Il est certain que les séparations successives, en seulement deux ans, de Black Country Communion puis California Breed, deux groupes talentueux en lesquels il plaçait à juste titre beaucoup d’espoir, ont été des douches froides pour le chanteur-bassiste Glenn Hughes ; ça lui a même brisé le cœur, à deux reprises coup sur coup, explique-t-il. Il revient là-dessus dans l’entretien qui suit et nous en dit plus notamment sur la fin de California Breed. Un sujet sur lequel il s’était encore assez peu exprimé jusqu’à présent.
Mais pas question pour Glenn Hughes de se morfondre ou ruminer une quelconque rancœur. Sa mission : la recherche du bonheur en tant qu’artiste, acceptant les nouvelles règles du jeu de l’industrie musicale actuelle, très différentes de celles qu’il a pu connaître par le passé. C’est pourquoi il revient aujourd’hui avec sa carrière solo, sept ans après l’avoir laissée avec l’album First Underground Nuclear Kitchen. Mais pas question non plus d’abandonner tout de suite le rock pour le voir retourner à son amour pour la funk, et c’est pour cela qu’on le verra dès octobre dans une tournée en Europe – dont un passage au Divan Du Monde à Paris – accompagné du très talentueux et prestigieux ex-Whitesnake Doug Aldrich à la guitare.
Et des guitaristes de talents Hughes a pu en connaître dans sa carrière, dont un certain Tommy Bolin dont les quarante ans de l’album Teaser seront célébrés en septembre avec une réédition spéciale. L’occasion de parler de ce regretté guitariste disparu trop tôt et de dévier sur d’autres sujets tels que le guitariste Ritchie Blackmore ou The Purple Album de Whitesnake sorti récemment.
« Jason [Bonham] s’est senti mal de ne pas pouvoir continuer avec California Breed et il m’a brisé le cœur, et il le savait. »
Radio Metal : Tu as sorti l’année dernière le premier et unique album de California Breed avant que le groupe ne se sépare au début de l’année. C’était une grosse surprise, dans la mesure où l’album était très bon, et tu semblais très emballé par ce groupe. Tu as expliqué la séparation en disant que tu ne pouvais t’engager dans un second album parce qu’il « n’était pas question d’aller plus loin sans les trois membres d’origine. » Mais concrètement, qu’est-ce qui s’est passé ?
Glenn Hughes (chant/basse) : [Le batteur] Jason [Bonham] a eu des opportunités pour travailler avec d’autres artistes. Jason aime jouer avec d’autres gens. Je ne pense pas qu’il était prêt à investir tout son temps dans California Breed. Lorsque nous avons débuté California Breed, Nicolas, nous avons dit : « Investissons-nous dans ce groupe pour qu’il perce ! » Faire percer un groupe implique de jouer autant de concerts que possible à travers le monde, pour jouer pour autant de gens que possible. Jason n’avait pas le sentiment que c’était ce qu’il voulait faire pour l’instant. Je n’ai jamais parlé des raisons pour lesquelles Jason a décidé qu’il ne voulait pas continuer et lorsqu’il n’a plus voulu le faire, j’ai dit : « Ok. Eh bien, c’est très triste ! » Il a donc fallu que nous passions à autre chose. Il fallait que je décide si je voulais poursuivre avec Andrew et quelqu’un qui remplacerait Jason ou de complètement arrêter le groupe. Et je ne voulais pas spécialement continuer sans lui, et donc c’est pour ça que le groupe s’est séparé en décembre. La seule raison pour laquelle nous avons continué à faire quelques concerts avec Joey Castillo c’est parce que les tickets étaient déjà en vente et il fallait que j’honore ça, mais ça ne semblait plus vraiment être un groupe mais plutôt ma propre chose. C’était un sacré choc pour moi lorsque Jason a décidé de partir ; ce n’était pas une super nouvelle pour moi. Je veux donner des concerts ! Je veux jouer ces chansons avec ces mecs ! Et comme tu peux le savoir aujourd’hui, Nicolas, les choses ne sont plus les mêmes dans l’industrie musicale, tout est très différent ! Tu peux en fait te retrouver dans deux groupes à la fois ! Je sais qu’un mec comme Mike Portnoy est genre dans six groupes ! Donc, ce qu’il faut que tu saches, c’est qu’il y a une vie après California Breed. California Breed était un groupe qui a vécu très peu de temps. Parfois ça arrive, Nicolas. Ce n’est pas quelque chose que j’ai voulu, que ce soit l’affaire d’un album. Je voulais que nous en fassions deux ou trois. Mais ça n’a pas pu se faire.
