L’histoire de Richie Faulkner est presque un conte de fées. A trente ans, il s’est retrouvé embarqué dans l’un des plus gros et influents groupes de heavy metal de l’histoire, pour remplacer le légendaire K.K. Downing et donner la réplique au non moins légendaire Glenn Tipton. Le résultat est que Judas Priest lui a permis de se retrouver sous le feu des projecteurs, autant qu’il aura lui-même permis à Judas Priest de trouver un nouveau souffle grâce à son énergie scénique et à sa créativité en studio, parfaitement en phase avec l’héritage du groupe de Birmingham. Mais on le sait bien, ce dernier a passé la barre des cinquante ans et la question de la retraite plane désormais sur lui. Après tout, quand Richie a rejoint le Priest, c’était bel et bien pour une tournée d’adieu…
C’est donc, en quelque sorte, pour préparer l’après que Richie Faulkner nous revient avec un tout nouveau groupe, baptisé Elegant Weapons, accompagné de Ronnie Romero au chant, ainsi que de Rex Brown (Pantera) à la basse et Scott Travis (Judas Priest) à la batterie pour le studio – tous deux remplacés par Dave Rimmer (Uriah Heep) et Christopher Williams (Accept) pour le live. Mais c’est aussi pour, là encore, faire vivre un héritage : Horns For A Halo, le premier album de la formation, honore les pères fondateurs autant qu’il modernise leur propos. Nous en discutons ci-après avec le guitariste, qui nous parle également de son histoire personnelle et de son aventure avec Judas Priest, dont un nouveau disque ne devrait pas tarder à voir le jour…
« Je sens le metal qui court dans mes veines au quotidien ! C’est marrant à dire, mais c’est vrai. Il y a des câbles, là-dedans, et une soupape mécanique, pour s’assurer que tout fonctionne correctement. Du coup, j’ai littéralement du métal dans le corps. »
Radio Metal : Pour commencer, et avant même de parler d’Elegant Weapons, le 26 septembre 2021, tu as été victime d’un anévrisme de l’aorte sur scène avec Judas Priest. Tu as réussi à finir le set avant d’être conduit à l’hôpital, où tu as subi une opération à cœur ouvert de dix heures. Comment as-tu vécu ce moment, et comment as-tu seulement réussi à finir le concert ? Avais-tu conscience qu’il se passait quelque chose de grave ?
Richie Faulkner (guitare) : Je n’avais pas réalisé sur le moment à quel point c’était sérieux. Ce n’est qu’après mon opération, quand j’ai commencé à me documenter sur ce qui s’était passé, que j’ai compris à quel point j’avais eu de la chance. Je ne savais pas que c’était si grave quand ça s’est produit. J’étais sur scène et j’ai senti quelque chose exploser à l’intérieur. Je me souviens m’être dit que ça n’était pas très normal [rires]. Ce n’est pas le genre de chose qui arrive habituellement ! J’étais étourdi, j’avais l’impression que j’allais m’évanouir. Je savais que quelque chose n’allait pas. Pour moi, si quelque chose clochait à cet endroit-là, qu’est-ce que ça pouvait être, à part le cœur ? Je pensais que je faisais une crise cardiaque. Heureusement, c’était la dernière chanson du concert. Nous jouions à un festival et Metallica était en tête d’affiche. Généralement, nos concerts durent une heure quarante ou quarante-cinq. Ce soir-là, je crois que nous n’avions qu’une heure, et c’était la dernière chanson. C’est l’un de ces coups de chance dont tu n’as pas conscience sur le moment mais qui te sauvent la vie. Si nous avions eu une heure quarante, j’aurais continué à jouer. Mais là, c’était la dernière chanson, nous pouvions sortir de scène et appeler les urgentistes. C’était flippant, mec, sur le moment et après. Découvrir ce qui s’était vraiment passé, à mon âge, et alors que je suis en relativement bonne santé… C’était vraiment choquant à vivre.
Tu as déclaré que tu avais « de la chance d’être en vie ». Est-ce que cela a changé ta vision de la vie en quoi que ce soit ?
L’une des conséquences, c’est que je ne m’arrête plus. Je crois que je me dis que tout peut changer en un clin d’œil. Je suis sorti de l’hôpital en 2021, je me suis retapé et Priest est reparti sur les routes en mars [2022]. J’ai tourné aux États-Unis et en Europe, puis les médecins ont dû me rouvrir. Ensuite, je suis à nouveau parti tourner avec Priest, et nous avons enregistré l’album de Priest et celui d’Elegant Weapons. Je pense que mon moteur pour tout ça, c’est l’idée que nous puissions ne plus être là demain [rires]. C’est positif. J’essaie de voir les choses sous un angle positif. Nous savons tous que nous ne sommes pas immortels, mais on ne sait jamais ce qui nous guette au coin de la rue et qui pourrait tout bouleverser. S’il y a des choses que vous voulez faire, faites-les, parce que vous ne serez peut-être plus là demain.
Est-ce que cela a un impact sur ta façon d’être sur scène ? Y a-t-il des contraintes spécifiques concernant ton boulot en tant que musicien live ?
