Ça se voit à son attitude, ses sourires sur scène, son enthousiasme, sa sympathie, Mikael Stanne, le chanteur de Dark Tranquillity est un homme positif. Il a de l’espoir et reste optimiste. Comme lorsque, récemment, le guitariste et membre fondateur Martin Henriksson décide de jeter l’éponge parce qu’il n’a plus la flamme pour jouer, certes Stanne est triste et se demande s’il n’aurait pas pu y faire quelque chose, mais il se dit aussi que c’est peut-être l’occasion d’apporter du neuf. Et si par ailleurs il doute constamment de lui-même, il a foi dans le collectif.
Et c’est cette nature profondément humaine, chaleureuse, ouverte à l’autre, qui fait qu’il se désole de la direction qu’est en train de prendre le monde, et plus particulièrement son pays la Suède. « J’aimerais tellement que nous soyons bien plus que ça, » dit-il un brin exaspéré, et même énervé. Lucide sur le modeste impact de son oeuvre, Atoma, le nouvel album du combo de Göteborg, est un cri du cœur. Un album qui plus est marqué par la conjoncture d’événements personnels, négatifs comme positifs, qui, selon lui, en font une forme de nouveau départ, en profitant pour prendre le temps d’expérimenter avec les sons et, paradoxalement, y injecter une urgence. Nous parlons de tout ceci et plus encore dans la suite avec cette icone d’un des trois piliers du death-melo suédois.
« C’est vraiment effrayant de voir jusqu’où les gens peuvent aller simplement pour montrer de la haine, de la frustration et de la colère envers des choses qu’ils ne comprennent pas. C’est probablement dans la nature humaine mais, à la fois, j’aimerais tellement que nous soyons bien plus que ça. »
Radio Metal : Le guitariste Martin Henriksson qui a été dans le groupe depuis le début a annoncé son départ plus tôt cette année. Il a dit qu’il avait le sentiment d’avoir « perdu la passion pour jouer de la musique. » Comment c’est arrivé ? L’as-tu vu venir ?
Mikael Stanne (chant) : Je suppose que oui, mais peut-être n’en ai-je pas vraiment compris la gravité. J’aurais aimé l’avoir vu plus tôt et mieux compris. Il était de plus en plus dans le côté business du groupe, et c’est devenu son principal centre d’attention. Nous l’avons un peu senti, en étant sur scène, il pensait déjà au concert suivant, à quand nous allions réserver le prochain vol et ce genre de choses. Il n’avait plus vraiment la même passion pour jouer et il avait l’impression que c’était injuste [envers le reste du groupe, que] son cœur n’y était plus à cent pour cent. C’était évidemment très triste. Je veux dire que ça nous a vraiment brisé le cœur qu’il ne se sente plus de continuer. Peut-être aurais-je dû le voir plus tôt et peut-être aurions-nous pu faire quelque chose, mais je n’en suis pas sûr. Maintenant, quand je lui ai parlé, il est content de sa décision et il peut désormais complètement se concentrer à être le manager du groupe, qui est quelque chose qu’il fait merveilleusement bien. Bien sûr, son départ nous a laissé sans trop savoir quoi faire ensuite, comment gérer la tournée à venir et ce genre de choses. Donc ce sera difficile mais j’essaie toujours d’être optimiste et de voir le bon côté des choses. Maintenant, nous pouvons amener certains de nos amis dans le groupe pendant un certain temps, avoir des guitaristes de session, essayer et voyager avec de nouvelles personnes, recevoir une nouvelle énergie et avoir du sang neuf dans le groupe. Avec un peu de chance, ce sera une bonne chose. Evidemment, c’est étrange d’être sur scène sans un mec qui était là pendant vingt-cinq ans.
Comme tu l’as dit, vous avez des membres de session pour remplacer Martin, mais aussi pour le poste de bassiste. Est-ce que ça veut dire que vous êtes un peu réticents voire effrayés à l’idée d’intégrer de nouveaux membres à part entière dans le groupe ?
