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Interview   

L’ouragan Avatarium monte en puissance


Si l’on peut reconnaître un autre talent à Leif Edling que ceux de compositeur, parolier et génie du riff, c’est celui de savoir très bien s’entourer en dénichant de sacrés talents. Avatarium en est le symbole, formation de musiciens jusqu’alors peu voire pas du tout connus mais qui excellent chacun dans leur domaine, avec des personnalités, des sensibilités bien affirmées. Et en particulier le couple que forme la chanteuse Jennie-Ann Smith et le guitartiste Marcus Jidell. Il y a d’ailleurs des signes qui ne trompent pas, Edling, lui qui est pourtant habitué à avoir la main mise sur la création, commence à leur laisser de plus en plus de place pour s’exprimer, leur permettant notamment, cette fois-ci, avec le nouvel album Hurricanes And Halos, d’apporter deux compositions pleines de fraîcheur.

Comme nous avons déjà, à deux reprises, eu l’occasion de faire connaissance avec Jidell, c’est au cas de son épouse et chanteuse, au background jazz, soul et pop, que nous nous sommes intéressés cette fois-ci. Ainsi elle nous parle de ce troisième album et de la dynamique actuelle du groupe, mais aussi d’elle-même afin de mieux saisir son état d’esprit d’artiste.

« La musique a été une part très importante de ma vie depuis que je suis très jeune, mais je ne m’attendais pas à évoluer dans ce style ou ce que nous faisons. »

Votre premier album est sorti en octobre 2013 et un peu plus de trois ans plus tard, vous avez désormais trois albums et deux EPs…

Jennie-Ann Smith (chant) : Whoo-hoo ! [Petits rires]

N’est-ce qu’une question de créativité ou bien est-il important pour vous de maintenir cette régularité ?

Eh bien, je pense que c’est nécessaire. Si tu veux travailler en tant que groupe, il faut avoir de la continuité. La clef est de travailler dur, je pense. Il n’y pas d’autre solution. Et aussi de maintenir un esprit créatif. Donc oui. Et aussi, à un niveau pratique, pour créer un super set live, il te faut un catalogue, il te faut de super chansons et de la super musique à proposer au public, et tu en as aussi toi-même, en tant que musicien, besoin pour ressentir une satisfaction.

Sur The Girl With The Raven Mask, tu as commencé à être davantage impliquée dans les arrangements des chansons, et maintenant tu as même composé deux chansons avec Marcus, et vous étiez tous les deux fortement impliqués dans le processus de composition. Leif Edling est généralement réputé pour être le seul compositeur dans ses groupes, du coup, y avait-il un fort désir de ta part et de celle de Marcus de s’impliquer davantage dans la composition ?

Pour ma part, j’ai composé par intermittence pendant pas mal d’années. Par rapport à la musique, je trouve qu’il n’y a aucun intérêt à faire le même album encore et encore. J’ai besoin, en tant que personne, de me développer, donc je pense qu’il est naturel de vouloir également composer et grandir en tant que compositeur. Je savais vraiment dès le début que je devais composer de la musique, je le ressentais. J’y ai bien réfléchi et j’estimais que je pouvais apporter quelque chose en tant que compositrice. Si ça n’avait pas été le cas, je ne l’aurais pas fait. Mais je pense que toutes nos contributions à cet album nous ont amené à un autre niveau et nous ont fait passer une étape. En fait, nous avions composé avant, nous avons sorti un EP il y a quelques années, et nous avons écrit une chanson qui s’appelle « Deep Well » sur celui-ci. Et nous voulions composer sur The Girl With The Raven Mask aussi, mais le processus était si rapide que nous n’en avons jamais eu l’occasion à cause des contraintes de temps, et Leif est un rapide ! [Petits rires] C’est une personne unique et un compositeur unique. Il est tellement créatif et il était arrivé avec de supers chansons, et nous les avions enregistrées assez vite.

Penses-tu que ce nouvel album te représente mieux en tant qu’artiste que le premier, par exemple ?

Je pense qu’il représente mieux qui nous sommes en tant que groupe aujourd’hui. Je pense qu’il montre bien comment nous avons progressé [individuellement] et ensemble, en groupe. C’est une conséquence naturelle de nos personnalités et de ce que nous sommes en tant que musiciens.

