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Interview   

Halestorm : l’heure de la résurrection


La façon dont Halestorm et sa front-woman Lzzy Hale ont vécu la pandémie et le confinement est l’exemple même du groupe qui s’est senti perdu, voire mourir, dans un monde où leur métier n’avait plus de sens. C’est en ressentant le poids d’une angoisse existentielle et celui d’un monde qui se délitait, puis une forme de renaissance en commençant à apercevoir la lumière au bout du tunnel que leur nouvel album, Back From The Dead, a été conçu.

Un album témoin où l’on retrouve toutes les émotions ressenties durant cette période et les réflexions qui les ont accompagnées. Un album rassurant face à l’incertitude ambiante, une sorte de bulle musicale confortable, énergique et accrocheuse. Un album en forme de confession dans lequel la chanteuse reflète le monde et se reflète elle-même, cette « fille étrange » pour qui il est important de se démystifier, montrer qu’elle est exactement comme ses fans avec ses parts d’ombre et de lumière, et qui a besoin de sa communauté, de son église, de son sanctuaire. Nous parlons de tout cela avec une Lzzy Hale joviale, généreuse et authentique.

« Nous passions par des hauts et des bas. Nous essayions de nous encourager mutuellement et de dire : ‘D’accord, on va y arriver. C’est nous quatre contre le monde. On y va.’ Et ensuite, nous passions par ces gros passages à vide, à nous demander : ‘A-t-on le moindre talent pour ça ?' »

Radio Metal : Vous avez commencé à vous réunir et à écrire activement pour ce qui deviendra Back From The Dead avant le premier confinement de 2020, mais au final, l’album a été enregistré en 2021. Comment avez-vous vécu la montée de la pandémie à cet égard ? Est-ce que ça vous a arrêtés dans votre élan ?

Lzzy Hale (chant) : Oui. J’ai l’impression que ça a arrêté tout le monde dans son élan [rires]. Surtout notre business, notre vie en tournée, tous nos plans pour entrer en studio… Nous étions confrontés à un futur incertain. Nous avions commencé à jammer et à composer avant le confinement et ensuite, je me souviens que tous les jours, j’entendais de plus en plus de mauvaises nouvelles à propos de cette pandémie qui était en train d’arriver. Finalement, les gars et moi avons dit : « Bon, on rentre tous chez nous, on tient bon et, je ne sais pas, peut-être que ça durera un mois et ensuite on pourra se réunir à nouveau. » Un mois passe, puis un autre, et on ne voyait pas le bout du tunnel. La seule chose sur laquelle nous avions la main était le fait d’essayer d’écrire pendant ce temps-là, peu importe si nous pourrions un jour entrer en studio ou pas. C’est drôle la façon dont le monde affecte notre créativité, car surtout dans mon cas, je crois que je n’avais pas d’autre choix que de ressentir ce poids, en observant tout ce qui était en train de se passer dans le monde et intérieurement par rapport à moi. Je ne suis pas seule : tout le monde a connu une petite crise d’identité quand le monde s’est arrêté, genre : « Qui suis-je sans tout ça ? Que vais-je faire de ma vie ? C’est nouveau. Ça n’était jamais arrivé avant. » Honnêtement, ce que je pense avoir redécouvert en écrivant cet album est que j’écrivais toujours comme une forme de thérapie, pour essayer d’assembler toutes les pièces du puzzle dans ma tête, de combattre certaines obscurités et tout. Le bon côté est que ça aurait été un album très différent si le monde n’avait pas changé [rires].

As-tu l’impression que même musicalement, ça a orienté votre créativité ?