Je pense que ouais, nous le sommes ! Car nous ne savons pas vraiment… C’est difficile de d’arriver dans un groupe après vingt-cinq ans. Comment gères-tu ça ? Comment fais-tu en sorte que ça fonctionne ? Dans le cas d’Anders [Iwers] à la basse, nous avons décidé que, bien sûr, il sera à nos côtés [indéfiniment]. C’est un de nos plus anciens fans, c’est un musicien fantastique et un chouette type. Donc il restera avec nous pendant longtemps. Mais nous avons effectivement décidé : « Essayons, voyons comment tu te sens, voyons comment nous nous sentons, voyons si c’est quelque chose que tu veux faire pour les quelques prochaines années. » Nous avons eu le sentiment assez rapidement que « oui, ce sera fantastique et nous allons nous éclater ensemble. » Donc il sera avec nous à l’avenir. Mais ensuite, ouais, [pour la place de guitariste], nous allons essayer différents membres. Evidemment nous sommes hésitants par rapport à ça parce que c’est une grosse décision. Ce n’est pas quelque chose que nous voulons prendre à la légère.
Martin a écrit beaucoup de musique pour le groupe. Comment avez-vous pallié à son absence ?
Ouais, évidemment, par le passé il a écrit des tonnes de trucs, il a aussi et surtout arrangé une grande partie de la musique. Mais pour les deux derniers albums, il a un peu eu le sentiment de ne pas vraiment avoir d’inspiration et il a passé plus de temps à organiser et arranger des choses. Pour le dernier album, il n’a rien écrit et pour cet album, lorsqu’il a décidé de partir, nous avions déjà écrit la majorité de l’album et ça ne l’a pas tellement affecté. Bien sûr, au cours des quelques dernières années, il a affecté la composition, [mais beaucoup moins qu’avant] et donc les autres gars ont pris plus de place, se sont davantage impliqués et ont davantage composé. Donc Anders [Jivarp] a écrit plus de musiques, Martin, Brändström a écrit plus de musiques, tout comme Niklas [Sundin]. Il y a eu un changement dans le processus, ce qui, je pense, est très sain pour un groupe de notre âge, le fait que nous ayons de nouvelles personnes qui arrivent et prennent un plus grand rôle dans le processus de composition.
Apparemment le batteur Anders Jivarp a même écrit une majorité de chansons. Ce n’est pas très commun de voir un batteur être un compositeur principal dans un groupe. Penses-tu qu’il a un feeling spécial et différent en tant que compositeur parce qu’il est batteur ?
Je suppose. Je veux dire qu’il a toujours été batteur mais il écrit plein de choses au piano, il a vraiment un super sens de la mélodie et des influences venant de toutes parts. Il écoute des tonnes de musiques différentes. Donc ce qui se passe normalement, c’est qu’il trouve des mélodies et des riffs de base, et ensuite Niklas ou Anders les interprètent et en font des parties de guitare ou quelque chose comme ça. C’est plus ou moins collaboratif, dans le sens où il initie le processus, trouve l’idée principale, et nous construisons à partir de ça. Evidemment, il pense tout le temps rythmiquement mais aussi, comme je l’ai dit, il a vraiment un très bon sens de la mélodie, et je pense que ça se voit dans tout ce qu’il écrit.
Tu as dit que vous avez décidé de commencer à enregistrer en janvier, et ensuite vous vous êtes rendus compte que vous n’étiez pas encore prêts et vous avez continué à travailler sur l’album, jusqu’à que vous disiez : « Eh merde ! Il nous faut une date butoir. » Etes-vous le genre de groupe qui a besoin de la pression d’une date butoir, autrement vous continueriez à travailler sur les chansons et à les peaufiner éternellement ?
Ouais, je le pense. Autant je déteste les deadlines… Bon, ce n’est pas que je les déteste mais elles me stressent [petits rires], mais nous en avons vraiment besoin, absolument. Autrement, rien ne se ferait jamais, nous serions juste là : « Ouais, d’accord, remplissons un peu plus cette chanson, changeons des choses ici et là, faisons des allers-retours jusqu’à ce que nous soyons contents. » Mais ouais, c’est quelque chose dont nous avons besoin afin que les choses avancent, c’est certain.