Non, j’ai eu la chance de pouvoir… Je veux dire, je prends des médicaments, mais à part ça, il n’y a rien de physique. Tout ce à quoi il faut que je fasse attention est interne – ma tension, mon rythme cardiaque, ma densité sanguine, ce genre de chose. C’est en interne que je dois faire attention. Mais concernant la musique, non, il n’y a aucune contrainte… à part mon âge ! Quand on vieillit, ça devient plus difficile de jouer ces conneries ! [Rires]
Cinq parties de ta poitrine ont été remplacées par des composants mécaniques. Te sens-tu encore plus « metal », aujourd’hui ?
Bien sûr ! Je sens le metal qui court dans mes veines au quotidien ! C’est marrant à dire, mais c’est vrai. Il y a des câbles, là-dedans, et une soupape mécanique, pour s’assurer que tout fonctionne correctement. Du coup, j’ai littéralement du métal dans le corps. Mais non, mec, je suis simplement reconnaissant d’être toujours là pour te parler, jouer de la musique et voir ma fille grandir.
Tu es de retour aujourd’hui avec un tout nouveau supergroupe appelé Elegant Weapons. Comment est né ce projet ? Quelle était ta motivation initiale pour fonder le groupe ?
Ma motivation remonte à l’époque où j’ai rejoint Priest. J’ai discuté avec Glenn Tipton, qui m’a dit que le groupe n’allait pas continuer vingt ou vingt-cinq ans. Il aurait aimé que soit le cas, mais j’ai rejoint le groupe lors de la tournée pour Epitaph, qui devait être la tournée d’adieu. Je crois que c’est là que j’ai pris conscience que ça n’allait pas durer éternellement et que je devais penser à ce que j’allais faire après Priest. Je passe mon temps à écrire des trucs – pas vraiment des paroles, mais des idées de paroles, des mélodies, des riffs, des bouts de chanson. J’avais des idées depuis longtemps, mais quand la pandémie est arrivée et que le monde entier a été confiné, c’était l’occasion d’essayer de rassembler ces idées pour voir ce que j’avais. Est-ce que j’avais des chansons ? Est-ce que j’avais un EP, un album, ou même un groupe ? Je voulais que ce soit unique. Je voulais un projet qui ait une identité et un caractère propres, et je pense que c’est le cas. Tout a évolué à partir de là. C’est la pandémie qui m’a permis de me concentrer sur le projet et de le monter. J’ai trouvé les gars pour participer à l’album, et ceux qui feraient partie du groupe par la suite. J’ai eu énormément de chance d’avoir des musiciens formidables sur le disque. D’abord Rex Brown, Scott Travis et Ronnie Romero, puis Christopher Williams d’Accept et Davey Rimmer d’Uriah Heep. C’est un formidable groupe de musiciens attachés au projet. Je ne pourrais pas être plus reconnaissant.
« J’ai discuté avec Glenn Tipton, qui m’a dit que le groupe n’allait pas continuer vingt ou vingt-cinq ans. Il aurait aimé que soit le cas, mais j’ai rejoint le groupe lors de la tournée pour Epitaph, qui devait être la tournée d’adieu. Je crois que c’est là que j’ai pris conscience que ça n’allait pas durer éternellement et que je devais penser à ce que j’allais faire après Priest. »
Judas Priest est plus vieux que toi, et l’idée de voir le groupe prendre sa retraite pèse comme une épée de Damoclès. Elegant Weapons est donc un moyen pour toi de préparer l’après-Judas Priest…
Je crois, d’une certaine façon. Comme je l’ai dit, cette conversation avec Glenn m’a poussé à réfléchir à la vie après Priest. Si je devais créer quelque chose et sortir un album, il serait logique que le projet ait une personnalité que je puisse exploiter après Priest. C’était important pour moi que nous ne soyons pas un groupe avec un seul album à son actif. Je ne voulais pas sortir un album et on n’en parle plus. Je voulais qu’il y ait un album, une tournée, des concerts, un autre disque, encore des disques, et je voulais que le groupe ait un avenir. Donc oui, je dirais que cette discussion avec Glenn m’a fait réfléchir sur l’après-Priest, ce qui arrivera quand le groupe prendra sa retraite. J’espère que nous saurons combiner l’héritage et l’ADN des groupes auxquels nous avons tous participé et les faire avancer.
Y a-t-il d’ailleurs des discussions concernant la retraite de Priest ?
Par pour l’instant. Je veux dire, je pense qu’ils ont conscience – comme nous tous, comme tu viens de le dire – qu’ils ne pourront pas continuer éternellement. Et comme je l’ai dit, quand je suis arrivé, c’était censé être la tournée d’adieu. Heureusement, ça n’a pas été le cas, et nous sommes toujours là treize ans plus tard. Je crois qu’ils savent que les choses vont devoir s’arrêter, mais il n’y a pas eu de discussion concernant le calendrier.
Tu as mentionné le line-up d’Elegant Weapons. Pourquoi avoir opté pour un line-up différent en studio et en live ?
