A force de répéter à qui veut l’entendre que Device est un projet arrivé accidentellement et que, comme on l’expliquait récemment, « l’existence de Device ne veut aucunement dire la fin de Disturbed », le public pouvait légitimement se demander si David Draiman (Disturbed) assumait vraiment le projet Device. Il s’agissait plus vraisemblablement d’une crainte que le public de Disturbed prenne cette incartade aux relents indus en compagnie de l’ex-Filter Geno Lenardo comme un coup de poignard dans le dos.
Une crainte qui, par ailleurs, apparaît étrangement en opposition avec l’enthousiasme débordant qu’a Draiman à parler du projet. Notamment quand il évoque avec nous, dans un entretien à paraître bientôt, l’excitation d’avoir à tout recommencer de zéro : « J’adore être le nouveau gars et faire partie du projet qui attise toutes les curiosités. J’adore avoir la possibilité de recommencer. (Rires) C’est un sentiment très revigorant ! », ou avec le magazine australien Heavy la composition de cet album éponyme : « Cela a été une expérience merveilleuse. J’ai adoré ça, vraiment, d’être libre et de créer. » Comme d’autre frontmen avec leur side-projects, Draiman apprécie de pouvoir un peu prendre l’air avec un projet qu’il emmène plus ou moins où il veut artistiquement. Seize années avec Disturbed l’ont-il fatigué de ses partenaires habituels ?
Sûrement, puisque le groupe a jugé bon de prendre une pause afin de retrouver le plaisir de jouer ensemble après presque deux décennies d’albums et de tournées. Mais c’est surtout l’opportunité d’une nouvelle aventure qui séduit Draiman: « Imagine que tu aies l’opportunité de créer quelque chose de vraiment génial et unique après avoir été dans les affaires pendant seize ans, que l’on te donne la chance de recommencer avec toute la connaissance et l’expérience que tu as déjà accumulé, et d’être également un meilleur musicien… » La motivation était donc toute trouvée, ne manquait plus que l’occasion et les personnes avec qui travailler.
Ce qui arriva donc de manière inattendue : alors que Geno Lenardo lui envoie une piste musicale pour réaliser un titre de la bande originale du film Underworld Awakening, il écrit un texte, adore le morceau et s’envole l’enregistrer à Chicago. Le titre plaît à la production de la bande originale qui veut en faire le titre-phare. Cependant, un morceau de Disturbed extrait de la compilation de faces B The Lost Children sorti fin 2011 passe à la radio à ce moment-là et David ne veut pas que les deux entrent en concurrence… Ils gardent donc le futur « Hunted » sous le coude jusqu’à la prochaine opportunité, mais également comme base de travail, car la décision d’écrire d’autres titres est prise au vu de la connivence musicale entre les deux hommes.
Le fruit de cette collaboration est une dizaine de titres plutôt universels aux influences électroniques qui prennent chacun des orientations musicales différentes. Les traits des morceaux se définissent chacun différemment, Draiman et Lenardo allant de l’indus assez sombre (« Hunted », « War Of Lies ») à de très accrocheurs et accessibles brûlots au potentiel populaire certain (« Vilify », « Out Of Line »). Draiman, lors de sa longue carrière avec Disturbed s’est créé un certain nombre d’amitiés musicales et a donc profité de l’occasion pour les inviter à venir s’amuser sur son album. Mais plus que des featurings, ce sont des morceaux taillés pour leurs invités que Device a réalisé : notamment un très Néo et sautillant « Out Of Line » avec Serj Tankian (System Of A Down), un « Opinion » à tendance politisée forcément réservé pour la guitare folle de Tom Morello, une reprise du duo d’Ozzy Osbourne et Lita Ford « Close My Eyes Forever » en compagnie de Lzzy Hale (Halestorm) et une surprenante association avec l’ex-Deep Purple et ex-Black Sabbath Glenn Hughes sur le final « Through It All ». Il y en a pour (presque) tous les goûts du metal, même si la touche indus est prédominante dans la production, et ce soupçon Néo accrocheur dans les compositions et les structures qui existait déjà dans Disturbed est également très décelable.
David Draiman a décrit le premier single extrait de l’album « Vilify » comme la porte d’entrée idéale pour les fans de Disturbed vers le monde de Device. Qu’ils se rassurent, même une fois à l’intérieur de l’album, le choc ne sera pas démesuré, à condition bien sûr qu’ils tolèrent cette orientation électronique et ce parti pris de titres rock plutôt fédérateurs faisant la part belle aux mélodies accrocheuses mais aussi à de solides riffs simples mais massifs dans l’esprit de Rammstein. De toute façon, l’électronique faisait déjà, dans une certaine mesure, partie du paysage musical de Disturbed via quelques effets ici et là. Sans compter que les éléments tels que le chant de Draiman et ses mimiques caractéristiques ou les riffs efficaces, donneront assurément le sentiment aux habitués de Disturbed d’évoluer en terrain connu.
Il y a peu de risques que Draiman désoriente son public avec cet opus. Ce dernier possède d’avance un certain nombre de certitudes : la production léchée, la participation d’invités prestigieux et sa vraie aptitude à accrocher l’oreille d’une audience plutôt large… autant d’éléments qui font de l’aventure Device un pari mesuré mais suffisamment excitant pour que le frontman de Disturbed recharge ses batteries en toute sérénité. Et aille même défendre sur les planches le potentiel de ces titres en compagnie du guitariste Virus (Dope) et du batteur Will Hunt (Evanescence) pour faire part à tout le monde de son enthousiasme pour ce projet. L’étincelle nécessaire pour rallumer la flamme Disturbed ou la naissance d’un deuxième hémisphère musical à part entière, à l’image de Corey Taylor (Slipknot) avec Stone Sour ? Le succès de cet éponyme et de sa représentation scénique en est certainement la clé.
Album Device, sortie le 9 avril 2013 chez Warner Bros Records
Au vu de ce que j’ai écouté, ça sonne pas mal comme Disturbed, alors pourquoi faire un side-project si ce n’est pas pour VRAIMENT cha
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