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Interview   

Carcariass dans le monde d’après


Groupe culte de la scène death française depuis 1991, Carcariass n’est pourtant plus véritablement le même depuis quelques années… Le combo s’est refait une petite beauté et a rafraîchi sa dynamique et sa musique, avec désormais cinq membres sur les planches, dont un chanteur permanent. Exit donc le trio de death technique aux compositions principalement instrumentales, voici depuis Planet Chaos un groupe plus mélodique et accessible, avec une ouverture encore plus assumée sur Afterworld. Changer de mode opératoire n’a rien d’évident pour un groupe avec une si longue carrière, mais il faut bien affirmer que ce Carcariass version 2020 leur correspond bien au vu de la qualité de ce Afterworld qui franchit un pas et qui a des arguments solides pour s’adresser à un autre public. Après une période de trêve propre à l’histoire du groupe et la pause forcée provoquée par la pandémie, Carcariass revient plus en forme que jamais.

Cette évolution naturelle, le batteur Bertrand Simonin présent depuis les débuts du groupe y revient avec nous. Il évoque une certaine lassitude des productions trop brutales, démonstratives et techniques qui sont peut-être des déclencheurs de ce virage musical et de la nouvelle couleur de Carcariass aujourd’hui. Entre quelques anecdotes sur le passage au Hellfest, le rapport du groupe à la science-fiction et quelques réflexions sur la force de l’âge, Bebert nous dresse le tableau du Carcariass d’aujourd’hui dans cet entretien.

« Côté carrière, nous sommes un peu blasés des musiques trop démonstratives – sans méchanceté aucune vis-à-vis des groupes qui jouent un style de musique plus brutal, plus rapide ou plus technique que nous – et naturellement, nous allons vers un style de musique qui nous plaît. »

Radio Metal : Cette fois-ci, il n’y a pas eu six ans qui ont séparé les deux albums, Planet Chaos et Afterworld, comme pour le précédent cycle, mais « seulement » quatre ans. C’est vrai que Rafael nous avait expliqué, la dernière fois, que vous aviez des familles qui s’agrandissaient à ce moment-là, qu’il y avait pas mal de mouvements de vie à ce moment-là, que ça a forcément pris du temps. Toi aussi, t’étais à l’époque dans Mindwarp. Est-ce que la pose mondiale forcée à cause de la pandémie vous a profité pour que vous fassiez un album un peu plus rapidement ?

Bertrand Simonin (batterie) : Oui, effectivement. Grâce aux Chinois, nous avons dû annuler tous nos concerts et nous consacrer à l’élaboration d’un nouvel album. Merci le Covid-19 pour ça. Effectivement, nous avions pas mal de concerts prévus à la sortie du dernier album Planet Chaos et finalement, il y a eu quelques reports mais la plupart des concerts ont été annulés. Les festivals auxquels nous devions jouer ont même capoté, donc ils n’existaient plus. C’est vrai que nous avons pris une petite douche froide parce que nous pensions faire une promotion. Nous avions bien envie de jouer ce nouvel album en concert, et puis du coup, nous n’avons rien pu faire pendant deux ans. Mais nous n’avons pas perdu de temps. Pascal a composé une dizaine de nouveaux morceaux. Nous en avons profité pour partir en studio, les enregistrer, et nous voilà de nouveau avec un nouvel album.

Vous êtes aussi sur une nouvelle dynamique depuis 2019 avec votre nouveau chanteur. Est-ce que le fait de ne plus évoluer à trois comme avant, et d’être jusqu’à cinq sur le live, insuffle forcément une créativité et une productivité nouvelles pour vous ? Ou est-ce que pour toi, finalement, il n’y a pas tant de rapport que ça ?

