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Interview   

Danko Jones : beaucoup de bruit avec pas grand-chose


« – Alors, Danko, pas trop dur les interviews de bon matin ?
– Oh, non, j’ai bien dormi, je ne suis pas un cliché [rires] ! »

Faut-il avoir peur de paraître cliché ? Du rock n’roll avec trois accords, qui parle de nanas, de drogue et de baston, certes, on en a déjà entendu. Beaucoup. Est-ce pour autant manquer de créativité que de faire le choix de se consacrer à ce type de musique ? Est-ce cliché et si facile que ça ? Des groupes comme Airbourne ou Danko Jones n’ont-t-il donc aucune personnalité ? Un musicien doit-il, pour proposer « quelque chose qui sonne frais et neuf », nécessairement tenter de repousser les limites de la technique ou de l’originalité ?

A tous ceux qui seraient tentés de répondre par l’affirmative à cet éternel débat, Danko Jones, en nous parlant de son nouvel album Fire Music qui sort la semaine prochaine, partage ses arguments pour réfléchir dans l’autre sens. Et vu la nature très spontanée du personnage, pas étonnant que cette interview se transforme par moments en bavardage, avec son lot de petites vannes.

« Lorsque tu balances un paquet de notes délirantes, est-ce vraiment si dur ? [Petits rires] Essaie de chanter avec une âme et une émotion capables de toucher quelqu’un ! Ça, c’est vraiment dur à faire. »

Radio Metal : Vous avez dernièrement accueilli le batteur Rich Knox dans le groupe. Que s’est-il passé avec Atom Willard ?

Danko Jones (chant/guitare) : A l’époque où Atom était dans le groupe, il était déjà dans deux groupes différents. Nous n’étions qu’un groupe de plus dans lequel il jouait de la batterie. C’était mieux ainsi, et je ne dis pas ça par espoir de voir notre situation actuelle aller bien, absolument pas. Rich Knox est déjà une part vitale de ce groupe. Pendant l’année et demi qu’il a passé dans le groupe, il s’est imposé et est devenu essentiel. Lorsque Rich a rejoint notre groupe, son premier ordre du jour était de retirer le tom de 12 de son kit de batterie. C’était quelque chose que tous nos batteurs, avant Atom, ont fait mais Atom insistait pour jouer de la batterie avec un tom de 12. « Ok, pas de souci ! » Mais ça a aussi donné le ton de son passage dans le groupe et pour le son. Nous n’avons jamais enregistré d’album avec un tom de 12 jusqu’à Rock And Roll Is Black And Blue. Et bien sûr, ça peut sembler dérisoire mais pour moi c’était vraiment important parce qu’on touche au concept du groupe. C’est ça le groupe : une instrumentation minimaliste faisant un maximum de bruit avec un son sale. Et dès que Rich a rejoint le groupe, il a dit : « Regarde, j’aime vraiment jouer avec un kit épuré, » comme il en avait l’habitude, et j’étais là : « Absolument, parfait ! » Ca donnait déjà le ton pour le passage de Rich au sein du groupe. Son entrée dans le groupe s’est faite alors que nous étions sur la route, en plein milieu d’une tournée, il est donc arrivé dans le feu de l’action, pour ainsi dire. Nous avons découvert que nous pouvions nous entendre, car c’est aussi ça qui peut déterminer si oui ou non on peut trainer et être dans un groupe ensemble. Et ensuite, nous avons fait cet album, et ça c’est aussi important. Collaborer dans le processus créatif avec quelqu’un peut parfois être un cauchemar. Et là, c’était le contraire. Au cours d’une conversation spontanée que Rich et moi avons eu, j’ai dit sans y accorder trop d’importance : « J’aimerais qu’on ait une autre chanson comme ‘Full Of Regret’ », comme sur l’album Below The Belt, c’était il y a deux albums. Nous avions une chanson qui s’appelle « Full Of Regret » avec pas mal de cloches et nous en avons fait une vidéo avec Elijah Wood et Lemmy, c’était un single et il a très bien marché. Mais, peu importe que ce fut un single ou pas, j’aime vraiment cette chanson. Sans nous en parler, Rich est retourné dans notre salle de répétition et a enregistré trois motifs rythmiques différents avec une cloche et il nous les a envoyé en nous demandant : « Qu’est-ce que vous en pensez ? » Et l’un d’entre eux a fini par devenir « Do You Wanna Rock », qui est la piste numéro six sur notre nouvel album. Aucun batteur que nous avons eu dans ce groupe n’avait fait ça. C’est génial ! Nous sommes vraiment contents que la situation avec Atom a fini comme elle a fini parce que ça nous a permis de trouver Rich Knox.