Les deux dernières années ont vu les disparitions successives de Black Country Communion et California Breed, lesquels n’ont pas duré très longtemps. Même ton passage chez Deep Purple n’a duré que trois ans. Tu montres toujours…
Tu sais, écoute, je veux parler du truc avec Black Country Communion. Joe Bonamassa et moi, et Jason et Derek ; nous n’avons jamais eu de dispute. Nous ne nous sommes jamais fâchés. Tu sais ça, Nicolas, tu es un gars de la presse. Lorsque nous avons fait ces albums, j’écrivais une grand part de la musique et tout ce que je voulais faire, c’était faire un album et faire quarante ou cinquante concerts par an en tant que Black Country Communion. Maintenant, Joe ne pouvait pas faire ça. Il voulait juste jouer en solo. Donc arrivé au troisième album Afterglow – j’ai écrit la majorité des chansons moi-même -, j’ai dit : « Je ferais l’album Afterglow avec toi si nous pouvons tourner ! Peut-être quarante concerts dans l’année, ce qui n’est pas tant que ça. » Et Joe ne voulait toujours pas le faire. Et il faut comprendre que lorsqu’un mec dans un groupe ne veut pas le faire, le groupe ne peut pas jouer ! Mais je veux te dire ceci : Joe et moi ne nous sommes jamais disputés à ce sujet. Il était juste très clair qu’il ne voulait jouer aucun concert ! Je ne suis pas en train de dire qu’il n’était pas sympa ou sympa ou en colère, c’était juste un fait ! Donc le groupe s’est séparé parce que, Nicolas, tu ne peux pas avoir un groupe aujourd’hui qui ne joue pas en live. Tu ne peux pas. Il n’y a plus d’opportunité dans le business pour vendre des albums parce que les gens veulent voir la musique en live. C’est donc comme ça !
Tu montres toujours beaucoup de passion à l’égard de tes groupes mais d’un autre côté, ils ne semblent jamais durer très longtemps. Comment l’expliques-tu ?
Je sais… C’est fou, mec, mais tu sais, écoute, j’aime être dans un groupe mais de nos jours, c’est vraiment difficile de les maintenir parce que les opportunités ne sont plus les mêmes. Si on remonte dans les années 80 et 70, même au début des années 90, les maisons de disques apportaient leur soutien aux groupes pour pouvoir aller sur les routes, elles t’aidaient. Aujourd’hui il n’y a rien de tout ça ! C’est fini ! Tu dois te débrouiller par toi-même. Tu dois avoir assez d’argent ou de soutien pour pouvoir le faire. Donc de nos jours, dès que quelque chose ne va pas, tout s’écroule. En conséquence, c’est pourquoi je reviens en tant qu’artiste solo car je peux choisir avec qui travailler et financer mes propres trucs pour moi-même. Parce que, frangin, j’ai essayé d’être dans des groupes, c’est quelque chose de très difficile. Et il se peut que tu me revois dans un autre groupe l’année prochaine mais il faut que je sois très, très prudent par rapport à avec qui je vais faire ça et comment je vais approcher ça. Hey, Nicolas, écoute, ça m’a fendu le cœur lorsque Black Country Communion s’est séparé, et ça m’a fendu le cœur lorsque California Breed s’est séparé. Jason le sait. Nous ne nous sommes pas parlé pendant six mois et maintenant nous nous reparlons. C’était une période difficile. Jason s’est senti mal de ne pas pouvoir continuer avec California Breed et il m’a brisé le cœur, et il le savait. Mais écoute, c’est comme ça. Ainsi va la musique de nos jours. Ce n’est plus comme c’était dans les années 70.
Avec California Breed on avait découvert un jeune et talentueux guitariste : Andrew Watt. Penses-tu qu’on vous reverra travailler ensemble dans le futur ?
Je ne suis pas sûr. Je pense qu’Andrew est très occupé à faire son album solo. Je pense qu’il est intéressé par monter son propre truc. Je veux donc juste lui souhaiter rien que le meilleur. C’est vraiment un talentueux jeune homme.
Comme tu l’as dis, tu reviens aujourd’hui à ta carrière solo. Est-ce que ça veut dire que tu as été un peu démotivé par ces récentes expériences de groupe ?
