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Interview   

Arjen Lucassen, un véhicule immatriculé 01011001


A l’origine, j’avais des questions à poser à Arjen Lucassen. Mais sachez qu’avec cet animal, on ne fait pas une interview. Avec Arjen, on bavarde, comme au collège ou en fin de soirée. Vous savez, ce genre de discussion qui, à l’instar d’un champignon hallucinogène hawaïen, d’un enseignant frustré de sciences politiques ou d’une conversation de rencard, vous fait digresser de sujet en sujet sans que vous ne vous en rendiez compte. Partis des dernières réalisations d’Arjen, à savoir Guilt Machine et Star One, nous avons réussi à en arriver à parler du prochain Symphony X, de laxatif intergalactique et… des Dents de la Mer ! Nous avons tenu à vous présenter cette interview de la manière la plus brute possible, afin de vous présenter le personnage et de vous montrer à quel point l’échange avec lui est facile, agréable et fluide.

Arjen Lucassen est un personnage ambitieux, mais pas égocentrique pour autant ! C’est avec une honnêteté déconcertante qu’il confesse ses fautes, ses redondances musicales et qu’il parle, presque gêné, de ses défauts. Avec un sens de l’autodérision certain, il rira de son incapacité à écrire des albums dépouillés de claviers ou à ne pas faire appel à des chanteurs. A ce titre, il déclare solennellement qu’il travaille sur un album solo et qu’il en sera l’unique vocaliste !

Un entretien sans fards et bourré d’anecdotes qui, j’en mets ma main à couper, ravira le fan d’Arjen Lucassen. Autant que moi-même j’ai pu l’être en y participant.

En fin d’interview, alors que je m’apprête à raccrocher, une évidence me saute aux yeux. Arjen, ça ressemble drôlement à Aryen ! En voilà un prénom qui doit susciter la controverse. Arjen Lucassen me raconte alors l’histoire d’un fan d’Ayreon dont la voiture, dont la plaque portait le nom du groupe, a été vandalisée par des individus persuadés que le groupe avait des affinités avec l’idéologie du IIIème Reich. Le fan en question avait envoyé la plaque à Arjen pour le souvenir. Vautour de journaliste que je suis, je lui demande s’il l’a encore. Quelques secondes plus tard, je trouve dans ma boîte mail la photo en question.

« J’ai vraiment essayé tu sais… Je me disais ‘ je vais faire un album plein de guitare ! Aucun clavier ! ‘.[…] Et si tu écoutes bien les chansons, au début de l’album, j’y arrive. Mais ensuite… j’aime tellement le clavier vois-tu… Au bout d’un moment, ça ressort naturellement (rires) ! C’est tout mon côté prog’ qui refait surface ! Donc, je ne pense pas que je sois capable de faire ça, un projet plus ‘traditionnel’… « 

Radio Metal : Tu as déclaré en interview « chaque album que je fais est en réaction à l’album précédent ». Alors, dans quelle mesure le nouvel album de Star One est-il une réaction à l’album de Guilt Machine (NDLR : side-project d’Arjen Lucassen) ?

Arjen Lucassen : Je pense que c’est vrai pour de nombreuses raisons. L’album de Guilt Machine était très atmosphérique et il n’y avait qu’un seul chanteur. De plus, les chansons étaient très longues, tout particulièrement leurs intros. Cet album de Star One est beaucoup plus direct. Il est plus lourd aussi. Les chansons frappent fort dès le début. Et aussi, il y a quatre chanteurs au lieu d’un seul. Enfin, au niveau des paroles, l’album de Guilt Machine était très profond. Les paroles, basées sur la dépression et des trucs comme ça, étaient très fortes émotionnellement parlant, alors que pour l’album de Star One, toutes les chansons sont basées sur des films, ce qui rend l’album plus léger.

Qu’est-ce qui t’a motivé à réaliser aujourd’hui une suite presque 10 ans après la sortie de Space Metal, le premier album ?

Je crois que c’est justement parce que le Guilt Machine était très atmosphérique. Après cet album, j’ai vraiment senti que j’avais envie de faire quelque chose de plus lourd et plus orienté guitares. Je voulais faire quelque chose plein de riffs et Star One est le projet où je fais ça. Donc, j’ai senti que c’était le moment de sortir un nouveau Star One. De plus, je n’étais pas à 100% content du premier album. J’étais – et je le suis encore – satisfait des chansons, mais le son n’était pas terrible : les guitares et la batterie sonnaient un peu faibles. Donc, j’ai toujours voulu améliorer ça.

