Encore ? Quelle surprise d’apprendre que Cradle Of Filth nous prévoit déjà un petit frère à Darkly, Darkly, Venus Aversa sorti en 2010. En effet, souvenez vous, en avril dernier Dani Filth, frontman emblématique du groupe, postait sur son blog personnel le message suivant : « Nous nous préparons à débuter l’enregistrement de notre dixième album studio qui n’a pas encore de nom (même si plusieurs titres flottent dans l’éther, la plupart d’entre eux sont ridicules, quelques uns collent un peu mieux…). […] Pour le moment, nous avons enregistré 9 démos (avec deux dernières qui sont sur leurs talons dans les prochaines semaines) qui sonnent toutes fabuleusement tordues, même si c’est difficile de décrire exactement avec des mots comment cet album sonne sans que cela crée quelque confusion dans l’attente générale. […] C’est rapide, innovant, mélodique, brutal et sans aucun compromis, TRÈS cinématique (il y a une notable montée de l’orchestral grâce à Martin [Skaroupka, batteur] qui a œuvré au côté de Paul [Allender, guitare] dans sa fiévreuse écriture des chansons, en même temps que sur les pistes de batterie, qui sont, pour le moins, stupéfiantes…), romantique, nécromantique, colérique et réflexif. Putain, c’est un nouvel album de Cradle Of Filth et un sacré bon sang de bon album si les seules démos sont déjà un avant-goût de la tempête à venir. L’album en lui-même n’est pas un concept-album cette fois […] mais un bestiaire de chansons tournant en orbite autour du thème de la chimère (…) avec une date de sortie prévue pour Halloween et la date du 25 avril qui approche à grands pas pour l’entrée en studios où nous serons enfermés pour achever ce travail de mammouth. .»

Sceptiques, nous l’étions, car au vu des derniers efforts du groupe, il semblerait que l’alchimie pré-Midian (2000) soit perdue. Alors quand Dani Filth annonce que le nouvel et dixième opus du groupe est en phase de mixage il est impossible de ne pas nous dire « encore ? »

Cradle Of Filth n’a certes jamais mis plus de deux ans avant de produire du nouveau contenu (CD, compilations, lives) avec une régularité métronomique afin de satisfaire les fans. Là n’est donc pas la surprise, inutile de jouer les étonnés. Cependant, là où la curiosité peut se retrouver attisée c’est lorsque le groupe offre en l’espace d’une même année deux nouveaux albums dont un franchement dispensable. Midnight In The Labyrinth, sorti le 21 avril dernier, est un double album dont le premier disque comprend des versions de plusieurs vieux morceaux narrés par Dani Filth et le second uniquement composé des versions orchestrales et symphoniques de ces mêmes titres. Était-ce vraiment utile ?

Il paraît bien improbable au vu de la tournure qu’a pris la carrière du groupe que l’on entende quelque chose similaire à un Midian ou à l’un de ses prédécesseurs. Bien entendu, il n’y aurait aucun plaisir à entendre un album identique à son prédécesseur, et ce, sur vingt ans de carrière, mais, force est de constater que les Nymphetamine, Thornography ou autres Darkly, Darkly, Venus Aversa ont moins convaincu que les premières heures du groupe. Alors : fatigue, lassitude, manque d’inspiration ou tout simplement précipitation ?

Semblant céder bien trop facilement à la moindre bribe d’inspiration, la bande de Dani Filth (qui n’a jamais cessé de se remodeler au fil des ans) semble malgré tout plus proche de la précipitation que de la réflexion. Et nous ne parlons pas là de spontanéité mais bel et bien d’un minimum de recul nécessaire à n’importe quel artiste. La critique facile place Cradle comme étant un groupe devenu commercial, ayant en quelque sorte perdu les saintes valeurs du metal extrême. Ce qui est défendable, tant le groupe semble s’appliquer à matraquer ses fans de contenus, de produits commerciaux (dans le sens premier du terme) et à enchaîner les albums en oubliant – peut-être ? – de s’appliquer à leur qualité. L’annonce de cette doublette n’est par conséquent pas plus rassurante. Alors, il est toujours possible d’espérer un réveil. Mais pour qu’il s’opère, le groupe aurait certainement besoin de prendre un peu de temps. Pour lui et pour l’auditeur qui peut finir par se lasser de cette cadence infernale peu productive.