Absolument. D’ailleurs, je crois que toutes les chansons qui ont été composées avant que la pandémie n’entre en considération, je les ai mises de côté parce qu’elles paraissaient très futiles et prudentes. Quand tu es en plein confinement et en pleine pandémie – et on l’était tous –, tu te sens un peu impuissant, parce que tu vois tout ce qui se passe dans le monde. Peu importe si on était en confinement ou pas, il se passait plein d’autres choses. Il y avait tellement d’agitation dans le monde et encore tellement de haine pour la haine. Tout le monde était encore obsédé par toutes ces conneries mesquines qui ne devraient pas avoir d’importance. Donc tu absorbes tout ça et tu vois tout ça se dérouler, mais que peux-tu y faire ? La seule arme à ta disposition dans ton arsenal pour agir, c’est d’écrire. Donc j’utilisais un peu ça pour y faire quelque chose. Donc oui, absolument, l’état du monde a orienté le navire. De même que l’état de mon âme, à essayer de trouver mon bonheur sans être dans mon groupe, sans tourner, sans avoir de but, sans avoir de déclaration de mission, tout cela a aussi orienté l’écriture.

D’un autre côté, beaucoup de temps s’est écoulé avant que vous entriez en studio. N’y avait-il pas un moment où vous avez perdu de vue ce que vous essayiez d’accomplir avec cet album ?

Absolument. C’était un peu les montagnes russes. Nous passions par des hauts et des bas. Nous essayions de nous encourager mutuellement et de dire : « D’accord, on va y arriver. C’est nous quatre contre le monde. On y va. » Et ensuite, nous passions par ces gros passages à vide, à nous demander : « A-t-on le moindre talent pour ça ? Est-ce que, même, on aime toujours la musique ? Est-ce que ça va aboutir un jour ? Va-t-on pouvoir un jour revenir à comme c’était avant ? » Pour être honnête, probablement pas. Peu importe à quoi ça ressemble maintenant – sarcastiquement – « à l’autre bout du tunnel »… Car je ne sais pas si nous sommes au bout du tunnel, mais nous avons démontré avoir la capacité d’avancer. Mais oui, nous ne pensions pas entrer en studio. Je suis passée par une période où j’écrivais beaucoup mais je n’aimais rien de ce que j’écrivais, je trouvais que tout était nul. Et ensuite, lentement mais sûrement, je me suis donné un bon coup de pied aux fesses et j’ai dit : « D’accord, on va tenir bon et on va le faire. » Lentement, tout a commencé à prendre forme et à voir le jour. Mais c’était étrange. Je pense que nous avons tous vécu quelque chose que nous n’avions jamais vécu auparavant, donc nous ne savions pas vraiment comment le gérer. Nous n’avions pas les outils dans notre ceinture porte-outils pour combattre une partie de ces ténèbres. Nous avons dû comprendre au fur et à mesure, c’était un tout nouveau monde [rires].

« Je me souviens être allée à une soirée pyjama avec un groupe de filles de mon âge et avoir essayé de leur faire connaître Alice Cooper. Elles m’ont regardée comme si je venais d’une autre planète, elles ne comprenaient absolument pas pourquoi j’aimais cette musique, et c’était le jour où j’ai compris que j’étais bizarre [rires]. »

C’est un album très classique, accrocheur et énergique d’Halestorm. Penses-tu que la période n’était pas propice à l’expérimentation, mais qu’au contraire, le groupe comme les fans avaient besoin d’une forme de confort, de quelque chose auquel se raccrocher qui offrirait un plaisir instantané et rassurerait en ces temps incertains ?

Absolument. Avec cet album, surtout une fois que nous sommes enfin entrés en studio ensemble, c’était un peu tacite parce que nous ne nous sommes pas posés pour dire « voilà ce qu’on va faire », mais je crois que nous avons tous pensé que si nous faisions enfin cet album, il fallait que ce soit l’album le plus Halestorm possible. C’est pourquoi on entend tout le monde jouer à cent dix pour cent. Mon frère joue de façon plus dingue que jamais, je chante plus haut et plus fort, on retrouve certains des meilleurs leads de guitare que j’ai jamais entendu Joe [Hottinger] faire… Nous étions tellement reconnaissants de pouvoir mettre ces sentiments quelque part. Et oui, si vous entendez un peu d’angoisse existentielle, c’est simplement parce que nous avons dû la canaliser. Nous n’avions pas d’autre choix. Nous ne pouvions pas l’évacuer sur scène quelque part, donc nous avons dû la mettre dans l’album [rires].