Tu t’étais lassé de ces chansons atmosphériques de Guilt Machine et tu avais besoin de faire un album plus rentre-dedans et orienté guitares ?

Lassé n’est pas le mot car j’adore le Guilt Machine. Je pense que c’est un album fantastique qui n’a pas eu l’attention qu’il méritait. Pour être complètement honnête, l’album ne s’est pas bien vendu. En fait, c’est mon album qui s’est le moins bien vendu si tu prends en compte tous mes disques faits avec Ayreon et Star One. Et bien entendu, c’est un peu une déception pour moi. Donc je pense que mon nouvel album est clairement en réaction à tout ça.

Pourquoi penses-tu que ça a été un échec commercial ?

C’est sans doute dû à plusieurs choses. Cela vient peut-être du fait qu’il n’y a pas de chanteur célèbre sur cet album. Je n’ai fait appel qu’à un seul chanteur et il ne vient ni du monde métal ni de la scène prog’, mais de la pop et de la scène alternative. Je pense que ça a quelque chose à voir avec ça. C’était également un plus petit label, Mascot Records, qui a sorti l’album et il n’a pas la puissance de vente que peut avoir InsideOut, Century Media et EMI. Ajoute à cela le fait que cet album est très sombre et lourd… Du moins, pas lourd au niveau de la musique, mais au niveau des paroles. De fait, les textes sont un peu durs à suivre. Il n’y a pas une trame évidente et limpide comme avec Ayreon ou Star One où les chansons sont liées à des films. Donc je pense que mis bout à bout, tout cela a rendu les choses plus difficiles. Cela dit, tous les fans qui ont aimé cet album trouvent que c’est le meilleur que j’ai fait jusque-là. En tout cas, je crois que le Guilt Machine est un album qu’on aime ou qu’on déteste. Il n’y a pas de demi-mesure.

Tu dis que cet album a été un échec parce qu’il n’y a pas de chanteur célèbre dessus. Est-ce que tu as pris cet échec comme quelque chose de personnel ? Un peu comme si « Ok, apparemment les fans d’Ayreon n’écoutent mes albums que parce que je fais appel à des chanteurs célèbres et pas pour mon travail ! »

Je ne pense pas que ça soit la seule raison. Comme je l’ai dit, c’est un ensemble de facteurs. Mais je pense que oui, ça a sans doute quelque chose à voir avec ça. C’est ce que les gens aiment à propos de ma musique, tu sais : ce groupe de chanteurs et la façon dont ils interagissent les uns avec les autres. Mais au bout du compte, c’est moi qui ai fait ce choix, donc je n’ai pas de problème avec ça (rires).

Mais est-ce que tu crois que les gens n’écoutent pas vraiment ta musique et qu’ils n’écoutent que les chanteurs invités ?

Nein, nein, nein (NDLR : « non, non, non » en hollandais) ! Mais je crois néanmoins que ça aide. Si j’avais fait appel à Bruce Dickinson ou à James LaBrie sur cet album, de nombreux fans d’Iron Maiden et de nombreux fans de Dream Theater auraient écouté l’album. C’est comme ça que vont les choses. Tu sais, je reçois tellement d’emails de fans de Dream Theater me disant « Eh bien, je ne connais pas ta musique, mais j’ai entendu dire que James LaBrie chantait sur cet album, alors je l’ai écouté et là j’ai adoré ! » Ils l’ont adoré non pas parce que James LaBrie chantait dessus, mais parce qu’ils ont adoré la musique elle-même. Alors bien sûr, ça aide pour la promotion de l’album. Mais ceci étant dit, s’ils sont des fans de James LaBrie et s’ils écoutent un album auquel il participe, il arrive aussi qu’ils n’aiment pas le résultat (rires) ! Mais bon, c’est sûr que c’est une bonne chose pour la promotion : j’attire de nombreux fans des groupes d’où sont issus mes invités. Ces fans veulent tout simplement écouter ce à quoi leur chanteur, leur guitariste ou leur claviériste préféré a participé.