Ok…

Tu ne sembles pas convaincu… [Rires].

Je le suis ! [Rires] Je sais à quel point il peut être difficile de jouer sur un kit de batterie minimaliste. Lorsque tu as un énorme kit avec plein de toms et de cymbales, c’est un peu facile de donner l’illusion d’être un bon batteur, mais un super batteur doit pouvoir être super avec simplement une caisse claire, un Charley et un tom.

Absolument ! C’est vraiment ça le signe d’un bon batteur : s’il est capable de faire du bruit avec juste trois éléments. Et en plus c’est impressionnant d’entendre ce type de son sortir juste de ce tout petit kit. J’ai toujours trouvé que garder un kit minimaliste était dans l’intérêt du batteur.

Sur un autre sujet, vous avez fait vos deux précédents albums avec le producteur Matt DeMatteo mais cette fois-ci vous avez embauché Eric Ratz. Avez-vous ressenti un besoin de changement à nouveau ?

C’était exactement ça : nous avions besoin de changer. Comme tu l’as dit, Matt a fait les deux derniers albums, mais il a aussi fait We Sweat Blood et Sleep Is The Enemy. Il était donc temps de changer. Et Matt a fait un super boulot, ces albums sont super et pour beaucoup on le doit à Matt. Mais Eric est quelqu’un avec qui nous avions travaillé il y a quinze ans et toutes les chansons sur lesquelles il avait bossé en tant qu’ingénieur se sont retrouvées sur I’m Alive And On Fire. Depuis lors, nous nous sommes surveillés mutuellement. Eric est allé produire des albums de Billy Talent, Cancer Bats, Monster Truck, pendant que nous faisions notre propre truc. Et il regardait ce que nous faisions, et nous regardions ce que lui faisait. Et il y a quelques années, en remontant peut-être quatre ou cinq ans, JC est tombé sur Eric dans un club et ils ont fini par parler. Et voilà, nous avons pris contact comme ça. Et ensuite, Scott Middleton de Cancer Bats est venu chez moi – c’était quand ? L’année dernière ? – et il m’a ramené pas leur nouvel album mais le précédent, et Eric avait produit ça. Il m’a offert un exemplaire, je l’ai écouté et j’ai adoré le grain de la guitare. Pas parce que ça sonne metal ou heavy metal ou quoi que ce soit mais simplement parce que je trouvais que ce grain de guitare était ce qu’il manquait à nos albums. J’ai donc questionné Scott au sujet d’Eric, comment c’était de travailler avec kui, etc. Et ensuite, lorsque est venu le moment de faire cet album et de décider qui allait le produire, avec qui nous allions travailler et si même nous allions travailler avec quelqu’un, le nom d’Eric n’arrêtait pas de revenir. Nous n’avons fait que parler de lui, de plus en plus, jusqu’à ce que nous nous décidions à le contacter. Et, sans surprise, il voulait travailler avec nous. C’était vraiment super, nous étions sur la même longueur d’onde. Eric est un rockeur ! Il adore le rock, il adore le metal, c’était donc vraiment top de travailler en studio avec quelqu’un qui connaissait ce type de musique, mais aussi il connaissait notre groupe, il nous connaît ! Il sait quel son nous voulons ou dont nous avons besoin. Et une chose qu’il a faite et dont je suis vraiment content, c’est qu’il a travaillé le son de la guitare. Je suis du genre à savoir quel son de guitare je veux entendre. Je sais ce qui sonne bien ; je ne sais juste pas comment y parvenir. Je ne sais pas quel matériel choisir. Je ne sais pas quelle tête d’ampli ou quelle pédale offre la meilleure combinaison. Je ne sais pas quelles pédales secrètes tous ces producteurs et tous ces geeks du matos utilisent. Je sais juste ce qui sonne bien ! Donc Eric était là, à régler les choses et faire des trucs avec le son et ensuite tu entends le résultat, et tu fais : « Ah ouais, c’est ça, aller on y va ! »