Au début, comme je l’ai dit, j’ai rassemblé les chansons, et j’ai réalisé que j’avais un album. Je voulais donc l’enregistrer. J’ai demandé à Scott, Rex et Ronnie s’ils pouvaient en être, et heureusement pour moi, c’était le cas. Évidemment, Rex a des obligations avec Pantera, ce genre de choses. Quand il a fallu passer à l’étape suivante, à savoir « maintenant que nous avons un album, je veux que le groupe parte en tournée », Rex était occupé avec Pantera, et Scott n’était pas disponible. J’ai donc dû trouver d’autres musiciens qui pourraient prendre leur place et partir sur les routes. Christopher Williams, d’Accept, a d’ailleurs assuré les premières démos de l’album. Scott n’était pas disponible [à ce moment-là], donc j’ai demandé à Christopher de démarrer le processus. Je voulais commencer à enregistrer et avoir la batterie pour que nous puissions poser les autres instruments. Christopher a été intimement impliqué dans cet album dès le départ. Scott est arrivé par la suite et a remplacé les parties qu’il avait jouées. Choisir Christopher était une évidence : il me connaissait, il connaissait l’album et le groupe, c’est un batteur formidable, et lui aussi vient d’un vieux groupe, Accept, qui ne sera pas là éternellement. Prendre cet ADN, l’injecter dans ce groupe et l’aider à avancer dans l’avenir était génial. Même chose avec Davey. Je le connais depuis plus de vingt ans. J’ai joué avec lui. Il est chez Uriah Heep, mais nous avions l’habitude de faire la tournée des clubs et des bars pour jouer toutes les reprises possibles en Angleterre et au Royaume-Uni. Nous sommes de très bons amis, et là encore, lui demander d’assurer la basse pour faire monter le groupe sur scène était une évidence.
Pourquoi Scott et Rex spécifiquement pour cet album ?
Ces treize dernières années, j’ai joué presque exclusivement avec Scott dans Priest, en studio et en tournée, et je lui ai toujours promis que si je devais faire quelque chose en dehors de Priest, je lui donnerais la possibilité de participer s’il le souhaitait. Rex et moi sommes amis avant tout, et je l’ai appelé un jour pour lui demander s’il pouvait jouer sur l’album. Je ne pensais pas qu’il accepterait, mais il a dit qu’il adorerait parce qu’il avait aimé les chansons. Encore une fois, je lui suis vraiment reconnaissant d’avoir pu assurer la basse sur le disque. Évidemment, Scott apporte… On sait comment ces gars-là sonnent. Ce sont des légendes de la musique et du heavy metal. Scott a un son particulier, de même que Rex. Quand Rex m’a envoyé les parties de basse, il y avait ce côté crasseux et une ambiance absolument géniale. C’est instantanément reconnaissable comme étant du Rex Brown. J’ai eu beaucoup de chance de les avoir sur l’album, et j’espère que nous leur rendrons justice sur scène. D’ailleurs, nous allons venir en France. Nous faisons le Hellfest cette année avec Elegant Weapons, et nous avons une série de dates en festival cet été. Nous avons hâte de prendre la route et de jouer de la nouvelle musique aux gens qui ne connaissent pas les chansons.
Davey a rejoint Uriah Heep en 2013, deux ans après ton arrivée chez Judas Priest. Le fait que vous ayez tous deux rejoint presque au même moment un groupe anglais emblématique, ayant passé la barre des cinquante ans, vous a-t-il rapprochés ?
Oui, je pense. Nos carrières ont beaucoup de points communs, avec Davey. Comme je l’ai dit, nous avons fait énormément de concerts de reprises pendant des années et des années, donc nous étions liés à ce niveau – et nous sommes aussi amis. Et puis, comme tu l’as souligné, j’ai rejoint Priest, et lui a rejoint Uriah Heep. Nous avons suivi des chemins similaires. Aujourd’hui, il fait partie du groupe ; je le connais en tant qu’ami, je le connais en tant que musicien, du coup il y a beaucoup de familiarité. Ça ne peut qu’être bénéfique au groupe. Bien évidemment, il fait toujours partie d’Uriah Heep, mais je suis reconnaissant de l’avoir dans le groupe et en tant qu’ami.
« Je voyais aussi le nom comme un lien avec Star Wars. L’arme élégante, c’est le sabre laser d’une époque révolue qu’Obi-Wan Kenobi confie à Luke Skywalker. C’est une relique, datant d’une époque qui n’existe plus. Certains instruments commencent à ressembler à ça. »
Ronnie Romero est un chanteur extrêmement talentueux, ce qui explique pourquoi il est tellement demandé. On dirait que tous les grands guitaristes de hard rock et de metal se battent pour l’avoir : Ritchie Blackmore, Leo Leoni, Michael Schenker, Adrian Vandenberg, et maintenant toi… N’avais-tu pas peur qu’il considère Elegant Weapons simplement comme un projet de plus ?
Quand j’ai eu besoin d’un chanteur, j’ai discuté avec Ronnie de ce que j’avais en tête, et du fait que ces groupes ne seraient pas là éternellement. Vu les groupes dans lesquels il joue, il était totalement sur la même longueur d’onde. Il y a toujours un risque que ce ne soit qu’un projet de plus, mais c’est à nous de faire en sorte que ce ne soit pas le cas, que le groupe évolue et gagne une identité et une longévité. C’est à nous de faire en sorte que ce soit plus qu’un simple tremplin. Ronnie est super. Il est à fond, il a un CV impressionnant, et c’est normal que tout le monde se l’arrache – il est génial ! Il n’y a pas beaucoup de chanteurs comme lui, et j’en ai bien conscience. Mais là encore, c’est à moi d’écrire des chansons qui l’intéressent et qui fassent ressortir sa voix. Pour moi, sur cet album, on entend davantage Ronnie Romero qu’auparavant. Je pense qu’il serait d’accord avec ça. Il y a plus de Ronnie sur cet album. Peut-être qu’il y en aura encore plus à l’avenir. On verra comment les choses se passent.
