« Nous croyons en la tradition plus qu’en la nouveauté. Nous adorons la tradition! » : à rebours de nombreux groupes se défendant d’adopter une posture délibérément rétro, Jus Oborn l’affirme haut et fort : avec Time To Die, son nouvel album, Electric Wizard reste fidèle à lui-même. De l’eau a coulé sous les ponts depuis Black Masses, le précédent album du groupe – changements de line-up, départ de leur label historique, Rise Above – mais le noyau dur formé par Liz Buckingham [guitare] et Jus Oborn [chant] semble plus solide que jamais : finissant les phrases de l’un, cherchant l’assentiment de l’autre, la complicité des deux têtes pensantes du groupe est évidente.
Joviaux, ne cachant ni leurs enthousiasmes, ni leurs déceptions, ils répondent à nos questions avec la sincérité qu’ils revendiquent et une pincée d’auto-dérision, entre deux bouffées prises d’une canette de 1664 transformée en pipe de fortune, évoquant autant leurs désillusions et leur attrait pour la solitude que leur amour pour le do-it-yourself et leurs projets futurs.
« Nous voulions éviter que ce soit un groupe à personnalités. C’est une histoire de musique, pas d’individus. Au point que Jus dit qu’il va finir par se faire remplacer lui-même [rires]. »
Radio Metal : Mark Greening avait fait son retour dans le groupe pour enregistrer l’album, mais il l’a déjà quitté à nouveau (il a été remplacé par Simon Poole). Dans le press kit, le caractère explosif de votre relation était mentionné. Est-ce que c’est pour cela qu’il est parti à nouveau ?
Liz Buckingham (guitare) : Sur le coup, ce n’était pas une relation explosive. Il a juste laissé tomber. Tout allait bien tant que nous faisions des trucs…
Jus Oborn (guitare & chant) : C’était inévitable. Le groupe avait splitté il y a 10 ans à cause de certains conflits. Nous avions décidé d’enterrer la hache de guerre, mais ces vieilles disputes sont revenues…
Liz : Elles ont refait surface.
Jus : …Comme dans une relation de couple compliquée [rires].
Est-ce que ça t’a déçu, puisque tu as dit que c’était le meilleur batteur pour le groupe ?
Oh, bien sûr que c’est décevant. Les choses ne se sont pas passées comme il faut, tu vois ? Nous voulons faire de la bonne musique. Nous voulons que le groupe continue et être complètement fidèles à nous-mêmes. Lorsque les choses ne se passent pas comme il faut, ça ne va pas. Qu’est-ce qu’on peut faire ? Nous ne voulons pas de nouveaux conflits, parce que ça devient vraiment moche.
Liz [à Jus] : Tu étais très déçu…
Jus : Oui. J’espérais que nous pourrions au moins retrouver notre ancienne amitié, mais peut-être que trop d’eau a coulé sous les ponts en 10 ans…
Depuis 2012, il y a eu beaucoup de changements au sein du groupe au niveau de la batterie et de la basse. Qu’est-ce qu’il s’est passé avec Tas Danazoglou, Glenn Charman et Shaun Rutter ? Comment expliquez-vous cette instabilité ?
Euh, je ne suis pas sûr que ça ait tant à voir avec le groupe que ça. De bien des manières, ça fait 20 ans que le groupe existe. Ce n’est pas évident de conserver l’enthousiasme de la jeunesse. Quand nous avons commencé, nous avions entre 20 et 25 ans, et nous nous disions : « OK, je peux consacrer toute ma vie au groupe ! » Mais ensuite, quand ils atteignent la trentaine ou la quarantaine, les gens ne peuvent plus y consacrer toute leur vie. Ils ont des enfants, une famille… C’est la vie. Il faut être raisonnable : nous ne pouvons pas emprisonner les gens dans le groupe ! Les choses évoluent, et nous devons prendre les bonnes décisions pour que notre musique se maintienne et reste honnête et fidèle à notre intention initiale. Liz et moi faisons en sorte qu’il y ait un noyau dur, une certaine stabilité dans le groupe. Je ne pense pas que nous ayons dévié de notre voie. Nous sommes toujours Electric Wizard.
Vous avez un nouveau bassiste, Clayton Burgess, qui est très jeune. Est-ce que vous pensez qu’il a amené du sang frais au groupe ?