En 2010, lorsque Below The Belt était sorti, ton bassiste John Calabrese nous a dit que tu avais trouvé avec ta voix l’équilibre idéal entre ce que tu pouvais faire et ce que les chansons réclamaient. Quatre ans après, comment te sens-tu par rapport à ta voix ?

Je me sens plutôt à l’aise avec ma voix. Cet album en est la preuve, je chante plus et je crie plus. Beaucoup de chansons ont des cris tout en gardant la mélodie intacte. Et c’est quelque chose qui, par le passé, je dois l’admettre, m’intimidait. Pour une raison ou une autre, j’assimilais le chant mélodique à la douceur. Et pourtant, j’écoutais quand même des groupes comme les Misfits et d’autres que je trouvais pas mal heavy et qui utilisaient de la mélodie. J’étais juste intimidé ; je croyais que ça allait adoucir notre son. Avec les années j’ai essayé d’être plus à l’aise avec l’idée de chanter des mélodies sur nos chansons sans les crier. Below The Belt n’était peut-être pas la première mais certainement l’une des premières fois où j’ai tout déballé pour que tout le monde voit ça sur une chanson qui s’appelle « Had Enough », et ça c’était très mélodique. Et je crois qu’avec Fire Music nous avons repris le pas, repris le fil conducteur, et nous l’avons fait sur « The Twisting Knife », et même « Gonna Be A Fight Tonight » a une mélodie intacte, « Body Bags » aussi a une mélodie intacte, « She Ain’t Coming Home », « Live Forever »… Beaucoup de chansons dans cet album ont un thème mélodique mais avec un vrai côté rauque et dur.

« Tous le monde a dans sa vie […] ces gens qui lui ont causé du tort […]. Les gens te diront de te comporter en grand seigneur, de passer l’éponge, que tu dois laisser le passé là où il est et toutes ces banalités […]. J’emmerde ces conneries ! Ce sont ces merdes qui me donnent de l’énergie, mec ! »

La prochaine question est un peu liée à ce que tu disais plus tôt à propos du kit de batterie. Ta musique, c’est un rock très direct, simple et efficace. Dirais-tu que c’est un défi plus grand encore de jouer ce genre de choses que des trucs techniques ?

Ouais, absolument, c’est un point que tu soulèves dont les gens ne se rendent pas compte. Parfois il est facile de juste créer un mur de bruit ou un mur de son ou de balancer un million de notes, et reculer pour voir les éloges te suivre et tout le monde t’encenser et dire à quel point tu es technique. Et pourtant, c’est très difficile de faire en sorte que trois accords sonnent frais et les refaçonner encore et encore. Tu peux dire que ça semble barbant, et parfois ça l’est, parfois c’est putain de chiant. Mais ce n’est pas ce que tu gardes [rires], et ce n’est pas ce que tu montres aux gens. Tu travailles là-dessus jusqu’à ce que tu mettes le doigt sur quelque chose qui sonne frais et neuf, et qui sonne énergique. Et ça, c’est difficile, mec ! Et les gens se demandent pourquoi tu chantes tout le temps les mêmes choses. Essaie de le faire, encore et encore, et essaie de faire en sorte que ça sonne frais, encore et encore. C’est dur ! C’est difficile, et ça n’a pas le respect que, parfois, j’estime que ça mérite, rien qu’en comparaison de tous ces groupes de prog techniques. Ca semble évident que ces choses là sont difficiles à jouer, mais l’est-ce vraiment ? Lorsque tu balances un paquet de notes délirantes, est-ce vraiment si dur ? [Petits rires] Essaie de chanter avec une âme et une émotion capables de toucher quelqu’un ! Ca, c’est vraiment dur à faire. Pas que je sois en train de dire que j’ai fait ça, je dis juste que la simplicité à tendance à être négligée et rejetée comme étant simple et facile. Mais la simplicité en musique n’est pas forcément simple et facile.