Tu as déclaré que « normalement, on passe à un nouvel album, et quoi qu’il se passe est un peu une réaction à ton œuvre précédente. » Du coup, en quoi Atoma est une réaction à Construct ? Qu’avez-vous voulu améliorer ?
Je pense que nous avons raffiné un peu le processus. Avec Construct, nous avions décidé de composer différemment, en le faisant en studio plutôt que dans notre salle de répétition, et en commençant immédiatement à enregistrer et faire des démos avant que les chansons soient terminées. C’était une expérience que nous avons vraiment aimée. Ça s’est avéré être une très bonne chose et nous avons décidé de continuer comme ça, mais cette fois, nous avons poussé le bouchon plus loin. Nous pouvions faire des démos de certaines chansons très tôt, des versions grossières des chansons, et essayer des choses. Nous pouvions en fait voir tout l’album et l’écouter des mois en avance et ensuite, nous pouvions corriger de petites parties ici et là qui avaient besoin d’être corrigées. Ça lui confère une nature plus immédiate. Nous avons coupé un peu toutes les choses inutiles que parfois nous mettons dans les chansons. C’était comme : « Quelle est l’essence ? Quel est l’aspect le plus important ? Quelles sont les parties les plus importantes ? Focalisons-nous complètement là-dessus et rendons-les aussi géniales que possible. » Je pense que c’était l’une des plus grandes différences avec cet album. C’était l’urgence et l’immédiateté que j’ai vraiment aimé ; ça donnait le sentiment d’avoir créé une entité progressiste. Je trouvais que c’était une super façon travailler, le fait d’avoir cet environnement tendu. Nous voulions aller quelque part, nous voulions que les choses soient faites, faire une déclaration forte et puis partir [petits rires]. Ça s’est révélé être quelque chose de très positif une fois que tu entends le résultat final.
« Comment se fait-il que nous n’ayons toujours pas appris à nous entendre ? C’est horrible de voir des gens adultes, rationnels et intelligents soudainement avoir recours à ce comportement puéril que l’on voit habituellement dans les cours de récréation entre gamins. »
On dirait que les atmosphères des chansons ont bénéficié de beaucoup travail et d’attention, surtout avec les sons et arrangements de clavier. Est-ce quelque chose que vous avez voulu développer ?
Ouais, c’est aussi lié au processus d’enregistrement lorsque nous sommes dans le studio [Rogue Music] que Martin gère depuis maintenant quelques années ; il a enregistré quelques albums là-bas et nous y sommes plus à l’aise que jamais. Dans la mesure où nous avons eu plus de temps avec cet album, je suppose, plus de temps en studio en tout cas, nous pouvions vraiment expérimenter avec différents sons. Nous avons mis à jour une grande partie de notre matériel, comme de nouveaux amplis de guitare et toutes ces choses, et aussi Martin a commencé à sortir du matériel analogique, de vieux claviers et des Moog, ce vieux piano et des trucs comme ça. Une partie de ce processus créatif consistait à expérimenter avec ces trucs, tu essaies des choses : « Ça, ça serait cool ! Pourquoi pas ? Voyons si ça marche ! » Car nous en avions le temps et l’opportunité. C’est quelque chose que j’ai trouvé vraiment amusant et intéressant sur cet album, nous pouvions nous développer un peu, essayer des choses que peut-être nous n’aurions pas faites si nous n’avions pas eu autant de temps pour travailler dessus.
L’album est accompagné d’un second disque avec seulement deux chansons. Et ces chansons semblent aller plus loin dans l’expérimentation sonore. Est-ce pourquoi vous les avez inclus sur un disque séparé ? Peux-tu nous en dire plus sur ces deux chansons ?
