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Interview   

Flotsam And Jetsam se remet à flot


D’une certaine manière, Flotsam And Jetsam est un groupe maudit, prisonnier de son lointain passé dans la tête de certaines personnes qui, d’après le chanteur Eric AK lui-même, « n’écoutent rien au-delà de Doomsday For The Deceiver ou No Place For Disgrace », ses deux premiers albums, et surtout trop peu évoqué pour ce qu’il est devenu et est aujourd’hui. La carrière de Flotsam And Jetsam est pourtant caractérisée par un excellent power/thrash ouvert fait par d’excellents musiciens et un des meilleurs chanteurs du genre. Mais la carrière de ce groupe c’est aussi, et c’est ce qui ressort à certains moments dans l’interview qui suit, un chemin pavé de désillusions et d’embûches.

Mais de motivation il est plus que jamais question aujourd’hui dans les rangs de Flotsam And Jetsam qui sort aujourd’hui le successeur à l’excellent The Cold. Il s’appelle Ugly Noise et voit le groupe revenir sous son line-up le plus créatif, celui qui a donné naissance à la bombe Drift en 1995, et la participation à l’écriture de quelques morceaux de son premier bassiste, un certain Jason Newsted. Eric AK, conscient de son potentiel sous sa forme actuelle, nous exprime sa volonté de repartir à la conquête des cœurs métalliques et de refaire briller la marque Flotsam And Jetsam dans le paysage metal. « Notre pic créatif est encore à venir », affirme-t-il convaincu.

On en parle ci-après.

« Nous avons répondu à des questions sur Jason Newsted dans chaque interview ces vingt-cinq dernières années ! (Rires) »

Radio Metal : Craig Nielsen a quitté le groupe en 2011. C’était une surprise car il paraissait très motivé par Flotsam And Jetsam. Que s’est-il passé ?

Eric ‘AK’ Knutson (chant) : Lorsque Craig était dans le groupe, c’était plus un hobby qu’une carrière ou un business. Lorsque j’ai décidé de tenter à nouveau le coup en essayant d’en faire une carrière et notre boulot, j’ai pensé que cela tombait sous le sens de rappeler les membres d’origine.

Je me souviens d’un des membres du groupe qui parlait de son « éternelle détermination à maintenir le groupe uni et à jouer partout dans le monde. » Par rapport à ça, ne penses-tu pas que la motivation de Craig pour faire bouger les choses manquera au groupe ?

C’était une situation où on gagnait d’un côté et perdait de l’autre. Craig calait autant de shows qu’il le pouvait pour nous maintenir sur la route, mais il le faisait pour si peu d’argent que ça n’avait aucun sens. Nous perdions de l’argent sur les trajets et faisions croire aux promoteurs qu’ils n’avaient pas à nous payer plus. D’une certaine manière, ça a vraiment fait du mal au groupe.

Kelly David-Smith (batteur) est revenu dans le groupe quatorze ans après l’avoir quitté, ce qui fait de ce line-up le même qui a enregistré Cuatro, Drift et High. Beaucoup de fans voient Cuatro et Drift comme les meilleurs albums de Flotsam And Jetsam. Dirais-tu qu’il s’agissait là de votre pic créatif ?

Non, car en fait je pense que notre pic créatif est encore à venir. L’époque de Cuatro et Drift était celle où les membres du groupe se sentaient le plus à l’aise les uns avec les autres et avec sa créativité. Nous sommes de retour à ce stade maintenant avec du nouveau matériel.

Est-ce que ça t’ennuie que la plupart des gens connaissent Flotsam And Jetsam pour votre premier album, Doomsday For The Deceiver, uniquement parce que Jason Newsted a joué dessus et ont tendance à passer à côté du reste de votre discographie ?

Ça arrive parfois, mais pas aussi souvent qu’on peut le croire. Ça me chiffonne un peu que des gens n’écoutent rien au-delà de Doomsday For The Deceiver ou No Place For Disgrace. Ils ont écouté nos deux premiers albums et c’est tout : ils ne prennent même pas la peine de fouiller le reste de ce que nous avons fait pour voir ce que nous sommes devenus. Je crois qu’aujourd’hui, en termes de composition, nous sommes meilleurs que nous ne l’avons jamais été et je suis vraiment fier de notre nouvel album. Je pense qu’il se portera bien.