Back From The Dead est un titre assez explicite à cet égard. Je suppose que quand tu as écrit les paroles, les moments les plus durs de la pandémie étaient derrière nous, les vaccins étaient là, les perspectives du retour des concerts – en tout cas, dans certains endroits – étaient là, etc. Est-ce que ça traduit ce que tu ressentais à ce moment-là ? Te sentais-tu renaître ?

Oui. Quand nous avons commencé à voir la lumière au bout du tunnel, j’ai été envahie par un sentiment d’espoir et presque de soulagement. J’ai voulu célébrer ça. Donc en écrivant les paroles de « Back From The Dead », je pouvais presque m’y voir. Je pouvais me voir sur scène quand ça allait arriver, quand nous allions remonter pour la première fois sur les planches, et j’ai voulu crier une chanson sur la survie, célébrer le fait que nous soyons ici ensemble, que nous avions survécu – peu importe ce que ça veut dire, nous avons survécu [rires] – et que nous sommes de retour. Peu importe à quel point tout semblait désespéré ou sombre, nous avions quand même la capacité de puiser profondément en nous pour nous en sortir. Il y a aussi un sentiment d’accomplissement, d’avoir presque prouvé que l’impossible était possible. Tu te prouves à toi-même que tu peux t’en sortir dans les moments difficiles.

Tes mots dans la ballade « Terrible Things » sonnent parfois assez amers. Est-ce que la façon dont les gens ont agi pendant la pandémie a parfois renforcé ce sentiment que les humains sont ces « horribles choses » ?

Absolument. Et c’est toujours comme ça dans le monde aujourd’hui. C’est dur de ne pas ressentir le poids de tout ce qui se passe autour de soi. Peut-être que c’est simplement dans ma nature, que je suis une éponge. J’aime absorber ce qui m’entoure, même si ce sont des choses sombres. J’ai quand même envie de continuer à croire que les êtres humains sont fondamentalement bons, qu’on trouvera le moyen de régler les problèmes et qu’on peut devenir meilleurs, que les gens peuvent changer, qu’ils peuvent évoluer. En tant qu’êtres humains, on est pleins de ressources. On voit l’histoire sans arrêt se répéter. Quand va-t-on enfin apprendre toutes nos leçons ? Quand va-t-on oublier toutes les choses qui n’ont pas t’importance et qui obsèdent autant tout le monde ? Quand va-t-on enfin regarder nos confrères humains comme nos égaux et ne pas les rabaisser à cause de toutes ces choses insignifiantes ? Quand est-ce que ça va arriver ? Je ne sais pas, mais je dois garder la foi et cette croyance qu’on peut être meilleurs, ou alors pourquoi suis-je là ? Pourquoi fais-je ça ? [Rires] Mais oui, cette chanson était une vraie réflexion, à regarder ce monde tel qu’il est aujourd’hui et à essayer d’y faire quelque chose. Avec un peu de chance, on s’améliorera, j’ai la foi, mais il y a une part de moi qui, en écrivant et finissant cette chanson, voulait transmettre cette positivité et ce message au monde, indépendamment de qui écoutait. J’ai décidé il y a longtemps – je crois quand j’étais adolescente – que si les gens commençaient à écouter ce que j’ai à dire… Pour le meilleur et pour le pire, parce que je ne suis pas thérapeute, je ne suis pas une politicienne, je ne suis pas médecin, je n’ai aucune qualification pour mettre quiconque dans le droit chemin, mais c’est important pour moi de véhiculer cette positivité et cet espoir.

« Je connais plein de gens qui gardent secrètes beaucoup de choses sur eux-mêmes et ne montrent pas qui ils sont véritablement, car c’est important pour eux. Pour ma part, je tire plus de positivité en étant sans vergogne moi-même, en dévoilant beaucoup de choses et en étant vraiment honnête avec nos fans. »

On retrouve une chanson intitulée « Strange Girl » : as-tu toujours été considérée comme telle par les gens ? Qu’est-ce qui fait de toi une « fille étrange », selon toi ?

