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Chronique Focus   

Hallatar – No Stars Upon The Bridge


Parfois il est impossible d’exprimer un sentiment, un état d’âme avec des mots. C’est simplement trop difficile, comme si la langue ne suffisait pas, n’était pas prévue pour. C’est ce qui est arrivé malheureusement à Juha Raivio, guitariste et compositeur de Swallow The Sun et Trees Of Eternity, après le décès de sa compagne la chanteuse Aleah Stanbridge, victime du cancer. Hallatar naît ainsi d’un sentiment d’urgence. Une nécessité au-delà de la simple catharsis, « prendre la guitare ou la hache » pour reprendre les termes de Juha. Hallatar est en quelque sorte une extension de Trees Of Eternity – son projet avec Aleah qui n’aura eu le temps d’engendrer qu’un album -, comprenant Gas Lipstick (ex-HIM) à la batterie et Tomi Joutsen (Amorphis) au chant. L’album s’intitule No Stars Upon The Bridge, écrit en une semaine sans retouche par Juha Raivio un mois après la triste nouvelle, ayant rassemblé des écrits et démos d’Aleah Stanbridge. En somme, No Stars Upon The Bridge est aussi spontané et crucial que douloureux. L’extension d’un être en deuil qui aujourd’hui peine à se souvenir du processus de composition et ne souhaite surtout pas le revivre.

On comprend aisément que la musique d’Hallatar soit extrêmement sombre, aux accents doom très prononcés. Il suffit d’apprécier les premières notes de « Mirrors » pour s’en rendre compte. L’espoir semble être une denrée rare, impression qui subsiste tout au long de l’album. Le riff de guitare emprunte un tempo qui ferait passer Paradise Lost pour un groupe de punk, les arpèges sont aussi minimalistes que torturés. À ce titre la performance vocale de Tomi Joutsen est tout bonnement impressionnante; son expression poignante, jusque dans ses respirations. Ce dernier multiplie les registres, que ce soit dans les growls stridents ou gutturaux (une démonstration sur le massif « Melt »), ainsi que le chant clair présent, plaintif, sur « Mirrors » et, paisible, sur le titre acoustique « Severed Eyes ». Car aussi sombre soit No Stars Upon The Bridge, l’immédiateté de son écriture ne bride pas le soin accordé aux mélodies. Il y a effectivement du Anathema dans les harmonies de « My Mistake » qui voit la participation toute en sensibilité, soufflée, presque susurrée, de la chanteuse Heike Langhans (Draconian). On peut même évoquer une certaine délicatesse, des éclaircies rarissimes qui au final renforcent l’impact de la véritable violence d’Hallatar. Le hurlement de Tomi Joutsen sur l’outro de « My Mistake » a ainsi toute la puissance qui sied à l’entreprise délicate qu’est l’album. Puis survient « The Maze » qui prouve que le doom est un genre presque contemplatif pour l’auditeur, où l’intensité semble toujours primer sur la performance instrumentale. On se retrouve au sein de l’esprit d’un homme meurtri qui ne retrouve pas la lumière, « In my mind I see fear » scande Tomi, avec une crédibilité rare.

Au-delà de l’extrême sincérité des musiciens, l’une des forces de ce No Stars Upon The Bridge réside dans les arrangements qui viennent aérer une musique pesante par essence. Outre les interludes que sont « Raven Song », « Spiral Gate » et « Pieces », textes d’Aleah Stanbridge déclamés par Heike Langhans qui confèrent une tonalité expérimentale à l’album, on retrouve des notes de piano éparses présentes dans les compositions telles que « The Maze ». Il y a une tension constante entre la brutalité de l’écriture et les fines mélodies qui ponctuent le disque. No Stars Upon The Bridge évite ainsi l’écueil d’un genre qui tend parfois à se refermer sur lui-même en répétant les mêmes structures avec lassitude. Hallatar en est aux antipodes. Le moment le plus fort de l’album reste le titre de conclusion « Dreams Burn Down », titre au riff le plus heavy de l’album qui contient des enregistrements de la voix chantée angélique d’Aleah Stanbridge justement… Pour être honnête, que l’on soit amateur ou non de l’œuvre des membres d’Hallatar, il est difficile d’analyser la chanson lorsqu’on en connaît l’origine et le contexte. On se contentera de dire qu’il noue la gorge et que « poignant » devient un adjectif lacunaire.

Certains pourront tristement se retrouver dans la douleur que Juha Raivio arrive à communiquer. On ne peut faire plus sincère que la musique d’Hallatar. Peut-être est-ce l’origine première de sa grande qualité. No Stars Upon The Bridge ne peut toutefois pas se résumer à un simple exutoire. Il l’est lorsqu’il soulage les esprits affligés, il le dépasse lorsqu’il arrive à communiquer des émotions auxquelles des personnes n’ont pas encore été confrontées. S’il est possible pour des artistes de créer en partant d’émotions aussi négatives, alors il y a de la lumière à trouver partout, quoi qu’on en dise.

Clip vidéo de la chanson « Mirrors » :

Album No Stars Upon The Bridge, sortie le 20 octobre 2017 via Svart Records. Disponible à l’achat ici



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