Bring Me The Horizon est en pleine mutation depuis son album Sempiternal sorti en 2013 et qui voyait le combo de Sheffield s’éloigner des codes habituels du metalcore, pour embrasser des éléments de rock alternatif et d’électronique. Et cet opus est un exemple même de virage bien négocié puisque c’est avec un beau succès qu’il a été reçu, même au-delà de la sphère des fans habituels de Bring Me The Horizon. Il n’est donc pas étonnant de les voir aujourd’hui aller beaucoup plus loin dans cette direction avec son nouvel album That’s The Spirit, presque totalement débarrassé de sa parure metalcore. Le groupe revient confiant, si bien qu’il a été jusqu’à produire l’album par lui-même, avec le chanteur Oli Sykes et le claviériste Jordan Fish aux manettes. Ce dernier est d’ailleurs désormais pleinement intégré au groupe, et sa contribution apparaît comme essentielle.
Nous avons eu l’occasion d’échanger sur tout ça avec le bassiste et membre fondateur Matt Kean. Voici, ci-après, ses propos rapportés découpés par thèmes.
« Aujourd’hui, nous faisons certainement enfin ressortir l’artiste qui a toujours été dans le groupe. »
A propos du succès de Sempiternal :
« Je n’en suis pas trop sûr. Je pense que tout ce que nous avons fait était de composer un album en lequel nous avions tous confiance. Je suppose que le succès vient du fait que d’autres gens sont raccord avec ce que nous aimons. Tu vois ce que je veux dire ? Mais tu ne peux pas vraiment affecter ton propre succès ; c’est à d’autres gens d’en décider. Mais c’était la première fois que nous avons reçu des retours vraiment, vraiment positifs de tout le monde. Nous avons donc un peu été pris de court. Nous nous disions : « Eh ben, c’est dingue ! » Beaucoup de gens pensaient que nous étions juste de jeunes gens qui essayaient de faire de la bonne musique mais ils trouvaient que nous n’étions pas très bons, mais après que nous ayons fait Sempiteral, je pense que ça en a forcé beaucoup à reconsidérer leur opinion : ‘En fait ces gars savent faire de la musique !’ Beaucoup de gens se sont retrouvés à aimer l’album, alors qu’ils ne le voulaient pas nécessairement ! Je crois qu’en termes d’objectif, nous voulons simplement être le meilleur groupe possible. Nous ne nous fixons jamais de but du type quelle salle on veut jouer, combien de CDs on veut vendre ou quoi que ce soit de ce genre. Le seul but que nous nous fixons, c’est juste d’être les meilleurs possible. Faire tout notre possible est ce qui nous rend heureux. Nous voulons que Bring Me The Horizon soit le meilleur possible. »
A propos de la conception du nouvel album That’s The Spirit :
« Nous étions en tournée en tête d’affiche en Amérique et Jordan et Oli ont commencé à composer une chanson, et puis ils nous l’ont jouée quelques jours plus tard. Et nous étions là : ‘Oh, cette chanson est géniale !’ Et nous avons continué à travailler dessus pour le reste de l’été. Et puis, cette chanson est devenue ‘Drown’. Ensuite nous avons voulu prendre la température auprès de nos fans, pour voir s’ils allaient nous suivre là-dessus. Nous l’avons sortie et elle a été très bien accueillie ! Ça nous a donc donné confiance en nos capacités en tant que compositeurs pour poursuivre ce que nous voulions faire. Et donc je pense que cette chanson nous a inspirés pour le reste de l’album. Lorsque nous composions, tout le monde savait que : ‘Ok, après le succès de Sempiternal, il faut vraiment, vraiment que nous travaillions dur sur ce prochain album parce qu’il faut faire mieux !’ Car tout le monde s’attendait… Certains s’attendaient à ce que nous fassions mieux et d’autres s’attendaient à ce que nous échouions. Nous avons donc assurément ressenti de la pression. Mais après peut-être six ou sept chansons, nous étions là : ‘Ok, on se débrouille pas mal là, continuons sur cette lancée !’ Pendant les sessions de composition de Sempiternal, Jordan Fish était un peu en marge du groupe, alors que cette fois-ci nous étions tous ensemble. Tout le monde savait quelle était sa place au sein du groupe et nous sommes partis de zéro. C’était donc beaucoup plus décontracté et facile cette fois-ci. Je pense que tout le monde a pu davantage faire valoir son opinion et le processus de composition était plus ouvert. C’était amusant. C’était stressant mais amusant. »
