Depuis leur apparition, et plus particulièrement depuis la sortie de leur Opus Eponymus fin 2010, un terme définit plus que tout autre Ghost : phénomène. Et un phénomène, ça se soigne, ça s’entretient, ça s’alimente comme un bon feu qui doit rester un phare toujours en vue, même du coin de l’œil. Pour cela, les Suédois enchainent tournées sur tournées (en 2013, ils n’ont pas passé un mois sans au moins un concert), ne s’arrêtant, très probablement (étant donné le secret entourant le groupe, leur agenda n’est pas rendu public, mais il y a quand même un vide d’info entre avril et août 2012), que pour enregistrer un nouvel album, et même un EP de reprises par dessus le marché, pour ne jamais disparaître de la vue et des oreilles d’un public désormais fasciné.

Mais voilà que le groupe devrait à nouveau s’effacer pendant deux mois. Au terme d’un tour d’Australie de deux semaines, qui fit une dernière escale le 2 février à Perth, et avant de revenir en avril pour une nouvelle tournée nord-américaine qui s’étendra jusque fin mai pour enquiller directement sur la saison des festival européens. Alors ils offrent quand même de quoi parler d’eux avec une performance live dans les studios de Music Feeds, à Marrickville, près de Sydney, pour laquelle, si les goules portent toujours le masque, Papa Emeritus II, lui, apparait sans fard.

Ci-dessous les interprétations des chansons « Ritual », « Year Zero » et de leur reprise de Roky Erikson « If You Have Ghosts ». Et on en reparle juste après…

Sans fard, c’est vite dit. S’il n’est pas un mystère pour grand-monde que le visage du chanteur de Ghost est déjà un masque en lui-même, et plus que du maquillage, ce visage-là, même sans les peintures noires et blanches, et malgré son réalisme, n’en est pas moins factice – la rigidité des lèvres, par exemple, le prouve. Et ce visage n’est pas non plus inconnu puisque c’est celui que tous les fans du groupe ont déjà pu contempler dans leur clip « Year Zero ».

Mais, voilà, hors de toute la mise en scène d’un clip, c’est tout de même un Papa Emeritus II sans ses ornements, sans ses insignes de pouvoir qui est mis, en public, au devant d’une bande de goules costumées et toujours aussi anonymes, sans visage. Serait-ce là une façon de déjà ostraciser, aliéner, mettre à part leur deuxième leader pour préparer sa succession ? Le distinguer pour mieux le faire tomber ? A n’en pas douter, ce sont les Nameless Ghouls qui ont le pouvoir dans ce théâtral clergé. Serait-ce donc le début de la fin pour le deuxième Pape de Ghost ? Sachant que le groupe prépare déjà un retour en studio avant la fin de l’année, pour un album qui se voudrait moins axé sur le chant et plus sur l’instrumental, il n’est pas impossible qu’Emeritus II soit le premier sacrifié dans ce tournant artistique. Avant l’intronisation d’un Numéro 3.

Ou alors n’est-ce qu’une façon de se dévêtir peu à peu de l’anonymat, considéré de l’aveu même d’une des Goules, comme impossible à conserver à long terme : « On travaille à être de plus en plus connus, plus populaires et c’est ça la limite ; de toute évidence ce n’est pas vraiment compatible avec l’anonymat. C’est une utopie qui serait belle à réaliser, mais je nous vois difficilement y parvenir. »

Voilà, Ghost disparait juste un peu et laisse pour tous de quoi cogiter pendant bien deux mois. C’est ainsi qu’on reste dans les esprits, avant de revenir envahir le paysage.