Tu sais, je veux te dire qu’avec Black Country Communion, la majorité de la musique et des paroles étaient de moi… Je suis un compositeur et Joe était vraiment super avec moi à ce sujet. Il me poussait vraiment à faire ça. J’adore Joe Bonamassa, c’est un homme adorable et vraiment un talentueux jeune homme. Ecoute mec, être dans un groupe c’est… Un groupe, pour moi, c’est une famille et certaines familles ne fonctionnent pas [petits rires], tu sais. Encore une fois, ce n’est plus les années 70 où les groupes restaient ensemble pendant vingt ou trente ans. De nos jours, les groupes se mettent ensemble et en un clin d’œil – pas seulement California Breed – c’est terminé.
Tu trouves qu’il est plus difficile de maintenir un groupe aujourd’hui ?
Oh, c’est vraiment difficile ! Nicolas, tu dois comprendre que c’est un marché différent de nos jours. Dans les années 70 tu avais le soutien d’une maison de disques alors que maintenant il n’y en a strictement aucun ! C’est donc la raison pour laquelle tu vois un gars dans six groupes ou un gars dans trois groupes ou un gars dans quatre groupes. J’ai moi-même deux ou trois choses différentes sur lesquelles je travaille aujourd’hui ! Simplement parce que, tout d’abord, j’adore travailler et faire de la nouvelle musique avec d’autres artistes, c’est vraiment important. J’ai Kings Of Chaos avec Slash, Matt et Duff de Guns N’ Roses, Steven Tyler et Joe Elliot, et j’ai aussi ce truc avec ma propre carrière et c’est quelque chose qu’il faut vraiment que je fasse parce que j’adore travailler avec d’autres gens.
« Si on remonte dans les années 80 et 70, même au début des années 90, les maisons de disques apportaient leur soutien aux groupes pour pouvoir aller sur les routes, elles t’aidaient. Aujourd’hui il n’y a rien de tout ça ! C’est fini ! »
Tu vas tourner en Europe à l’automne en tant qu’artiste solo et il vient tout juste d’être annoncé que Doug Aldrich t’accompagnera à la guitare sur cette tournée…
C’est super ! Je veux dire que je sais ça depuis un mois mais je ne pouvais pas l’annoncer avant ce matin. C’est en train de se faire au moment où je te parle. Ouais, Doug rejoint mon groupe et nous allons jouer en Amérique du Sud en août et en Europe en septembre et octobre. C’est une super opportunité pour Doug et moi de nous retrouver. C’est super d’avoir Doug avec moi parce que c’est vraiment un super musicien, et ça me permet d’explorer mon côté rock. Ce que Black Country Communion a fait pour moi, c’était de me donner l’occasion de faire grandir ma fanbase rock. Donc avec Doug qui arrive, je pense que c’est une bonne opportunité. Je connais Doug depuis qu’il était avec Ronnie James Dio. Ronnie, comme tu le sais, était l’un de mes plus proches amis et dès que Ronnie avait un nouveau membre, j’allais le rencontrer. J’ai donc eu l’occasion de rencontrer Doug il y a des années par le biais de Ronnie. Trois heures avant que Ronnie ne meure, il y a cinq ans, Doug jouait avec moi sur scène à Bologne, en Italie. Il se trouve que Doug était sur la même affiche que moi, j’étais la tête d’affiche d’un concert à Bologne, devant cinq mille personnes et j’ai dit à Doug dans les loges : « Hey, est-ce que ça te dit de venir jouer ‘Burn’ avec moi ? » Et il a dit : « Bien sûr ! » Nous avons donc joué « Burn » cette nuit-là et je ne savais pas que Ronnie était à l’hôpital. Nous ne savions pas que c’était ses dernières heures et j’ai dit à l’audience : « Je veux dédier ce concert à Ronnie James Dio. » Et trois heures plus tard, Ronnie est mort et Doug était avec moi sur scène. Il y a quelques semaines, pour le cinquième anniversaire de la mort de Ronnie, Doug m’appelle toujours, et il m’a appelé et sans réfléchir je lui ai dit : « Hey mec, je vais aller sur la route, est-ce que tu veux venir avec moi ? » Il y a eu un silence et il a dit : « BIEN SÛR ! » [Petits rires]. Donc c’est super mec. Je veux remercier Ronnie pour nous avoir rassemblés [petits rires], c’est un peu bizarre à dire mais c’est vrai. C’est une famille pour moi. C’est super d’avoir Doug avec moi sur cette tournée. Je suis surexcité.