Au niveau composition, on va dire, il n’y a pas vraiment de changement. C’est toujours Pascal, qui est à l’origine du groupe et qui compose toute la musique de Carcariass. Lorsqu’il compose, il m’envoie la musique, je place la batterie dessus et nous validons ensemble si cela convient ou pas. Ensuite, nous plaçons les lignes de chant. Jérôme arrive avec ses textes et ses idées au niveau du chant, puis nous enregistrons tout ça au studio et nous sortons le petit bébé. Jérôme, qui a rejoint le groupe pour Planet Chaos, a apporté sa touche en tant que chanteur à cent pour cent puisque précédemment, Rafaël faisait la basse et le chant. Il y a déjà eu une évolution. Il y en a qui préfèrent les chants plus classiques mais Jérôme a quand même un répertoire permettant de diversifier beaucoup plus le chant dans Carcariass, et c’est une chose que nous recherchions. La musique évoluant, nous souhaitions faire évoluer le chant avec. Puis il y a la cinquième personne, Bob, qui a rejoint le groupe en tant que guitare rythmique. C’est un appui supplémentaire en concert, qui permet de jouer la quasi-totalité des morceaux. A une époque, avec une seule guitare en concert, il y a des morceaux qui ne pouvaient pas être joués puisque ça faisait un peu trop vide. On avait un solo avec une partie rythmique absente, donc certains morceaux perdaient leur sens à une seule guitare.

Vu que c’est Jérôme qui écrit maintenant les textes, est-ce qu’il est complétement libre sur les thèmes ou faut-il qu’il suive la ligne passée de Carcariass ?

Jérôme est assez libre au niveau des textes. Après, Pascal est passionné de tout ce qui est science-fiction, donc nous aimons bien encore les textes qui se rapprochent de ce milieu-là. Mais il arrive qu’il y ait des chansons qui puissent être en rapport avec une expérience vécue et qui font qu’une chanson puisse parler d’un sujet divers et varié, et qui n’a peut-être plus rien à voir avec la science-fiction. Globalement, ça reste quand même très science-fiction, ambiance Terminator, Alien, futuriste, avec une image plutôt apocalyptique.

Ce qui va sauter instantanément aux oreilles dans Afterworld, c’est son ouverture musicale vers des choses encore bien plus mélodiques et plus heavy. Vous avez en réalité poursuivi ce qui était déjà entamé sur le précédent album. Aviez-vous un désir d’accessibilité, de toucher un public plus large ?

Non, je ne pense pas. Il n’y a pas de réflexion particulière. C’est une évolution qui vient un peu instinctivement. Après, côté carrière, nous sommes un peu blasés des musiques trop démonstratives – sans méchanceté aucune vis-à-vis des groupes qui jouent un style de musique plus brutal, plus rapide ou plus technique que nous – et naturellement, nous allons vers un style de musique qui nous plaît. Nous ne cherchons pas à plaire plus, ça vient de manière instantanée. En tant que batteur, tout ce qui est blast beat et tout, je suis content de voir des batteurs en faire, mais de mon côté, je me suis calmé. Même des gros nappages de double grosse caisse, j’en fais de moins en moins qu’avant. Nous évoluons. J’aime bien écouter des choses plus simples, qui me reposent. C’est peut-être l’âge. C’est par périodes. Peut-être que le prochain album sera ultra-brutal, je n’en sais rien. Peut-être que l’ambiance aussi, avec le Covid-19, cette pandémie, cette période un peu de dépression, a pu influencer la composition, l’état d’esprit dans lequel on compose à un moment donné. Mais ça, il faudrait plus le demander à Pascal, parce que c’est quand même lui le compositeur et lui qui peut donner son point de vue par rapport à ça.

D’un autre côté, est-ce que ton expérience dans ton ancien groupe ne fait pas aussi que tu as voulu aller sur d’autres chose avec Carcariass ?

Non, je pense que Carcariass évolue sans suivre une mode ou subir une contrainte particulière. Ce sont les goûts qui évoluent et ça se ressent sur la composition finale. Par rapport au groupe dont tu parlais, Mindwarp, c’est un groupe que nous avions rejoint, Pascal en premier, en parallèle de Carcariass à l’époque où nous ne faisions plus de concert avec Carcariass. Sur l’album de Mindwarp, on ressent la touche Carcariass, mais c’était un aparté.