Visiblement, tu avais prévu depuis le début d’écrire une suite à cet album. Est-ce parce que tu hésitais ou par peur de produire une mauvaise suite que tu as attendu si longtemps ?

Non. C’est juste que l’envie ne m’est pas venue plus tôt. Avec Star One, j’ai fait une tournée. On a fait huit dates je crois. Je ne sais pas si tu l’as vu, mais on a sorti l’un de ces shows en DVD. L’enregistrement était très simple et amateur, mais le résultat était magique ! C’est tellement génial que j’avais vraiment peur de ne jamais réussir à capturer une seconde fois une telle magie si jamais je filmais à nouveau un show. Mais je faisais essentiellement référence aux concerts, pas à l’album en lui-même. En fait, j’ai toujours pensé que je pouvais faire mieux que le premier Star One. Mais je ne planifie jamais rien à l’avance. Quand je suis en train de travailler sur un album, je ne sais jamais ce que je vais faire ensuite. Donc, je pense tout simplement que le temps n’était pas encore venu, jusque maintenant du moins.

L’année dernière, quand tu as commencé à travailler sur cet album, tu n’avais visiblement pas encore décidé s’il allait s’agir d’un nouveau Star One ou pas. Qu’est-ce qui t’a aidé à te décider ?

Peut-être les réactions à l’album de Guilt Machine. En de nombreuses occasions, des gens m’ont dit « Il a fallu que je l’écoute trois ou quatre fois pour l’apprécier ». Et en fait, c’est une bonne chose car les albums qui demandent plusieurs écoutes avant d’être appréciés sont ceux qui nous marquent le plus longtemps. Mais avec MySpace et Facebook, les choses vont très vite. Les gens écoutent un album une fois et s’il ne leur plaît pas, ils ne lui donnent pas une seconde chance. Ça fait un peu peur. Donc j’ai senti que je devais vraiment aller droit au but cette fois. Un peu comme « Bam ! ». La chanson commence et « Bam ! ». Dès le début ce qu’elle dit est clair ! Tu sais, je fais toujours un peu la même chose. Je crée un album en n’écoutant que ce que je veux faire, comme avec Guilt Machine. Et ensuite, j’écris un album en pensant à ce que les fans veulent vraiment entendre. Et je crois que ce nouveau Star One est exactement ce que les gens veulent entendre.

Mais pourquoi crois-tu que tant de musiciens ont peur d’enregistrer une suite pour un album qui est considéré comme un chef-d’œuvre ? Pourquoi croire que rater le prochain album va conduire à remettre en question le génie du premier ?

(Rires)

Vraiment, j’entends ce discours très souvent. A tel point que j’en viens à croire qu’il est plus simple de ne pas écrire d’albums géniaux du tout !

Eh bien, je crois qu’il existe plein d’exemples. Regarde Van Halen 1, pour moi, ça reste un album génial. Mais prend également les films : tu as Les Dents de la Mer, qui est un super film et ensuite tu as Les Dents de la Mer 2 qui est horrible et, après ça, Les Dents de la Mer 3 qui est encore pire (rires) ! Je pense que c’est difficile de faire un album après un qui a rencontré le succès. Même lorsque le second est bon : regarde Pink Floyd qui a écrit The Dark Side Of The Moon. Comment veux-tu faire mieux que cet album ? Et malgré ça, ils ont fait ensuite Wish You Were Here, qui est pour moi encore meilleur ! Mais malgré ça, cet album n’a pas reçu la même attention que The Dark Side Of The Moon.

C’est vrai, mais c’est quand même mieux que de n’avoir jamais écrit un album génial.

Absolument ! Bien sûr, je suis fier de tout ce que j’ai fait dans le passé. En fait, lorsque j’écoute mes albums précédents, ça me donne une drôle d’impression du genre : « Bon sang ! Pourrais-je jamais écrire quelque chose comme ça à nouveau ? ». Mais c’est aussi ça le challenge pour moi. Avec l’album Electric Castle d’Ayreon, tout le monde a dit que c’était là mon meilleur album, mon summum, et que je ne pourrais pas refaire un album aussi bon à l’avenir. Et puis ensuite, les gens ont dit la même chose de l’un de mes albums suivants, The Human Equation ! Pour moi, c’est effrayant d’écrire un nouvel album. C’est un challenge : « OK, vous pensez vraiment que c’est mon meilleur album ? Je vais vous prouver que je peux faire encore mieux ! ».