Penses-tu que cette collaboration avec Doug ira plus loin ?
Je l’espère ! Je veux dire, encore une fois, Nicolas, nous avons parlé de ça plus tôt au cours de l’entretien : la seule chose que je veux dans ma vie, c’est du bonheur et d’être entouré de gens heureux. Je veux que tout le monde, peu importe dans quel groupe je suis, soit amical et je veux qu’ils soient honnêtes et qu’ils disent : « Hey, je vais venir, je veux faire ça, je veux m’assurer que nous pouvons développer un groupe, je veux dire que je suis disponible pour tourner avec toi… » Et parfois, ces choses ne se produisent pas. Donc, tout ce que je peux te dire c’est que Doug et moi allons partir sur les routes cette année et voyons comment les choses évoluent. Comme je l’ai dit avant, il se peut que tu me voies dans un autre groupe l’année prochaine. Je veux dire que je travaille tout le temps avec d’autres gens. Mais il faut que je continue à être un artiste solo. Je n’ai pas sorti d’album en sept ans, il est donc temps pour moi de retourner en studio et tu ne sais jamais qui sera avec moi. Mais cette année, Doug Aldrich fera de la guitare avec moi et nous sommes très, très excités à ce sujet.
Et qu’en est-il de JJ Marsh ? Il a joué avec toi pendant tant d’années…
J’adore JJ Marsh. Je lui ai parlé la semaine dernière. Il s’apprête à faire un autre album le mois prochain en Suède. Il est possible que tu revois un jour JJ avec moi, uniquement à cause de ce que je pense de la super musique que nous avons faite il y a dix ans avec Soul Mover et toutes les autres choses géniales que j’ai faites avec lui. JJ me manque vraiment, c’est un guitariste extrêmement talentueux. Beaucoup de mes fans adoreraient le voir revenir. Mais pour le moment, Doug Aldrich est le gars qui sera à mes côtés. J’adore Doug, c’est vraiment un bon ami et ça a du sens pour moi de revenir et jouer sur une tournée rock, qu’un guitariste comme Doug joue avec moi. Mais JJ Marsh est clairement un guitariste qui me manque.
Pendant ces concerts tu vas revisiter toute ta carrière – avec des chansons de Trapeze, Deep Purple, Black Country Communion, California Breed…
C’est exact ! Je pense que ça a du sens de faire un historique des chansons que j’ai jouées. Je vais faire quelques chansons que je n’ai pas faites depuis des années. Je vais donc célébrer Trapeze, Glenn Hughes en solo, Deep Purple, quelques chansons de Black Country et Calibree (NDLR : contraction de California Breed) et quelques chansons surprises. Je crois donc que ce sera une setlist intéressante. Mais l’accent sera mis sur la musique rock de Glenn Hughes. Ce sera un concert rock. Un trio. Si tu connais mon histoire, j’ai commencé en trio dans Trapeze et je veux célébrer ce que ça fait d’être dans un trio. C’est super parce que, en jouant en trio, je peux jouer les trucs que j’ai écrits lorsque j’étais un adolescent. Je veux dire que maintenant, ça fait quarante-cinq ans, peut-être un peu plus, que j’écris des chansons et celles-ci sont parmi les meilleures chansons que j’aie jamais écrites ! J’ai publié plus de quatre cent chansons dans ma vie et ça représente beaucoup de musique, beaucoup de chansons à choisir, une quantité phénoménale de musique ! Donc choisir une setlist n’est jamais facile pour moi, il y a tant de chansons que je veux faire. Encore une fois, je veux apporter un spectacle rock en France. C’est important pour moi. Je n’ai pas assez joué en France mais mes fans en France sont très dévoués. Je suis si heureux et maintenant nous avons Doug qui me rejoint, donc ce sera encore mieux !