« C’est vrai que ce sont deux Carcariass différents, le trio et aujourd’hui celui à cinq. Peut-être que les vieux de la vieille qui aimaient les anciens albums de Carcariass vont être déçus. En tout cas, nous trouvons cette évolution positive et c’est celle que nous souhaitons garder. »

Tu évoques un côté un petit peu blasé par rapport au death tech, au blast, etc. Qu’est-ce qui te fait vibrer aujourd’hui en termes de death metal ?

Il faut dire que je n’écoute plus tellement de brutal, mais si on doit parler de brutal death metal, j’ai été assez impressionné ces derniers temps par Archspire. J’étais assez bluffé par rapport à la dextérité de la batterie et du chant. J’ai trouvé ça original. J’ai aussi bien aimé Cattle Decapitation. Ce sont les deux groupes qui me viennent, je n’en ai pas d’autres. C’est à peu près tout. C’est faible mais c’est comme ça ! [Rires]

Le résultat de cette ouverture est que vous avez des titres qui sont assez immédiats, qui sont taillés pour être un peu des tubes, avec notamment « No Aftermath » que vous avez présenté en clip…

Je ne sais pas. Aujourd’hui, c’est dur d’avoir le recul. Nous apprécions tous les titres, mais de là à dire si tel titre va plus plaire ou pas, c’est difficile. C’est dur d’avoir le recul quand tu es compositeur, ensuite en tant que batteur quand tu enregistres un morceau, de savoir si celui-ci va plaire ou pas. La recette miracle ? C’est difficile… On verra ce que nous réserve l’avenir. Il est vrai que ce titre-là en studio, nous le trouvions très accrocheur. La batterie est ultra-simple, la mélodie est accrocheuse, le chant est bien posé et accrocheur. C’est très fluide, la mélodie est facile à retenir. C’est sûr que ça accroche. De là à ce que ça plaise, on verra, mais c’est un morceau qui est facile à écouter. Il n’y a pas besoin d’avoir une culture du metal pour pouvoir apprécier ce genre de morceau.

Tu as déjà un peu abordé ça, mais as-tu l’impression que pour ce nouvel album, il y a eu une bien plus grande liberté artistique, que quelque chose s’est débridé, ou dirais-tu que vous avez toujours eu une liberté artistique ?

Je pense qu’il y a juste eu une amélioration au fil des albums. Nous évoluons. Pascal évolue dans ses compositions, s’améliore en permanence. Il joue énormément chez lui, donc il a beaucoup d’idées et il nous fait tous évoluer. Après, nous suivons le mouvement. Jérôme s’est bien appliqué aussi sur ce nouvel album au niveau du chant. Il a fait des belles propositions par rapport à sa façon de chanter, certains refrains, certains couplets. Et après, il s‘agissait de faire en sorte que ça nous plaise tout d’abord à nous, puis, une fois que ça nous plaît et que nous validons tous, nous sommes partis pour enregistrer et ça donne le résultat actuel.

Vous avez la même équipe technique qu’avec Planet Chaos. On a Drop de Samael pour le mix, Jens Bogren au mastering, le studio Headsplit Design pour l’artwork. C’était voulu de marquer une certaine continuité, de montrer au public qu’il y a une nouvelle ère ?

Déjà, nous étions très contents de travailler avec Drop, un des guitaristes de Samael. L’avantage est que son studio n’est pas très loin de là où habite Pascal. Ça facilite quand même beaucoup de choses. Idem pour Jérôme qui n’habite pas très loin. Déjà pour des raisons pratiques et financières, c’est quand même bien. L’avantage, Drop étant le fondateur du groupe Sybreed et étant dans Samael, lorsque l’on parle metal, de son, nous sommes tous sur la même longueur d’onde. Nous gagnons beaucoup de temps. Et c’est vrai que le travail qu’il avait fait sur Planet Chaos nous avait bien plu. Il est très impliqué, il a de très bons conseils, il s’investit énormément. Pour nous, c’était clair, le nouvel album, nous allions le refaire avec lui.