Et pour toi, quel serait le meilleur groupe qui ait fait ça ?

Une partie de ce qui faisait l’attrait du rock des années 90 et du revival du garage rock était le fait que c’était rudimentaire. Pas l’esthétique du son, mais les chansons elles-mêmes étaient très, très simples ; j’aimais ça. Quelque chose auquel je pense parlera à tout le monde, sans aller trop dans l’underground, c’est une chanson comme « Seven Nation Army » de The White Stripes. C’est un super exemple de simplicité. Tu entends perpétuellement le même riff mais pour une raison ou une autre, c’est frais et neuf et tu peux l’écouter encore et encore. C’est une progression d’accord très simple mais ça fait mouche pour beaucoup de gens et ça laisse sa trace ; c’est ce type d’essence. C’est pour ça que ça fait de Jack White un très bon compositeur. Lorsque tu peux faire quelque chose d’aussi simple, et aussi ancré dans un contexte contemporain, qui sonne frais et nouveau, c’est très difficile à faire.

Un album de Danko Jones n’est pas vraiment un album de Danko Jones sans chanson qui parle des femmes. Qu’est-ce qui te pousse à faire des femmes ton sujet de prédilection pour tes chansons ?

C’est un sujet facile à chanter avec émotion parce que tout le monde a traversé au moins une des trois étapes, que tu veuilles être avec quelqu’un ou que tu sois avec quelqu’un ou que tu aies été avec quelqu’un et désormais vous êtes séparés et peut-être as-tu le cœur brisé ou cette personne a le cœur brisé, ou les deux. C’est un sentiment universel, c’est donc facile de se sentir concerné. Et c’est aussi quelque chose dans laquelle tu peux mettre beaucoup d’émotion, lorsque tu chantes, lorsque tu écris des paroles, ou tout du moins lorsque je chante et écris des paroles parce que ça a un sens pour moi. J’ai investi beaucoup d’émotion, de temps et d’énergie dans cette part de ma vie, dans cette expérience. Donc lorsque tu chantes chaque soir, si tu chantes à propos de : « Oh, j’ai été faire une randonnée hier et j’ai été dans la forêt et c’était super », essaye de chanter ça cinq cents fois avec de l’émotion ! Après un moment, tu vas t’ennuyer à raconter aux gens que tu as été faire de la marche ! Alors que si tu parles de cette personne que tu as aimé et avec qui tu voulais être, et maintenant vous vous êtes séparés et elle sort avec quelqu’un d’autre et ça te fait mal… Je peux chanter ça. Je peux revivre cette émotion facilement chaque soir !

Des chansons comme « The Twsiting Knife » ou « Body Bags » renvoient une sensation d’amertume ou même de haine. D’où cela vient-il ?

Celles-ci, et en particulier « Body Bags », sont des chansons de revanche. Ça ne parle pas d’une ancienne petite amie ou quelque chose comme ça. Je pense que ce serait un peu étrange et louche. Ça parle juste de quelques mecs, genre la première phrase de la chanson c’est : « Mettez mes ennemis en rang, dites leurs ce qu’ils m’ont fait. » Tous mes ennemis, ou la plupart, sont des mecs [rires]. Donc ça parle de quelques mecs à qui j’aimerais faire ça. C’est une chanson sur un fantasme de revanche ! Tout le monde a dans sa vie ce genre de mecs ou ces gens qui lui ont causé du tort et qui le pousse à prendre sa revanche. Evidemment, les gens te diront de te comporter en grand seigneur, de passer l’éponge, que tu dois laisser le passé là où il est et toutes ces banalités et slogans pour te convaincre de ne pas ruminer la chose, tu dois laisser aller… J’emmerde ces conneries ! Ce sont ces merdes qui me donnent de l’énergie, mec !

Des chansons comme « Gonna Be A Fight Tonight » ou « Getting Into Drugs » renvoient aussi une sensation d’excès ou de danger. Est-ce ça le rock pour toi : les excès et le danger en te mettant dans des situations à risques ?