En fait, je ne comprends vraiment pas pourquoi les gens pensent que si le second album n’est pas bon, cela va ruiner la réputation du premier. Si le premier est génial, il sera toujours génial, même si le second est nul…

Je suis d’accord avec toi : je ne pense pas qu’un second album puisse ruiner le premier. Néanmoins, c’est aussi vrai ce qu’on dit : tu n’es aussi bon que tant que ton dernier album l’est…


« Donovan était un chanteur hippie des années soixante et cet album que j’ai contient une chanson marrante qui s’appelle Intergalactic Laxative. Donovan se demande comment les astronautes chient et pissent quand ils sont dans l’espace (rires). Comment font-ils et qu’advient-il de toute cette merde et de toute cette pisse ? »

« It All Ends Here » est le titre du dernier morceau. Cela signifie-t-il que c’est la fin de Star One ? Ou est-ce plus simplement la fin d’un chapitre ?

C’est drôle, parce que j’avais peur que les gens réagissent de cette façon ! En fait, j’avais même suggéré ça pour le titre de l’album, mais le directeur de la compagnie m’a alors dit « Non ! Non ! On va croire que c’est le dernier album ! » (Rires). Donc non, ça ne veut pas dire cela. La chanson est fondée sur le film Blade Runner. Je ne sais pas si tu l’as vu, mais c’est un film à propos de robots, ou « réplicants » comme on les appelle, qui n’ont que quatre années d’espérance de vie. Ils vivent quatre ans et ensuite ils meurent, ils s’évanouissent. Cette chanson parle de ça : les quatre années sont terminées et ils sont sur le point de mourir. Si tu te souviens, Rutger Hauer est assis sur le toit alors que des oiseaux blancs s’envolent… Donc, vraiment non, ce n’est pas la fin de Star One. En fait, j’adore composer pour ce projet car c’est tellement plus simple que tous les trucs d’ Ayreon. Avec Ayreon, tout est tellement compliqué avec cette longue histoire et tous les thèmes abordés. Pour Star One, je n’ai qu’à brancher ma guitare et jouer des accords bien heavy ! Je n’ai plus ensuite qu’à appeler mes quatre amis, Damian, Floor, Dan et Russel pour le chant et c’est tout, tu sais ! Donc vraiment, j’adore ça.

A l’écoute de ce dernier album, mais également des deux derniers Ayreon, il est clair que tu apprécies le gros son de guitare. N’as-tu jamais envisagé créer un projet plus traditionnel (basse, guitare, batterie) qui serait donc plus axé guitare ?

En fait, c’est exactement ce que j’ai essayé de faire avec Star One, mais je n’ai pas réussi (rires). J’ai vraiment essayé tu sais. Je me disais « je vais faire un album plein de guitares ! Aucun clavier ! Comme AC/DC, Van Halen, Judas Priest, Iron Maiden ou encore Rammstein par exemple ! ». Et si tu écoutes bien les chansons, au début de l’album, j’y arrive. Mais ensuite… j’aime tellement le clavier, vois-tu. Au bout d’un moment, ça ressort naturellement (rires) ! C’est tout mon côté prog’ qui refait surface ! Donc, je ne pense pas que je sois capable de faire ça, un projet plus « traditionnel »… Mais je crois que j’y étais presque avec cet album de Star One (rires) !

Victims Of the Modern Age fait appel aux mêmes chanteurs que le premier album. N’as-tu pas été tenté de voir ce que ça pourrait rendre avec quatre autres chanteurs ?

Clairement oui et j’y ai beaucoup réfléchi. J’ai même sérieusement pensé à certains chanteurs et…

Oh ! Donne-nous des noms !

Eh bien… vais-je donner des noms ? (rires). Je me disais « qui est aussi bon que Russel Allen ? ». Le seul à qui je peux penser est Jørn Lande, mais j’ai déjà travaillé avec lui. Et après, je me suis dit « OK ! Et Floor ? Comment pourrais-je remplacer Floor ? » Elle est la plus puissante chanteuse au monde ! Vraiment, je ne vois personne qui puisse faire l’affaire dans son registre.

Irène Jansen, sa sœur ?

