fun, d’un certain professeur de physique dans le Milwaukee fan des Beatles qui a trouvé le nom de « Beatallica » pour baptiser cet étrange groupe dont il venait de découvrir les chansons, d’un festival plein de bonne humeur, le Spoof Fest, le tout mélangé à la magie d’internet : « Ces chansons se sont retrouvées sur Internet, sans même qu’on soit au courant ! » Le buzz était né.
Des personnalités se sont intéressé à eux comme Mike Portnoy (ce qui leur aura valu une première partie de Dream Theater) et Lars Ulrich lui-même. Avec deux albums, Sgt. Hetfield Motorbreath Pub Band et Masterful Mystery Tour, et une belle réputation scénique dans la besace, Beatallica n’a toujours pas épuisé son concept – et n’est visiblement pas près de le faire – malgré le chemin pavé d’embuches juridiques.
C’est avec un plaisir non feint que nous avons retrouvé Jaymz Lennfield – un homme qui sait s’habiller avec classe (voir photo plus bas) – et Kliff McBurtney, cette année au Motocultor Festival. Car par-dessus tout, passer un moment avec les mecs de Beatallica, c’est forcément passer un excellent moment après lequel on repart avec la banane.
Radio Metal : la dernière fois qu’on s’était rencontré, c’était il y a presque cinq ans. Que s’est-il passé entre temps, notamment depuis la sortie de votre album Masterful Mystery Tour ?
Kliff McBurtney : On s’est évaporé dans la nature et maintenant on s’est condensé à nouveau sous la forme de Beatallica. Je rigole. On a beaucoup tourné aux États-Unis, sur la côte Est et la côte Ouest, ce qui fait un sacré voyage. Si tu regardes sur une carte, ça fait [un poster se décroche du mur de la loge], euh, tomber des posters… C’est ce qu’on a fait pendant tout ce temps : casser des trucs. (rires)
Et aujourd’hui, où en êtes-vous ?
Jaymz Lennfield : Pour nous, le principal en ce moment, c’est qu’on enregistre. Ce festival [NDLR : le Motocultor] est le seul show qu’on fait. On a pris l’avion juste pour ça et ensuite on rentre chez nous. Deux jours après notre retour, on finira les parties de batterie, on fignolera les voix et on va probablement commencer le mixage le mois prochain. Ensuite, on l’enverra au remastering. Il sera terminé d’ici la fin de l’année, mais il ne sortira sans doute pas avant février parce qu’on a prévu de revenir faire une tournée en Europe au début du printemps.
Est-ce que l’album a déjà un titre ?
Oui.
Qu’est-ce que c’est ?
Kliff McBurtney : On ne peut pas vous le dire ! Enfin, on pourrait vous le dire, mais ensuite il faudrait qu’on casse votre Zoom, là [il fait référence à notre enregistreur audio] [rires].
Jaymz Lennfield : On a déjà fait les photos et nos costumes sont prêts. On les a portés pour le photo-shoot, mais on ne les montrera pas avant que l’album soit sorti.
Est-ce que vous êtes toujours sur le même label ?
Ouais, on est toujours sur Oglio Records, basé à Los Angeles.
Quelles chansons y aura-t-il sur cet album ? Quelles chansons des Beatles, de Metallica ?
On va jouer au moins une chanson du prochain album ce soir. On en jouera aussi une autre qu’on voulait mettre sur l’album mais pour laquelle on n’a pas eu l’autorisation. Ils n’ont pas voulu nous laisser la mettre sur le disque. [NDLR : il parle des titres « Please Please Me Or I’ll Beat You » et « While My Guitar Deathly Creeps »]
À cause des droits ?
Oui, à cause de ceux qui détiennent les droits.
La dernière fois qu’on s’est rencontrés, vous aviez évoqué les difficultés que vous aviez à obtenir les droits pour certaines chansons… C’est toujours aussi compliqué ?
Kliff McBurtney : Oui, et ça ne va pas aller en s’arrangeant. Les gens ont des droits sur des trucs et les protègent avec passion. Parfois il est possible de faire des compromis et de trouver un terrain d’entente, mais parfois, c’est complètement impossible.
Comment faites-vous pour les convaincre ?
Jaymz Lennfield : Nous, on n’a rien à voir avec ça. Ni Cliff ni moi n’allons appeler Sony pour leur dire : « Hé, on aimerait bien utiliser ça ! » Il y a des juristes qui s’en occupent, donc on ne s’en mêle pas. Notre label nous dit : « Écoutez, on veut juste que vous écriviez les trucs les plus cool et les plus drôles possible, et on se débrouillera », puis ils font le gros du travail. Certaines personnes se montrent plus réceptives que d’autres.