Je me souviens, je crois que j’avais onze ans et j’étais obsédée par Alice Cooper. C’est là que j’ai commencé à découvrir à quel point j’étais étrange. Je me souviens être allée à une soirée pyjama avec un groupe de filles de mon âge et avoir essayé de leur faire connaître Alice Cooper. Elles m’ont regardée comme si je venais d’une autre planète, elles ne comprenaient absolument pas pourquoi j’aimais cette musique, et c’était le jour où j’ai compris que j’étais bizarre [rires]. C’est drôle parce que maintenant, je suis amie avec Alice Cooper et je lui ai raconté une fois cette histoire. Il en était très fier, il était là : « Oh, je suis tellement content que ce soit moi qui t’ai aidée à découvrir que tu étais bizarre » [rires]. Ça fait pas mal de temps que je suis une fille étrange, mais c’est intéressant parce que je me souviens m’être sentie un peu exclue après cette expérience, mais ensuite, mon père – que Dieu le bénisse –, qui est un homme merveilleux, était fou de joie. Il était là : « Non, c’est une bonne chose. C’est bien que tu sortes du lot. C’est bien que tu sois différente. Et c’est bien que tu aimes la musique que tu aimes, simplement parce que ça te parle. Tu n’aimes pas Alice Cooper parce que c’est populaire à la radio en ce moment. » Je veux dire qu’à l’époque, il y avait les Backstreet Boys, les Spice Girls, TLC, Mariah Carey et tous ces trucs qui n’avaient rien à voir avec Alice Cooper et qui étaient populaires. En gros, il a dit : « Non, c’est vraiment une très bonne chose que tu te démarques » et cela, maintenant que je suis dans ma trentaine, est devenu ma déclaration de mission. Nous n’aurions pas de chansons comme « Freak Like Me » ou « I Get Off » ou « I’m Not An Angel » si je ne ressentais pas autant de fierté à être différente et à être une fille étrange. C’est donc une bonne chose, je l’utilise maintenant comme mon super-pouvoir !

Dans « Wicked Ways » tu chantes qu’il ne faut pas te prendre pour un ange, que tu auras toujours des vices et que tu as tes mauvais côtés. As-tu l’impression que les gens se font de fausses idées sur toi parce qu’ils t’admirent en tant qu’icône ? A quel point est-ce important pour toi de te désacraliser ou démystifier aux yeux de tes fans ?

Je trouve que c’est très important de démystifier. Je pense qu’à un moment donné, quand on a des gens qui nous admirent ou nous suivent, il faut prendre une décision. Une manière de faire est de complètement fermer la porte et de mettre un voile, et je connais plein de gens qui gardent secrètes beaucoup de choses sur eux-mêmes et sur leurs relations, et ne montrent pas qui ils sont véritablement, car c’est important pour eux. Pour ma part, je tire plus de positivité en étant sans vergogne moi-même, en dévoilant beaucoup de choses et en étant vraiment honnête avec nos fans. Je ne sais pas pourquoi c’est si important pour moi de faire ça. Peut-être que ça m’aide ; peut-être que ça m’aide à me rassurer qu’indépendamment de mes défauts et tout, mon côté obscur et mon côté clair peuvent coexister, et que personne ne me détestera pour ça – ou peut-être que si, mais ça n’a pas d’importance. En étant honnête avec nos fans et avec les choses dont je parle, j’ai vu que ça inspirait d’autres gens à être honnêtes avec eux-mêmes aussi. J’ai entendu tellement d’histoires de fans racontant à quel point ils appréciaient le fait que je sois vraie. Ce n’est pas parce que je suis sur scène et que plein de gens savent qui je suis que ça me rend moins humaine et moins mauvaise ou moins bonne [rires]. En écrivant cette chanson, je me rassurais un peu et je montrais un peu que mes côtés obscur et clair pouvaient faire une trêve et coexister. Il peut m’arriver d’aimer les deux côtés. Je peux accepter les deux côtés de ma personnalité, et ce n’est pas un souci. J’espère que les fans apprécient l’honnêteté de cet album.