Quelles sont les deux chansons que tu as écrites avec Marcus ?

C’est « Road To Jerusalem » et « When Breath Turns To Air ». Et je pense que ça donne à l’album une certaine saveur et ça nous amène dans une nouvelle situation. Je veux dire que nos racines sont dans le doom et le rock, évidemment, mais aussi, je pense qu’il est nécessaire de vraiment permettre à nos influences personnelles et nos références musicales de faire partie de ce à quoi nous passons tant de temps, comme nous le faisons dans Avatarium.

J’aurais parié que « Road To Jerusalem » n’avait pas été écrite pas Leif, car elle ne sonne pas tout à fait comme lui, et elle apporte effectivement une belle diversité à l’album…

Oui, je le pense aussi. Et ça se mêle joliment au reste. En fait, l’enregistrement de l’album a vraiment été un processus où chacun de nous a été très impliqué dans l’arrangement, l’enregistrement et la production. Marcus Jidell est notre producteur, donc il a une vue d’ensemble qui rend les choses spéciales, mais le savoir-faire et la maestria musicale sont très élevés et tout le monde contribue à ces arrangements, donc je pense que nous avons beaucoup de chance, en ce sens, d’avoir un tel savoir-faire dans nos rangs.

Peux-tu nous parler de ce qui vous a inspiré ces deux chansons ?

Pour « Road To Jerusalem », la construction de la chanson était très inspirée par… Je sais que Marcus adore Crosby, Stills & Nash autant que moi, donc nous étions en train de se dire que ce serait sympa d’avoir un morceau à trois harmonies sur l’album. Donc nous en avons parlé et c’était l’intention, mais ce n’est pas tout à fait ce qui s’est passé. Ce n’est pas complètement des harmonies à trois parties, mais il y a des harmonies sur certains passages. Donc ça s’est vraiment développé à partir de là et avec les arrangements, nous avons essayé différentes choses, en faisant des allers-retours, parce que nous voulions que ce soit dynamique. Et à part nous, Lars Sköld à la batterie, Mats Rydström à la basse, Rickard Nielsson à l’orgue et Marcus Jidell à la guitare, nous avions aussi Michael Blair qui est un percussionniste. C’est un merveilleux musicien et il a joué avec Lou Reed, Tom Waits et ces géants américains. Donc il joue sur l’album et en particulier sur ce morceau, ce qui apporte une saveur particulière, je trouve. Et j’ai aussi le plaisir d’avoir un choriste – ce n’est pas qu’un choriste, c’est un vrai chanteur -, son nom est Leif Sundin ; je ne sais pas si tu le connais mais il a chanté sur des albums de Michael Schenker, c’est un des meilleurs chanteurs en Suède, et il fait des harmonies avec moi, et Marcus chante également, sur « Road To Jerusalem ». Je trouve que c’est devenu un chouette arrangement.

Pour « When Breath Turns To Air », nous étions dans un contexte où le père de Marcus est décédé. C’était il y a presque un an, et le père de Marcus était une personne très musicale aussi, il jouait du violoncelle, du Nyckelharpa, du piano, et il était une grande inspiration pour Marcus. Nous avons d’ailleurs joué ensemble et, comme tu peux l’imaginer, c’était une énorme perte. Et pour Marcus, je pense que jouer et écrire de la musique a aussi été une façon de digérer son état émotionnel, et la musique est une grande force pour ça ; c’est une très bonne façon de gérer nos émotions et les digérer. Donc il a trouvé ce thème, il me l’a envoyé, je l’ai écouté, je me suis assise avec ma guitare acoustique et j’ai essayé certaines choses et j’ai travaillé un petit peu sur la mélodie qu’il avait fredonnée par-dessus. Et ensuite les mots sont venus. J’ai ajouté un changement sur le pont qui mène au refrain, et nous avons échangé des choses que nous avons essayées. Le père de Marcus adorait la musique folk suédoise, et il y a un fil conducteur dans Avatarium et dans la façon dont nous sonnons, mais cette chanson est aussi assez inspirée de la musique folk, je trouve. Les paroles parlent de perte et de la peur de partir et aussi d’être oublié, et je trouve que c’est une perspective pleine d’espoir lorsque le souffle devient de l’air (traduction de « when breath turns to air », NDT), il se peut que nous soyons partout [petits rires]. En fait, ça parle vraiment de la relation que l’on a les uns avec les autres et qui reste. Donc ouais, ça parle de ces grandes questions [petits rires].

