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Interview   

Black Star Riders a le feu sacré


Qui aurait cru que la reformation de Thin Lizzy de 2010 – une parmi tant d’autres sans lendemain qui ont eu lieu à travers l’histoire – allait être aussi productive, au point d’engendrer un tout nouveau groupe qui désormais vole de ses propres ailes, proposant déjà son troisième album en à peine quatre ans. On parle évidemment de Black Star Riders et son opus Heavy Fire à paraître dans quelques jours. Mais il faut croire que Scott Gorham, seul rescapé du groupe originellement mené par le légendaire Phil Lynott, a retrouvé un élément essentiel dans cette nouvelle et fine équipe, en particulier avec le chanteur Ricky Warwick et le guitariste Damon Johnson : une complicité et une confiance.

Et cette énergie positive, c’est ce que l’on ressent immédiatement à l’écoute de Heavy Fire, le genre d’album de hard rock racé mais sans prétention qui donne la pêche et nous fait passer une bonne journée. A l’image d’un Scott Gorham, toujours aussi agréable, avec qui nous avons parlé de tout ça.

« Si tu abordes la chose de façon paresseuse, ça sonnera paresseux et les gens diront : ‘Tu vois, c’est un album un peu mou. Je ne suis pas sûr d’aimer, il n’y a pas d’énergie positive.’ Mais ça, lorsque tu es aux côtés de Ricky et Damon, ça ne peut pas arriver [rires] ! »

Vous revenez avec un troisième album en seulement quatre ans. Est-ce parce qu’il y a une vraie poussée créative dans le groupe ?

Oui et je pense que c’est le cas de chacun de nous ! D’une certaine façon, nous sommes tous des compositeurs. Nous fonctionnons par jets où on peut écrire plein de chansons, ensuite on se repose et ensuite on se remet à écrire plein de chansons, et ensuite c’est au tour de quelqu’un d’autre de faire des chansons. Donc ça fonctionne très bien comme ça ! Lorsque tu n’as plus d’idées, untel ou untel en aura une. Celui qui ne manque jamais d’idées, c’est Ricky [Warwick]. Il écrit plus de paroles que quiconque que j’ai connu dans ma vie ! Il ne s’arrête jamais ! Si tu lui montre un riff de guitare, il dit : « J’ai des paroles pour ça ! » Si tu lui montre une progression d’accord : « J’ai des paroles pour ça ! » [Rires] A chaque fois ! Et c’est vraiment le cas ! Et Ricky compose lui-même de la musique mais il a toujours des tonnes de paroles pour chaque autre chanson que tu peux avoir, ce que je trouve incroyable parce que, pour moi, les paroles, dans un groupe de rock, c’est ce qu’il y a de plus dur. Faire en sorte qu’une chanson de trois minutes trente sonne cohérente, en y intégrer la mélodie, tout en moins de quatre minutes, c’est un truc pas évident à faire !

Non seulement vous sortez un troisième album depuis 2013, mais en plus cette année semble s’annoncer comme étant bien chargée. Comment parvenez-vous à maintenir cette dynamique ? N’est-ce pas éreintant parfois ?

Eh bien, tu sais, ça l’est ! Mais tu dois simplement rester mentalement attentif, mentalement vif, mentalement heureux. En plus, ça aide que tout le monde dans le groupe soient de très bons amis. Il n’y a jamais de : « Je ne vais pas voyager en avion avec ce mec. Je ne vais pas voyager en bus avec lui. Mettez-moi dans un autre hôtel ! » Il n’y a rien de tout ça dans ce groupe ! Donc nous apprécions tous traîner ensemble, nous sommes tous de très bons amis. Du coup, ça rend d’emblée les choses sacrément plus faciles. Je ne peux m’imaginer être dans un groupe où les gens ne s’aiment pas, ils sont là juste pour l’argent. Ça, ce serait mentalement éreintant ! Essayer d’éviter tout le monde… Donc la moitié du chemin est fait, rien qu’avec ça. Et, tu sais, nous aimons nos jeux respectifs, nous adorons jouer cette musique, donc ça facilite aussi la chose. J’espère que le jour où nous arrêterons d’apprécier tout ça n’arrivera jamais, et comme ce n’est pas encore le cas, tout va bien pour nous [rires].

Tu as déclaré que « peu de groupes ont l’occasion d’enregistrer trois albums de nos jours. C’est sans l’ombre d’un doute plus difficile que jamais d’avoir une longue carrière musicale et de sortir plusieurs albums. » Dirais-tu que même vous connaissez parfois des difficultés ?