A propos d’honnêteté, quels sont tes plus grands vices ou mauvais côtés ? Quel est ton côté obscur ?

Oh purée ! Je peux être très méchante quand je veux, et ce n’est pas quelque chose que j’aime chez moi. J’ai aussi parfois tendance à abuser de la débauche. Parfois – je n’ai pas de manière plus éloquente de dire ça – je dis « j’emmerde ça » et je m’attire plein de problèmes quand je ne devrais pas, parce que je devrais être la personne responsable dans ce groupe, or je ne le suis pas toujours [rires]. Même sans parler de mon rapport aux autres, je me surprends à être très méchante envers moi-même aussi. J’ai le sentiment que je ne prends pas soin de moi comme je le devrais, autant sur le plan de l’amour-propre que mentalement, et je pense que j’utilise la musique pour m’aider avec ça aussi. A la fois, personne n’est parfait. Donc j’arrive de plus en plus à accepter que je ne sois pas parfaite et que je ne puisse jamais l’être. Plus je trouve un équilibre par rapport à ça, plus j’arrive à m’apprécier, parce que même les choses qui font de moi quelqu’un d’agréable et qui peuvent paraître positives… Par exemple, je suis une béni-oui-oui en série : j’irais jusqu’au bout du monde pour autrui, mais je ne prendrais pas soin de moi, ce genre de chose. Donc, dans tout ce qu’on fait, je pense qu’il y a un grand équilibre à trouver entre le clair et l’obscur, parce que oui, d’une certaine façon, c’est quelque chose de positif, genre : « J’aime les gens et j’aime faire en sorte qu’ils se sentent bien », mais si je ne prends pas soin de moi, comment puis-je répandre cet amour sur une autre personne si je ne le ressens pas pour moi ? Je pense que tout le monde a un peu des deux.

« Maintenant que je suis sortie du circuit religieux traditionnel, ce qui s’en rapproche le plus, c’est vraiment la musique. Ça te fait léviter. Il y a un côté confrérie là-dedans. Il y a une magie intangible. »

Tu confesses pécher dans « Wiched Ways », tu chantes à propos de « ma religion » dans « Steeple » et, bien sûr, il y a « My Redemption ». Il y a donc toutes ces connotations religieuses. Trouves-tu une forme de spiritualité dans cette musique ?

Oui. Je pense que c’est la chose qui se rapproche le plus de la magie. J’allais à l’église quand j’étais plus jeune. Mes parents sont passés par une phase chrétienne et je suis allée à l’école chrétienne et tout ça quand j’étais enfant. Il y a plein de questions qui ne trouvaient pas de réponse. Maintenant que je suis sortie du circuit religieux traditionnel, ce qui s’en rapproche le plus, c’est vraiment la musique. Ça te fait léviter. Il y a un côté confrérie là-dedans. Il y a, comme je l’ai dit, une magie intangible que personne ne comprend vraiment et que personne ne peut vraiment recréer, il faut presque la laisser faire. Je dis toujours ça aux gens : je pense que c’est la musique qui te choisit, pas l’inverse, parce que c’est vraiment ce que je ressens. Et puis, quand on y pense, quand on est à un concert, on érige vraiment sa propre église. C’est ce sanctuaire, tu regardes dans le public et tu vois tous ces gens différents venant de tous les milieux, de tout âge, de toute couleur de peau et de tout sexe, et pourtant on est tous pareils dans ce concert de rock. On peut tous se rendre compte de ça et avoir cette unité, cet espoir et cette célébration. J’adore mettre de petites connotations religieuses dans les chansons qui, je suppose, représentent intrinsèquement la musique du diable, simplement parce que je trouve que… Pourquoi pas ? [Rires]

Tu mentionnes ta communauté dans « Steeple » et puis l’album se termine sur une ballade très fédératrice intitulée « Raise Your Horns ». Le sens de la communauté est-il aussi important pour toi – surtout en tant que « fille étrange » – que la musique ?