« Avatarium me permet de prendre part à la production musicale […]. C’est nécessaire pour moi. J’ai besoin de sentir que je fais partie de la musique en tant que musicienne. Je ne suis pas qu’une chanteuse, je suis musicienne. »

Marcus et toi êtes mariés. Est-ce que cette relation spéciale se traduit d’un point de vue créatif ? Est-ce que vous vous nourrissez l’un et l’autre ?

Je pense que nous avons beaucoup de chance de pouvoir travailler avec la musique ensemble. Nous nous sommes rencontrés en tant que collègues musiciens avant que nous ne devenions un couple. Donc c’est facile de faire une transition entre la vie privée et la vie professionnelle. J’ai l’opportunité de travailler avec un des meilleurs guitaristes qui soit, Marcus est un musicien extraordinaire. J’ai beaucoup de chance de pouvoir travailler avec lui et aussi, évidemment, d’être marié avec lui [petits rires], et ça offre un certain sentiment de sécurité, aussi. Et je m’amuse tellement avec lui. C’est quelqu’un de très amusant, marrant et plein d’humour.

Est-ce qu’il t’inspire, par exemple, lorsqu’il fait un solo, et vice versa ?

Eh bien, j’espère que je les inspire tous, parce que je sais qu’ils m’inspirent. Je veux dire que lorsque Rickard est arrivé et a posé ses mains sur l’orgue Hammond, et que la première chose qu’il a enregistré était le solo de « Into The Fire – Into The Storm », et lorsqu’il a fait ça, je n’avais pas encore fait le chant, j’étais là : « Ok, il est temps de passer au niveau supérieur ! » [Rires] Car c’est l’un des meilleurs pianistes et claviéristes en Suède. Et je suis inspiré par le jeu de batterie super groovy de Lars et la façon dont Mats nous pousse à un autre niveau avec son jeu de basse. Je trouve qu’il y a une telle maestria que nous pouvons improviser, nous pouvons nous inspirer les uns les autres à franchir de nouvelles étapes. Et aussi les gars sont tous de chouettes personnes, et je me sens en sécurité avec eux, et je peux me permettre d’être enjouée, je peux me permettre de… Tu dois t’exposer et beaucoup oser si tu veux passer au niveau supérieur, et ils me permettent de le faire. C’est génial !

Pour le deuxième album, Leif n’a enregistré que la moitié de l’album, l’autre moitié ayant été enregistrée par Anders Iwers. Maintenant, vous avez Mats Rydström en tant que bassiste live, mais quelle a été son implication dans l’album ?

Mats est notre bassiste permanent à partir de maintenant et il a joué la basse sur tout l’album. Depuis le début, nous nous sommes tous réuni en studio, avec Leif et tout le groupe. Et après ça, nous avons répété avec Mats, et Mats a été une grande influence, comme chacun d’entre nous l’a été. L’album que tu entends est le résultat d’un processus de groupe très intense. Donc Mats a, dans l’ensemble, été une part très vitale et importante dans les arrangements et la production. Donc il est très important.

Est-ce que ça signifie que Leif n’est plus qu’un compositeur dans le groupe maintenant ?

Leif est un compositeur et il est aussi une grande force créative que nous avons avec nous.

Comme Leif ne joue plus aucun instrument dans le groupe, n’avez-vous pas peur qu’il finisse par se détacher complètement du groupe ?

Selon moi, nous avons un bon accord. C’est une compréhension que nous partageons. Non, je ne suis pas inquiète à ce stade.

Depuis le tout premier album, la musique des années soixante et soixante-dix sert de base au groupe. Je me souviens de Marcus qui nous disait à l’époque du premier album que toi, lui et Leif aviez énormément écouté ce type de musique. Du coup, qu’est-ce qu’il se trouve de si spécial dans cette musique des années soixante et soixante-dix, d’après toi ?