Ça veut dire différentes choses pour différentes personnes. Lorsque j’étais gamin, j’ai toujours été attiré par le rock n’ roll parce que c’était dangereux, ou tout du moins ça paraissait l’être à mes yeux. Donc peut-être est-ce un thème récurrent. Pour ce qui est de l’excès, étant de l’autre côté du rideau du rock n’ roll, l’excès n’est pas forcément quelque chose que tu dois t’efforcer d’atteindre. Je crois que ce désir dionysien d’excès et sa célébration me parait usé. Venant du punk-rock, ça me semble n’avoir aucun intérêt. Mais ça fait partie de la tradition et de l’histoire du type de musique que nous jouons, je ne peux pas le nier. Mais « Getting Into Drugs » n’est rien d’autre qu’une chanson légère à propos de quelqu’un qui a découvert les drogues sur le tard et s’est rendu compte qu’il aimait ça. Ça parle en partie de moi, seulement en partie parce j’ai pris de la drogue lorsque j’étais plus jeune mais ça parle aussi d’une expérience récente où j’ai effectivement fumé un joint et qui nous a bien fait marré. Ce n’est rien de plus, une chanson drôle. Et je pense qu’une chanson drôle, balancé de temps en temps au milieu de l’album, a sa place. Des chansons comme « Big Balls » d’AC/DC sont très drôles, pourtant AC/DC n’est pas un groupe à blagues.

« Il y aura toujours des gens qui voudront se faire passer pour des officiers de police, qui te diront ce que tu dois faire, qui imposeront des règles et des réglementations […]. Et ça, ça va contre la grande idée, au-delà de la musique, de ce qu’est le rock n’ roll. »

Tu as aussi une chanson qui s’appelle « Do You Wanna Rock ». En fait, qu’est-ce que le rock représente pour toi ?

Beaucoup de choses ! Certaines personnes ont essayé de définir le rock n’ roll en tant que tel. Je pense avant tout que le rock est une forme de musique, c’est de la musique, et c’est un genre de musique que j’aime énormément. Si on prend du recul, pour moi, c’est aussi un concept qui représente la liberté, la liberté de faire tout ce que tu veux. Mais il y aura toujours des gens qui voudront se faire passer pour des officiers de police, qui te diront ce que tu dois faire, qui imposeront des règles et des réglementations, même si la chose sur laquelle ils imposent des règles représente la liberté. Tu dois avoir l’air de ceci, tu dois agir de cette manière, tu dois parler de cette façon, tu dois être comme ça. Et ça, ça va contre la grande idée, au-delà de la musique, de ce qu’est le rock n’ roll.

L’album s’appelle Fire Music (NDT : musique de feu). Dirais-tu que le rock n’ roll est cette chose qui brûle à l’intérieur de toi et, peut-être, d’une certaine manière, te consume de l’intérieur ?

C’est une meilleure explication que celle que j’avais ! J’allais juste te dire : « C’est un titre cool ! » [Rires]

Plus que tout, Danko Jones est un vrai groupe de live et sur scène tu deviens un personnage totalement survolté. Qu’est-ce qui t’arrives lorsque tu montes sur scène ? Qu’est-ce qui se passe dans ta tête ? Et as-tu des habitudes particulières pour te préparer pour la scène ou entrer dans l’état d’esprit du concert ?