Plus Ronnie Romero et moins Ronnie James Dio, je suppose…
On porte tous nos influences en étendard, et évidemment, quand Ronnie chante du Rainbow, ces influences s’entendent. Quand il chante nos chansons, vu que ce sont des titres originaux, c’est davantage Ronnie qu’on entend. Mais ces influences ne vont pas disparaître, et il doit en être fier, comme nous le sommes tous. Au niveau des guitares, il y a aussi des influences. Je ne m’en cache pas, je ne m’en suis jamais caché et j’en suis fier. Comme je l’ai dit, il prend cet ADN et il en fait quelque chose pour l’avenir.
Le nom du groupe, Elegant Weapons, se compose de deux mots très contrastés qu’on n’associerait pas naturellement. Comment cette dichotomie te définit-elle, ainsi que ta musique ?
J’ai toujours été attiré par la juxtaposition que tu viens de mentionner. Même dans le titre de l’album, Horns For A Halo, on retrouve les deux facettes d’un même concept. L’arme élégante, ça représente la guitare. C’est une arme. Dans certains cas, les mots peuvent aussi être une arme, et la musique qu’on crée avec ces mots peut être utilisée pour faire ressentir certaines émotions aux gens. Les geishas japonaises sont élégantes, et ce qu’elles font peut être vu comme… Tu vois ce que je veux dire ? Cette juxtaposition entre la beauté et… je ne sais pas comment appeler l’autre facette, mais cette juxtaposition m’a toujours attiré. Et je trouve que dans le metal et le rock, on retrouve aussi cette juxtaposition. Si tu prends une chanson comme « Victim Of Changes », tu as un passage clair magnifique, puis ça explose, c’est heavy, sombre, bruyant, énorme. La juxtaposition est aussi là. Je voyais aussi le nom comme un lien avec Star Wars. L’arme élégante, c’est le sabre laser d’une époque révolue qu’Obi-Wan Kenobi confie à Luke Skywalker. C’est une relique, datant d’une époque qui n’existe plus. Certains instruments commencent à ressembler à ça : ils datent des années 50 et 60, d’une période différente, comme nous. Pour moi, c’était en rapport avec les instruments que nous jouons.
Elegant Weapons est ton bébé. Lorsque tu as rejoint Judas Priest, le groupe avait déjà une histoire vieille de quarante ans que tu as dû respecter et à laquelle tu as dû, en un sens, te plier. Penses-tu qu’Elegant Weapons montre qui est réellement Richie Faulkner en tant que guitariste, artiste et compositeur ?
J’ai toujours eu la possibilité de m’exprimer quand j’écris avec Priest. Ce n’est pas comme si j’étais différent avec eux. Je n’ai pas eu à me couler dans un moule Judas Priest, toutes les influences étaient déjà là. J’ai grandi avec Priest, Maiden, Sabbath, Pantera, UFO ; tout était déjà là. Ce nouveau groupe n’est qu’une nouvelle opportunité pour l’exprimer. Tu as raison, ne pas avoir à se soucier d’une histoire de quarante ou cinquante ans, c’est d’une certaine façon libérateur, mais ça reste la même chose. Les influences qu’on entend sont les mêmes, mais comme je l’ai dit, c’est une nouvelle opportunité. Il y a un peu plus de blues sur cet album que sur le dernier Priest, peut-être. Mais il était important de sortir un album qui ne sonne pas comme du Judas Priest. Ça n’aurait aucun intérêt. Je voulais que ce projet ait sa propre identité, et je pense que c’est le cas.
D’un autre côté, qu’as-tu apporté dans Elegant Weapons de ton expérience de douze ans – jusqu’à présent – avec Judas Priest ?
Je ne sais pas ! [Rires] Je crois que c’est aux auditeurs de décider. Parfois, il faut sortir quelque chose et laisser le monde se faire une idée. C’est difficile à dire pour moi, parce que je suis dedans depuis les douze ou treize dernières années. J’ai juste fait ce que je pensais être la chose à faire, et musicalement, ce que je pensais être le mieux que je pouvais faire. Et c’est la même chose avec ce nouveau groupe. Je rassemble mes influences, j’écris les meilleures chansons possible, et je les sors pour que le public puisse en profiter.
« Parmi mes premières influences, Hendrix était très important, et il l’est toujours. C’était une telle boule d’énergie sonore, et son look ne pouvait pas manquer de m’influencer. Je devais avoir sept ans à l’époque, et je me suis dit : ‘Je veux faire pareil’. »
Tu as déclaré que « sous-accorder permet de créer un son plus moderne, et en utilisant le son classique d’un Marshall Plexi, on obtient cette juxtaposition, ce contraste ». À quel point cela te définit-il en tant qu’artiste ? Dirais-tu que tu te situes quelque part entre l’ancien et le moderne, en tant que guitariste et en tant que compositeur ?