Il y a d’ailleurs un petit côté presque indus sur l’album par moments. Je pense surtout au titre « Angst », peut-être dans la façon dont le chant est posé…

« Angst », c’est vrai. C’est vraiment Jérôme qui a proposé de poser le chant comme ça. Au fil des écoutes en studio, nous avons trouvé que c’était vraiment intéressant. Ça change du côté du chant death classique. C’est une chanson qui est vraiment chantée de A à Z. C’est une chanson qui dénote complètement des autres, même au niveau des paroles qui parlent d’un sujet complément différent de ce que nous pouvions aborder habituellement. Elle est différente mais elle a sa place dans l’album.

Depuis que vous êtes dans cette nouvelle configuration, on a l’impression qu’il y a une réelle séparation avec le Carcariass d’avant. J’ai pu vous voir à deux reprises en 2017 au Hellfest où vous étiez en trio et au Lions Metal Fest l’année dernière. C’est beaucoup moins froid dans l’approche, même si ça reste du death metal. Il y a une chaleur, un côté très avenant, très fédérateur…

Oui, c’est vrai. Disons que le trio d’origine est toujours là. La différence est que la touche de Jérôme au chant fait qu’il y a déjà une évolution dans les sonorités. Et puis, quand il y a deux guitares, ça change tout. Quand d’un coup la guitare rythmique passe en solo et que derrière, il y a juste la basse qui appuie, musicalement, ça fait une baisse sonore non négligeable, ça casse un peu l’ambiance. Par rapport à notre prestation du Hellfest, il faut dire aussi que nous n’avions pas rejoué depuis une dizaine d’années. Nous avions fait deux ou trois concerts avant et nous nous retrouvons à jouer sur la scène du Hellfest, donc nous étions un petit peu rouillés. C’est vrai que la dernière fois, au Lions Metal Festival, il y avait déjà quelques concerts de réalisés. Nous avons joué de nouveaux morceaux de Planet Chaos, avec cet appui en deuxième guitare et Jérôme qui a également une prestance en chantant. C’est vrai que ce sont deux Carcariass différents, le trio et aujourd’hui celui à cinq. Peut-être que les vieux de la vieille qui aimaient les anciens albums de Carcariass vont être déçus. En tout cas, nous trouvons cette évolution positive et c’est celle que nous souhaitons garder. Aujourd’hui, l’avenir de Carcariass est d’être à cinq sur scène comme actuellement et cette composition nous va parfaitement.

« On va dire que la musique reste une échappatoire mais, dans certains cas, les paroles vont se rapprocher de la réalité parce que, justement, nous abordons des sujets qui, malheureusement, deviennent tout à coup d’actualité. »

Vous n’étiez pas satisfaits de votre prestation au Hellfest ?

Non, c’est vrai, nous avions un peu le trac. Ça faisait longtemps que nous n’avions pas joué. Nous avions joué avant de venir dans des petites salles de cent ou deux cents personnes et, d’un coup, nous nous sommes retrouvés devant dix mille, ça calme, même si nous étions très heureux d’y participer. On se dit qu’on ne peut pas faire les cons, donc nous étions trop concentrés, et en étant trop concentré, on n’est pas si naturel. On essaye de pas faire de conneries et on est donc un peu moins à l’aise, et peut-être que ça se ressent. Sans doute que le public ne l’a pas remarqué parce qu’avec le brouhaha musical et l’ambiance du Hellfest, on n’est peut-être pas à chercher les petits détails, mais c’est vrai qu’à la fin du concert, nous nous sommes dit : « Merde, il y a deux-trois conneries ». C’est comme ça. Et puis nous avons eu des petits couacs. Ça n’arrive jamais, mais à un moment donné, Pascal a une corde qui a pété au début d’un morceau, donc ça te met un coup au moral. Même s’il y a une guitare de préparée, tu perds dix ou vingt secondes. Quand il n’y a qu’une guitare, tout de suite, ça casse le concert. Quand tu as la deuxième guitare qui est là, ce n’est pas grave, elle peut appuyer le temps de changer de guitare, mais là, tu es en guitare-basse-batterie, et d’un coup, il n’y a plus la guitare, tu es plus qu’en basse-batterie, ça fait un vide ! Ce sont des petits détails, mais quand tu es sur scène, des fois, tu le vis un peu difficilement, mais ça fait partie du jeu.