Ça va paraître décevant mais non ! C’est même plutôt le contraire, je ne pense à strictement rien. Tu as tendance à te prendre la tête, je trouve, si tu commences à penser comme ça. Lorsque je monte sur scène, la seule chose que j’ai préparé ou que je connais, ce sont les chansons que nous avons répété. Je sais comment jouer de A à Z les chansons que nous avons décidé de jouer ce soir-là. Ce qui se produit entre ou pendant les chansons dépend du public qui sera là, de la salle où nous sommes et de ce que je ressens sur le moment. Mais je ne monte pas sur scène en disant : « Ok, tout d’abord je vais dire ceci, ensuite je vais dire cela, et ensuite ceci va se produire et puis je vais faire cela. » Je n’ai jamais fait ça. Parfois je regarde des groupes, et parfois tu vois un groupe deux ou trois soirs d’affilée sur une tournée, ce n’est pas qu’ils font quelque chose de mal mais j’ai remarqué que parfois les groupes ont tendance à faire la même chose encore et encore. Je ne veux pas forcément faire ça avec notre groupe. Evidemment, tu dois dire : « Salut ! [Rires] Bonsoir – insère le nom d’une ville ici » ou « C’est super de jouer ici. » Tu diras toujours des trucs comme ça. Mais quoi qu’il se produise entre ça et lorsque je dis « Bonne soirée ! », tout dépend de l’audience et de ce qui me passe par la tête sur le moment, tout dépend de ce qui pourra se passer pendant le concert ! Si je suis un script, qu’est-ce que je dirais ou ferais si quelque chose qui ne s’est jamais produit se produit ? Disons, je ne sais pas, que quelqu’un tombe ou porte un drôle de chapeau. Je me souviens d’une fois, pendant un concert, où un gars est venu avec un chapeau vert fluo qui ressemblait à des tentacules qui sortaient de sa tête. Il était là, au milieu de la foule. Je veux dire que tout le monde pouvait voir ce type avec ce chapeau marrant ! Tu pouvais le voir depuis le fond de la salle ! Il fallait que j’en parle ! Et tous ceux qui étaient là savaient que je n’allais pas parler du gars avec le chapeau marrant le soir suivant et que je n’avais pas parlé de lui le soir précédent parce qu’il n’était pas là. Si j’avais eu un script à suivre, je n’aurais pas pu en dévier et j’aurais dû l’ignorer, ce qui aurait produit un show très bien répété et planifié et je n’aime pas donner à l’audience l’impression que ça aurait pu être n’importe quel autre soir.

Je me souviens d’un concert à Lyon il y a quelques années où tu parlais à l’audience et tu disais : « Ok, qui dans cette assistance joue dans un groupe ? Voilà un riff ! Je te le donne, tu peux le prendre ! »

[Eclate de rire]

Etait-ce totalement improvisé ?

Ouais [rires], je ne me rappelle pas avoir fait ça. J’ai fait des trucs dans ce genre-là auparavant, mais je ne me souviens pas avoir offert un riff à quelqu’un. En général, je le garde pour moi [rires] mais c’était très drôle. J’aimerais le varier si je devais le refaire, ce qui serait une bonne idée [rires]. Je peux te garantir que je n’ai pas fait ça le soir suivant. Il doit y avoir quelque chose pour que je dise ça. Parfois tu testes le son de guitare de ton ampli entre les chansons, juste pour voir si ça sonne plus fort ou plus heavy ou peu importe le problème, et tu tombes sur un riff, en plein milieu du concert ! Peut-être est-ce ce qui s’est passé, je ne sais pas.

Il aurait été intéressant de savoir si la personne a qui tu as donné le riff a véritablement fait quelque chose avec et a enregistré une chanson avec !

Oh, ç’aurait été mon cauchemar si cette chanson avait eu du succès et était devenu l’un des plus grands hits de l’univers… C’est comme si tu donnais un ticket de loterie à quelqu’un et qu’il gagnait 10 million de dollars. « Joyeux anniversaire ! Voici le ticket de loterie que je t’ai acheté. » Je n’ai jamais compris pourquoi les gens achetaient des tickets de loterie en tant que cadeau d’anniversaire…

Ouais, c’est horrible parce que tu l’achètes mais tu t’attends à ce que la personne perde.

Ouais ! « Hey, loser, joyeux anniversaire ! Continue avec ta guigne ! »

« Je n’aime pas donner à l’audience l’impression que ça aurait pu être n’importe quel autre soir. »

Etant un si bon groupe de live, comment se fait-il que vous n’ayez jamais fait de véritable album ou DVD live ?