Bien sûr ! Tout le monde a des difficultés. Personne n’est invulnérable aux mauvais côtés du business du divertissement ou de la musique. Il a quelques soucis en ce moment, avec le manque de ventes pour les albums, tu vois. La conséquence, c’est que ça a coupé une avenue très lucrative pour des groupes qui en avaient vraiment besoin. Et ce n’est pas simplement pour mettre l’argent dans leur compte en banque, c’est pour acheter d’autres choses autour du groupe, de façon à améliorer le show. Aujourd’hui, on a un peu privé tout le monde ça. Et je n’arrête pas de me demander comment les jeunes musiciens peuvent continuer comme ça ? Je pense que l’autre chose par rapport aux difficultés qu’on rencontre aujourd’hui… Tu sais, dans les années 70 et 80, lorsque tu signais un contrat avec une maison de disques, tu ne t’attendais pas à rencontrer le succès dès ton premier album, ou tout du moins ils ne s’y attendaient pas, mais ils s’attendaient à ce que ce soit le cas arrivé au troisième album. De nos jours, si tu n’as pas de succès avec ton premier album, hop, tu prends la porte ! C’est impitoyable, en ce sens. Donc je pense que de nombreux très, très bons et talentueux jeunes musiciens ne pourront pas se faire entendre parce qu’ils ne parviennent pas jusqu’à ce second album, et j’espère qu’ils ne se découragent pas trop à cause de ça, mais j’ai peur que ce soit probablement ce qui se passe. C’est assez traumatisant lorsqu’une maison de disque te dit : « C’est fini, tu ne vaux plus rien. On ne veut plus entendre parler de toi. » Car tu as tous ces espoirs et ces rêves et d’un seul coup, il n’y a plus rien. Donc tu dois apprendre à avoir la peau dure. Et si on te rejette, ne t’inquiète pas, continue à te battre. Est-ce que c’était la bonne réponse ? Est-ce que je réponds de la bonne façon aux questions ? Parfois j’ai tendance à radoter [rires].

Pour Heavy Fire, vous avez une nouvelle fois travaillé avec le producteur Nick Raskulinecz…

Très bien ! J’ai dû m’entraîner pour bien le prononcer ! Nick Raskulinecz.

Qu’est-ce qui vous a convaincu dans votre première collaboration pour revenir vers lui ? Qu’est-ce qu’il a de si spécial et qu’est-ce qu’il apporte au son de Black Star Riders ?

La bonne chose à propos de la première collaboration était qu’elle a eu du succès ! [Petit rires] Donc ça, c’est toujours bien. La seconde raison qui nous a poussés à faire de nouveau appel à lui est probablement que maintenant nous le connaissions. Et maintenant, il nous connaît. Sur le premier album, tu as tendance à apporter tes amplificateurs avec toi, car c’est le monde que tu connais ; je sais que je peux obtenir un très bon son avec ça, de même pour Damon [Johnson] et les autres. Mais lorsque nous sommes allés au studio de Nick, il avait au moins vingt têtes d’amplificateurs différentes et tout un large choix d’enceintes qu’il connaissait de fond en comble. Donc pour le second, il disait : « Je sais exactement ce que tu veux pour cette chanson. Ecoute ça. » Il me sort d’un coup, disons, une tête Bogner avec une enceinte Orange, et tu regardes ça en disant : « Ça ne va jamais aller ! » Et puis tu balances un accord et tu dis : « Oh ! Ça va bien ! » [Rires] Et il n’arrêtait pas de faire ça, ces différentes combinaisons, et il est super avec ça parce qu’il sait comment paramétrer ces amplis que tu n’as jamais essayé auparavant. Donc ça, de base, le son qu’il te donne, c’est vraiment un gros plus. Ce qui apporte beaucoup lorsqu’on travaille avec Nick, c’est lorsque tu lui montres une chanson, il a déjà des idées pour : « Pourquoi ne fait-on pas ceci ? J’adore ça mais on peut l’améliorer. Donc pourquoi on ne fait pas cela ? Au lieu de le mettre en quatre-quatre, divisons le temps par deux et voyons ce que ça donne. » Et peut-être que ce sont des idées que tu n’as jamais eues avant et dès qu’il les dit, tu es là : « Ouais ! Je pense que ça va marcher ! » Et la plupart du temps ça marche vraiment. Donc il a de supers idées. Qu’importe la chanson que tu as, il aura une idée pour elle. Tu as le sentiment d’être en de bonnes mains parce que, peu importe à quel point tu penses que la chanson est bonne, je crois qu’il peut encore l’améliorer. Travailler avec ce genre de producteur procure un très bon feeling.