La dernière fois, Rafaël nous disait que le chant n’était pas au premier plan sur la musique de Carcariass parce qu’il y a pas mal de titres instrumentaux. Il y en a toujours sur ce dernier album mais le chant n’a jamais été aussi présent. Est-ce que vous avez changé de discours ou de paradigme par rapport à ça ?

Nous n’avons pas vraiment de ligne directrice. Nous ne nous disons pas qu’il faudrait mettre plus ou moins de chant. Là, c’est beaucoup de morceaux qui se prêtaient à pouvoir mettre du chant. Il y a aussi Jérôme qui a fait ses propositions. C’est vrai que le chant est plus présent. Il n’y a que deux instrumentaux et il y a des parties instrumentales au sein même de certaines chansons chantées, mais nous sommes un peu moins instrumentaux que sur l’album précédent. Il faut dire que l’album précédent s’est préparé sur cinq-six ans – ça faisait un moment que Pascal cumulait des compositions – et lorsque nous avons eu l’opportunité de sortir l’album précédent, nous en avons profité pour sortir tous les morceaux. Nous aurions presque pu faire deux albums en un avec l’album précédent. Je crois qu’on atteint presque les soixante-quinze minutes. Et maintenant, pour Afterworld, tout est entièrement neuf. Ce sont toutes des compositions qui ont été réalisées après Planet Chaos.

Jérôme a-t-il exprimé une volonté d’avoir un rôle un peu plus au premier plan dans votre musique ?

Non, il n’a pas fait de remarque particulière par rapport à ça. C’est vraiment de manière naturelle que Jérôme place le chant. On est des potes avant tout, il y a des échanges constructifs. Jérôme dit que là, il verrait bien du chant et, après, Pascal valide en disant : « Oui, effectivement, là effectivement il faut mettre du chant » ou « Non, là je ne verrais pas de chant. » La décision est entre Pascal et Jérôme, entre le compositeur et l’auteur. C’est eux qui font leur soupe, en totale amitié.

On a l’impression aussi qu’l y a une volonté d’accentuer la compréhension des paroles, qui sont de plus en plus intelligibles…

Oui, Jérôme a une façon de chanter qui fait que l’on comprend très bien les paroles, donc un effort a été fait sur l’écriture. Jérôme a écrit les textes, et les sujets sont peut-être plus matures. Au début de Carcariass, nous étions dans notre période très death metal avec un chant guttural. On ne va pas dire que les paroles étaient secondaires, mais déjà, pour comprendre ce que disait Rafaël à l’époque, c’était un peu difficile. C’était la musique avant tout. C’était du death metal mais le chant était un peu secondaire. C’était une voix grave, point barre. Aujourd’hui, c’est complètement différent, c’est du chant chanté. Il y a des passages qui peuvent faire death metal mais il y a aussi du chant qui pourrait être associé à un tout autre style de metal.

« Je me rappelle les premiers albums d’Iron Maiden, notamment les grands passages instrumentaux, quand j’étais petit et que j’écoutais ça au casque dans ma chambre, je voyageais. J’avais l’impression que j’étais dans un monde parallèle. Et les instrumentaux dans Carcariass, c’est un peu l’état d’esprit : on voyage. »

Comme tu le disais, vous êtes toujours tournés vers des histoires de science-fiction et un côté un peu post-apocalyptique, mais n’y a-t-il pas aujourd’hui une dimension peut-être un peu plus « réelle » dans vos textes ou est-ce que c’est la réalité qui rattrape la fiction ? Je pense par exemple au titre « Identity » qui parle de la liberté par rapport à son propre corps, or ce sont des questions qui sont assez actuelles et même discutées dans le droit.