C’est vrai, sa sœur, mais elle a été impliquée dans Star One, tu sais. Et je pense que Floor me tuerait si je travaillais avec Irène (rires) ! Ça c’est sûr ! Et ensuite on a Dan Swanö avec sa voix gutturale. Il y aurait bien eu Peter Steele, mais il n’est plus parmi nous malheureusement. Il aurait été le seul avec qui, je crois, on aurait pu faire quelque chose dans le même registre que Dan Swanö. Et enfin, il y a Damian qui est vraiment impossible à remplacer. Qui a une voix comme la sienne ? Elle est tellement unique. Donc oui, j’ai réfléchi à tout ça, j’ai même parlé avec Mikael Åkerfeldt qui était intéressé pour chanter sur l’album. Mais Garry Wehrkamp, qui joue les solos de guitares sur l’album m’a dit « Écoute, je pense qu’Ayreon est ton projet où tu travailles avec un tas de chanteurs. Pourquoi ne pas conserver le line-up de Star One comme il était ? Garde Star One comme un groupe et garde Ayreon comme le projet où tu fais tourner plein de chanteurs. » Et je crois qu’il a eu là une très bonne idée.

Il y a une continuité entre les sonorités de Victims Of The Modern Age et celles de Space Metal, surtout au niveau des claviers. Est-ce volontaire ?

Ce n’était pas intentionnel, mais c’est inévitable au bout du compte. J’ai tout un ensemble de vieux claviers analogiques et leur palette de sons est assez limitée. Ce n’est pas comme ces claviers modernes sur lesquels tu trouve cinq mille sons dans un module. Les vieux claviers ont leurs propres sonorités et c’est la raison pour laquelle je les aime tant. Ils sont très personnels. En fait, j’ai essayé de faire un album différent, mais il aura toujours mon son, même si j’utilise la guitare complètement différemment comme ici. Le premier Star One a été enregistré avec des sortes d’amplis digitaux. Mais cette fois, j’ai utilisé de vrais amplis de guitare. Donc c’est complètement différent. Mais malgré tout, l’album conserve mon son et mon jeu de guitare. Je pense que peu importe ce que je fais, même un album disco demain (rires), cela aura toujours mon son. C’est inévitable.

Dans le passé, tu as fait des concerts sous l’étiquette de Star One. Est-ce quelque chose qu’on peut espérer à nouveau dans le futur ?

C’est possible. Néanmoins, ça sera difficile d’avoir tous les chanteurs en même temps. Floor a un nouveau groupe, ReVamp et elle tourne beaucoup. Le nouvel album de Russel avec Symphony X est presque terminé et il sortira bientôt. Donc ils sont très occupés. De plus, Ed (NDLR : Warby) joue en tant que batteur dans son propre groupe. Shadow Gallery est en tournée actuellement (NDLR : le groupe de Garry Wehrkamp). Donc ça serait vraiment très dur de les rassembler tous. Nous avons de nouveau tourné un petit documentaire en vue de l’édition de ce nouvel album et on a demandé à chaque chanteur s’il serait d’accord pour tourner avec Star One et ils ont tous répondu « Oui, bien sûr ! ». Ça sera dur à organiser et je n’ai rien prévu de tel pour le moment, mais cela reste définitivement une option. Et je pense qu’au fond de moi, je veux d’abord voir comment l’album sera accueilli. En plus de rassembler tout le monde, il faudrait trouver quelques mois pour répéter. Enfin, ça coûterait très cher. Ça me prendrait six mois pour tout organiser, alors je veux être sûr d’abord que ça vaudra vraiment le coup.

« …le dernier Ayreon devait être un album solo. Mais après, je me mets à écouter tous ces chanteurs géniaux et je me dis ‘ce chanteur devrait chanter cette partie ! ‘.[…] Donc à chaque fois, je prévois de faire un album solo, mais à chaque fois ça rate. Mais maintenant, je pense que je dois vraiment le faire. J’ai 50 ans maintenant tu sais… Je vois autour de moi ces chanteurs qui perdent leur voix ou du moins qui perdent quelque chose de leur voix au bout d’un moment. »

Tu as mentionné Russel Allen de Symphony X et le fait que leur nouvel album est presque prêt. Est-ce que tu as des infos là-dessus ? Parce que c’est toujours très difficile de savoir quelque chose avec Symphony X…

Ça a été très difficile de faire venir Russel dans mon studio car il était au milieu de l’enregistrement du chant pour Symphony X. De plus, il était également sur le point d’avoir son second enfant. Donc, ça a été dur de l’avoir. Mais par chance, il a pu prendre une semaine de congé pour venir me voir et enregistrer. Ils espéraient être prêts pour cette année, et j’ai demandé confirmation à Russel. Il m’a répondu « Non, non, ce n’est pas encore prêt ! » (rires). C’est toujours comme ça avec Symphony X tu sais : leur musique et leurs albums sont tellement complexes qu’il faut qu’ils rajoutent ceci et puis cela… Donc à mon avis, ils ne le sortiront pas cette année, mais peut-être au début de l’année prochaine.