« Le premier album était confus parce que nous nous étions tous vraiment confortablement installés dans le truc avec Thin Lizzy, le son et la façon dont les chansons étaient écrites […], donc c’est un peu difficile de se sortir ce style de la tête et penser autrement. Mais je pense que nous l’avons fait maintenant. »

Apparemment, vous vous êtes éclatés à enregistrer l’album, alors que souvent, les musiciens trouvent le processus d’enregistrement très exigeant et stressant…

Bon, nous avons passé de bons moments mais ça reste exigeant [petits rires]

Donc peux-tu nous décrire l’atmosphère de travail pour cet album ?

Nick est le genre de mec qui est toujours là en train d’appuyer sur ton interrupteur, qui veut toujours plus de ta part. Même lorsque tu ne veux pas en faire plus, ou même lorsque tu penses : « Je ne peux pas faire mieux que ça ! » « Ah, je crois que si ! Je pense que tu peux le faire. » Et ça t’use un peu. Mais un bon producteur va appuyer sur cet interrupteur et il obtiendra quelque chose de meilleur de ta part, que tu apprécies le processus ou pas. La plupart du temps, il est capable de faire ça pour toi, et après coup, tu es très reconnaissant. Sur le moment, tu es un peu furieux mais lorsque tu entends le produit fini, tu dis : « D’accord, ok, tu avais raison, j’avais tort… » Je pense que le seul problème que j’ai rencontré en enregistrant l’album était le fait que ce soit à Nashville au mois d’août. Il fait très chaud ! C’est très humide ! Il y a tellement de moustiques ! [Rires] C’est de la torture par la chaleur et les moustiques ! Mais c’est la seule autre chose. Les gens à Nashville sont très sympas. La nourriture est super là-bas. Il y a tout un tas de musiciens qui vivent à Nashville. Donc l’atmosphère est toujours très cool. Je dirais que peut-être il y a le mauvais côté que j’ai mentionné, mais les bons côtés prennent le dessus sur les mauvais côtés. Est-ce que j’ai bien tourné ça ? Disons qu’il y a un plus grand pourcentage de bons côtés que de mauvais côtés [petits rires].

D’après ce que Ricky raconte dans le premier trailer de l’album, lui et Damon Johnson ont écrit cet album ensemble.

La majorité, ouais.

En fait, étant le seul membre restant du Thin Lizzy original, on se serait attendu à ce que tu prennes un rôle plus important dans la composition. Donc, tu leur fais totalement confiance ?

Je leur fait totalement confiance ! Tu vois, la différence est que je vis à Londres et eux en Amérique. Donc c’est très difficile de se réunir. Les seules fois où je peux vraiment me retrouver avec eux, c’est lorsque nous sommes sur la route ou en studio. Donc, simplement, je les laisse faire. « Allez-y ! Les mecs, vous êtes sur une bonne lancée ! Vous faites ça très bien, donc continuez. Peu importe les chansons que vous avez, je leur apporterai mes trucs et j’incorporerai mes riffs, parties et solos, je mettrai ça là-dedans. » Je n’ai pas un énorme égo où tout doit tourner autour de moi. Ce n’est pas comme ça que je fonctionne. Ça n’a pas d’importance qui écrit la chanson, ce qui importe est à quel point la chanson est bonne.

Il y a une énergie positive inhérente à la musique de Thin Lizzy et maintenant celle de Black Star Riders. Est-ce votre but principal avec cette musique, transmettre de la force et de l’énergie à l’auditeur ?

Absolument ! Avec chaque album que tu fais, tu essaies de mettre le meilleur feeling possible sur tout, et d’y mettre de l’énergie. Je pense que si tu abordes la chose de façon paresseuse, ça sonnera paresseux et les gens diront : « Tu vois, c’est un album un peu mou. Je ne suis pas sûr d’aimer, il n’y a pas d’énergie positive. » Mais ça, lorsque tu es aux côtés de Ricky et Damon, ça ne peut pas arriver [rires] ! De même pour Jimmy [DeGrasso] et Robbie [Crane], ce sont tous des mecs plein de vivacité. Si je suis fatigué, j’ai chaud, je me suis fait piquer par des moustiques, je suis énervé, il y aura quelqu’un pour me remettre debout et me faire dire : « Ok, d’accord, allons jouer de la guitare, bordel, mec. » [Petits rires] Je ne peux pas rester énervé avec ces mecs. Et je pense que ça transparaît dans l’album ! Tout le monde était très positif là-dedans. Même les gars qui n’ont rien écrit pour l’album, ils étaient tellement à fond, c’était absurde ! Donc on s’est éclaté !

