Artistes : Deep Purple – The Running Birds
Lieu : Lyon
Salle : Halle Tony Garnier
Date : 05/11/2010
Il s’agit tout de même de la troisième fois en à peine quatre ans que Deep Purple se montre en région lyonnaise. On se souvient d’une Halle Tony Garnier bien remplie mais c’est surtout la performance dans le cadre du théâtre antique de Vienne qui aura marqué de son empreinte les mémoires. Un cadre idyllique, une ambiance fantastique, une prestation sans – ou presque – fausse note. Un concert magique comme on en vit peu. Bref, je ne vais pas vous la refaire, un live report existe déjà sur le sujet.
Mais il est clair que Deep Purple grâce à des shows mémorables a su fidéliser les foules. La preuve, ce soir la Halle Tony Garnier reste honorablement remplie malgré la fréquence des passages du groupe et le fait que celui-ci n’a toujours pas de nouvel album sous le coude (le dernier, Rapture Of The Deep, datant de 2005). Comme quoi, il ne faut pas être médisant, le public sait parfois reconnaître la qualité lorsqu’elle se présente à lui. Encore faut-il que les deux parviennent à se rencontrer…
Visiblement, contrairement aux deux fois précédentes, ce n’est pas un groupe français qui ouvre le bal. C’est bien de promouvoir la scène nationale mais encore faut-il proposer au public des groupes qui en valent la peine. Alors tant pis pour le chauvinisme, car The Running Birds ont, eux, assuré comme des chefs. Comment ? Quoi ? Ils nous viennent du sol français ? Mais ils sont originaires d’Italie, à la frontière, non ? Ha, bien, voilà, je me disais aussi ! Tout de même, avec ce hard bluesy directement échappé des 70’s, on aurait juré avoir à faire à une formation anglo-saxonne. D’autant plus que les chanteurs s’expriment en anglais pendant leurs interludes.
Oui vous m’avez bien lu : « LES chanteurs ». En effet, le guitariste et le bassiste se partagent les parties vocales. L’un possède une voix plutôt rauque, l’autre plus lisse à la Joe Lynn Turner – tiens, un ex-Deep Purple… Et justement, ce n’est pas un hasard si je dévie sur le sujet car le meilleur point de référence pour décrire la musique des Running Birds c’est précisément… Deep Purple. Pas étonnant que Ian Paice himself tape de temps à autre le bœuf avec les Oiseaux Coureurs. Que voulez-vous ? La possibilité de revivre sa jeunesse ne se refuse pas.
Pour en revenir aux similitudes, les sons d’orgue Hammond au clavier y sont certainement pour quelque chose mais pas uniquement : les riffs ainsi que, globalement, les compositions bien que parfois empreintes d’un très léger fumet année 80. Mais nous savons aussi que Deep Purple s’est lui-même, fut un temps, laissé marquer par cette décennie. Une période du Pourpre Profond que beaucoup ont laissé croupir dans le carton. Mais force est de constater que la formule typée AOR (« appellation d’origine rock’n’roll », c’est bien ça ?) fonctionne plutôt bien pour les Running Birds car un certain talent est là. Sans compter que les musiciens laissent transparaître un très bon feeling et même une petite pointe de charisme. Mention spéciale à Fabrizio qui se révèle être un guitariste inspiré. Il gratifiera d’ailleurs l’audience d’un solo psychédélique pour le moins original par le biais d’un système avec lequel il interagit en bougeant sa main dans le vide.
Alors, que demande le peuple ? L’original, le père fondateur, le roi sur son trône : Deep Purple ? Oui, oui, attendez, ça vient. Un peu de patience ! Laissez-leur au moins le temps d’installer le plateau !
Ha, les voilà ! Ce Steve Morse, décidément, a toujours la banane pendue aux lèvres et sait immédiatement transmette les bonnes «vibes ». Mais, très vite, c’est à un bien étrange choix de titre d’ouverture auquel le public est confronté : « Hard Lovin’ Man ». Méconnu, répétitif et qui ne décolle pas vraiment, ce titre clôture le pourtant mémorable In Rock. L’assistance reste perplexe. Les connaisseurs, eux, savourent égoïstement cette rareté.