Dans l’édition limitée de Space Metal, il y avait une chanson bonus ayant pour titre « Intergalactic Laxative ». Qu’est-ce que c’était exactement ?

C’était une sorte de blague. Je l’ai ajoutée à la dernière minute. Je voulais mettre une reprise sur l’album, mais je voulais quelque chose à la fois drôle et qui se rapporte à l’espace. Et je me suis alors souvenu de ce vieil album de Donovan que je possède. Donovan était un chanteur hippie des années soixante et cet album que j’ai contient une chanson marrante qui s’appelle « Intergalactic Laxative ». Donovan se demande comment les astronautes chient et pissent quand ils sont dans l’espace (rires). Comment font-ils et qu’advient-il de toute cette merde et de toute cette pisse. Et la chanson est vraiment trop drôle. Tout le monde pense à ces astronautes, ces grands héros, qui atterrissent sur la Lune et qui voyagent dans l’espace, mais Donovan, lui, il se demandait seulement « mais comment ils chient ? » (rires). Donc, pour faire une blague, j’ai pris ma guitare acoustique et j’ai enregistré cette chanson. Je l’ai alors mise secrètement à la fin comme un morceau caché, mais il faut aller en avance rapide pour l’atteindre. Je ne suis même pas sûr que la compagnie de disque ait été au courant (rires). Ils auraient sans doute dits « non, ne fais pas ça ! Tu es fou ! ».

Apparemment, tu as beaucoup de matériel comique dans ton sac. Je me souviens du bonus DVD du dernier album d’Ayreon. Il y a cette version d’une chanson de Simone Simons où elle a changé les paroles et elle chante « dear penis, give my butt a sign» (NDLR : à la place de « Dear PX, give me but a sign »)

(Rires) C’est vrai… Petite coquine… Petite coquine… Il y avait aussi tous les ratés, qui sont vraiment très drôles, mais qui n’ont malheureusement pas été filmés pour le DVD, du coup on n’a sorti que les versions audio.

Et la fausse interview avec Daniel Gildenlow !

Et Tom Englund d’Evergrey qui s’amuse tout le temps. Pareil pour Bob Catley !. Cet enregistrement était vraiment marrant.

Retour à l’interview maintenant. Concernant Ayreon, tu as reconnu que les critiques avaient raison de dire que tu réutilisais toujours les mêmes sonorités. Est-ce quelque chose dont tu t’es rendu compte en lisant les critiques ou le savais-tu avant ?

Je savais que le dernier Ayreon n’apportait rien de neuf ou d’unique, mais cet album était conçu pour terminer la longue histoire de la planète Y, de la race des Forever et de la façon dont ils ont ensemencé la Terre. C’était la fin de l’histoire débutée avec le premier Ayreon et qui était devenue de plus en plus compliquée. A cause de ça, cet album se devait d’avoir des facettes de chacun des albums précédents et donc il devait avoir un peu les mêmes sons. Je suis d’accord avec ceux qui trouvent que tout ça n’était pas très neuf et que ça devenait compliqué. Il faut vraiment que tu connaisses les albums précédents pour comprendre celui-là. En fait, j’avais un peu peur de m’aliéner ceux qui ne sont pas des fans d’Ayreon et qui ne connaissent donc pas toute l’histoire. J’avais un peu peur qu’ils se demandent pourquoi ils devraient aimer cet album.

