Duff McKagan est évidemment éminemment connu ; être bassiste des Guns N’Roses, forcément, cela donne une renommée certaine. Ce soir, l’homme à l’histoire vraiment intéressante – plongez-vous dans la lecture de sa biographie It’s So Easy (Et Autres Mensonges) pour savoir comment survivre à une explosion de pancréas –, se présente en solo, à la guitare, prêt à défendre son nouvel album solo Tenderness, prêt à (s’)offrir une pause, prêt à souffler comme il en a exprimé récemment le besoin dans la presse. En solo, cela ne signifie pas qu’il se présente seul sur scène avec sa guitare : il est accompagné d’un groupe dans les rangs duquel vous trouverez Shooter Jennings, musicien américain œuvrant dans la country et le rock sudiste. Shooter Jennings qui assure d’ailleurs la première partie. Mais, déjà, les lumières s’éteignent et une musique d’introduction type dessin animé résonne dans le Trabendo.
On rejoint la fosse ?
Artiste : Duff McKagan
Date : 3 septembre 2019
Salle : Trabendo
Ville : Paris [75]
Dès les premières notes, aucun doute possible, Shooter Jennings donne dans un blues rock à tendance country se mâtinant d’air western (le violon sur « The Outsider »). Et honnêtement, qui ne révolutionne pas le genre. On pense parfois à John Cougar Mellencamp. Il manque ici une touche en plus, une étincelle, un grain de folie qui fasse décoller le propos. D’autant que sur scène, c’est très calme. Le fait le plus marquant sera le loupé du démarrage de « Leave Those Memories Alone ». Sur « Fast Horses », Aubrey Richmond, la violoniste prend le chant ; le titre est une balade sirupeuse, dommage car la voix est belle. Côté son, fort et propre. Parfait pourrait-on dire. Côté salle, le public apprécie et applaudit de manière plus nourrie comme le concert avance. Le Trabendo a connu meilleure affluence ; dans la fosse, personne au-delà de la console lumières. Shooter Jennings conclut sa prestation par la reprise du titre « Rock’n’Roll Suicide », classique poignant de David Bowie. La reprise n’apporte pas grand-chose mais il est doux de se souvenir de ce grand artiste !
21h : revoici les mêmes protagonistes qui accompagnent Duff. Rompant tout de suite la glace, Duff s’adresse rapidement au public, en français s’il vous plaît ! Et avant « Tenderness », son « je t’aime Paris » met la salle dans sa poche. Salle bien mieux remplie désormais. En toute logique – même groupe, mêmes instruments, le son est toujours fort et bon. « Feel » est dédiée à plusieurs artistes décédés : Scott Weiland, Lemmy, Prince entre autres. « Wasted Years » donne l’occasion au chanteur de rendre un vibrant hommage à sa « beloved wife Suzan » avec laquelle il vit depuis vingt ans et qui « saved his ass », selon les propres dires du mari clairement amoureux et reconnaissant. Duff est élégant, possède une indéniable prestance, pas mal d’humour – le moment où il prononce très mal « bassiste » en français lui donne l’occasion d’un peu d’autodérision ; il tient la scène, fait chanter les spectateurs, les motive, comme sur le titre « River Of Deceit », écrit par un de ses amis de Seattle. Sa voix est très agréable, très stonienne comme sa musique finalement.
Et l’homme a du coffre mine de rien. Et quand le violon intervient désormais, terminée cette ambiance western, l’instrument se fait chatoyant, envoûtant, doux. Duff troque sa guitare acoustique pour une guitare électrique et « Dust’n’Bones » arrive pile poil pour casser le rythme du concert, apporter une variation dans la couleur du son qui pouvait être un peu trop redondante. Une espèce d’impression de tourner en rond. Sur scène, l’émulsion n’est plus la même que pour la première partie. Sans qu’il y ait une grande effervescence, cette formation, portée par son meneur, dégage une réelle énergie. Les musiciens sont peut-être plus impliqués ; ils changent de côté. On sent, par ailleurs, une vraie connexion entre Duff et les musiciens, ce qui est très agréable. « Dust’n’Bones » remporte un gros succès comme toute la prestation depuis son début en fait. Duff reprend son acoustique et le doux « Last September » ramène le calme dans le Trabendo. Très communicatif, il évoque, avant « Falling Down », la communauté du rock’n’roll dans laquelle tout le monde se soutient, citant Paris, New York, Londres et un tas d’autres villes. « Do you agree? » demande-t-il au public. Et même si la réponse est positive, nous sommes en droit de nous demander ce que deviendra cet élan de solidarité rock’n’roll une fois tout le monde dehors, reprenant son rythme quotidien.
« Parkland » est bienvenue car elle apporte une touche différente dans le son, un peu plus vénéneuse peut-être. « Clampdown » amène un regain d’énergie et la version de ce titre de The Clash proposée par Duff et sa bande est plus sale que l’originale… plus punk ! Duff, qui a repris sa guitare électrique, demande au public s’il va bien, plaisante en expliquant qu’il n’y aura pas de rappel, que le groupe jouera tous les morceaux qu’il connaît. Et de lancer en plusieurs fois « Dead Horses », demandant aux fans s’ils veulent chanter. Charmant le mec ! Et sur ce titre, excellent, Aubrey prend sa part du chant. Le guitariste va exécuter son solo sur les barrières de sécurité. La soirée s’anime d’un bel esprit rock’n’roll, de partage et d’échanges ! Et atteint une belle intensité. La salle est aux anges ! « Don’t Look Behind You », balade rock’n’roll, devrait nous faire faire de beaux rêves avec son violon très poignant ! Pas question toutefois de terminer sur une balade ; le groupe offre du plus musclé pour un final plutôt intense !
Duff avec sa voix, ses belles chansons aura su nous envoûter, nous emmener dans une belle soirée même si certains regretteront le manque de titres énergiques qui auraient agréablement varié les ambiances. La soirée aurait sûrement gagné en folie ! Toutefois, le public a apprécié et, au risque de se répéter, il est finalement le seul juge, non ?
Setlist Duff McKagan :
You Ain’t The First (reprise des Guns N’ Roses)
Breaking Rocks
Tenderness
Chip Away
Feel
Wasted Heart (titre de Duff McKagan’s Loaded)
River Of Deceit (reprise de Mad Season)
Dust N’ Bones (reprise des Guns N’ Roses)
Last September
It’s Not Too Late
Falling Down
Cold Outside
Parkland
Clampdown (reprise de The Clash)
Dead Horse (reprise des Guns N’ Roses)
Don’t Look Behind You
Deepest Shade (reprise de Mark Lanegan)