Nous avons décidé d’enregistrer douze chansons pour l’album, c’était ça toute l’idée : enregistrer ces douze chansons, les rendre aussi bonnes que possible et complètement se concentrer là-dessus. Mais ensuite, nous avons aussi parlé au label et ils ont dit : « Peut-être avons-nous besoin de chansons bonus pour les éditions spéciales. Certains marchés veulent parfois des chansons supplémentaires… » Nous avons déjà fait ça dans le passé mais tu ne veux pas vraiment faire de chanson bonus parce que peut-être que celle-ci sera vraiment très bonne et méritera d’être sur l’album ou… Mais nous avions quelques chansons que nous trouvions très bonnes mais nous avions du mal à les voir dans le contexte d’un album, ça ne cadrait pas vraiment avec le reste des musiques. Nous essayions de faire rentrer ces deux chansons, « The Absolute » et « Time Out Of Place », dans l’album et ça ne marchait pas vraiment. Donc nous avons dit : « Rendons-les totalement différentes et poussons les aussi loin que possible. » Après deux mois à enregistrer, complètement par nous-même, en studio, nous étions un peu lessivés. Donc lorsqu’est venu le moment de faire ces deux chansons bonus, nous avons décidé de faire appel à un autre gars, un producteur qui travaille au même complexe de studios que nous. C’est un producteur de rétro-synth de la vieille école. Il fait des trucs étranges très intéressants et éclectiques que l’on entend parfois à travers les murs. Nous nous sommes dit que peut-être il avait une perspective totalement différente sur notre musique et notre son et peut-être qu’il pourrait faire quelque chose de sympa. C’était simplement une expérience et nous nous sommes dits : « Si ça fonctionne, très bien, génial, et si ça ne fonctionne pas, c’est cool aussi, alors nous n’utiliserons pas les chansons et nous les enregistrerons l’année prochaine ou quelque chose comme ça. » Il est venu et a amené avec lui tout son matériel analogique, de vieux enregistreurs à bande, des délais à bande, un piano Rhodes et des trucs vraiment cool. Nous avons commencé à enregistrer pendant deux jours, et je trouve que ça s’est révélé incroyablement bon. C’était très amusant d’enregistrer comme ça et aussi de lâcher du lest en terme de contrôle. Nous n’avons jamais vraiment fait ça auparavant. Nous avons toujours enregistré tout nous-même et tout d’un coup, nous avions cet autre gars qui avait ces grandes idées sur ce que devaient être nos chansons. Il a fait un boulot génial. Mais une fois que nous avons fini les chansons, nous étions là : « D’accord, qu’est-ce qu’on fait avec ça ? » Nous avons eu l’idée de les mettre sur la version deluxe du CD. Si tu achètes l’édition deluxe, il y a une tonne d’illustrations supplémentaires que Niklas a faites pour l’album et qui sont fantastiquement belles, c’est un livre relié, c’est splendide, et il y aura un autre CD contenant ces deux chansons qui sont très éloignées du reste de l’album. C’est la seule façon d’acquérir ces chansons. Donc c’est un petit cadeau et un remerciement pour les gens qui achètent ces éditions spéciales. C’est super cool. Ça ne sera pas disponible en streaming ou dans aucune autre version de l’album. J’espère que les gens, en quelque sorte, tomberont de leur chaise en écoutant ces chansons parce qu’elles sont clairement les chansons les plus variées et différentes que nous ayons jamais enregistré.
Quels sont les messages, en termes de thématiques, que tu as voulu faire passer avec cet album ?