A propos de l’auto-production :
« Depuis que nous avons commencé, pour chaque album que nous avons fait, nous nous sommes toujours dit : ‘Oh, nous devrions le produire parce que c’est ce que tout le monde fait.’ Et la façon dont nous avons fonctionné, y compris dans le passé, surtout avec les deux derniers albums, Sempiternal et That’s The Spirit, c’est qu’avant d’aller en studio, nous avons fait des démos des deux albums. Nous avions donc déjà tout enregistré. Et, en gros, nous allions en studio pour enregistrer ça et, évidemment, expérimenter un peu. Du coup, nous n’avions pas vraiment besoin de producteur, car nous savions ce que nous voulions. Sur Sempiternal, nous avions Terry Date, et arrivés à la moitié du processus, nous étions là : ‘En fait, nous n’avons pas besoin de quelqu’un pour produire l’album, car nous avons déjà décidé comment nous voulons que les chansons sonnent et nous sommes contents de ce processus.’ Donc cette fois, lorsque nous sommes allés en studio, nous savions ce que nous voulions. Nous avions déjà tout enregistré en démo ; le CD était presque déjà enregistré. Nous y sommes juste allés pour le peaufiner. […] En fait, la première fois que nous avons enregistré avec Fredrick [Nordström, pour l’album Suicide Season (2008),] il n’était pas tellement présent. Nous l’avons pris pour le studio parce que nous étions très fans d’autres trucs qu’il a faits, et il est venu, je pense, genre le premier jour, il a tout installé et a paramétré notre son et puis il est parti. Il appelait toutes les semaines pour voir comment les choses se passaient mais il n’était pas tellement présent. Il était beaucoup plus présent pour There Is A Hell (2010) parce qu’évidemment, Suicide Season a bien marché et il voulait faire des améliorations. Je pense que nous sommes clairement obstinés. Une fois que nous avons composé les chansons, même si quelqu’un venait en disant ‘oh, peut-être devriez-vous changer ci ou ça’, nous étions là : ‘Non !’ Donc ça ne nous a jamais profité d’avoir un producteur. »
« Nous voulons juste être connus pour être bons. […] Nous voulons que les gens pensent que Bring Me The Horizon est un bon groupe. »
A propos de la musique sur That’s The Spirit :
« Je pense que si tu écoutes les parties électroniques sur l’album, c’est assez euphorique mais c’est aussi presque comme de la musique dance sombre, d’une certaine façon, avec les progressions d’accords et tout. Si tu écoutes les chansons, tu peux entendre de petits éléments dans presque chaque morceau sur l’album. Donc je pense que nous avons été influencés par plein de choses. Si tu es porté sur ce type de musique, je suis certain que tu accrocheras à certains passages en écoutant l’album. […] Oli a différentes couches de chant et joue avec différents sentiments. Car, évidemment, comme il a pu le dire, si tu ne fais que crier tout le temps, ça passera toujours pour de la colère. Alors que si tu écoutes That’s The Spirit, il y a des chansons qui ont bien plus de tristesse et puis d’autres qui sont joyeuses et lumineuses. Vocalement il peut faire les deux, donc nous sommes en super position pour pouvoir faire ça. […] Aujourd’hui, nous faisons certainement enfin ressortir l’artiste qui a toujours été dans le groupe. »
A propos du thème de l’album :