Oui, complètement ! C’est chouette d’entendre de jeunes musiciens qui sont très enthousiastes sans être influencés par la mode ou ce genre de conneries, qui aiment vraiment la musique et qui sont vraiment honnêtes… C’est ce que nous avons choisi. Nous ne voulions pas quelqu’un de corrompu par le milieu de la musique parce que ça peut arriver [rires], ça peut te corrompre !
Pendant longtemps, Electric Wizard, c’était essentiellement toi [Jus], et maintenant c’est vous deux. Vous dites toujours que vous êtes très complémentaires. Quelles sont donc vos différences et vos points communs, à votre avis ?
Liz : Nos personnalités sont très différentes. Nos points communs, ce sont définitivement nos influences musicales et esthétiques, ainsi que la manière dont nous envisageons Electric Wizard…
Jus : …Nos visions, aussi…
Liz : …Ce sont les mêmes…
Jus : Nous venons de milieux similaires, en tant que personnes. Lorsque nous nous sommes rencontrés, nous savions déjà que nous nous ressemblions beaucoup. Nous nous comprenons l’un l’autre à plein de niveaux. Et j’aime avoir quelqu’un pour écrire avec moi. Plus tôt dans la carrière du groupe, c’était Tim [Bagshaw] qui avait ce rôle, et lorsque notre amitié s’est terminée, je ne voulais pas me retrouver à écrire tout seul. Liz était déjà presque dans le groupe au moment où tout s’est mis à aller de travers. Nous avons joué quelques concerts avec Sourvein et nous avions été très impressionnés par son style. Tim et moi parlions d’avoir un deuxième guitariste, et nous nous demandions ce que ça pourrait donner. Tout cela a été une évolution naturelle. Du dehors, on peut s’imaginer beaucoup de choses au sujet de ce qu’il se passe au sein d’Electric Wizard, mais pour nous, c’est une évolution naturelle, et une volonté de faire progresser notre musique. Il faut que nous prenions les décisions qu’il faut pour pouvoir avancer.
Est-ce que c’est pour ça que les changements de line-up sont aussi discrets ?
Oui ! Personne n’est en disgrâce, il n’y a pas eu de grosses embrouilles… Généralement, c’est seulement : « Je ne peux pas continuer, je dois passer à autre chose… »
Liz : Et nous avons toujours dit que nous voulions éviter que ce soit un groupe à personnalités. C’est une histoire de musique, pas d’individus. Au point que Jus dit qu’il va finir par se faire remplacer lui-même [rires], mais ce ne serait pas possible ! Mais c’est comme ça que ça devrait être : avec l’espoir d’avoir créé Electric Wizard comme une entité musicale peu importe qui se trouve dans le groupe.
Jus : Ouais ! Et même comme une créature vivante ! Electric Wizard est là. Je n’en suis qu’une partie. Je crois que c’est difficile de s’en éloigner, maintenant.
Liz : Nous vivons dans une culture où tout le monde veut des personnalités, des ragots, de la réalité et toute cette merde, et nous ne voulons vraiment pas rentrer dans ce monde moderne, tu vois ? Ce n’est pas ça qui est important. Nous ne sommes pas une émission de télé réalité [rires]. C’est de la musique.
« Nous ne voulons pas faire du divertissement, nous ne faisons pas de la pop. J’aime créer un culte, j’aime sentir le public… »
Time To Die parle évidemment de la mort. Tu as déclaré que tu avais eu l’impression que le groupe devait être tué pour pouvoir renaître de ses cendres. Qu’est-ce qui t’a donné cette impression ? Pourquoi pensais-tu qu’il devait être tué ?
Jus : Je vois toujours les choses de manière dramatique de toute façon, Liz peut te le dire [rires]. Ça doit être noir ou blanc. Soit c’est la fin, soit tout est fantastique… Mais en tout cas, oui, nous sommes destinés à faire des albums très heavy. Nous n’avons aucune intention de céder aux caprices de qui que ce soit ou d’être des trouillards. Nous sommes fidèles à nous-même de toutes sortes de manières, tu vois ?
Liz : Nous n’avons laissé personne intervenir. Nous n’avons pas fait l’album en disant : « Est-ce que ça va aller ? », mais plutôt : « NON ! C’est comme ça ! » Et peut-être que ça va tout détruire… Je ne sais pas ce qu’il va se passer. Nous avons juste eu une attitude du genre « tous les coups sont permis ».
Jus : Oui. Notre attitude, c’était : « Voilà ! Nous ne ferons plus d’autres albums. C’est la fin. » Mais je pense que nous avons souvent ce genre d’attitude [rires]. Comme ça, nous y mettons toute notre énergie, comme si c’était le dernier.