Pourquoi vous pouvez utiliser certaines chansons et pas d’autres ? Ces chansons n’appartiennent-elles pas aux mêmes propriétaires ?
Non, beaucoup de monde pense que c’est le cas. Ça ne l’est pas. Il y a de nombreux ayants droits suivant quand la chanson a été écrite ou par qui la chanson a été rachetée par la suite et certains ne veulent pas qu’on y touche… On n’a pu utiliser aucune des chansons de George Harrison. Pourtant, on pense que George Harrison avait un super sens de l’humour et qu’il aurait trouvé ça drôle. Les gens de notre label connaissent les personnes qui gèrent l’héritage de George Harrison, ils ont travaillé ensemble par le passé, mais ils ne peuvent pas laisser utiliser quoi que ce soit parce que les personnes qui détiennent les droits ne veulent pas qu’on le fasse.
Est-ce qu’ils vous demandent de l’argent pour que vous puissiez avoir les droits ? Dans les poches de qui vont les royalties ?
Sony prend l’intégralité de la dimension juridique et des droits d’auteurs mais ce n’est qu’une partie, tu vois. Du côté de Metallica, ils ont été plutôt cool et nous ont dit : « Non, on ne veut rien. » Pensez-y la prochaine fois que vous entendez les gens dire du mal de Metallica à cause d’affaires légales ou autre ou les histoires qu’ils ont eu ; à nous, ils ont dit : « C’est bon les mecs, on ne veut rien. »
C’est marrant parce que, en effet, Metallica n’a pas très bonne réputation pour ce genre de chose !
C’est bien ce que je dis ! Ouais, ne vous faites pas berner !
Les gens pourraient penser que votre concept a des limites parce qu’il repose uniquement sur Metallica et les Beatles. Ils pourraient se dire : « Oh, ils devraient élargir ce concept à d’autres groupes… » Est-ce que c’est une chose à laquelle vous avez déjà pensé, à élargir ce concept à d’autres groupes ?
Kliff McBurtney : Tu sais, les Beatles ont fait plus de 260 chansons et Metallica a sorti combien d’albums, déjà ? On n’est pas près d’avoir épuisé tout le stock, et puis ça a été tellement compliqué que maintenant je vais me contenter d’attendre que d’autres fassent la même chose pour d’autres groupes.
Jaymz Lennfield : Oui, pense bien que du côté de Metallica, ils ont vraiment été sympa de nous laisser faire ça. Tous les groupes ne sont pas prêts à laisser faire ce qu’on fait, tu sais. C’est un peu comme un couple : on ne cherchait pas spécialement cette relation, on n’avait même pas pensé faire ce groupe. Ça nous est tombé dessus, en quelque sorte [rires]. Mais il faut aussi savoir que nous et les autres membres du groupe jouons tous de la musique originale en dehors de Beatallica. Je suis moi-même dans quatre groupes ! Quand Cliff et moi avons commencé à écrire pour Beatallica, on avait déjà des décennies d’expérience dans la composition qui nous ont permis de faire ces mash-ups, tu vois ce que je veux dire ? Ce ne sont pas des petits trucs vite faits, ça demande beaucoup de travail et d’expérience et il faut avoir envie de le faire.
Ça doit être beaucoup de travail en effet… Beaucoup de gens voient votre groupe comme une blague mais, en fait, quand on écoute les chansons, on se rend compte que c’est du boulot sérieux, que c’est vraiment travaillé…
Est-ce que tu connais un groupe autre que Beatallica qui fait ce qu’on fait ?
Non !
Voilà ! Si c’était si facile, d’autres seraient déjà en train de le faire ! [rires]
Vous parliez du fait que Metallica a été très ouvert à votre projet. Est-ce que vous pensez que si tous les Beatles étaient encore vivants, ils y auraient été ouverts eux aussi ?
Je pense que Harrison l’aurait été, oui. Pour Lennon, je ne sais pas, mais je pense que Harrison, si.
Kliff McBurtney : Je pense que si on avait pu leur en parler individuellement, comme on a fait avec Metallica, peut-être. Peut-être qu’on aurait pu s’asseoir autour d’un thé et en discuter comme des êtres humains raisonnables. Mais à partir du moment où des avocats et des businessmen s’en mêlent, tout le monde veut sa part du gâteau et les choses deviennent vite complètement absurdes.