Absolument. Le sens de la communauté est très important pour moi. Nous avons les fans les plus extraordinaires au monde – et certains des fans d’Halestorm les plus extraordinaires sont d’ailleurs en France, soit dit en passant, vous êtes tellement passionnés ! Je sais que nos fans m’ont dit qu’ils avaient besoin de cette communauté, mais d’un autre côté, j’en ai aussi besoin. Ça me protège de mes pensées et c’est magnifique d’en faire partie, et c’est quelque chose qui m’a manqué. Cette camaraderie m’a beaucoup manqué durant le confinement et toute cette période. Car je vis la même chose que tout le monde. Même si je suis sur scène, je regarde les gens et je suis là : « Ouah, tout ça ce sont des gens exactement comme moi. C’est un sanctuaire pour les incompris et ici on peut être soi-même sous une vive lumière, à crier à pleins poumons. » C’était très important pour moi de refléter ça dans cet album rien que pour cette raison. Ce qui est beau avec « Raise Your Horns », c’est que quand j’étais en train d’enregistrer le chant, il y a un moment où j’ai fermé les yeux et juste après avoir prononcé la première phrase du refrain [chante] « raise your horns », je pouvais voir très clairement tout le monde se lever et ressentir cette unité et ce sens de la communauté. Ça m’a beaucoup émue rien que d’y penser. Et ensuite, j’ai testé un extrait de la chanson sur la dernière tournée, juste pour voir si ce que j’avais imaginé allait se réaliser, et c’est ce qui s’est passé. Je n’ai même pas eu à dire quoi que ce soit, tout le monde a levé les cornes et j’étais là : « Oh purée, c’est fou ! » J’en suis fière et j’ai hâte que tout le monde entende l’album au complet. J’espère qu’ils se verront dans toutes les chansons et comprendront à quel point ils sont tous importants pour moi.

Tu as déclaré que quand les gens entendront cet album, tu veux qu’ils sachent qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils peuvent survivre à tout. Quels sont les albums qui ont fait ça pour toi ?

On remonte le temps maintenant. L’un de mes albums préférés est Holy Diver de Dio. Celui-ci, clairement, m’a donné énormément de force et de positivité, surtout quand j’étais adolescente ; peu importe mon humeur ou ce que je vivais, sur le plan relationnel ou autre, ou simplement quand je me disais que c’est vraiment nul d’être ado [rires], ça m’a beaucoup aidée. De même, quand j’étais plus âgée, il y a un album de Jeff Buckley intitulé Grace qui a vraiment touché ma corde sensible et m’a montré qu’énormément de choses étaient possibles. Après, je sais que ce n’est pas très metal de ma part, mais à n’importe quel moment, il peut m’arriver d’écouter du Tom Petty. Je ne sais pas ce qu’il y a dans son écriture, mais il y a certaines chansons qui ont un sens différent aujourd’hui qu’auparavant, ou peut-être qu’elles nous touchent à différents moments de notre vie. Je l’admire aussi. Je pense qu’il aurait pu faire du metal s’il l’avait vraiment voulu, mais je ne crois pas qu’il le voulait [rires].

« C’est important de parler du fait d’être une femme dans cette industrie, car ces filles vont me voir comme moi je voyais Ann Wilson de Heart, ou Joan Jett, ou Pat Benatar, et elles diront : ‘Eh bien, c’est une fille et elle y est arrivée. Donc je peux aussi le faire.' »

Vous avez enregistré et sorti l’an dernier la reprise des Who « Long Live Rock » pour le documentaire Long Live Rock. L’original est sorti il y a cinquante ans. Quel est ton sentiment quand tu regardes le rock n’ roll de cette époque et puis maintenant ce que vous faites avec Halestorm à cinquante ans d’écart ? As-tu l’impression d’une continuité ou bien est-ce deux mondes différents ?