À propos de votre musique, vous parlez souvent de « destruction mentale ». Est-ce que c’est pour vous une manière de détruire la partie corrompue de l’esprit pour qu’elle puisse renaître, d’une certaine manière ?
Oui. Personnellement, je crois que la plupart d’entre nous avons été conditionnés depuis notre naissance : on nous apprend à vivre et à nous comporter d’une certaine façon… Et je pense que certains d’entre nous ne croient même pas à leur vrai soi et en ce qu’ils sont. Ça a toujours été notre message : « Soyez-vous mêmes, soyez libres, affranchissez-vous de vos conditionnements ! » Quand j’étais jeune, avec beaucoup de mes amis nous pensions que nous pourrions peut-être évoluer et parvenir à un nouveau degré de compréhension et d’humanité. Voilà en quoi je crois ! Peut-être que les gens se disent que je suis complètement taré ! [Rires]
On entend de l’eau qui coule au début et à la fin de l’album, ce qui lui donne une certaine circularité évidemment, mais aussi un côté « campagne ». Vous avez déclaré : « Nous avions besoin d’aller à la campagne pour finir l’album. » Qu’est-ce que vous trouvez là-bas qu’il n’y a pas en ville ?
Liz : Moins d’êtres humains [rires] !
Jus : De la solitude, de l’isolement… C’est assez facile de se laisser influencer par ses pairs, et je pense que ce serait la pire chose qui pourrait arriver à Electric Wizard. Nous créons une musique qui est très personnelle, que les gens aiment ou pas. Nous n’avons pas à essayer de créer de la musique que le public aimerait et à essayer de lui plaire, mais quand tu es entouré de gens, tu te retrouves vite à avoir une vie sociale. Tu veux que les gens aient des réactions positives… Donc nous avons besoin de nous isoler du reste du monde pour pouvoir être fidèles à nous-même, je pense, en tant que musiciens. C’est juste notre philosophie à nous et peut-être que nous sommes stupides [rires], mais ça marche pour nous !
Liz : Et le courant t’emmène chez nous…
Jus : Oui, l’idée de l’eau qui coule, c’est qu’elle t’emmène dans notre monde.
Liz : Si tu viens chez nous, tu entendras exactement la même chose.
Jus : C’est le son qu’il y a dans le jardin… Voilà la raison de ce son. L’eau en elle-même, c’est très primordial, c’est un retour aux racines de la vie…
Liz : Et ça a un rapport avec la pochette….
Jus : …La pochette y fait allusion aussi… Mais nous préférons ne pas en dire trop parce que la pochette est aussi importante que l’album, pour moi. Tout te semblera logique lorsque tu auras l’ensemble entre les mains.
Vous paraissez être tous les deux très attirés par l’isolement et la solitude. Comment donc gérez-vous le paradoxe entre rechercher la solitude et être en tournée dans le monde entier, et donc entourés de gens en permanence ?
Eh bien c’est très difficile, vraiment [rires].
Liz : Nous ne le faisons pas autant que la plupart des autres musiciens, donc ce n’est pas si terrible que ça. Ce n’est pas que nous voulons fanatiquement éviter les gens. Il faut ce qu’il faut. Il y a beaucoup de solitude sur la route, d’une certaine manière. Tu es devant tous ces gens mais tu passes beaucoup de temps à attendre…
Jus : Personne ne nous parle jamais ou quoique ce soit.
Liz : [Rires] Oui, personne ne nous parle !
Jus : [Rires] Nous sommes très seuls. Nous sommes dans les loges, et des centaines de gens font la fête dehors pendant qu’Electric Wizard reste silencieux !
À vrai dire, un concert d’Electric Wizard est une expérience assez unique. Ça va bien au-delà de la musique : c’est une expérience intégrale. Il y a les visuels psychédéliques, la fumée, l’odeur, le sol qui vibre… Qu’est-ce que ça vous fait, de vous retrouver au milieu de cette atmosphère quasi religieuse ?
Ces concerts sont tout ce que nous voulons faire ! Ça va définitivement se retrouver dans la musique. Nous ne voulons pas faire du divertissement, nous ne faisons pas de la pop. J’aime créer un culte, j’aime sentir le public… Quand tu joues du bon rock, tu te nourris du public. Plus ils s’éclatent, mieux tu joues. Ce transfert est vraiment stimulant, et ça peut aussi beaucoup plaire au public. Honnêtement, tu ne veux pas te retrouver avec des gens qui sont assis là à se dire [se grattant le menton] : « Ah ouais, c’est pas mal », donc il faut que tu accumules tous ces éléments pour les forcer et leur faire comprendre : « Ouais, tu vas rentrer dedans, et tu vas complètement t’y abandonner ! » Il y a pas besoin d’être raffiné pour nous comprendre et rentrer dans notre monde. C’est la vraie manière de faire l’expérience d’Electric Wizard, voilà ce que je veux dire.