Donc, ce n’était vraiment pas le bon moment pour complètement changer ton style…

Non, vraiment pas. Ce n’était vraiment pas le bon moment. Mais pour revenir à ce que j’ai dit plus tôt dans l’interview, je ne peux de toute façon pas complètement changer mon style. Je peux essayer. Je peux essayer de faire quelque chose de différent comme avec The Guilt Machine ou comme avec cet album de Star One.  Mais ça restera néanmoins mon son. Ce que je vais clairement essayer avec le prochain Ayreon, c’est de lancer une nouvelle histoire, peut-être un peu plus personnelle, peut-être comme ce que j’ai écrit avec The Human Equation, qui était un peu comme une échappée hors de toute cette science-fiction présente dans Ayreon. Mais au niveau du son, ça va être dur de changer, tu sais : j’aime un certain son de guitare, j’aime certains sons de clavier et j’aime certains chanteurs. Et je ne peux pas changer ça. Je ne peux pas tout à coup jouer avec le son de guitare de Dire Straits (rires). Je pense que peu importe ce que je fais, ça aura mon son. Mais peut-être puis-je faire quelque chose de différent en me focalisant sur certains aspects d’Ayreon comme je le fais avec Star One. Je veux dire par là que Star One ne sonne pas comme Ayreon, mais, comme je l’appelle moi-même, c’est un peu comme une version heavy d’Ayreon.

Est-ce la raison pour laquelle tu veux attendre avant de relancer ton projet Ayreon ? Est-ce que tu veux prendre le temps d’essayer de nouvelles idées ?

Clairement oui. Je ne suis pas pressé pour faire le prochain Ayreon. D’ailleurs, je ne pense même pas que mon prochain album sera un Ayreon. Pour revenir à ta première question « Est-ce que tu crois qu’une large part de ton succès est due à la présence des ces chanteurs célèbres ? », je pense que je vais maintenant faire un album solo sans aucun invité. Juste moi. Et ça serait un énorme challenge pour moi de prouver que « Eh oui, je peux faire tout ça moi-même ! ». J’ai besoin de ce challenge. Donc je crois que je vais maintenant faire un album solo et je vais essayer de faire quelque chose d’intéressant. Et comment tu fais pour faire de la bonne musique ? Tu viens avec du nouveau matériel et de nouveaux sons. Donc oui, j’ai besoin de ces challenges.

Mais est-ce quelque chose de déjà programmé ?

Oui, je crois que c’est vraiment le bon moment pour que je fasse un album solo. Mais ça fait dix ans que je dis ça… En fait, le dernier Ayreon devait être un album solo. Mais après, je me mets à écouter tous ces chanteurs géniaux et je me dis « ce chanteur devrait chanter cette partie ! Cet autre chanteur devrait chanter celle-là ! ». Et avant que je ne m’en rende compte, je suis en train d’écrire un nouvel Ayreon avec tout un tas de chanteurs ! Après ça, j’ai fait le Guilt Machine, qui devait aussi être un album solo au départ. Mais j’ai entendu ce super chanteur belge qui est vraiment meilleur que moi et je me suis dit « non, faisons un album avec lui ! ». Donc à chaque fois, je prévois de faire un album solo, mais à chaque fois ça rate. Mais maintenant, je pense que je dois vraiment le faire. J’ai 50 ans maintenant tu sais. Je vois autour de moi ces chanteurs qui perdent leur voix ou du moins qui perdent quelque chose de leur voix au bout d’un moment. Donc je pense que je devrais le faire maintenant.

Seras-tu vraiment le seul à chanter ?

Oui. Je ferai peut-être appel à des chanteuses pour m’accompagner. C’est quelque chose que je n’ai pas encore décidé. Mais oui, ça ne serait que moi.

Vas-tu résister à la tentation d’inclure un invité ?

Ça serait dangereux si je commençais à en mettre un… (rires).

(NDLR : A propos de Tobias Sammet) »Je déteste cet enfoiré (rires) ! C’était horrible ! […] Mais en même temps, il m’a détesté tout autant quand j’ai réussi à avoir Bruce Dickinson. Donc je pense qu’on est quittes maintenant ! (rires) »

J’imagine que tu n’arrêteras pas Ayreon avant d’avoir réussi à inviter Alice Cooper. Est-ce que ça ne t’a pas ennuyé que Tobias Sammet réussisse à rentrer en contact avec lui presque immédiatement alors que ça fait des années que tu essaies ?