Je dirais que oui. Ça me semble une bonne façon de voir les choses. Je veux dire, je suis un type de quarante-trois ans qui a grandi dans les années 80 avec Maiden, Metallica et Duran Duran. On est qui on est. Je n’essaie pas de réinventer la roue. Si j’essayais de faire quelque chose de complètement moderne, ce ne serait pas sincère. Ce ne serait pas moi. La musique qui m’a influencé date d’une certaine époque, mais on vit en 2023, et je crois que le son de l’album reflète ça. Il y a les influences du passé, mais ça sonne comme un album de 2023. Je pense aussi que le fait d’avoir Andy Sneap en tant que producteur aide à faire passer ça. Il a grandi avec le même genre de musique, mais c’est aussi un producteur en 2023. Il a la même dynamique, et je crois que c’était très important que cette dynamique se retrouve dans la production. Au niveau du son, il a parfaitement compris ce que je cherchais. C’est le même genre de gars, il écoute les mêmes groupes, mais il sait comment être pertinent en termes de son en 2023.
Penses-tu que le fait de désormais jouer avec Andy Sneap au sein de Judas Priest change quelque chose à ta relation avec lui en tant que producteur ?
Nous passons notre temps à essayer de nouveaux trucs en matière de guitare et d’équipement. Nous cherchons toujours de nouvelles façons de capturer le son en studio, parce que nous voyons désormais l’équipement live, les amplis et ce genre de trucs sous un autre angle. Surtout, Andy et moi nous envoyons des messages tous les jours depuis au moins les cinq dernières années. Tous les jours. On dirait que nous sommes mariés ! On parle de musique, de trucs personnels, etc. Et c’est le genre de personne à qui je peux faire confiance si j’ai besoin d’un avis objectif, parce que nous sommes vraiment très proches. Si quelque chose peut être mieux fait, mieux joué, il te le dira. Il ne se soucie pas de ton ego. Il veut ce qu’il y a de meilleur pour l’album et le groupe. Et de la même façon, si tu fais quelque chose de bien, il te le dira. Mais tu peux avoir confiance en son avis objectif, parce que c’est le genre de producteur qu’il est.
L’album comporte une ballade, « Ghost Of You », qui est très bluesy. À ce sujet, tu as déclaré que cette chanson était « aussi acoustique que possible » pour toi, parce que « l’acoustique et [toi] ne font pas bon ménage ». Cela veut-il dire que tu as débuté directement sur une guitare électrique, que tu n’es pas passé par une phase acoustique, contrairement à beaucoup de guitaristes ?
Si c’est le cas, je ne m’en souviens pas. J’ai une guitare acoustique. Il y en a une dans le coin, là. C’est juste que ça ne m’attire pas. Je ne suis pas attiré par une guitare acoustique de la même façon que par une guitare électrique. J’en utiliserai une si la chanson l’exige, s’il y a besoin d’une texture ou quelque chose du genre, mais il est très rare que je sois attiré par une guitare acoustique et que j’écrive une chanson dessus. C’est toujours une électrique. Donc non, « Ghost Of You » n’est pas acoustique, mais elle n’est pas aussi heavy et il n’y a pas autant de distorsion que sur d’autres chansons. C’est une guitare électrique avec le volume baissé, du coup la distorsion diminue aussi. Mais qui sait, si quelque chose est adapté à la guitare acoustique… Peut-être que ce n’est qu’une phase. Peut-être que je n’ai pas encore correctement découvert la guitare acoustique et que ça viendra. Mais pour le moment, je suis tout électrique.
Peux-tu nous parler un peu de tes années de formation en tant que guitariste ? Comment as-tu découvert l’instrument ?
C’est grâce à mon père. Il avait des amis qui jouaient dans des groupes à l’époque, et ce sont ses propres influences qui m’ont initié – Jimi Hendrix, Black Sabbath, Thin Lizzy, ce genre-là. Et le fait d’entendre et de voir Hendrix – pas en personne, évidemment, mais en VHS, ou sur Electric Ladyland, c’était… Qui n’a pas été influencé par ça ? C’était une telle boule d’énergie sonore, et son look ne pouvait pas manquer de m’influencer. Je devais avoir sept ans à l’époque, et je me suis dit : « Je veux faire pareil. » Tout a commencé avec mon père, puis il y a eu Jimi, et je suis ensuite passé à Maiden et Metallica. J’ai rejoint un groupe de reprises à treize ou quatorze ans ; nous jouions tout, de Jeff Beck aux Rolling Stones en passant par les B-52’s. Nous jouions tout : Priest, Maiden, Sabbath, Purple, qui tu veux, on le jouait. Tu es forcément influencé quand tu joues ce genre de musique quatre soirs par semaine. Ça ressortira forcément d’une façon ou d’une autre. Mais parmi mes premières influences, Hendrix était très important, et il l’est toujours.
« Les membres du groupe ont tous été choisis par Accept, Uriah Heep, Rainbow et Judas Priest, et il est de notre devoir d’aller de l’avant. Comment pourrions-nous faire autrement ? C’est ce que nous sommes, et nous avons presque l’obligation de reprendre le flambeau. »
Concernant la chanson-titre, tu as déclaré : « Ça parle de la façon dont on justifie les choses négatives que l’on fait. Quand viendra le jour du Jugement, est-ce que les anges prendront nos cornes pour une auréole ? » Crois-tu vraiment au Jugement dernier ? As-tu des croyances religieuses ou spirituelles ?