En 2010 tu m’avais dit que tu avais écrit un album que tu aurais dû enregistrer en octobre de l’année précédente…
C’est exact ! Tu as parfaitement raison ! J’ai les démos chez moi. Je veux sortir cet album. Il est vraiment, vraiment bon. Je pense que ce qui s’est passé avec moi durant ces dernières deux ou trois années, Nick, c’est que je me suis rendu compte qu’il y a une partie de ma fanbase qui aime les trucs groovy et funky et j’aime vraiment ça aussi. Mais de façon plus générale, dans le grand dessein qui fait qui je suis, « the voice of rock », les gens s’attendent à et aiment le spectacle rock. Du coup je m’intéresse à… Ecoute, j’aime faire la musique que je veux faire pour moi mais je sais que les fans veulent un certain type de spectacle de Glenn, donc je vais leur donner ce qu’ils veulent. Je pense que je vais leur donner un spectacle rock de Glenn. Donc ceci sera mon prochain album. J’ai un autre album que nous allons écrire cette année. Donc je vais sûrement faire un nouvel album cette année, Nick. Donc il y aura un album de Glenn l’année prochaine, c’est certain. Mon dernier album est sorti en 2008, donc d’ici 2016, ça fera huit ans… Ca fait longtemps pour moi ! Ca fait beaucoup de temps entre deux albums. Donc le prochain album sera plus un album de rock groove.
« [Tommy Bolin] n’avait jamais vraiment écouté notre musique [avec Deep Purple] et c’est l’une des raisons pour lesquelles nous l’avons choisi. »
L’album Teaser de Tommy Bolin va être réédité dans une version anniversaire des quarante ans en septembre. Tu chantes sur une chanson de l’album, « Dreamer », et Tommy était pour ainsi dire ton protégé. Quels souvenirs gardes-tu de lui ?
Nous étions très proches parce qu’il était comme un frère pour moi. Nous étions de très, très bons amis et il vivait chez moi lorsqu’il a rejoint Deep Purple. Il est resté chez moi pendant sept semaines et avant que nous allions faire l’album [Come Taste The Band] en Allemagne, Tommy vivait chez moi. Nous étions tous les deux du signe du Lion, nous étions nés à trois semaines d’écart, tu sais, donc nous étions très, très proches. Nous étions tous les deux des hippies et nous parlions la même langue musicalement. Il était très porté sur le jazz fusion, moi j’étais porté sur la musique noire américaine et c’était un véhicule intéressant. Il a enregistré l’album Teaser en juillet et il a rejoint Deep Purple également en juillet, il était tout juste en train de terminer Teaser. Nous l’avons entendu sur un album de Billy Cobham, Spectrum. Tommy a eu le job dans Deep Purple à cause de l’album Spectrum mais évidemment, lorsque nous avons entendu Teaser, nous étions époustouflés !
Dans Deep Purple, il a remplacé Ritchie Blackmore, il avait donc un énorme défi à relever, comment est-ce qu’il a géré le job ? Etait-ce difficile pour lui ? Etait-il anxieux ?
Pas vraiment difficile. [Réfléchi] Tommy n’était pas un fan de rock, vraiment. Lorsqu’il est venu auditionner pour nous, il ne connaissait aucune chanson de Deep Purple ! Donc pour lui, débarquer dans Deep Purple, c’était comme débarquer dans quelque chose de complètement nouveau. Donc Come Taste The Band était une toute nouvelle aventure pour lui. Pour lui, le fait d’apprendre nos chansons… Il n’avait jamais vraiment écouté notre musique et c’est l’une des raisons pour lesquelles nous l’avons choisi, c’était quelque chose de complètement différent et j’aime toujours choisir les choses qui sont complètement différentes. Ca aurait été un peu plus facile si nous avions trouvé quelqu’un qui jouait comme Ritchie mais c’était plus audacieux pour nous de jouer avec quelqu’un qui ne sonnait pas comme Ritchie.
C’était même plutôt risqué…
Il faut que je te dise la vérité : lorsque nous essayions de trouver un guitariste pour remplacer Ritchie, David Bowie vivait chez moi et il m’a suggéré Mick Ronson, et j’adore Mick Ronson. Mais je ne crois pas que Mick aurait pu remplacer Ritchie parce que Mick était un genre de guitariste complètement différent, tout comme l’était Tommy mais Tommy avait ce charisme qui était très, très spécial. Et à l’époque, personne vraiment ne jouait comme Blackmore. Jimmy Page ne jouait pas comme Blackmore. Je veux dire qu’Yngwie Malmsteen n’était pas encore là à l’époque. Si Yngwie Malmsteen avait eu 22 ans en 1975, il aurait sûrement eu le boulot parce qu’il joue comme Ritchie. C’était vraiment, vraiment difficile de remplacer Ritchie. Très, très difficile. Je pense que Come Taste The Band est un album qui sonne unique. Il sonne comme un groupe différent parce que si tu retires Blackmore de Purple, même avec Steve Morse, ça sonne différent, tu sais. Lorsque Blackmore joue de sa Strat, personne ne sonne comme lui avec sa Strat. Blackmore était le roi de la Stratocaster. Tout comme Jimi [Hendrix] était le roi de la Stratocaster dans les années 60, je pense que Blackmore était le roi de la Stratocaster dans les années 70. C’est juste incroyablement… Blackmore et sa Stratocaster, c’est un truc de malade, tu sais. Donc, pour remplacer Blackmore, c’était impossible de trouver quelqu’un pour jouer exactement comme ça.