Donc cette énergie positive que l’on entend dans vos chansons reflète l’état d’esprit des gens dans le groupe…

Tu sais, tout le monde a ses moments [où l’on se sent moins bien]. Ce n’est toujours à fond « woohoo ! » Tu te retrouves sur une longue tournée et tu deviens fatigué, comme n’importe qui, mais parmi les cinq, il y a toujours quelques gars qui ont toujours la pêche pour maintenir le niveau d’énergie. Il y a trop de comiques dans ce groupe ! Tu passes la moitié du temps à rire des trucs stupides que les gens font, mais ce sont des trucs stupides positifs ; mais ça reste stupide. Tout le monde est positif dans ce groupe. Je pense que c’est la seule façon pour que ça fonctionne. Si tu es le mec négatif, et que tu es trop négatif, personne ne voudra traîner avec toi, tout le monde voudra t’éviter, et si tout le monde essaie de t’éviter, tu ne vas pas bien t’entendre avec tout le monde et tu ne resteras pas très longtemps dans le groupe.

Ricky a dit que le titre de l’album « fait référence au fait qu’il se passe tellement de choses dans le monde en ce moment, et nous sommes constamment bombardés d’information et la technologie est conçue pour rendre nos vies meilleures et plus faciles, mais pourtant nous n’avons pas la moindre idée d’où nous nous dirigeons en tant qu’espèce. C’est un peu une interrogation sur la façon dont nous gérons ça. » Du coup, comment toi, personnellement, tu gères ça ?

Eh bien, ce dont parle également la chanson, c’est que ton intimité est envahie, tes emails peuvent être piratés, ton compte en banque peut être piraté et tu ne peux rien y faire. S’ils veulent te pirater d’une façon ou d’une autre, ils réussiront. Aujourd’hui, si tu voyages à Londres, tu es photographié trois cent fois par jour, donc il n’y a plus de réelle intimité. C’est comme si tout le monde avait un poids sur les épaules. Tôt ou tard, et espérons le plus tard possible, ça t’affectera ! Et il n’y a pas moyen d’y échapper. Comment je gère ça ? Je n’utilise pas Facebook. Je n’utilise pas Instagram. Je ne fais rien de tout ça. Je me tiens à l’écart de tout ça. J’ai vu trop de gens avoir trop de problèmes à cause de tout ça, avec le piratage et les choses horribles que les gens peuvent dire ou faire. Donc je me tiens à distance. J’ai quelqu’un qui s’occupe de ma page Facebook à ma place et il m’appelle et dit : « Untel et untel ont demandé ça, qu’est-ce que tu veux que je leur réponde ? » Je lui dis : « Ok, bon, réponds de cette façon. » Mais je n’irai pas là-dessus, avoir une discussion, etc. Car il y a trop de gens mal intentionnés qui essaient d’être [il fait une expression à la fois vicieuse et stupide] : « Voyons voir ce qu’on peut faire avec Scott… » Je ne rentre pas dans ce jeu.

Est-ce que tu sens toujours très attaché à l’héritage de Thin Lizzy ou bien as-tu le sentiment qu’après trois albums, Black Star Riders est maintenant en train de faire son propre héritage ?

Ouais, surtout après ce troisième album, je pense que le groupe commence à vraiment voler de ses propres ailes. Le premier album, je dirais que, ouais, il sonnait un peu comme Thin Lizzy [rires], et j’ai essayé de le nier à l’époque mais en le réécoutant, ça ne fait aucun doute. Mais maintenant, c’est une autre histoire. Maintenant, trois ou quatre ans qui se sont écoulés, nous avons bien plus joué ensemble, nous avons écrit bien plus de chansons ensemble, nous savons vers quel style nous voulons nous diriger. Le premier album, surtout, était confus parce que nous nous étions tous vraiment confortablement installés dans le truc avec Thin Lizzy, le son et la façon dont les chansons étaient écrites, nous avons joué ces chansons partout dans le monde, donc c’est un peu difficile de se sortir ce style de la tête et penser autrement. Mais je pense que nous l’avons fait maintenant. Et probablement que si nous parvenons à un quatrième album, nous continuerons de nous en éloigner.

Ouais, on ressent l’évolution…

C’est le mot que je cherchais ! Evolution, ouais.

Interview réalisée en face à face le 30 novembre 2016 par Aline Meyer.
Fiche de questions : Philippe Sliwa.
Retranscription, traduction et introduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Robert John.

Site officiel de Black Star Riders : blackstarriders.com

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