Non ! [Rires] Je trouvais simplement le concept intéressant. J’aime l’idée et l’imagerie du paradis et de l’enfer. Encore une fois, la juxtaposition pointe le bout de son nez. Le paradis, l’enfer et les images qui leur sont associées, tout ça soulève beaucoup de questions. Tout est hypothétique. Comme tu l’as dit, est-ce que les anges pourraient prendre nos cornes pour une auréole ? Je n’ai jamais vu d’ange. Ce serait génial s’ils existaient. Est-ce que ce ne serait pas super s’ils volaient autour de nous ? [Rires] Ça donne matière à réfléchir, mais ce n’est que de l’imagerie. On a tendance à résumer l’existence humaine avec ce type d’images, et nous n’avons fait que poursuivre dans cette voie.
Penses-tu que l’ambiguïté entre les saints et les pécheurs soit au cœur du heavy metal et des metalleux ?
C’est une bonne question. C’est absolument un sujet de réflexion. En tant qu’humains, je pense que nous faisons tous des choses qui sont vues comme mal, et d’autres qui sont considérées comme bien. Le metal est peut-être également perçu comme ça. Peut-être que certaines personnes écoutent une chanson de metal et se disent : « Oh, c’est la musique du diable », alors que les paroles parlent de quelque chose de complètement différent. Il peut y avoir cette juxtaposition. Mais en ce qui concerne les metalleux, je ne sais pas. Il leur arrive d’avoir mauvaise réputation, ça c’est sûr. La perception peut être négative, mais pour moi, la communauté metal est très chaleureuse – je le vois surtout avec ce qui m’est arrivé. Beaucoup de metalleux m’ont envoyé des messages et des vidéos de soutien, ce genre de choses. Nous sommes une super communauté. Du coup, je ne sais pas. C’est une bonne question. Encore une fois, ça donne à réfléchir, et c’est ce que je cherchais à faire avec le titre de l’album.
As-tu vécu cette expérience quand tu étais plus jeune ? As-tu été mal vu en raison de la musique que tu écoutais ?
Non, je ne crois pas. Je ne pense pas avoir jamais eu cette expérience. Je suis sûr que certains parents devaient nous regarder de travers. Peut-être qu’ils pensaient ce genre de chose. Je n’en ai jamais fait l’expérience directement, mais peut-être qu’ils pensaient que j’écoutais la musique qu’il ne fallait pas ou quelque chose comme ça. Peut-être que tous les parents font ça et que tous les gamins vivent ce genre d’expérience. Beaucoup de gens racontent qu’ils écoutaient Black Sabbath quand ils étaient mômes et que leurs parents étaient contre. C’est une étape normale quand on grandit.
Tu as décrit Elegant Weapons comme « un mélange de Jimi Hendrix, Priest, Sabbath, Ozzy en solo et Black Label Society ». À quel point est-il important pour toi de perpétuer l’héritage des titans du heavy metal des années 70 et 80 ? As-tu parfois peur qu’on le perde avec la nouvelle génération ?
Pour la première question, je pense que c’est très important, parce que c’est ce que je suis. C’est ce nous sommes en tant que musiciens dans le groupe. C’est de là que nous venons, et nous ne pouvons pas faire autrement que d’essayer de préserver ça. C’est la musique avec laquelle nous avons grandi, la musique qui nous excite. Je crois qu’il est important de… C’est comme ce que je te disais pour les guitares. Certaines d’entre elles datent des années 50, et les plus jeunes n’ont pas forcément l’occasion de voir ce genre de guitares, ou des vieux pianos, ou des Stradivarius, par exemple. Pour répondre à ta deuxième question, tant que nous allons de l’avant avec cet héritage – ou que nous essayons, en tout cas –, il y a une chance qu’il ne disparaisse pas. Faire quelque chose de cet héritage est presque un devoir. Les membres du groupe ont tous été choisis par Accept, Uriah Heep, Rainbow et Judas Priest. Nous avons tous été choisis pour faire partie de ces groupes, et il est de notre devoir d’aller de l’avant. Comment pourrions-nous faire autrement ? C’est ce que nous sommes, et nous avons presque l’obligation de reprendre le flambeau. Tant que nous faisons ça, il y a moins de risque que tout ça ne disparaisse.
« Judas Priest a eu une énorme influence sur des millions de guitaristes, et le groupe a eu une énorme influence sur le heavy metal et tout ce qui en a découlé. Du coup, en le rejoignant, tu accèdes à un autre niveau. Tu changes en tant que musicien. Avant ça, tu affinais ton art et ton jeu à la guitare, et maintenant, tu utilises tes capacités pour continuer à faire avancer l’un des plus grands groupes de metal de l’histoire. »
Tu as donné un nouveau souffle à Judas Priest autant que le groupe a donné un nouveau souffle à ta carrière, car c’est grâce à cela que la plupart des gens te connaissent, même si tu avais sorti plusieurs albums avant. Penses-tu être un musicien ou un artiste – voire un homme – différent aujourd’hui par rapport à 2011 ?
