Brainstorm profite de l’engouement retrouvé pour le heavy/power metal à l’ancienne, pratiquant une musique grandiloquente, inspirée par une mélancolie et un héroïsme au premier degré. Pourtant, malgré plus de trente ans de carrière, Brainstorm n’a pas toujours affiché la même conviction quant à sa musique. Après un relatif passage à vide, il a lentement remonté la pente jusqu’à un Midnight Ghost (2018) qui est alors apparu comme salvateur. Succès critique et commercial, l’opus renouait avec un Brainstorm confiant et déterminé à ne pas s’écarter de ce que les fidèles attendent : un heavy sans compromis et puissant qui respecte scrupuleusement ses codes. Le treizième opus, Wall Of Skulls, est de cette trempe, peut-être plus encore. Brainstorm a subi une cure d’amaigrissement et en revient à des compositions plus directes pour encore moins d’ambivalence.
Brainstorm doit relever le défi de la redite. Plus de trente ans consacrés au heavy implique nécessairement des répétitions et une difficulté pour trouver l’inspiration dans un registre aussi étriqué. Il résout en partie ce casse-tête en légitimant l’attente du « fan » quant à ce que devrait être sa musique. Si certaines formations mettent un point d’honneur à ne pas se préoccuper des attentes, Brainstorm se met au service de son public. Deux approches qui ont leur mérite. Quoi qu’il en soit, Brainstorm a profité de l’effet Midnight Ghost pour élever ses ambitions et réemployer Seeb Levermann aux manettes (invité à chanter sur « Turn Off The Light »). La pandémie a même « permis » au groupe de faire table rase de certains éléments pour parvenir à un résultat censé approcher l’idéal. « Chamber Thirteen » remplit son rôle d’introduction cinématographique avec ses cantiques religieux et ses pulsations solennelles avant de laisser place au lead de « Where Ravens Fly » et son riffing survitaminé. Brainstorm met un point d’honneur à présenter l’essentiel avec ce sens de l’immédiateté. Andy B. Franck ne tarde pas à prendre ses aises sur un refrain galvanisant et Brainstorm déroule sa composition sans se permettre d’artifices. « Escape The Silence » accentue les traits de ce « heavy traditionnel » en profitant de la brève participation de Peavy Wagner de Rage au chant sur le pont du morceau. En ce qui concerne ses développements, Brainstorm lève très rarement le pied : il en revient au refrain d’aérer le morceau et de l’ancrer dans la tête de l’auditeur. Un travail sur le chant explicite sur « I, The Deceiver » qui voit Andy B. Franck multiplier les accroches hybrides entre heavy, rock et parfois pop de manière inavouée.
Brainstorm fait néanmoins toujours confiance à son public pour tolérer certaines incartades, à l’image du power-rock de « Glory Disappears » où les couplets langoureux laissent place à des refrains glorieux en phase avec sa thématique. « End Of My Innocence », toujours dans un registre plus mid-tempo, se permet quant à lui certains arrangements hérités des eighties et met à l’honneur la ligne de basse, tandis que « Holding On » se voit agrémenté de claviers et chœurs qui exacerbent son cachet mélodique entêtant voire « tubesque ». Brainstorm se plaît à embrasser un rock qui délaisse les plages effrénées pour mettre en avant ses qualités de songwriting. Ses limites se ressentent surtout au sein d’une même composition qui peine à maintenir une intensité égale. « Solitude » souffre de couplets patauds, peu flatteurs pour le frontman, et de la comparaison avec l’énergie de son refrain. Brainstorm cultive certainement ce cachet authentique et en paye parfois le prix : le temps n’épargne personne.
Impossible de ne pas développer de l’affection pour ce Brainstorm retrouvé, trop heureux de continuer à faire partie de l’histoire du heavy metal. Wall Of Skulls est un exercice de maîtrise des codes et profite grandement de ce besoin de ne pas tergiverser. Impossible cependant de ne pas s’essouffler sur la durée et de se distinguer réellement, y compris au sein de la discographie du groupe. Brainstorm peut s’échiner autant qu’il le souhaite, il reste prisonnier de sa musique et de ce qu’elle lui dicte. Ce qui n’est pas nécessairement un mal ni une entrave au plaisir de l’écoute pour les amateurs. Il faut simplement accepter de l’avoir entendue des milliers de fois.
Clip vidéo de la nouvelle chanson « Glory Disappears » :
Lyric vidéo de la nouvelle chanson « Where Ravens Fly » :
Clip vidéo de la chanson « Escape The Silence » (avec Peavy Wagner de RAGE) :
Album Wall Of Skulls, sortie le 17 septembre 2021 via AFM Records. Disponible à l’achat ici