Non, je pense que nous avons clairement essayé de porter le flambeau. Toutes nos premières influences sont venues de la musique de la génération de nos parents, donc des groupes comme les Who, Vanilla Fudge, Deep Purple et Pink Floyd, en allant dans les années 80 avec Van Halen, Judas Priest et toutes ces choses. Ce sont tous des influences que nous assumons complètement. C’est important pour nous de conserver cette mentalité de base et ce son qu’avaient ces groupes, et c’est en grande partie la raison pour laquelle, quand nous sommes en studio, la performance est très importante. La performance supplante la perfection, toujours, car on veut avoir ce côté humain dans les chansons, on ne veut pas retirer toute vie de l’enregistrement, pour ainsi dire, juste pour que tout soit parfait. Nous faisons la même chose lors de nos concerts. Nous n’utilisons pas de piste de click – ça ne me dérange pas –, nous n’utilisons pas de bande enregistrée, on n’est pas près d’entendre de shaker de sitôt… « D’où vient cette section de cordes ? » [Rires] C’est très important pour nous aussi, parce que quand tu montes sur scène, ça devient vivant et tout est possible. Enfin, ça peut être un désastre complet, je ne sais pas ! Nous devons nous écouter et nous assurer de bien répéter pour que ça n’arrive pas, mais c’est ce qui est excitant et ça fait partie de ce que je préfère dans ce job. Donc oui, c’est très important pour nous de marcher dans les pas de ces grands artistes, de faire honneur à leur héritage et de porter toutes ces valeurs fondamentales que nos ancêtres ont mises en place.

Tu es récemment devenue la toute première ambassadrice pour la marque Gibson. Qu’est-ce que ces guitares représentent pour toi ?

Oh, mon Dieu ! La guitare est plus qu’une guitare pour moi. C’est une extension de moi. Pour moi, c’est aussi une arme qu’on peut utiliser pour inspirer les gens. C’est une arme qu’on peut utiliser, évidemment, pour répandre de la musique dans le monde. Je sais que dès que je me sens déprimée, tout ce que j’ai à faire – j’en ai plein autour de moi aujourd’hui –, c’est d’en prendre une et de jouer un petit peu. Même si tu ne fais que gratter quelques accords, ça te redonne vraiment le moral. Je ne sais pas quelle est cette magie, mais je la prends. L’une des plus belles choses qui me sont arrivées durant ces dernières années, en tournant et en étant une ambassadrice de Gibson, c’est que plein de gamines qui m’écrivent des lettres, qui viennent me voir lors de mes concerts, ou quand je suis par monts et par vaux en ville, me disent qu’elles ont commencé à jouer de la guitare parce qu’elles m’ont vue en jouer. Je vais te dire, si tu m’avais dit quand j’avais entre treize et seize ans, quand j’ai commencé à jouer, que je serais dans une position aujourd’hui où j’inspirerais de jeunes femmes à jouer d’un instrument, j’aurais halluciné, car c’est vraiment une position spéciale. J’ai l’impression que si je suis capable de rendre leur rêve un peu plus atteignable… Je pense que c’est important de parler du fait d’être une femme dans cette industrie, car je sais que ça peut paraître un peu absurde, mais ces filles vont me voir comme moi je voyais Ann Wilson de Heart, ou Joan Jett, ou Pat Benatar, et elles diront : « Eh bien, c’est une fille et elle y est arrivée. Donc je peux aussi le faire. » Ça leur ouvre un peu cette porte. C’est tellement beau de faire partie de ça. J’en suis très fière.

C’est tout pour moi. Merci d’avoir échangé avec nous aujourd’hui !

Oh, je t’en prie. Mille mercis d’être resté là à m’écouter radoter encore et encore. C’est très courageux de ta part !

Interview réalisée par téléphone le 15 avril 2022 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.

Site officiel de Halestorm : www.halestormrocks.com

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