Ton bon ami David Coverdale vient tout juste de sortir The Purple Album avec Whitesnake sur lequel ils reprennent des chansons de Deep Purple Mark III et IV. Est-ce que tu as entendu ce qu’il a fait ?
Il m’en a envoyé une copie il y a dix jours. Je veux dire ceci : j’aime énormément David. Ce qu’il a fait avec ces standards, c’est qu’il les a réarrangés, il les a enregistrés différemment, il n’a pas utilisé de clavier, il en a réarrangé certains en acoustique… Ce que j’admire à propos de David, c’est qu’il n’a pas essayé de faire les versions originales et ça, ça aurait été la mauvaise chose à faire. Ce que j’ai a dire pour sa défense, c’est qu’il a fait quelque chose qui est plus proche de ce qui lui convient. Cet album signifie beaucoup pour lui. Ca signifie beaucoup pour moi de le soutenir parce que je l’aime. C’est difficile de réenregistrer ces standards, c’est vraiment difficile, mais l’album se portera bien et je suis vraiment content pour lui. C’est un de mes plus chers amis, donc je le respecte et je ne veux que le meilleur pour lui.
David m’a dit que Jon Lord voulait faire une reformation du Deep Purple Mark III avant de mourir et qu’il était récemment entré en contact avec Ritchie Blackmore…
Ouais, j’étais impliqué là-dedans. Avant que nous sachions que Jon était malade, Jon, David et moi faisions des conférences téléphoniques pour parler de Mark III et nous essayions de savoir comment nous pourrions impliquer Ritchie. Est-ce que ce serait possible ? Nous n’en sommes jamais arrivés au point ou Ritchie était impliqué mais David, Jon et moi l’étions. Nous ne pouvions vraiment pas le faire sans Ritchie. Maintenant, lorsque Jon est mort, un an après sa mort, David, Ritchie et moi étions en quelque sorte en discussion pour faire quelque chose ensemble. Nous avons un peu commencé à parler et ensuite ça s’est refroidi. Ca s’est refroidi et j’ai dis à David : « Il faut qu’on passe à autre chose dans nos vies, tu sais. » Tu ne peux pas forcer les gens à se réunir. L’un de nous est parti ; Jon est parti. Ian Paice est clairement impliqué avec Gillan et Glover, il ne voudrait pas fâcher qui que ce soit. Ca ne tenait donc plus qu’à moi et David de voir : « Que fait-on maintenant ? » Et nous avons simplement dit : « Hey, continuons avec nos vies. »
Mais crois-tu qu’il soit possible de voir Ritchie revenir au rock ? Je veux dire qu’il y a aussi des discussions au sujet d’une de reformation de Rainbow…
Ca ne me surprendrait pas si Ritchie revenait au rock. Je ne veux que le meilleur pour Ritchie. Il a soixante-dix ans maintenant et j’ai le pressentiment, connaissant un peu Ritchie [petits rires], qu’il va à un moment donné reprendre la Strat et faire du rock. Ca ne me surprendrait pas. Et je veux, encore une fois, lui souhaiter rien que le meilleur parce qu’il est l’un de mes cinq guitaristes préférés de tous les temps. On va tous accueillir Ritchie à bras ouverts. Je pense que c’est un homme très respecté.
« La seule chose que je veux dans ma vie, c’est du bonheur et d’être entouré de gens heureux. »
Tu as mentionné un peu plus tôt le projet Kings Of Chaos. A quoi peut-on s’attendre par rapport à ça ?