Qu’est-ce que cela fait d’être à nouveau avec ce line-up, presque quinze ans après ?

C’est comme remettre un vieux t-shirt : c’est très confortable ! (Rires) Nous nous entendons à merveille, ça a toujours été le cas, même lorsque les membres n’étaient pas dans le groupe. Je sors toujours avec eux, parle avec eux comme s’ils étaient mes frères : c’est très confortable d’être ensemble et ça colle vraiment entre nous.

Craig Nielsen nous avait dit il y a deux ans que « lorsque Mark Simpson est arrivé, ça a permis à tout le monde de commencer à devenir fainéant » et que ce serait « vraiment difficile de le remplacer en tant que compositeur ». Est-ce que le reste du groupe s’est forcé à composer à nouveau, je pense en particulier à Mike Gilbert et Jason Ward qui ont été d’excellents compositeurs dans le passé…

Michael Gilbert a écrit la majeure partie de l’album, même si nous avons reçu un peu d’aide de Jason Newsted. J’ai écrit presque toutes les paroles. Ça s’est fait très facilement et naturellement et nous n’avons pas trop eu à nous casser la tête : j’allais chez Michael où il me montrait des riffs sur lesquels il avait commencé à travailler et très vite nous nous retrouvions avec une chanson et ensuite nous en commencions une autre. Jusqu’ici, je crois que c’était la bonne étape à suivre.

« J’aime chanter à peu près n’importe quoi qui se trouve en dehors du metal, même le rap. J’aime ce que ma voix peut faire et j’aime l’utiliser autant que possible, peu importe si quelqu’un écoute ou pas. »

Il y a eu de nombreux allers et venues dans Flotsam And Jetsam ces dernières années. Comment le groupe parvient-il à maintenir sa cohésion dans une telle situation ?

Ça a été très dur. Nous avons dû combattre le sentiment qui nous faisait dire : « Oublie ça ! Abandonne », et continuer à aller de l’avant. Tu sais, à chaque fois que nous faisons quelque chose, nous avons des problèmes qui surgissent au tournant et que nous devons combattre vigoureusement pour ne pas céder et se retrouver à terre. Nous devons les traverser et continuer ce que nous faisons. Et nous y arrivons plutôt bien.

Jason Newsted a coécrit quelques chansons sur Ugly Noise. Comment s’est-il retrouvé impliqué dans l’écriture de l’album ?

Jason et Michael se sont retrouvés pour trainer ensemble. Jason est venu en ville pour jammer avec nous et s’amuser et nous avons fini avec quatre chansons. Tu sais, nous étions frères en 1982 et de temps en temps, il vient ici pour jammer, sortir ensemble et être potes. Jason a dit que ces chansons ont été faites avec amour, que nous pouvions les avoir et faire ce que nous voulions avec.

Avez-vous pensé à le réintégrer au groupe ?

Nous en avons parlé un peu mais Flotsam And Jetsam ne représente pas vraiment la direction vers laquelle il veut aller. Son nouveau groupe, Newsted, est plus son type de rythme et son style, et il est très bon là dedans. Je pense qu’il a fait le bon choix en faisant son propre truc. C’est très lui.

N’as-tu pas pensé qu’en ayant Newsted impliqué dans la composition de l’album cela n’allait pas aider le groupe à sortir de l’image « d’ancien groupe de Newsted » et même, au contraire, la raviver ?

Oui, nous étions un peu inquiets de ça. Tu sais, nous avons répondu à des questions sur Jason Newsted dans chaque interview ces vingt-cinq dernières années ! (Rires) C’est un super type, un bon ami, donc ça ne nous pose pas de soucis de répondre à des questions à son sujet. Il a sacrément réussi, donc on ne peut vraiment pas éviter ça. Entre le fait d’avoir à répondre à une palanquée de questions et ne pas le voir faire partie de ça, nous préférons répondre à une palanquée de questions à son sujet.

Le nouvel album a, dans son ensemble, une atmosphère plutôt sombre, d’où cela vient-il ?

C’est une bonne question. A une époque, j’avais la réponse à ça ! Je ne crois pas que ce soit une habitude, c’est simplement là où mon esprit se retrouve lorsque j’écris des paroles. Tu sais, j’avais à une période toutes sortes de choses à blâmer : l’industrie, des anciens membres, des anciens managers… Mais il n’y a pas vraiment quoi que ce soit à accuser pour mes sombres paroles de chansons : c’est simplement ainsi que ça sort.