Je pense, oui, absolument. Quand tu rejoins un groupe comme Priest, tu es propulsé sur la scène mondiale et tu remplaces [un membre de longue date]. Dans mon cas, KK Downing a fait partie du groupe pendant quarante ans. Il a eu une énorme influence sur des millions de guitaristes, et le groupe a eu une énorme influence sur le heavy metal et tout ce qui en a découlé. Du coup, en rejoignant Judas Priest, tu accèdes à un autre niveau. Tu te demandes davantage : « En tant que guitariste, qu’est-ce que je peux faire pour préserver l’histoire que ces gars ont forgée ? » J’ai commencé à me demander ce que j’allais dire au niveau musical, comment j’allais écrire des chansons et des soli qui veulent dire quelque chose. Tu changes en tant que musicien. Avant ça, tu affinais ton art et ton jeu à la guitare, et maintenant, tu utilises tes capacités pour continuer à faire avancer l’un des plus grands groupes de metal de l’histoire. Comment peux-tu exploiter ces capacités au maximum, aider le groupe à grandir et t’inscrire dans cet héritage ? C’est très différent, et ça fait vraiment de toi un musicien différent.
Comme tu l’as dit, tu as dû remplacer un guitariste très influent quand tu as rejoint Priest. Comment as-tu abordé ton rôle à ce moment-là ? Comment as-tu trouvé un équilibre entre ta propre identité et le respect de celle qui avait déjà été établie ?
C’est exactement ça. C’est exactement ce que j’ai essayé de faire. Il faut absolument respecter cet héritage – pas seulement celui de KK, mais celui du groupe également. Ils ont toujours été… Par exemple, si on leur disait : « Vous ne devriez pas faire ça », ils répondaient : « On va totalement faire ça, parce que c’est notre truc, on y croit, c’est ce qu’on est, et on ira à contre-courant s’il le faut. » Quand tu rejoins un groupe comme ça, tu te dois d’avoir la même mentalité. Et rester soi-même fait aussi partie de ça, comme tu l’as dit. Quand tu joues autant de reprises et de soli pendant des années, tu apprends à y injecter un peu de ta propre personnalité. Quand j’ai rejoint Priest, j’ai cherché à rendre hommage à ces soli. Mais ce qui est génial, c’est que Ken était aussi plutôt spontané, et il lui arrivait de jouer différemment en live. Si tu écoutes le solo de « Sinner » sur différentes tournées, il change totalement. Je crois qu’Hendrix faisait la même chose. Je pense que ça m’a permis d’adopter une certaine liberté artistique, d’être un peu plus moi, tout en incluant la marque de fabrique de ce qui avait été fait avant. Donc tu as absolument raison. C’est comme ça que j’ai essayé de l’aborder : en respectant cet héritage, mais en me respectant aussi en tant que musicien et en ajoutant un peu de ma personnalité là-dedans. Mais au final, il faut respecter le passé. Je venais de rejoindre le groupe – j’étais là pour jouer leur musique. Mais au fil du temps, tu peux y mettre un peu plus de ta propre personnalité. Quand nous sommes entrés en studio, j’ai eu une vraie opportunité de faire ça, en écrivant des chansons avec le groupe et en proposant mes propres leads et mes propres mélodies. Il y avait beaucoup plus d’individualité. Et je continue d’en ajouter au fur et à mesure que la carrière du groupe se prolonge.
KK a joué avec le groupe lors de la cérémonie d’investiture au Rock And Roll Hall Of Fame. Comment as-tu vécu cette expérience de ton côté ?
C’était génial. À l’exception des tout débuts où le groupe était un quatuor, Priest a toujours été un groupe à deux guitares. Il n’y a eu qu’une occasion où ça a été un groupe à trois guitares, et j’étais là [rires]. J’étais ravi d’en être. C’était génial de rencontrer KK, de discuter et de jouer avec lui. Il sonnait super bien. Il a super bien joué. Et ça avait de la gueule, avec les trois guitares et les deux Flying V. J’ai trouvé ça incroyable. J’étais simplement ravi d’être là, et honoré que le groupe me permette de représenter Judas Priest en 2022. Être l’une de ces trois guitares était dément, mec. J’ai vraiment apprécié.
Quelle est la relation entre KK et le reste du groupe aujourd’hui ?
La même que ces dernières années, malheureusement. Je n’ai aucun problème avec KK. Je l’ai trouvé très cool et nous nous sommes bien entendus. Mais évidemment, je n’ai pas la même relation avec lui que les autres gars. Les choses sont ce qu’elles sont, malheureusement, mais j’ai trouvé génial de pouvoir le rencontrer – et de rencontrer Les Binks par la même occasion. [KK] a joué dans des groupes de reprises avec Les. C’était super de discuter avec eux et de savoir où ils en étaient professionnellement. Je crois que KK a un deuxième album qui doit sortir. Je ne suis pas certain de quand, mais je crois qu’il y en a un deuxième. Je suis sûr qu’il a des dates en Europe cette année. J’espère pouvoir le croiser sur le circuit et jouer quelques chansons avec lui. Qui sait ? Je crois qu’on a quelques titres en commun ! [Rires]
« Il n’y a eu qu’une occasion où Judas Priest a été un groupe à trois guitares, et j’étais là [rires]. J’étais ravi d’en être. C’était génial de rencontrer KK, de discuter et de jouer avec lui. »
Steve Harris a déclaré que, s’il avait dû arriver quelque chose à un des guitaristes d’Iron Maiden, il t’aurait choisi pour le remplacer. Penses-tu que tu que tu aurais été autant à ta place chez Iron Maiden que tu l’es chez Judas Priest ?