« De toute évidence, Oli avait ces problèmes avant et je pense que ce nouveau CD le voit se rétablir de ça, et parler de… Par exemple, tout le monde a de mauvaises pensées ou de mauvais jours et c’est juste une façon de surmonter ça. ‘That’s the spirit!’ (NDT : ‘c’est le bon esprit !’), les gens disent ça lorsque tu es un peu démoralisé [et qu’ils veulent t’encourager]. L’album parle à peu près de ça, le fait que l’on sache qu’à un moment donné tout le monde se sent démoralisé. C’est plus une question de trouver du positif lorsque ça ne va pas bien plutôt que de l’ignorer ; trouver le positif dans tout. Lorsque de mauvaises choses se produisent, il faut les affronter de façon positive. Dans la vie, tu te retrouves à un moment donné avec de mauvais côtés, même petits, comme lorsque tu vas au travail et qu’il se met à pleuvoir. Tu as une décision à prendre en toi au moment où ça part mal pour toi, sur la façon de voir les choses : soit tu es triste que les choses aillent mal, soit tu peux te relever et simplement dire ‘ok, ça ne va pas durer et je peux positiver.’ »
A propos de n’être « pas un simple groupe de metalcore, mais un groupe que n’importe qui peut aimer » :
« Je pense que le style est un peu rabaissé par certaines contraintes. Il y a plein de nouveaux groupes sympas qui sortent. Je ne suis pas sûr de ce qu’on peut appeler ou pas metalcore, mais je pense que lorsque les groupes commencent à expérimenter de diverses façons, c’est toujours une bonne chose pour la scène. Plus les groupes de metalcore expérimenteront et commenceront à ajouter de petits bouts venant d’autres styles de musique dans le metalcore, plus ce sera positif pour la scène. Je ne pense pas que ce soit important [de plaire à autant de gens que possible] mais nous voulons clairement que les gens nous aiment. Evidemment, le fait que des gens nous aiment, c’est super pour nous. Mais nous voulons juste être connus pour être bons. Tu vois ce que je veux dire ? Nous voulons que les gens pensent que Bring Me The Horizon est un bon groupe. […] [Les fans de metal] ne préféreraient-ils pas que des groupes comme nous ou Linkin Park ou n’importe qui dans le genre se retrouvent dans les charts plutôt que la musique pop et tous ces artistes mainstream comme, je ne sais pas, disons, Justin Bieber ou peu importe ? Je trouve que c’est quelque chose de très positif pour nous d’être dans les charts. Peut-être que quelqu’un qui normalement n’écouterait pas de la musique heavy se mettra à en écouter, puis reviendra en arrière et découvrira d’autres groupes de metal, et peut-être qu’il montera lui-même un groupe. Il est évident que, de cette façon, ça prend de l’importance. »
Interview réalisée par téléphone le 3 septembre 2015 par Nicolas Gricourt.
Fiche de questions : Philippe Sliwa.
Retranscription et traduction : Nicolas Gricourt.
Site officiel de Bring Me The Horizon : www.bmthofficial.com.
Esprit positif pour une musique de merde, sympas. Me manque les Sempiternal, Count your Blessings et consort, à l’époque où ce groupe savait faire des trucs très bons.
Franchement, je trouve que ce nouvel album est génial. Néanmoins, mon préféré reste encore et toujours Suicide Season ~
Niveau paroles, il n’y a rien à redire ~ Pour ce qui est de l’instru’, bah oui, ils font plus de metalcore les BMTH ~
Ça fait un bon moment que j’écoute ce groupe, et ça fait un bon moment que je vois des critiques de « metaleux puriste » envers ce groupe. Et vraiment, je trouve cela affligeant de la part de ces personnes, on est libre de ne pas aimer, mais dans ces cas là, c’est comme pour tout : Soit tu fais un avis constructif, soit tu la fermes et tu passes ton chemin ~
Etant donné que dans le monde du metal, on est censés être ouverts d’esprit, ça m’énerve au plus haut point de voir à quel point certaines personnes ne le sont pas ~.
C’est un problème récurrent, ça : certains n’écoutent pas un album pour ce qu’il est mais pour ce qu’ils voudraient qu’il soit. Frustrés et déçus, ils se mettent alors à râler. Ça devient gênant quand c’est dans des reviews (mais celles de RM ne font jamais ça ♥) : on se retrouve à devoir faire le tri pour vraiment savoir ce que l’album vaut. Ça m’a l’air fréquent sur le black atmosphérique et compagnie, avec des « C’est pas assez black ! » puérils.
Bref, le problème n’est ptet pas dans l’ouverture d’esprit proprement dite mais dans la rancœur et la frustration, au moins pour certains.