Oui, c’est évident. Notamment dans « Identity », le sujet, c’est un peu : « Comment définir l’identité d’une personne dans un futur où on change de corps comme de chemise ? » C’est un peu l’inspiration d’une série qui s’appelait Altered Carbon. En tout cas, oui, certaines paroles de textes peuvent se rapprocher de la réalité. Notamment dans « No Aftermath », lorsque ce morceau a été composé, c’était avant la guerre entre la Russie et l’Ukraine, et finalement, ce sont des paroles qui pourraient très bien s’adapter dans la dénonciation de la guerre permanente, toujours et sans fin, cette espèce de machine à broyer perpétuelle. Nous aurions très bien pu faire un clip en mettant les images de ce qu’on peut voir à la télévision, que ce soit la guerre en Ukraine ou ailleurs. Après, ça se fait comme ça. Je pense que nous ne sommes pas là pour faire passer un message. Nous ne faisons pas de la politique, nous ne sommes pas dans la religion ou quoi que ce soit. Nous faisons des textes qui parlent de l’actualité, mais chacun peut les adapter à sa manière ou faire une comparaison avec une actualité qu’il a vécue.

Dans les sujets très actuels, on parle beaucoup de ChatGPT. Est-ce que l’évolution de la technologie est quelque chose qui vous intéresse et vous interroge ?

Oui, ce sont des sujets qui nous intéressent. Dans l’album précédent, je crois que c’était « Genetic Conformity » qui abordait ces sujets d’intelligence artificielle. C’est sûr que l’actualité influence les textes, donc les sujets et les thèmes de l’album, même si, de manière générale, nous tendons à voyager un peu, à essayer d’être en dehors de tout ce qui se passe dans le monde pour que la musique reste une échappatoire. On va dire que la musique reste une échappatoire mais, dans certains cas, les paroles vont se rapprocher de la réalité parce que, justement, nous abordons des sujets qui, malheureusement, deviennent tout à coup d’actualité. Après, on est tous pareils. La technologie pour faire des choses positives, comme soigner des gens, c’est bien, mais quand c’est mis entre les mains de gens peu scrupuleux, qui font n’importe quoi, c’est sûr que ça peut inquiéter, c’est comme le nucléaire, comme beaucoup de choses. Il y a plein de sujets qui peuvent être inquiétants, comme l’intelligence artificielle. Ça peut apporter des choses positives mais aussi des choses négatives. C’est un peu le sujet du film Terminator. Au début, il y a des robots pour assister l’être humain. On leur fait faire les tâches difficiles plutôt que les êtres humains aient à le faire. Et puis, au final, le robot devient plus intelligent et prend le dessus. Ce sont des sujets qui peuvent inquiéter. Après, personnellement, je ne me pose plus trop de questions, parce qu’à une époque, j’étais peut-être un peu plus révolté que maintenant. Maintenant, si je me mets à critiquer, je vais commencer à ressembler aux vieux qui disent : « De mon temps c’était mieux ! Les fruits avaient du goût ! »

On rappelle que Carcariass a plus de trente ans quand même !

C’est vrai que le temps passe et on passe avec. J’ai toujours un côté un peu révolté sur certains sujets, mais encore une fois, chez Carcariass, nous avons toujours été discrets. Nous ne voulons pas nous mettre mal avec qui que ce soit en ayant des propos qui pourraient blesser. Nous avons déjà peu de fans, alors si nous en blessons certains avec certains sujets… Du coup, nous essayons de rester assez neutres. Nous sommes trop cons pour pouvoir avoir un avis sur quoi que ce soit.

