Mike Portnoy, plus que jamais libre comme l’air depuis son départ de Dream Theater et presque fatigant à lancer sans cesse de nouveaux projets avec les plus prestigieux musiciens, a été l’architecte fédérateur de cette nouvelle formation qu’est Flying Colors. Pour rappel, cette dernière est composée de Steve Morse (Deep Purple), Neal Morse (Ex-Spock’s Beard, Transatlantic…), Dave LaRue (Steve Morse Band, Dixie Dregs), Casey McPherson (Alpha Rev) et Mike Portnoy (bientôt tous les groupes du monde). Tous ne se connaissaient pas. Pour élaborer ce line-up, Mike s’est appuyé sur les différentes connexions qui s’étaient faites par le passé. Lui connaissait, voire avait travaillé avec chacun d’eux. Inutile de rappeler le nombre de fois que lui et Neal Morse ont fait des albums ou tourné ensemble. Et Steve Morse avait déjà l’habitude de jouer avec Dave LaRue. Morse étant d’ailleurs l’un des guitaristes ayant le plus influencé John Petrucci (Dream Theater) dans son jeu, Portnoy était donc en terrain connu. Il y avait donc fort à parier que l’osmose se fasse de manière évidente.
Dans la vidéo de présentation du disque, montrant le groupe le composer et l’enregistrer, chaque membre décrit avec amusement l’appréhension face à l’inconnu de ce « blind date » (NDLR : « rencard arrangé » en français), mais aussi l’alchimie aussi immédiate, agréable que surprenante, qui s’est créée. Une spontanéité d’ailleurs sous entendue par l’introduction du premier titre de l’album, « Blue Ocean », où l’on entend des bribes de conversations entre musiciens en studio, visiblement incertains de connaître la structure du morceau. Comme pour dire que ce disque a été composé et enregistré dans la foulée et d’une seule traite. Et il est incontestable, à l’écoute de ce premier disque éponyme, qu’il a été enregistré dans la bonne humeur et que tous les cinq ont plaisir à jouer ensemble. Mike Portnoy avait vu juste.
Musicalement, comme l’on pouvait s’y attendre et comme cela était annoncé par le groupe lui même, il s’agit d’un mélange, certes diversifié mais cohérent des sensibilités de ces différents musiciens. Il n’est donc pas étonnant que la patte Neal Morse/Transatlantic, couplée avec le duo Steve Morse/Dave LaRue, soit dominante. Au regard de cela, on pourrait s’attendre à un album axé sur le jam. Mais tel n’était pas l’objectif : ce disque est très canalisé et présente un aspect pop dans sa recherche de la simplicité, de l’accroche mélodique et dans le format des chansons. Comme si Transatlantic avait décidé de sortir un album de singles. « The Storm » aurait pu être écrite par Dredg, « Shoulda Coulda Woulda » présente la rage et l’approche vocale d’un Muse. Les harmonies vocales sont travaillées et comprennent jusqu’à trois voix. Le fait que Neal Morse soit un fan absolu des Beatles (l’homme leur a justement rendu hommage avec Mike Portnoy via le tribute-band Yellow Matter Custard) n’y est pas étranger.
Néanmoins, comme ce serait certainement du gâchis d’avoir sur un album des musiciens aussi avancés sans qu’ils n’aient leur moment de gloire, à chacun a été donné un peu d’espace pour s’exprimer. Une forme de pop à l’ancienne, de « pop améliorée », comme pour renouer avec l’esprit de celle que l’on pouvait entendre dans les années 60 et 70. Une musique populaire qui ne se reposait pas que sur ses qualités d’accroche et son aspect divertissant mais qui valorisait également une dimension artistique travaillée. Cela n’aurait pas été le cas à l’époque mais, aujourd’hui, les quelques « écarts » tels que le morceau final « Infinite Fire » (12 minutes) ou le percutant « Shoulda Coulda Woulda », excluent d’office ce disque de la catégorie Pop. Car, selon sa définition actuelle, elle devrait atteindre le paroxysme de la simplicité.
Alors qu’il ne révolutionne précisément rien musicalement, ce disque apporte pourtant quelque chose. Car il rappelle que divertissement ne doit pas nécessairement être primaire et que l’on peut l’élaborer sans pour autant en émousser l’immédiateté.
« On ne peut pas ranger tous ceux qui réfléchissent dans le camp de ceux qui se prennent la tête » – Alexandre Astier.
Ca sort quand?
Merci à Mike pour un de ces (nombreux) projet qui font plaisir à lire et voir sur Radio metal, et que on verra ce que donne l’album quand il sera dans les bacs.
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Ca sort le 26 mars !
Toutes ces couleurs, ça m’rappelle les Hidden Cameras :
la vie est gay.
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Dès lors que l’on arrive à proposer quelque chose de musicalement fouillé tout en conservant une accroche et une certaine accessibilité, on peut à mon sens prétendre au titre d’artiste. Finalement, la majorité des grandes œuvres réussissent à lier les deux faux antagonistes que sont l’immédiateté et la recherche. Personne n’oserait nier la profondeur de la 25e symphonie de Mozart ou de la 5e de Beethoven mais pourtant, on accroche et on prends du plaisir dès les premières notes de la première écoute.
J’étais assez intéressé par cet album de Flying Colors(Portnoy et Morse oblige) et ton avis conforte mon intérêt pour ce travail(j’avais peur de tomber sur une démonstration technique stérile). Au passage, ton article est franchement bien écrit et pertinent(avec la petite citation de ce branleur d’Astier qui ne donne plus de nouvelle des prochains Kaamelott!), beau boulot ^^
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A partir du moment où la musique est de qualité, quelle importance dans quel casier elle se range…
Fatigué de tous ces débats.
Il est possible d’aimer Mahler et Mayhem, en passant par tout ce que l’on peut trouver entre. Selon l’humeur du jour, Adèle passera mieux que Slayer et le lendemain ce sera l’inverse. Qu’importe…
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