Au niveau des paroles, je voulais faire face à toutes les frustrations que j’ai ressenties au cours des deux dernières années vis-à-vis de tout ce qui se passe dans le monde qui nous entoure. Il y a eu tellement de choses dingues qui se sont passées dans le monde ces deux dernières années et ça a commencé à m’affecter, moi, ma famille et les gens autour de moi. Ça a commencé à affecter mon pays, la Suède. Tout d’un coup, on voit cette atmosphère vraiment négative et haineuse monter et ce pays habituellement tolérant, sympa et neutre qu’est la Suède être effrayé, avoir peur, être craintif et haineux envers des gens qui sont un peu différents de nous. Tout d’un coup, [les gens avaient] peur de nouvelles idées et d’opinions différentes, d’une façon que je n’avais jamais vraiment vu auparavant. C’était vraiment effrayant pour moi. Ça mettait un peu en avant les côtés les plus horribles des êtres humains, de la nature humaine. On dirait que les gens ont si peur qu’ils ont oublié tout le reste autour d’eux, ils ont oublié empathie et la compassion et ont commencé à ne se soucier que d’eux-mêmes. C’était effrayant à voir, donc j’ai essayé de me focaliser à un niveau individuel : « Pourquoi les gens font-ils ça ? Comment nous comportons-nous et réagissons-nous lorsque les choses changent dans le monde ? Comment avons-nous soudainement recours à ce comportement animal lorsque nous nous sentons menacés ? » C’est vraiment effrayant de voir jusqu’où les gens peuvent aller simplement pour montrer de la haine, de la frustration et de la colère envers des choses qu’ils ne comprennent pas. C’est probablement dans la nature humaine mais, à la fois, j’aimerais tellement que nous soyons bien plus que ça. J’aimerais que nous soyons bien plus courageux que ça, de façon à ne pas être ces êtres territoriaux qui finissent en conflit les uns avec les autres uniquement parce que quelqu’un vit de l’autre côté de la rue, ou à l’autre bout de la ville, ou de l’autre côté de la frontière. Comment se fait-il que nous n’ayons toujours pas appris à nous entendre ? C’est horrible de voir des gens adultes, rationnels et intelligents soudainement avoir recours à ce comportement puéril que l’on voit habituellement dans les cours de récréation entre gamins. Ce sont des adultes, et souvent des politiciens, et les gens qui font ça, c’est vraiment effrayant. C’est quelque chose qui m’a vraiment mis en colère et m’a frustré. Donc faire ressortir tout ça, poser ça sur papier et le crier dans un microphone a été quelque chose que j’ai ressenti le besoin de faire. Même si ça ne veut rien dire, si ça n’a rien changé, si ça n’affectera rien, au moins, je l’ai évacué.
Le titre de l’album, Atoma, sonne un peu énigmatique. Il y a évidemment le mot « atome » là-dedans, mais qu’est-ce que tu mets derrière ce mot ?
C’est venu lorsque nous discutions des titres parce que c’est toujours la partie la plus dure, genre, comment donnes-tu un nom à un album de douze chansons qui ont toutes des idées et concepts différents ? C’est vraiment difficile pour moi. Mais Niklas et moi avons commencé à parler de choses qui se sont produites dans le groupe dernièrement. Il y a eu des décès dans nos familles, il y a eu des bébés qui sont nés, il y a eu toutes sortes de grands changements. Quelqu’un est parti, un nouveau arrive… Ça donne un peu l’impression d’un nouveau départ. Aussi, nous avions besoin de revenir à l’essence de ce que nous sommes, qui nous sommes en tant que groupe et ce que nous faisons musicalement. Niklas a eu l’idée du titre Atoma, qui peut-être ne veut rien dire, mais il a clairement un sens [petits rires]. Pour moi, le mot signifie « noyau », comme le cœur de quelque chose, le début de quelque chose de nouveau, le cœur de qui tu es et ce que tu es. C’est un mot grecque, je crois, mais nous adorions simplement [sa symbolique] et il englobe très bien tout l’album.
« Je doute de moi-même, de mes capacités et de tout ce qui me concerne mais j’ai une foi inébranlable dans le groupe. »
L’artwork a l’air à la fois abstrait et organique. Qu’est-ce qu’il symbolise ?
C’était la même chose avec ça, Niklas et moi parlions de ce que l’album devrait représenter, ce qui devrait être sur la pochette. Une fois que nous avons commencé à parler de ces vies et ces morts et ces commencements, et l’essence et Atoma, ce genre de choses, Niklas a dit : « Je pense avoir une idée » et il a commencé à travailler. Quelques jours plus tard, il a envoyé son premier brouillon et nous étions comme des dingues : « C’est parfait ! C’est différent. C’est étrange et cool, il y a toutes ces couches qui sont fantastiques. » Ca avait tellement de sens, ça ne pouvait pas mieux coller. Je suis vraiment content. Normalement, Niklas fait deux-cent brouillons et a différentes version d’à quoi l’illustration de l’album pourrait ressembler mais avec celui-ci, il a tout de suite tapé en plein dans le mille. C’est incroyable. J’ai hâte de tenir le produit fini entre mes mains avec le reste des images et toutes ces choses qu’il a créé autour de la pochette. Les différentes pages du livret ont toutes différentes illustrations originales qui sont super, super cool.