Il y a des effets de synthétiseurs ici et là dans l’album et même un piano sur la chanson éponyme. Est-ce que vous avez voulu expérimenter un peu avec des sons et des arrangements ?

Nous n’avons jamais été un groupe qui se muselle lui-même, donc si une partie de piano est ce que nous sentons, alors c’est ce que nous mettons. Nous ne nous inquiétons pas de savoir à quel point ce sera « metal » ou pas et comment cela sera perçu. Nous écrivons une chanson simplement de la manière dont nous l’imaginons devoir sonner, donc si elle doit ressortir avec du piano, elle ressortira avec du piano. Si c’est de la cornemuse, c’est ce que nous ferons. Nous écrivons des parties que nous pensons nécessaires pour les chansons. Peu importe quelles en seront les répercussions, que cela signifie avoir à embaucher quelqu’un pour jouer ces parties avec nous en tournée ou faire des samples ou peu importe, si ça fait partie de la chanson, c’est que ça doit être là.

« Ça peut payer mes factures et me permettre de partir sur la route et traîner avec les fans, c’est vraiment tout ce dont j’ai besoin. »

Craig Nielsen nous avait dit que “ce serait vraiment gâcher le talent d’AK si tout ce qu’on faisait, c’était de lui balancer des riffs lourds et du speed metal à la figure tout le temps.” Qu’en penses-tu ?

Je ne sais pas si c’est gâcher mon talent. J’aime chanter à peu près n’importe quoi qui se trouve en dehors du metal, même le rap. J’aime ce que ma voix peut faire et j’aime l’utiliser autant que possible, peu importe si quelqu’un écoute ou pas. J’aime le metal, ses fans, les groupes de metal là dehors dont je suis un grand fan, donc ce n’est clairement pas gaspiller mon talent que de faire la musique que nous faisons.

Tu avais quitté le groupe en 2001 parce que tu étais démotivé, avant de revenir en 2004. De ce que je sais, pendant les années chez MCA Records et Elektra Records, vous aviez beaucoup de budget pour faire vos albums mais n’avez jamais récolté d’argent, bien que des managers et des agents, eux, en faisaient. Au final, t’es-tu fait à l’idée que tu ne feras peut-être jamais vraiment d’argent avec Flotsam And Jetsam ?

Tu sais, passé un temps, nous avions en tête le mode de vie des rock-stars américaines : nous devions rouler installés à l’arrière d’une limousine, vivre dans de grandes villas et aller faire la fête en permanence. Lorsque nous sommes redescendus sur terre, nous nous sommes rendu compte que nous pouvions vivre décemment avec ça sans avoir de boulot à côté. C’est alors devenu une entité plus confortable et facile à gérer. Nous devons simplement nous protéger des erreurs que nous avons commises dans le passé et avancer à partir de là. Ça peut payer mes factures et me permettre de partir sur la route et traîner avec les fans, c’est vraiment tout ce dont j’ai besoin.

Qu’est-ce qui t’a motivé à continuer avec le groupe jusqu’à ce jour ?

J’ai attrapé Kelly Smith et nous nous sommes assis, nous avons eu un petit meeting et parlé à quel point nous voulions être sérieux avec ça ou de quelle direction nous allions prendre. Plus nous en parlions, plus nous devenions excités : nous voulons mettre un grand coup pour en faire la seule chose que nous faisons dans notre vie. Nous prenons ça très au sérieux. Nous voulons ressortir aux yeux du monde entier et voir si nous pouvons faire en sorte d’amener ça plus loin. J’ai été prêt à jeter l’éponge à plusieurs reprises parce que c’était devenu plus un désagrément qu’autre chose. Je n’obtenais pas vraiment grand chose en retour, mis à part l’amour des fans, mais dès lors que je me suis rendu compte que l’amour des fans m’était plus cher que je ne le pensais, alors la décision de revenir et d’essayer à nouveau était facile.

Interview réalisée le 8 avril 2013 par téléphone par Metal’O Phil
Fiche de questions : Spaceman
Introduction : Spaceman
Retranscription : Jean Martinez – Traduction(s) Net
Traduction : Spaceman

Facebook officiel de Flotsam & Jetsam : flotsamandjetsam.official

Album Ugly Noise, sorti le 16 avril 2013 chez Metal Blade



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