Bien sur que ça m’a ennuyé (rires) ! Je déteste cet enfoiré (rires) ! Non, sérieusement, quand j’ai entendu ça, ça a été comme la pire nouvelle que quelqu’un pouvait me faire (rires). C’était comme « est-ce que tu dis ça juste pour me faire du mal ? ». Et j’étais là « non, non, c’est la pire chose que quelqu’un puisse me dire ! » (rires). C’était horrible ! Mais en même temps, il m’a détesté tout autant quand j’ai réussi à avoir Bruce Dickinson. Donc je pense qu’on est quittes maintenant ! (rires)

Tu as récemment déclaré que Guilt Machine était ton projet préféré. Est-ce que tu envisages de produire un second album ?

J’adorerais ça, parce que vraiment j’aime beaucoup ce projet. Mais tu sais, l’une de mes motivations quand je fais de la musique, c’est bien sûr que le public veuille écouter ce que j’écris. Je me suis aperçu avec ce Star One que les gens l’avaient attendu impatiemment pendant dix ans. Ils sont vraiment là à dire « super, finalement tu es en train de faire un nouveau Star One ; c’est trop génial ! ». Et c’est une énorme source d’inspiration pour moi. Comme je l’ai dit, le Guilt Machine ne s’est pas très bien vendu et il n’y a donc pas grand monde qui attende un second album. Ça rend la tâche un peu plus ardue pour en faire un second. Mais tout est une question de priorité. Si après cet album solo, je m’aperçois qu’il y a cinq cent mille personnes attendant un prochain Ayreon alors qu’ils ne sont que dix mille à attendre un nouveau Guilt Machine, alors bien sûr ça sera très tentant d’écrire un nouvel Ayreon.

Et à propos d’Ambeon ?

Je ne pense pas qu’il y aura jamais un nouvel Ambeon, simplement parce qu’Astrid ne fait même plus de musique pour le moment. Je lui ai demandé. Elle est malheureusement passée par une période vraiment difficile durant laquelle elle était à l’hôpital. Elle n’allait vraiment pas bien. Elle est maintenant revenue dans le vrai monde, mais pas dans celui de la musique pour le moment. Donc elle n’est pas intéressée pour le faire et je crois que ce serait mal de faire Ambeon avec quelqu’un d’autre.

C’est vraiment dommage car elle a une voix incroyable…

Elle est fantastique ! Elle n’avait que 14 ans tu sais quand je l’ai embauchée ! C’était fou ! Le plus grand talent que je n’ai jamais eu dans mon studio ! Donc oui, c’est vraiment dommage…

Nous allons terminer l’interview avec une dernière question. C’est la question idiote de l’interview : est-ce que tu te souviens précisément de l’ordre des zéros et des uns formant le titre du dernier Ayreon ?

0 – 1 – 0 – 1 – 1 – 0 – 0 – 1… Et voilà ! (rires)

C’est fort ! (rires)

C’est en fait assez simple (rires). Il y a une logique derrière cette suite. Je me souviens de la compagnie de disque me disant « Ecoute, on ne va pas apprendre ça ! Tu peux l’appeler comme ça si tu veux, mais nous, on n’apprendra pas ce titre ! » (rires)

Merci beaucoup !

Tout le plaisir était pour moi.

Au fait, j’y pense, est-ce que tu es au courant du problème avec le mot « aryen »? Ca veut dire «nazi »…

Ah oui ! Comme avec « race aryenne ».

N’as-tu jamais eu de problèmes avec ton prénom justement, à cause de ça ?

En fait, des gens aux États-Unis ont eu des problèmes… Il y avait ce type qui a fait inscrire « Ayreon » sur sa plaque d’immatriculation. Les gens ont vraiment cru qu’il faisait référence à « aryen » comme « race aryenne » et ils lui ont saccagé sa voiture (rires). Et le type m’a envoyé sa plaque. Elle est maintenant accrochée à mon mur. Donc oui, il y a des gens qui ont pensé à ça, mais bien sûr ça n’a jamais été mon intention.

Est-ce que tu as une photo de cette plaque ?

Oui :

Ok ! Merci beaucoup ! Salut et merci pour l’interview !

De rien et « bonjour » (NDLR : en français dans le texte)

Entretien réalisé en septembre 2010 par phoner.
Myspace ARJEN LUCASSEN : www.myspace.com/aeronauts
Myspace GUILT MACHINE : www.myspace.com/guiltmachine
Myspace AMBEON : www.myspace.com/ambeon



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