Sur un autre sujet, as-tu déjà eu des moments de doute ou où tu as peut-être perdu un peu de ta passion, un peu à l’instar de Martin Henriksson dernièrement ?
Pas vraiment, pas pour ma part. Je veux dire que bien sûr, tu doutes de toi-même tout le temps et mon assurance et ma confiance en moi ont parfois été inexistantes, car tu te sens merdique, tu traverses plein de phases, surtout lorsque tu essaie d’être créatif et d’écrire quelque chose. Mais à la fois, j’ai une grande foi et confiance dans le groupe en tant qu’unité. Même lorsque je me sens mal, je sais qu’Anders et Niklas trouveront quelque chose de cool qui finira par m’inspirer. Et si Niklas se sent en manque d’inspiration, peut-être que je ferai quelque chose qui lui redonnera de l’inspiration. Je sais que nous pouvons nous inspirer les uns les autres pour avancer. Parfois, oui, bien sûr, nous sommes ultra fatigués, nous voyageons des heures et des heures pour simplement jouer un concert d’une heure parfois. Mais je pense que la récompense que tu obtiens en créant quelque chose, comme une chanson ou un album, est incroyable. Le sentiment d’accomplissement lorsque tu as fini quelque chose qui te tient vraiment à cœur est incroyable. Mais ensuite, évidemment, la plus grande récompense est lorsque tu pars sur les routes, tu te retrouves sur scène et tu ressens vraiment la connexion avec le public qui comprend exactement ce que tu essaies de dire, qui comprend ce qu’est ce groupe, ce que tu essaies de communiquer. C’est le meilleur sentiment au monde. Donc dès que tu as une journée affreuse et que tu as l’impression d’être une merde et que ça fait des semaines et des semaines que tu es loin de chez toi, une fois que tu es sur scène, tu commences à te sentir bien, tout ce qui est négatif tombe à l’eau et tu oublies toutes les difficultés que tu avais en venant, car l’expérience de la scène est plus grande que tout. Donc je doute de moi-même, de mes capacités et de tout ce qui me concerne mais j’ai une foi inébranlable dans le groupe.
Les deux autres groupes qui ont à l’origine développé le death metal mélodique de Göteborg sont At The Gates et In Flames. At The Gates a fait une pause de presque vingt ans sans sortir d’album et In Flames est connu pour avoir énormément changé leur son. Comment vois-tu la carrière et l’évolution de ces deux pairs ?
Oh wow ! Je veux dire, ouais, j’étais très triste lorsqu’At The Gates a jeté l’éponge en 97 ou peu importe quand c’était. Mais je l’ai compris parce que je savais qu’ils étaient pas mal en conflit et qu’ils ne pouvaient plus être des amis proches. Ensuite j’ai été super content lorsqu’ils ont commencé à tourner à nouveau, je n’arrivais pas à y croire ! Merde alors ! Evidemment, ils ont décidé d’enregistrer un nouvel album, j’étais très hésitant et j’avais peur, genre : « Oh, est-ce que ça va fonctionner ? » Et évidemment, ça a fonctionné. At War With Reality est l’un des meilleurs albums de death-melo en peut-être dix ans. In Flames a énormément évolué au fil des années. Ça a commencé avec Lunar Strain, qui était purement un album de death mélodique, un peu folk. Maintenant, ils sont complètement ailleurs mais c’est ce qui est cool. Ils ont constamment changé et évolué vers quelque chose d’assez différent de ce qu’ils étaient. J’adore ça. Je n’ai pas encore entendu le nouvel album mais j’entends dire qu’il est super. Je suis super fier de mes amis pour ce qu’ils ont accompli. Il y a tant de super groupes à Göteborg. Ces deux-là sont deux des meilleurs, bien sûr. Je ne pourrais pas être plus heureux pour eux. Je trouve que c’est fantastique et j’espère qu’At The Gates vont s’organiser et faire encore un nouvel album, mais qui sait ? Je l’espère vraiment.