Eh bien, en fait on l’a fait. Nous avons sorti un « album » live sur Spotify plus tôt cette année (NDLR : interview réalisée fin 2014) provenant d’un concert que nous avons donné à Stockholm en mai et qui s’appelle « Live At Gröna Lund ». Deux raisons à ça : tout d’abord, l’équipe du lieu, le Gröna Lund park où nous avons joué cet énorme show, avait à sa disposition sur site un équipement d’enregistrement professionnel, et ils nous ont proposé d’enregistrer le concert pour nous. Nous avons accepté, ils l’ont enregistré et ça sonne bien. Et puis, à la fois, Spotify est une nouvelle plateforme pour consommer la musique qui a gagné pas mal de terrain auprès du public. Et nous sommes un groupe qui n’a jamais eu peur des nouvelles technologies, nous les avons toujours adoptées, et donc nous avons décidé de faire ceci, presque comme une expérience pour voir ce qui se passerait si nous sortions un album live inédit complet et le diffusions ainsi. D’une certaine manière, on s’en est tiré sans sortir d’album live à proprement dit, c’est plus un enregistrement live en ligne que tu peux écouter, mais nous lui avons donné un nom, donc j’imagine que c’est quand même un album. Je crois qu’il y a des enregistrements live sur les sites de torrents ou de streaming ou peu importe que les gens, avec les années, ont uploadés eux-mêmes, ce n’est donc rien de neuf, c’est juste quelque chose sur une plateforme officielle. Et on contourne toujours le fait de sortir un album live officiel. Je vais te donner une autre raison : c’est parce que nous n’aimons pas vraiment les albums live. Je ne les aime pas, je ne les apprécie pas. Tout d’abord, ils ne sont jamais vraiment live, sauf le nôtre. Le nôtre est vraiment live, en fait. Il a été enregistré sur le vif et nous l’avons presque sorti tel quel. Je crois qu’on a édité des trucs entre les chansons, de manière à ce qu’on n’ait pas à entendre ce que je dis. Ce qui a été édité se trouvait entre les chansons mais pas pendant les chansons elles-mêmes. Sur beaucoup d’albums live sortis de manière officielle, il y a pas mal de bidouillages faits en studio et de trucs réenregistrés… Je n’ai rien réenregistré. Je trouve aussi que le concept de l’album live, qui est censé être un souvenir d’un concert, c’est un peu un genre de provocation, en te disant : « Haha ! Tu vois ce que tu as raté ? » Ou bien ça n’arrive juste jamais à la cheville du vrai truc.

John Calabrese est avec toi dans le groupe depuis le début. Comment décrirais-tu votre relation ?

Bonne, nous nous entendons très bien. Nous avons traversé beaucoup de choses. Nous avons beaucoup appris ensemble. Nous avons traversé les hauts et les bas de ce groupe. Lorsque tu vis quelque chose comme ça avec quelqu’un, ça restera toujours.

Tu as chanté à deux reprises sur des chansons d’Annihilator. Quelle relation entretiens-tu avec ce groupe ?

Annihilator vient du Canada, donc étant moi-même Canadien, j’ai toujours admiré Jeff Waters et Annihilator. J’ai toujours trouvé qu’il était un incroyable guitariste et qu’on ne l’encensait pas assez pour ça. Sur le premier album sur lequel j’ai chanté, qui était Metal, il y a tous ces guitaristes qui apparaissent et le glorifie, je suppose donc que je ne suis pas le seul mais c’est juste que je ne m’étais pas rendu compte avant l’avènement de Blabbermouth et d’internet que d’autres gens avaient le même sentiment. Jeff connaissait notre groupe parce que nous sachant Canadiens, il savait donc qui nous étions. Nous nous sommes rencontré en 2006, nous avons échangé nos coordonnées et peu après ça, il m’a demandé de chanter sur son album à venir, et bien entendu j’ai accepté ! Je trouve que Never, Neverland était l’un des meilleurs albums de thrash de son époque, l’un des albums les plus oubliés et négligés de cette époque.

Peut-on s’attendre à voir Jeff Waters invité à jouer de la guitare sur un album de Danko Jones ?

[Petits rires] On ne sait jamais ! On ne sait jamais… J’ai aussi chanté sur deux chansons de l’album de Marty Friedman, Inferno.

Interview réalisée par téléphone le 28 novembre 2014 par Philippe Sliwa.
Retranscription : Mariane Monin.
Traduction et fiche de questions : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Dustin Rabin.

Site officiel de Danko Jones : www.dankojones.com.



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