C’est toi [Jus] qui a réalisé l’artwork…
Oui, j’ai fait le dessin. Nous sommes tous les deux très impliqués dans la dimension visuelle. Liz s’occupe de la photo…
Liz : Oui, nous travaillons en équipe pour les visuels. Jus est un bon graphiste !
Il a un côté minimaliste, do-it-yourself, qui va un peu à l’encontre des artworks modernes. De plus, l’album a été enregistré dans un studio complètement analogique. Est-ce que c’est important pour vous de conserver le plus possible la dimension humaine dans votre musique ? Pour vous adresser directement à l’âme de l’auditeur ?
Oui, nous avons toujours été comme ça, au point de faire tous nos T-Shirts à la main ! Comme ça, tu as un morceau de l’essence d’Electric Wizard, et nous croyons fermement que ça fait une différence, contrairement à si ça avait été une machine qui l’avait fait.
Jus : Pendant des années, des milliers de personnes ont porté nos T-Shirts, et c’est nous qui les avons faits, à la main ! Je trouve qu’il y a une forme de spiritualité là-dedans : tu portes quelque chose que j’ai fait.
Liz : Nous aimons que tout soit fait comme ça. C’est pour ça que nous aimons travailler dans un studio analogique où Jus coupe les bandes à la main, tout est plus physique…
« Nous n’avons pas l’impression d’avoir à progresser… Nous nous sommes trouvés. Nous ne sommes pas perdus, nous savons qui nous sommes, et c’est très bien comme ça. »
C’est peut-être aussi une manière de donner un côté intemporel à votre musique ?
Jus : J’en sais rien ! [rires]
Liz : L’avenir nous le dira !
Jus : Oui, l’avenir nous le dira. Si dans 20 ans, je lis un livre sur l’histoire du rock où il y a un chapitre sur Electric Wizard, là, oui, je me dirai que nous avons réussi ! [Rires] Mais oui, ça nous rend un peu unique…
Liz : Nous ne suivons pas la mode.
Jus : Sois fidèle à toi-même, nom de Dieu ! Les modes, ça va ça vient, tout le monde sait ça ! Pas la musique. La musique dure des milliers d’années, alors pourquoi suivre la mode, c’est complètement stupide ! [Rires] Les gens écoutent toujours Black Sabbath, ils écoutent toujours les Beatles… Ces groupes… C’est plus important que d’être dans l’air du temps. C’est idiot.
Vous avez créé votre propre label, Witchfinder Records. Est-ce que c’est une manière de continuer dans cette démarche do-it-yourself ?
Oui. L’idée, c’est de garder le contrôle à 100 % dans un contexte de major. Je crois que nous ne voulons pas que quiconque ait peur que nous nous retrouvions embarqués dans une grosse machine comme ça. Witchinder, c’est « Voilà le monde d’Electric Wizard », et nous poserons des limites. Et j’espère que nous pourrons y amener d’autres groupes et peut-être produire des films, etc. L’idée, c’est vraiment de créer notre propre monde.
À ce propos, l’année dernière, vous avez déclaré que Rise Above Records, par l’intermédiaire de leur avocat, voulait vous empêcher de sortir un nouvel album ou même d’utiliser le nom « Electric Wizard ». À l’époque, nous avions contacté Lee Dorian, le patron du label, et…
Jus et Liz : …Et on vous a menti !
Liz : Nous avons demandé à un avocat d’étudier la question, et c’est un mensonge.
Jus : C’est un mensonge, nous n’avons pas de contrat avec cette maison de disque. C’est fini, et ils ne veulent pas l’accepter.
Liz : Ça fait des années qu’ils nous menacent…
Jus : …Ils nous menacent et nous harcèlent de la manière la plus dégueulasse qui soit. Nous sommes juste musiciens, et nous voulons créer de la musique !
Liz : Nous ne voulons rien faire de foireux…
Jus : Nous ne cherchons pas à la faire à l’envers à qui que ce soit !