Cette époque, tout du moins dans le monde occidental, était… En fait les années cinquante et soixante étaient l’époque des premières cultures des jeunes et qui a permis aux jeunes gens de vraiment explorer et instaurer leur propre culture. C’était donc vibrant, enjoué et ouvert, et évidemment, ça a affecté la scène musicale également, d’Elvis aux Beatles à Led Zepplein, toutes ces choses qui sont arrivées. A cette époque, il fallait aussi être un très bon instrumentiste ou chanteur. Il fallait savoir jouer ! Aussi, il fallait pouvoir jouer sur du matériel qui n’était peut-être pas aussi perfectionné qu’aujourd’hui et ainsi de suite. Donc ça jouait sur le savoir-faire. Il y avait de supers musiciens, de supers amplificateurs, de supers chanteurs et de supers compositeurs, et cette allégresse. Donc, bien sûr, c’est une super époque. Il y a de la très bonne musique qui est faite aujourd’hui aussi mais pour ce qui est du rock n’ roll, c’est la base [petits rires], n’est-ce pas ?

Le refrain de « The Starless Sleep » possède un côté cathartique qui peut rappeler une version plus heavy d’un groupe des sixties comme The Mamas And The Papas…

Ouais ! Je suis contente que tu aies relevé ça ! Tu sais, nous avons enregistré cette chanson et travaillé sur les arrangements tous ensemble, mais je me souviens que j’avais travaillé sur le chant du refrain, et j’ai dit à Marcus : « Je pense qu’on devrait avoir des chœurs ici. » Et il a dit : « Ouais ! Qu’est-ce que tu dirais de chœurs dans le style de The Mamas And The Papas ? » Donc nous avons expérimenté avec ça. C’est moi et Marcus qui chantons les harmonies sur celle-là et ça ajoute un côté The Mamas And The Papas. Et je trouve que ça se fond vraiment joliment avec les guitares plus heavy et ça reste sombre, heavy et poétique. Donc ouais, il y a cette saveur sixties.

Un autre élément sympa, c’est ce chœur d’enfants sur « Medusa Child ». Qui sont ces enfants qui chantent et comment en êtes-vous venus à l’idée de les faire chanter sur cette chanson ?

Ce sont des enfants d’amis à moi. On entend surtout Edith, elle a neuf ans et vient de Stockholm, et il s’est avéré qu’elle était très naturelle, elle avait répété avec son frère ainé et sa mère, et elle est venue et s’est tenue très naturellement devant le microphone et a assuré ! [Petits rires] C’est probablement un peu différent de ce qu’on entend sur la scène metal aujourd’hui mais ça se mêle très bien à cette chanson dramatique, et c’est un peu flippant aussi. En fait, c’était l’idée de Leif, il voulait un chœur d’enfant. Je crois que j’étais plus sceptique par rapport à cette idée mais ensuite j’ai pensé : « Et puis zut ! Essayons et si ça marche, tant mieux, et si ça ne marche pas, tant pis. » C’était vraiment un coup de chance que nous ayons trouvé ces voix parfaites parce que ça sonne vraiment naturel et réel. Ouais, je trouve que cette chanson est une belle production.

Tu peux interpréter les paroles de cette chanson de plein de façons différentes, je pense, mais si tu regardes la mythologie grecque, il y a ces liens avec l’enfant Méduse, évidemment, les Gorgones, donc on peut l’interpréter ainsi. Mais je pense que ça s’identifie à aujourd’hui et à ce que l’on voit autour de nous, la peur de l’inconnu et ces horribles vents nationalistes qui soufflent en ce moment en Europe. Le refrain, [chantant] « I just want to be a child, dream and play… » (« Je veux juste être un enfant, rêver et jouer… », NDT), ça parle d’un enfant qui voulait juste être accepté et pris en compte dans une communauté, et elle est maltraitée parce qu’elle est différente. Donc je pense que tu peux facilement t’identifier à ces paroles, de plein de façons. Et évidemment, c’est plus dramatique lorsque c’est un enfant qui le chante.

« Lorsque j’avais dans les quinze ans, les gars dans le groupe dans lequel je jouais m’ont initié à Rainbow […]. J’écoutais beaucoup de musiques à cette époque, mais Rainbow m’a probablement plus affectée que je ne le sais. »

L’album se termine avec une outro instrumentale éponyme. Quelle était l’idée derrière le fait de clore l’album avec ce morceau ?