Il faut l’avouer, ce soir, le concert leur aura particulièrement été adressé. De nombreux morceaux interprétés ne sont pas forcément les plus évidents, outre le titre d’ouverture : « Maybe I’m A Leo », « No One Came » ou « Lazy » pour la période Blackmore, « Almost Human » ou « Silver Tongue » pour la période Steve Morse. Donc, pas de « Speed King », « Highway Star » – alors que celle-ci a été rajoutée en ouverture sur toutes les dates suivantes – ou « Woman From Tokyo » (et encore moins de « Child In Time » que le groupe n’interprète plus pour des questions, a priori, de difficultés vocales). Des absences qui ont certainement fait des déçus mais les occasionnels n’auront pas pour autant été totalement déboussolés avec les incontournables « Perfect Stranger » (toujours aussi efficace avec cette interprétation sauvage du père Morse), « Space Truckin’ », « Smoke On The Water », « Black Night », la reprise de « Hush » ou même le plus récent mais prenant « Rapture Of The Deep » et ses gammes orientales.
Mais Deep Purple, ce n’est pas qu’une setlist. Deep Purple, c’est avant tout un plaisir partagé, des sourires, une complicité. Deep Purple ce sont des jams et des solos biens sentis comme, par exemple, ce duo guitare / chant à la fin de « Strange Kind Of Woman » qui semblait totalement spontané, vu les regards que se sont lancés Ian Gillian et Steve Morse à l’issue de l’exercice. Le « délectable Morse », dixit Ian, éblouira l’audience sur deux instrumentaux, « Contact Lost » puis, plus loin dans le show, « The Well Dressed Guitar », le premier étant annexé par un magnifique solo de guitare et le tout englobant un « When The Blind Man Cries » pour offrir un pur moment de plénitude. Dommage par contre que les passages instrumentaux n’aient pas été accueillis avec plus de folie par le public comme cela avait été le cas à Vienne deux ans plus tôt.
Quant à Don Airey, il aura proposé un solo de clavier analogique mélangeant psychédélisme et thèmes classiques. Les plus attentifs auront reconnu l’ombre d’un instant l’intro à l’orgue de « Mr. Crowley » du Prince des Ténèbres (c’est en effet Don Airey qui joua sur Blizzard Of Ozz). Les autres auront souri sur l’air d’ »Alouette », à défaut de vraiment se prendre au jeu. « Black Night » aura comme à l’accoutumée été affublé d’un jam mettant en avant la basse du classieux et élégant Roger Glover. Même Ian Paice aura eu son moment de gloire pendant un court solo sur la fin de « Smoke On The Water ». Ce batteur offre d’ailleurs un vrai plaisir visuel avec sa gestuelle élégante et expressive et ses mimiques faciales qui donnent l’impression, en permanence, de le voir chanter ses rythmes.
Au final, même si le public aura été plus attentif que participatif et l’ambiance moins « chaude » que la fois précédente, c’est invariablement avec le sourire que l’on quitte la salle après un concert de Deep Purple. Le groupe offre une constance remarquable dans la qualité de ses prestations et le plaisir d’être face à son public est toujours aussi palpable et communicatif. Chapeau bas et à la prochaine fois messieurs.
Setlist de Deep Purple :
Hard Lovin’ Man
Things I Never Said
Maybe I’m A Leo
Strange Kind Of Woman
Rapture Of The Deep
Fireball
Silver Tongue
Contact Lost
Guitar Solo
When A Blind Man Cries
The Well Dressed Guitar
Almost Human
Lazy
No One Came
Keyboard Solo
Perfect Strangers
Space Truckin’
Smoke On The Water
Rappels :
Hush (Billy Joe Royal cover)
Black Night
Photos : Sébastien Vogel
« Mention spéciale à Fabrizio qui se révèle être un guitariste inspiré. Il gratifiera d’ailleurs l’audience d’un solo psychédélique pour le moins original par le biais d’un système avec lequel il interagit en bougeant sa main dans le vide. »
Pour les gratteux qu’ça intéresse, c’est la Hot Hand : un anneau relié à une pédale qui fait varier des effets (wha-wha, whammy, chorus, etc…) selon la distance anneau-capteur, capteur que l’on place un peu où l’on veut (de préférence vers les micros).
Quand au fait de continuer les concert sans nouvel album, je trouve pas ça « choquant », ils ont déjà une discographie bien remplie et variée, à voir les titres qu’ils ont joués, et évitent ainsi le risques d’un album… raté.