Je pense qu’il cherchait simplement à être sympa en disant ça. Je ne pense pas qu’il fallait le prendre au pied de la lettre. À mon avis, il disait seulement qu’il me trouvait bon guitariste. Je crois qu’il faut le comprendre comme ça. Mais j’aurais pu aller chez Maiden, c’est sûr ! [Rires] Il y a pas mal de groupes que j’adorerais rejoindre, même pour un seul concert. Priest en faisait partie ; Maiden, Metallica, Alice Cooper, Queen… Il y a beaucoup de groupes avec qui j’adorerais faire ne serait-ce qu’une chanson. Mais si Steve m’appelait un jour pour me dire qu’il veut quatre guitaristes, comment pourrais-je dire non ?
Question piège : si tu avais eu le choix, aurais-tu opté pour Maiden ou Priest ?
[Éclat de rire] Je vais dire Judas Priest. En fait, je ne peux pas répondre à cette question. Priest a changé ma vie et j’adore ces gars. Et encore une fois, Maiden a déjà trois guitaristes, ils n’ont pas besoin de plus. J’aurais choisi Priest, clairement.
Un nouvel album de Judas Priest est dans les tuyaux…
Effectivement. Il est dans les tuyaux depuis un moment, maintenant. Évidemment, la pandémie a tout arrêté pendant un temps. Quand le confinement a été levé, nous sommes retournés sur la route, donc nous ne pouvions pas enregistrer à ce moment-là. Mais nous avons réussi à nous débrouiller autour du planning de tournée, et l’enregistrement est presque terminé. Rob doit encore finir quelques parties de chant, mais ça sonne très bien. C’est toujours génial d’entendre Rob chanter des titres inédits de Priest. Tu commences avec une petite idée, et elle évolue jusqu’à devenir une vraie aventure quand Rob chante dessus et l’emmène carrément sur une autre planète. L’album n’est pas fini, mais presque. Je ne peux pas te dire quand il sera bouclé ni quand il sortira, mais nous en voyons le bout. Cet album sera un peu plus progressif que Firepower, dans le sens où il aura un peu plus de rebondissements musicaux que ce dernier. Firepower est un peu plus direct, alors que celui-là peut se rapprocher de chansons comme « Sinner » ou « Tyrant ». C’est progressif dans ce sens-là. Ce n’est pas du Rush, ça reste Judas Priest, mais c’est un tout petit peu plus aventureux. Donc, je pense que ce sera un album intéressant.
C’est drôle parce que lorsque tu parles de Judas Priest, c’est du point de vue à la fois d’un membre du groupe et d’un fan.
Absolument. En tant que fan, j’ai l’opportunité d’entendre du nouveau Priest avant tout le monde. Mais je joue aussi un rôle dans la création des chansons. Donc encore une fois, j’ai la responsabilité dont j’ai parlé tout à l’heure, ce devoir de faire le meilleur morceau possible, le meilleur riff possible, pour qu’il soit meilleur que le précédent. Ça fait cinquante ans qu’ils font ça, et je pense que s’ils existent depuis tout ce temps, c’est parce qu’ils ont toujours cherché à faire mieux – un meilleur album, une meilleure tournée, une meilleure production. Et ils adorent faire ce qu’ils font. Donc une part de moi est le fan et une autre partie est un rouage dans cette machine qui s’efforce de faire un meilleur riff, une meilleure chanson ou un meilleur album. Tu as parfaitement raison : il y a le fan et il y a le membre du groupe. Je suis dans une position incroyablement privilégiée.
Ce n’est pas déroutant parfois ? N’as-tu pas parfois l’impression d’avoir un dédoublement de personnalité ?
Je ne crois pas. Peut-être que c’était le cas avant, au début, mais pas maintenant. Ça fait partie du processus naturel. Je serais toujours un fan de Priest. Rob est un fan de Priest. Je pense que cet élément est en chacun de nous, nous sommes fans de la musique du groupe, de ce qu’il représente et des fans eux-mêmes qui leur ont donné vie pendant cinq ans. D’un autre côté, nous sommes tous des créatifs et nous aimons créer de la nouvelle musique. Comme je l’ai dit, au début du processus, j’ai peut-être ressenti ça, mais ce n’est plus le cas maintenant. Ça fait partie de l’aventure.
La dernière fois que je t’ai vu, c’était dans le théâtre antique de Vienne. Comment était-ce jouer dans un tel lieu ?
Je me souviens de ce théâtre. C’est toujours une aventure de jouer dans ce genre de lieu historique. Plein de groupes sont passés avant toi et il y en aura plein d’autres après. Il est clair qu’il y a un respect pour le pays, l’histoire et le lieu. Ça crée une plus grande atmosphère. C’est comme si on jouait dans le Colisée ou à côté des pyramides. Il y a une atmosphère qui s’en dégage qu’on ne peut oublier.
Interview réalisée par téléphone le 4 avril 2023 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Tiphaine Lombardelli.
Photos : Jeremiah Scott (1), Matt Owen (2, 6, 8) & Nicolas Gricourt (3, 5, 7).
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