C’était surtout un joli thème et une jolie mélodie, bien sûr, pour résumer l’album. Et ça pourrait être sympa d’avoir une outro lors de nos concerts, donc peut-être que vous entendrez ça [petits rires]. Nous avons beaucoup réfléchi à nos sets live, nos concerts, lorsque nous avons fait cet album, car nous voulions avoir quelques chansons rapides pour compléter le set, c’est sympa d’avoir cette énergie, et je pense que nous y sommes parvenus. Cet album possède une énergie vibrante qui bénéficiera à nos concerts, je pense.

Votre musique a parfois un côté cinématographique. Du coup, cette dernière chanson pourrait-elle être l’équivalent d’une chanson de générique de fin dans un film ?

[Rires] Eh bien, c’est une belle remarque ! Je ne l’avais pas vu sous cet angle mais ouais, maintenant que tu le mentionnes, je peux très bien l’imaginer ! Bien vu !

Leif nous a dit il y a quelques mois que les chansons étaient plus courtes et plus focalisées, avec pas tellement de prog ni de metal. Bon, l’album contient une chanson de neuf minutes, une autre de sept minutes, et c’est quand même pas mal heavy par moments !

[Rires] Ouais, intéressant, n’est-ce pas ?

Est-ce que ça signifie que les chansons ont beaucoup évoluées entre ses démos et sa vision originales et le résultat final ?

Je pense qu’il a raison lorsqu‘il dit que c’est un peu plus direct, parce que c’est le cas, c’est plus rapide et direct, mais il y a aussi ces parties instrumentales qui rendent quelques-unes des chansons un peu plus longues et ainsi de suite. Mais elles sont plus atmosphériques et ont une ambiance peut-être un peu différente de la musique progressive traditionnelle à laquelle on peut penser. Tu sais, j’adore l’album Abbey Road des Beatles, c’est un album épique. Je ne nous comparerais pas aux Beatles – j’adore, adore, adore les Beatles ! – mais l’album Abbey Road est un album medley, les morceaux sont liés les uns aux autres, et il y a des parties instrumentales. Je pense qu’il y a un lien avec ça et il y a de petites influences des Beatles ; il n’y a pas de morceau qui leur est dédié ou d’hommage mais nous partageons clairement un amour commun pour les Beatles.

La production est devenue bien plus live et organique sur The Girl With The Raven Mask. Ce nouvel album, au niveau son, est clairement dans la veine de son prédécesseur mais plus peaufiné et chaleureux. Êtes-vous parvenus à trouver votre son définitif avec Hurricanes And Halos ? Quuelle a été votre approche cette fois au niveau son ?

Je pense que nous avons créé un son plus osé et audacieux cette fois. Je pense avoir dit plus tôt que ça n’aurait aucun intérêt, tout du moins pour moi, de faire la même chose encore et encore. Pour moi, il est important de ressentir que c’est vital et énergique, et que nous ayons un son qui reflète ça, tu peux vraiment sentir que nous sommes sur le qui-vive. Je pense que c’est un intérêt commun que nous partageons.

La musique d’Avatarium est très dynamique, avec des parties très, très calmes et des sections très heavy et intenses. Comment est-ce que tu abordes ces changements d’intensité avec ta voix ? Est-ce que ça représente un défi pour toi ?

J’ai de la chance, en ce sens, parce que j’ai également une voix dynamique. Heureusement, j’ai le bonheur de posséder une voix où je peux passer de quelque chose de très fragile et délicat à quelque chose de très puissant, et ça fonctionne avec mon instrument. Les défis avec ce groupe sont plus au niveau de l’ouïe parce que c’est un groupe sacrément puissant et fort. Le volume sur scène est assez incroyable [rires], donc ça a davantage été un challenge de pouvoir m’entendre ! Car j’adore les enceintes de retour et j’adore le son de l’air qui bouge avec ma voix. Si je le pouvais je continuerais à utiliser ce genre de retour, des retours ordinaires, parce que c’est ce que j’aime, et dans toutes les autres situations musicales, j’utilise ça. Mais c’en est arrivé à un point où je me suis rendu compte que tu ne peux pas rivaliser avec un double amplificateur Marshall, donc j’ai commencé à utiliser des retours intra-auriculaires en concert. J’en suis arrivé à cette conclusion principalement parce que je voulais préserver mes oreilles.

Généralement, Leif écrit la plupart des paroles. Du coup, comment tu fais pour t’approprier ses paroles ? Est-ce que tu discutes avec lui de leur sens ?