L’année dernière marquait les vingt ans de The Gallery, qui est devenu un classique et un des albums préférés des fans. Mais je ne me souviens pas vous avoir vu célébrer cet anniversaire. Comment ça se fait ? N’êtes-vous pas du genre à regarder en arrière ?
Non, je suppose que nous ne sommes pas comme ça. Je veux dire que nous ne sommes pas tellement nostalgiques par rapport à ce genre de choses. Bien sûr, c’est plutôt cool, c’était il y a vingt ans mais ce n’est pas le sentiment que ça donne. J’imagine que nous préférons regarder devant nous plutôt qu’en arrière. J’apprécie vraiment le fait que cet album ait une signification particulière pour plein de gens et pour nous, bien sûr, car c’était l’album qui nous a exposés aux gens. C’était le premier album qui a atteint un plus large public. J’adore l’ensemble de cet album et les choses que nous avons faites, il est clair que ça donne le sentiment d’être l’un de nos opus les plus importants. Mais je ne sais pas… On nous pose parfois des questions comme : « Ne voulez-vous pas jouer tout l’album ? » et ce genre de choses. Mais peut-être que nous ne lui rendrions pas justice. Lorsque nous jouions les chansons à l’époque, c’était super, mais c’est difficile de revenir en arrière et être nostalgique de tes propres trucs. Je peux être nostalgique à propos de mes vieux albums préférés mais faire ça pour tes propres trucs, ça met mal à l’aise, d’une certaine façon [petits rires], malheureusement. Mais qui sait ? Je veux dire que l’année prochaine, ce sera les vingt ans de The Mind’s I… Je ne sais pas. Nous essayons de ne pas y penser. Je suppose que nous allons de l’avant plutôt que de rester statiques et contempler le passé.
Plein de groupes ont tendance à jouer leurs albums classiques en intégralité de nos jours pour célébrer leur anniversaire ou même sans raison particulière. Que penses-tu de cette mode ?
Je suis très partagé à ce sujet parce que j’aime vraiment lorsque je vais voir un groupe et qu’il joue un de mes albums préférés, c’est génial, mais lorsque nous commençons à en parler dans le groupe, nous disons : « Oh, il faudrait vraiment faire ça ? C’est ce que les gens veulent entendre ? » Nous sommes trop complexés par rapport à ça. C’est sûr, je sais que certaines personnes adoreraient entendre The Gallery, en l’occurrence, mais peut-être pas tout le public. Je ne sais pas, nous évaluons trop les choses et je ne pense pas que nous avons la confiance en soi – peu importe comment tu veux appeler ça – pour le faire. Peut-être que nous l’aurons un jour mais là tout de suite, ce serait étrange de se concentrer sur quelque chose qui a vingt ans, au lieu de se concentrer sur quelque chose qui a quatre semaines [petits rires]. Mais j’aime bien cette mode, bien sûr, en tant qu’amoureux de musique et fan de groupes qui existent depuis longtemps. Evidemment que j’apprécie lorsque j’ai l’occasion d’entendre certains de mes albums préférés. Donc ouais, je suis très partagé et peut-être un peu hypocrite par rapport à ça.
Interview réalisée par téléphone le 6 septembre 2016 par Philippe Sliwa.
Retranscription : Gabriel Jung.
Traduction et introduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Dirk Behlau.
Site internet officiel de Dark Tranquillity : www.darktranquillity.com
Acheter l’album Atoma.
C’était très amusant d’enregistrer quelque comme ça <– soit il manque un mot, soit il y en a un de trop ?
C'est vers le milieu de l'interview avec l'enregistrement des 2 titres bonus, je poursuis la lecture !
Merci, c’est corrigé !
Hyper sincère ce mec ! C’est vraiment cool de le lire, on se sent dans l’intimité ^^