Liz : Nous n’avons rien à gagner à chercher les ennuis avec eux, tu sais… Vraiment rien [rires] ! Pourquoi irions-nous mentir ? C’est ridicule…
Jus : Je n’ai pas envie de m’étendre sur le sujet, mais je crois que Rise Above n’est plus le même label que celui sur lequel nous avions signé. C’est une entreprise différente avec des gens différents, ce ne sont plus ceux avec lesquels nous travaillions il y a deux ans… Je ne sais pas quoi dire ! [Rires]
Liz : Oui, c’est… vraiment, vraiment pas bien.
Jus : Si ton label te fout un procès à chaque fois que tu ouvres la bouche, comment pourrais-tu continuer en tant qu’artiste ? C’est ridicule !
Liz : Et nous ne sommes pas les seuls…
Jus : Nous ne sommes pas le seul groupe à qui c’est arrivé, il y a pas mal d’autres groupes qui ont quitté Rise Above. Des gens l’ont remarqué, mais bon…
Tu as déclaré qu’Electric Wizard était « un parfait exemple de croissance interrompue »…
[Rires]
Est-ce que vous avez peur du changement ou de ce que vous pourriez devenir ? Comment parvenez-vous à trouver de nouveaux challenges musicalement ?
Liz : Je pense que c’est parce que nous savons vraiment ce que nous aimons. Nous savons qui nous sommes, nous savons ce qui nous plaît, et nous n’avons pas l’impression d’avoir à progresser… Nous nous sommes trouvés. Nous ne sommes pas perdus, nous savons qui nous sommes, et c’est très bien comme ça. Je trouve qu’en réalité, c’est plus difficile de rester fidèle à soi-même. Les gens subissent toutes sortes d’influences, surtout quand ils ont plus de succès et qu’ils traînent avec des gens qui leur disent plein de choses. Nous sommes vraiment contre – en tout cas, moi je le suis – l’idée d’avoir à s’adapter, de subir des influences extérieures… Même si tu ne t’en rends pas vraiment compte, les gens te disent que tu devrais faire ceci ou cela…
Jus : Nous croyons en la tradition plus qu’en la nouveauté. Nous adorons la tradition. Ce n’est pas parce que certaines choses ont déjà été faites et refaites qu’elles sont mauvaises, tu vois ? Nous aimons l’art très traditionnel, et les choses qui ne changent pas.
Liz : Si c’est en ça que tu crois, pourquoi devrais-tu changer ? Peut-être que des gens veulent chercher des choses qu’ils n’ont pas encore trouvées, c’est leur droit, mais ce n’est pas notre cas.
Puisque nous parlons de tradition : le clip de « Sadiowitch » est sorti. C’est une illustration parfaite de votre musique, qui évidemment évoque beaucoup de réalisateurs des années 60-70 comme Kenneth Anger ou Jess Franco. Comme votre musique s’inspire largement de films, est-ce que c’était la suite logique pour vous d’en quelque sorte inverser le processus en faisant des vidéos inspirées par votre musique ?
Oui ! Nous sommes tellement contents de cette vidéo !
Jus : Oui, c’est fantastique !
Liz : Ça nous a vraiment donné envie de nous atteler à un projet plus large peut-être, totalement visuel, un film avec de la musique… C’est ce que nous avons toujours eu envie de faire, parce que nous sommes très visuels, et ce serait génial de créer le truc en entier.
Jus : Oui, je travaille sur les animations depuis quelques années maintenant, et sur des films. C’est dans cette direction que nous voulons évoluer en tant que groupe, vraiment. Il faut que nous passions à la vitesse supérieure. Voilà ce que nous avons hâte de pouvoir faire.
Liz : C’est ce que nous trouvons stimulant et inspirant.
« Il y a pas besoin d’être raffiné pour nous comprendre et rentrer dans notre monde. »
Et est-ce que c’était aussi un hommage à vos sources d’inspiration ?
Jus : Oui, complètement ! Nous voulions faire référence à Jess Franco, Kenneth Anger, tous ces gens d’entrée de jeu. C’est la première vidéo d’Electric Wizard officielle, financée et créée…
Liz : Avec la chanson et tout, ça fait vraiment : « Electric Wizard, c’est ça ». Ça va être notre première vidéo, donc ça doit vraiment être une synthèse de ce que nous sommes.