Nous jouons à nouveau en juillet. Nous allons tourner en Amérique du Sud à la fin de l’année, peut-être en novembre. Parce qu’il y a tant de gens qui ont d’autres engagements, tu sais, Duff [MacKagan] a un groupe, Steve Stevens est avec Billy Idol, Billy Gibbons est avec ZZ Top, Steven Tyler est dans Aerosmith, j’ai mon propre truc… C’est donc difficile de mettre en place des plannings parce qu’il est très difficile de rassembler tout le monde au même endroit au même moment. Mais on essaie vraiment de le faire, on essaie de trouver des opportunités où nous pouvons tous nous retrouver. Mais c’est vraiment un super groupe. Nous essayons de donner autant de concerts qu’il est humainement possible.
Mais y aura-t-il des enregistrements studio ?
C’est difficile. Nous avons en effet mentionné ça il y a deux ans, nous voulions écrire des chansons sous le nom Kings Of Chaos mais je t’en dirai plus lorsque nous aurons avancé.
Tu as d’autres projets, tu travailles notamment sur un film. Peux-tu m’en dire plus ?
Le film traite de l’incident, lorsque j’étais dans Deep Purple Mark IV, à Jakarta où mon garde du corps a été assassiné, où j’ai été envoyé en prison parce que mon garde du corps était avec moi quelques instants avant de mourir. Je fais un film basé là-dessus. Ca arrive l’année prochaine. Et comme je l’ai dit je m’apprête à faire un album solo. Je ne sais pas qui jouera parce qu’il y a un certain nombre de gens avec qui je suis en discussion. Il se peut que je me retrouve avec beaucoup d’invités ou peut-être pas. Je suis en train de parler de ça à mon management en ce moment même.
Et tu as aussi un nouvel album avec Voodoo Hill qui sort bientôt…
Oui ! Il arrive en septembre. Ca fait maintenant quatorze ans que je travaille avec Dario [Mollo]. Le dernier album était sorti il y a onze ans. Il était temps d’en faire un autre. Il m’a contacté il y a six mois et m’a demandé si j’aimerais le faire. Il a fallu que j’y réfléchisse. Tu sais, je savais que cette année serait une année où j’allais reformer mon propre truc et me préparer à tourner et je me suis dit : « Je pense que je peux faire un album de Voodoo Hill. » Et je l’ai fait dans mon propre studio il y a deux mois. J’ai fait les voix chez moi. Je pense avoir tout écrit en une semaine et enregistré en deux jours. J’aime enregistrer ces chansons live. Dario est en Italie et habituellement je vais dans son studio mais j’ai choisi de le faire dans mon propre studio parce que je suis vraiment occupé ici. Je trouve que c’est un très, très bon album. Je trouve que c’est un bon successeur à Wild Seed Of Mother Earth. Dario est le seul guitariste qui soit en dehors de ma vie… Je veux dire que c’est mon troisième album avec lui. Je le fais parce qu’il y a une génération de fans de rock qui aime ce type de musique venant de moi, ce genre de classic rock. Voodoo Hill est très classique à la manière du Glenn que beaucoup de fans aiment. La seule musique du genre que je fais c’est Voodoo Hill.
Il est impressionnant de voir le nombre de collaborations que tu as eues et que tu as toujours aujourd’hui…
J’aime toujours laisser les portes ouvertes pour travailler avec des gens que j’admire. Je veux dire qu’il y a d’autres gens que j’admire avec lesquels je suis en discussion en ce moment et qui font différents styles de musique. Je garde donc toujours les portes ouvertes pour des gens que j’admire et qui sont artistiquement différents de moi. La musique rock, pour ma part, c’est le centre de ma vie parce que les gens me connaissent via la musique rock mais j’apprécie aussi d’autres types de musique. J’aime aussi m’exprimer dans tous les styles et façons que je peux, du moment que ça me fait vraiment me sentir bien. Je ne dis jamais jamais. J’ai fait KLF en 92, c’est genre de la house music, c’était de la musique pour faire la fête, c’était quelque chose de complètement différent. La musique country m’inspire aussi. J’aime vraiment tout type de musique. J’aime la musique d’opéra. Ce n’est pas impossible pour moi de faire plein de choses.
Interview réalisée par téléphone le 2 juin 2015 par Nicolas Gricourt.
Retranscription et traduction : Nicolas Gricourt.
Site officiel de Glenn Hughes : www.glennhughes.com.
Plus je lis d’interview de Glenn Hughes plus je le trouve intéressant et sympathique. Il a vu juste pour le retour au rock de Ritchie Blackmore.
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Comment c’est, déjà, le prénom du gars qu’a fait l’interview?! (rires)
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