Jaymz Lennfield : Par exemple, notre label est en contact avec Sony, et je me souviens d’une conversation de novembre dernier où ils nous ont appelés pour nous dire : « Tu sais, Sony nous a dit que si le nouveau président avait déjà été là quand on faisait le mastering de l’album Masterful Mystery Tour, il ne serait jamais sorti. » Ils étaient hors d’eux quand l’album est arrivé dans les bacs. Voilà à quel point c’est des furieux [rires]. On peut seulement travailler sur ce qu’on nous laisse utiliser. C’est la seul chose que tu peux faire quand ton groupe doit faire face à tant de restrictions. On essaie seulement de faire les meilleurs morceaux qu’on peut.
Vous disiez que vous n’étiez pas près de voir votre stock d’inspiration arriver à sa fin puisque ce sont deux énormes discographies, mais qu’est-ce qu’il se passera quand vous aurez fait toutes les chansons pour lesquelles vous avez pu avoir les droits et qu’ils ne vous laisseront pas utiliser le reste ?
On ne peut pas le savoir tant qu’on ne leur a pas présenté la chanson. Ils nous demandent de venir avec des concepts, des idées générales, puis ils les soumettent. Ou ils recherchent qui a les droits et contactent la personne… Mais on a travaillé sur environ cinq chansons pour cet album qui ne pourront pas être dessus. Il y a d’autres chansons qu’on a fait par le passé qui n’ont pas pu être sur cet album. Je suis sûr qu’on a suffisamment de matière pour un nouvel album après celui-là, mais c’est une histoire de droits et de maisons de disques, maintenant.
Et quand ils auront refusé tout ce que vous proposez…
Kliff McBurtney : Est-ce qu’on peut faire un best-of ? Un live, un double album live ? [rires]
Jaymz Lennfield : Ça peut prendre dix ans comme ça peut prendre dix mois, mais notre label nous a aussi dit qu’ils seraient intéressés pour que Beatallica sorte une ou deux chansons originales par album.
Qu’est-ce que vous pensez de ça ?
Ça me va, mais je pense qu’il ne faut pas qu’on le fasse trop parce que tu sais à quoi t’attendre avec Beatallica. Tu ne peux pas te mettre à sortir sept chansons originales par album avec Beatallica…
Kliff McBurtney : Les gens se demanderaient ce que c’est que ce truc. Dans ce cas, on ferait aussi bien de commencer avec un nouveau nom et on n’aurait plus à se battre avec ses histoires de légalité et de royalties…
Est-ce que Metallica vous a jamais demandé de faire leur première partie ?
Jaymz Lennfield : Non, mais en même temps on ne leur a jamais demandé. On a déjà traîné ensemble, j’ai d’ailleurs besoin de mettre la main sur eux quand je vais rentrer chez moi, car on reste en contact à chaque fois qu’on sort quelque chose de nouveau. Il faut qu’ils soient au courant, donc on s’adresse directement à eux, à Lars et à sa propre équipe, au lieu de passer par leur avocat. Parce que si on commence par passer par les avocats… Rien n’avancerait, si tu vois ce que je veux dire. [rires]
Les derniers albums de Metallica ont été très critiqués. Est-ce que vous comptez faire des reprises de St Anger ou de Death Magnetic ?
Kliff McBurtney : Oui, D’ailleurs… Je ne sais pas si je peux dire ça, hmm…
Jaymz Lennfield : Personne n’écoute de toute façon ! [rires] Qu’est-ce que tu allais dire ?
Kliff McBurtney : Quel était cet album qu’ils ont fait avec Lou Reed ?
Jaymz Lennfield : Oh, Lulu !
Kliff McBurtney : Ouais, Lulu. C’est légitime, n’est-ce pas ? Après tout il y a Metallica dessus, donc…
Jaymz Lennfield : Sur le nouvel album, il y aura certains trucs qui viennent de St Anger ou de Death Magnetic. Notre trip, ce n’est pas d’utiliser seulement les trois premiers albums de Metallica. On n’utilise pas seulement les trois premiers albums des Beatles, donc…
Est-ce que vous allez utiliser le fameux son de caisse claire de St Anger ?
Kliff McBurtney : La poubelle avec un tuyau pour taper dessus ? [rires]
Jaymz Lennfield : Non, Ringo aura son propre son de caisse claire [rires].
Interview réalisée en face-à-face le 19 août 2012 lors du festival Motocultor
Site officiel de Beatallica : www.beatallica.com
C’est quand même vraiment nul ce qu’il font.
cher homonyme, je vous décerne le prix de No Comment de la semaine!
j’ai juste une question:
Vous n’en avez pas marre d’encenser des merdes?
No Comment Alert !
J’ai juste une question :
Vous en avez pas marre de dire tous ces mêmes conneries ?
Mais vous étiez pas en bisbille avec eux à un moment donné pour à cause du T-shirt ? Quoi qu’il en soit, chouette interview !!
Non pas avec le groupe, mais avec ceux qui ont filmé et uploadé la vidéo.