Jus : Il fallait que ce soit une synthèse. Nous ne voulions pas être hors sujet ou faire les malins. C’est Electric Wizard, tu vois, c’est tout. J’espère ! La vidéo capture la plupart des sensations que te procure Electric Wizard, l’idée que tu peux être – que tu dois être – un pécheur, un peu hédoniste, mais que ce n’est pas grave. On peut profiter de la vie sans que quoique ce soit n’ait à être bizarre [rires]…
Tu as déclaré que vous avez toujours « essayé de créer une moralité ambiguë et incertaine ». Est-ce que ce n’est qu’une esthétique ou est-ce que vous avez un message à faire passer ?
En effet, nous avons un message à faire passer avec ce groupe. Je pense que les gens le découvriront d’eux-mêmes, nous ne voulons pas le dévoiler ou le rendre très explicite. Avant toute chose, notre truc c’est vraiment d’être libre et de penser par soi-même. [À Liz:] Hein ?
Liz : Ouais.
Jus : Je veux que les gens apprécient la musique à leur propre manière, et pas qu’ils se disent qu’ils doivent porter certains vêtements ou faire certains trucs pour pouvoir aimer Electric Wizard. C’est juste de la musique. C’est fait pour t’inspirer d’une manière beaucoup plus fondamentale que simplement la manière dont je vis ma vie.
Maintenant j’ai une question un peu précise : l’occultisme a toujours été un thème récurrent dans vos paroles. J’aimerais parler d’une figure en particulier : Saturne. Il symbolise beaucoup de choses, dont le temps, la mort, les mauvais présages et la fatalité. Vous aviez déjà, entre autres, « Saturn’s Children », maintenant vous avez « Saturn Dethroned », qui est en plus la dernière chanson de l’album. Est-ce que tu pourrais développer la signification de ce titre ?
Mpf… C’est une note très négative sur laquelle s’achève l’album. Ça veut dire : « Eh merde. On est tous niqués. » « Saturn Dethroned », ça sonne comme l’Electric Wizard qui a fait Dopethrone. Nous n’en avions plus rien à foutre [rires]. Rien à foutre ! Ouais… Qu’est-ce que je suis en train de raconter ? [Rires]
Liz [à Jus] : Tu es toujours obsédé par Saturne…
Jus : Ouais. C’est la planète d’Electric Wizard.
Liz : Et on la voit toujours briller par la fenêtre, chez nous, scintiller continuellement depuis la première fois que nous sommes venus dans la maison. Je me disais : « Putain, c’est quoi ce truc ?! » Et c’était Saturne, juste là, par la fenêtre, toujours à la même place. Où que tu sois, assis en bas ou à l’étage, il y a Saturne.
J’ai une vieille gravure astrologique à propos de Saturne où il est écrit que Saturne est toujours signe de mauvais augure et de tragédie…
Oh mon Dieu ! [Rires]
Jus : Il y a beaucoup d’introversion et de trucs occultes liés à Saturne, aussi. Tu peux aussi beaucoup apprendre par toi-même… Ce n’est pas seulement négatif, je ne crois pas. Saturne offre aussi une protection contre la magie noire, si tu en fais ton talisman…
Est-ce que vous avez une tournée de prévue ?
Liz : Beaucoup de choses sont prévues mais rien n’est encore fixé et prêt à être annoncé.
Jus : Ouais. Pour être honnête, nous allons d’abord annoncer une tournée aux États-Unis, et ensuite seulement une tournée en Europe. Simplement parce que si nous annonçons la tournée européenne en premier, les Américains risquent de nous tuer ! [Rires]
Bon, c’est une bonne raison alors !
Ils sont là : « Vous devez faire une tournée ici, putain !! » Ça fait plus de 10 ans que nous n’y avons pas mis les pieds ! Juste un concert ! Nous avons une grosse communauté de fans là-bas. Il faut que nous allions voir nos fans. C’est le principal.
Interview réalisée en face à face le 16 septembre 2014 par Chloé Perrin.
Retranscription, traduction et introduction : Chloé Perrin.
Site internet officiel d’Electric Wizard : www.electricfuckinwizard.com.
Ah bonne idée la question sur Saturne ! Je me posais la même question… Dommage que cette partie-là ne soit pas plus développée que ça.
En tout cas la chanson Saturnine décrit bien la symbolique de Saturne en astrologie.
D’ailleurs, il y a aussi la chanson Scorpio Curse qui fait référence à l’astrologie…
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faut que je me penche vraiment sur Time to die. Dur à écouter comme groupe, mais Black Masses est une PUTAIN DE MASTERPIECE. Un son gras qui file une grosse érection à chaque fois.
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Excellente interview, vraiment 🙂 merci d’avoir abordé la question épineuse de Rise Above Records 🙂
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