Non ! Et en fait, c’est toujours comme ça que je m’y prends avec les paroles. Si tu veux faire en sorte que ça paraisse authentique ou vrai, tu dois te les approprier. Je veux dire que tu dois les ressentir. Tu ne peux pas dire à quelqu’un ce qu’il doit ressentir. Je ne peux pas te dire ce que tu dois ressentir lorsque tu écoutes et tu ne peux pas me le dire, tu dois le ressentir toi-même. Donc peu importe si je fais un standard de jazz ou si je chante une chanson de folk ou de hard rock, c’est pareil pour moi, c’est une représentation intérieure où j’ai mes propres images et visions en moi. C’est une représentation et ce que tu entends est ce qui en ressort.

D’ailleurs, tu penses davantage t’impliquer dans l’écriture des paroles à l’avenir ?

Eh bien, je pense avoir fait un bon boulot cette fois. Je progresse et vais dans cette direction [petits rires].

A propos du titre de l’album, Marcus a parlé du fait de s’être rappelé comment « le pouvoir permet aux gens de faire le mal au nom d’une mauvaise cause. » Peux-tu développer ce qu’il voulait dire et comment ceci est lié au titre, Hurricanes And Halos ?

Je pense qu’il serait mieux placer pour développer sa pensée. Mais je pense que nous vivons des moments chaotiques, c’est compliqué et difficile lorsque tu lis les infos et penses à ce qu’il se passe en Europe, qui est notre contexte le plus proche en ce moment. Ce vendredi, nous avons vécu une terrible attaque à Stockholm. On sait que ces choses se produisent. Je veux dire que vous avez vécu ça, les attaques de Paris et des choses horribles, donc vous êtes frappés par ça, c’est une puissance ou une force qui est comme un ouragan. Evidemment, j’ai vu comment ça accroit l’anxiété et les peurs des gens, c’est un ouragan, et il y a des tendances partout en Europe, par rapport à la peur et comment ça pousse les gens à vouloir exclure d’autres gens. Je me sens très fière de la Suède après ce qui vient de se passer, le fait que nous nous soyons rassemblés dans une grande manifestation contre la haine et l’exclusion de l’autre, pour être forts ensemble pour la solidarité, pour l’amour et pour une société ouverte. Donc Hurricanes And Halos (« Ouragans Et Auréoles », NDT) pourrait être lié à ça, c’est une manière de réfléchir sur ces très grandes questions auxquelles nous faisons face en ce moment, tout du moins pour moi. Donc si quelqu’un le souhaite, il peut le voir ainsi, mais je suis sûre que les autres gars dans le groupe ont des idées différentes, et ce que tu entends et obtiens là de ma part sont mes pensées filtrées à travers moi.

« L’empathie est une chose sur laquelle tu dois constamment travailler en tant qu’être humain. Tu dois être attentif, tu dois penser à ton empathie et y réfléchir quotidiennement. »

C’était une surprise de te découvrir sur le premier album d’Avatarium, car tu étais relativement inconnue dans la scène. Marcus nous a dit qu’avant Avatarium, tu n’as jamais vraiment cherché à faire carrière. Pourquoi ?

Je voulais une forme de carrière [rires] mais je ne m’attendais pas à ce qu’elle… Car la musique a été une part très importante de ma vie depuis que je suis très jeune, mais je ne m’attendais pas à évoluer dans ce style ou ce que nous faisons, donc c’était une coïncidence heureuse que Marcus m’ai demandé si je voulais faire quelques chants démos sur ces chansons que Leif avait écrit. Je crois que nous avons tous immédiatement ressenti que « wow, il y a vraiment quelque chose, ça sonne différent, ça sonne bien. » Et je l’ai moi-même aussi ressenti et entendu. [Au départ,] il n’y avait pas de groupe, je ne savais pas à quoi m’attendre et nous avons été à la pèche au contrat avec une maison de disques, et nous avons eu plusieurs propositions, et boum, nous voilà ! [Petits rires] Je pense que c’est un heureux développement mais ça vient aussi de beaucoup de travail et de concentration sur la musique.