Tu disais que Carcariass était aussi une musique qui veut faire voyager et s’évader, parce qu’avant tout ça, on parle de musique…

C’est ça, notamment les instrumentaux. Les instrumentales, tu écoutes une musique et tu imagines que tu voyages. Je me rappelle les premiers albums d’Iron Maiden, notamment les grands passages instrumentaux, quand j’étais petit et que j’écoutais ça au casque dans ma chambre, je voyageais. J’avais l’impression que j’étais dans un monde parallèle. Et les instrumentaux dans Carcariass, c’est un peu l’état d’esprit : on voyage. En voyant la pochette ou en lisant le titre, peut-être que l’auditeur s’imagine un monde parallèle, ce côté science-fiction.

J’allais justement te parler de l’artwork qui est très chaud au niveau des couleurs et qui dessine un monde, encore une fois, post-apocalyptique. Avez-vous posé des consignes particulières ?

C’est Pascal qui savait vraiment exactement ce qu’il voulait. Des fois, nous avons du mal à trouver un sujet de pochette, même si sur les dernières, ça tourne toujours autour de la science-fiction. Là, Pascal a dit : « Je voudrais un truc assez épuré, une ville un peu moderne détruite. » Nous avons donné le sujet à Remy [Cooper], alias Headsplit. Il nous a fait deux-trois propositions et au final, nous sommes tombés là-dessus, ce qui nous a bien plu.

Vous avez choisi de sortir l’album en indépendant, avec une distribution physique chez Season Of Mist. Vous n’êtes plus affiliés à un label. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Pour des raisons de simplification, parce qu’on s’aperçoit qu’aujourd’hui, pour un groupe, la distribution numérique est très simple. Un groupe met ses morceaux et ils sont diffusés partout sur toutes les plateformes, sur Spotify, YouTube, Deezer, etc. Pourquoi passer par un label qui va se servir au passage ? Le problème est plutôt la distribution physique de l’album. En discutant avec Season Of Mist qui nous distribuait déjà via Great Dane Records, ils nous ont dit : « Ecoutez, on veut bien distribuer l’album en direct », donc nous avons dit « ok ». Voilà où nous en sommes. Season distribue mondialement l’album. Je dis « mondialement », mais je pense qu’il sera distribué essentiellement dans la France et les pays limitrophes. Après, il y a toujours les moyens de vente par correspondance via Bandcamp pi, l’e-shop de Season Of Mist. Et nous faisons la promotion nous-mêmes. Nous gérons tout nous-mêmes. On va voir ce que ça donne, mais pour l’instant ça a l’air d’aller.

Est-ce que vous avez des plans en termes de live qui sont déjà établis, des projets pour porter cet album, que ce soit en salle ou sur des festivals ?

Nous avons quelques touches. Je ne peux pas les évoquer tant que nous ne les avons pas annoncées. Ce qui s’est passé, c’est que nous pensions que les festivals où nous devions jouer, nos prestations qui ont été annulées pendant le Covid-19, pourraient être reportés, mais il y a tellement de groupes qui n’ont pas pu jouer pendant ces deux dernières années, on voit qu’il y a une saturation dans les programmations. Nous n’avons pas été prioritaires sur certains festivals ou concerts, donc ce sera certainement plus sur fin 2023-2024. A part quelques petits concerts, nous n’avons pas grand-chose. C’est bien triste, mais c’est comme ça.

Interview réalisée par téléphone le 23 février 2023 par Jean-Florian Garel.
Retranscription : Julie Dubreuil.
Photos : Philippe Déléage.

Site officiel de Carcariass: carcariass.com

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  • Content que ce groupe existe toujours ! Une pépite ce nouvel album !

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  • Stéphane dit :

    Fan depuis le début de ce groupe ! Musicalement et humainement ces gars sont cool ! Afterworld est déjà culte, dans la Lignée de Killing Process et Planet Chaos ! Bravo les gars ! On ne vous voit pas assez souvent sur scène ou dans les grands festivals ? à quand au Motocultor ? Hell Fest ? Sylak ? S’il vous plait des concerts !!!

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