Apparemment tu avais reçu pas mal d’offres pour faire des choses avant, mais tu en as décliné beaucoup…

Ouais, et c’est encore le cas parce que ça n’a aucun intérêt pour moi de ne pas pouvoir être en mesure d’influer ou… Ce que j’essaie de dire, c’est qu’Avatarium me permet de prendre part à la production musicale et tout le décor pour apporter ma personnalité dans la musique, pas seulement en tant que chanteuse de haut d’affiche, ce qui malheureusement arrive souvent avec les femmes dans la musique, genre tu as un joli minois ou une jolie voix et tu chantes ce qu’on s’attend à ce que tu chantes, et tu ne prends pas part au processus global, tu ne prends pas part au processus d’arrangement ou à la production. Et je veux ça. C’est nécessaire pour moi. J’ai besoin de sentir que je fais partie de la musique en tant que musicienne. Je ne suis pas qu’une chanteuse, je suis musicienne.

Tu viens d’un background jazz et blues mais quelle a été ta relation au côté plus heavy de la musique avant Avatarium ?

Eh bien, quand j’étais adolescente, j’écoutais beaucoup de Rainbow, surtout, en fait. Lorsque j’avais dans les quinze ans, les gars dans le groupe dans lequel je jouais m’ont initié à Rainbow et je pense que j’ai été pas mal influencée par Ronnie James Dio. Je n’y pensais pas tellement parce que j’écoutais beaucoup de musiques à cette époque, mais Rainbow m’a probablement plus affectée que je ne le sais. Aussi, bien sûr, Led Zeppelin, Deep Purple et ainsi de suite. Ce genre de groupes basés sur le blues, je veux dire que Rainbow, Deep Purple et Led Zeppelin ont leurs racines dans le blues et, évidemment, ont des chanteurs qui ont été influencés par ces grands chanteurs de blues et de vieux rock, à l’instar probablement de Little Richard ou Chuck Berry, ce genre de chanteurs, donc ça semble naturel pour moi.

Penses-tu que le fait que tu aies ces influences jazz, soul et pop te donne une approche différente des chanteurs de rock habituels ?

Qu’est-ce que tu en penses ?

Je pense qu’on entend effectivement un peu de ce côté jazz parfois, et ça sonne assez différent des chanteuses qu’on entend habituellement dans le metal…

Ouais, je ne suis pas super connaisseuse dans le domaine mais je le pense aussi. Ça ajoute une fusion assez appréciable, je pense. De toute façon, c’est la seule chose que je puisse faire, je ne peux pas être quelqu’un d’autre [petits rires], je ne peux être que moi.

Dans le metal, lorsque l’on parle de chanteuse, les gens ont en général en tête ce chant façon opéra. Penses-tu que ça en soit arrivé à un point où c’est devenu caricatural ?

J’adore l’opéra mais je ne pense pas que ce soit… Tout ce que je peux dire : j’aime l’opéra dans l’opéra et le chant classique dans un contexte classique. C’est… [Hésite] C’est tout ce que je peux dire [rires]. Je pense que ça a sa place dans un contexte spécifique. Peut-être que c’était une réponse que tu peux comprendre [rires].

Tu as étudié la psychothérapie…

Ouais, et c’est encore le cas !

…et tu as travaillé dans des hôpitaux. Penses-tu que ce background, d’une certaine façon, peut-être étrangement, a un impact sur ton approche de la musique et d’un groupe ?

Ca a un impact sur moi en tant que personne, évidemment. Et musicalement, en tant que compositrice, ça m’impacte, oui, bien sûr. Mais aussi, je pense, la façon dont je mène à bien la partie émotionnelle de la musique… Je veux dire qu’étudier la psychothérapie – je suis maintenant dans ma quatrième année d’études -, évidemment, ça a approfondi ma compréhension, mes sentiments et mes pensées à propos des émotions. Donc oui.

Est-ce que ça te donne davantage d’empathie ou plus de moyens de transmette les émotions ?

L’empathie est une chose sur laquelle tu dois constamment travailler en tant qu’être humain. Tu dois être attentif, tu dois penser à ton empathie et y réfléchir quotidiennement. Pour l’autre partie de la question, eh bien, je pense que je suis devenue encore plus sensible à la transmission dans les relations que j’entretiens. C’est difficile de juger. Avec un peu de chance, ça affecte ma musicalité de façon positive.

Interview réalisée par téléphone le 12 avril 2017 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Linda Akerberg.

Site officiel d’Avatarium : avatariumofficial.se.

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