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Interview   

Hyrgal et le pacte de la renaissance


Un règne s’achève et un nouveau cycle s’ouvre. Si seulement dix-huit mois séparent Fin De Règne et ce troisième album qui se passe de titre, il s’agit bien d’un Hyrgal nouveau intensément plus noir. Une dimension plus radicale, un son plus cru et une nostalgie toujours plus évidente pour l’âge d’or du black metal. D’autant plus que la perspective du projet est tout à fait différente pour ce groupe mené par Clément Flandrois qui peut désormais s’y dévouer corps et âme, l’aventure de Svart Crown s’étant terminée dans le même temps. S’il s’agit bien d’un nouveau cycle qui s’annonce, il n’en est pas pour autant une surprise puisque son compositeur évoquait déjà avec nous lors du dernier entretien son désir de revenir à la source de la flamme qui l’anime…

Sur la base d’une spiritualité nouvelle, mêlée à de la colère et à de la rage, les membres d’Hyrgal scellent un nouveau pacte. Malgré la fidélité au principe de la musique de l’instant, nous sentons bien en discutant avec le musicien que le disque sans nom a pris une tournure différente que ce qui était initialement envisagé, portant sans doute avec lui des épreuves de la vie supplémentaires et imprévisibles. C’est à quelques jours de la présentation scénique de ce nouveau méfait dans le cadre du LADLO Fest, qui devait initialement être celle de Fin De Règne mais qui n’a jamais pu se tenir à cause de la pandémie, que nous nous sommes entretenus avec l’artiste. Du retour à un enregistrement traditionnel au fil thématique qui se dégage, Clément Flandrois nous en dit plus sur ce « redémarrage à zéro »…

« C’est un album qui marque un tournant pour le groupe, c’est définitif, tant en termes philosophiques, esthétiques que spirituels. »

Radio Metal : La semaine dernière on a appris la mort de Trevor Strnad (The Black Dahlia Murder). C’était une onde de choc, il se serait vraisemblablement suicidé à l’âge de 41 ans. Je voudrais avoir ta réaction à ce sujet, même si je ne sais pas si tu es familier avec sa musique. Je te pose cette question car dans le milieu du metal, et du metal extrême, il y a souvent des talents précoces, mais aussi des morts précoces : je pense évidemment à Alexi Laiho, Joey Jordisson, aujourd’hui Trevor, et je n’en cite que quelques-uns…

Clément Flandrois (chant & guitare) : Black Dahlia Murder n’est pas un groupe que j’écoute. Je connais ce groupe de renommée, parce que depuis le temps que je baroude avec mes quelques groupes, j’ai eu le temps de les voir, de les apercevoir sur des affiches et de connaître leur carrière. Je sais que beaucoup de gens étaient sensibles par rapport à Trevor. Je crois que c’était un mec qui était dans une sorte d’attitude très positive, très proche de ses fans. Il me semble que c’était quelqu’un de bonnard, comme on dit chez nous, quelqu’un qui avait une certaine joie de vivre et qui disparaît subitement comme ça – j’ai entendu dire aussi que c’était un suicide. Je ne peux pas être dans un affect comme certains parce que je ne suis pas aussi sensible à la musique que le sont certains. Après, je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’il y a, je pense, des dizaines et des centaines d’artistes qui disparaissent et qui n’ont pas forcément la notoriété de Trevor avec son groupe, des mecs qui sont aussi talentueux que lui et qui disparaissent aussi dans le plus grand inconnu. On va dire que ça ne me choque pas outre mesure. C’est dramatique et très triste que quelqu’un disparaisse aussi jeune, mais j’ai l’impression qu’il y en a beaucoup dans le milieu artistique qui disparaissent très jeunes. Est-ce qu’ils arrivent au bout d’un certain process ? Y en a qui le choisissent, ils partent de pleine volonté. Il me semble que c’était le cas de Selim Lemouchi et Jon Nordtveit, par exemple. Je ne sais pas trop quoi en penser, c’est une disparition tragique parmi tant d’autres pour moi. Ça ne m’attriste pas plus que ça, mais bon rétablissement à tous, bien sûr. J’imagine que le groupe doit être hyper impacté et que ça doit être dramatique de devoir subir un truc pareil quand on est au sein d’un groupe qui évolue depuis une vingtaine d’années. Je sais que les mecs tournaient beaucoup, que c’était très intense. J’imagine le lien qu’il y avait entre eux, donc j’imagine que ça doit être dramatique, mais à titre personnel, ça ne me choque pas plus que ça.

Question plus légère, on s’est parlé il y a un an et demi la dernière fois. Du coup, comment ça va depuis ?

[Rires] Eh bien écoute, ça va. Il y a eu beaucoup de bas, il y a eu des hauts. C’est bien, ça repart tranquillement. J’ai eu des années un peu compliquées, sur plein de niveaux : personnel, artistique, etc. Là, ça repart de plus belle avec ce nouveau disque pour lequel j’ai beaucoup travaillé. On est à une semaine de la sortie. Je suis très content, j’ai hâte qu’il sorte et que les gens puissent l’écouter. Ce qui est sûr, c’est que nous allons repartir un peu plus en concert avec le groupe. Nous avons hâte d’aller au contact, comme on dit, et de défendre ces nouveaux morceaux.

J’ai vu pas mal de retours positifs sur Fin De Règne. Comment as-tu reçu cet engouement ? L’as-tu d’ailleurs perçu ?

Pour être honnête, je n’ai pas trop prêté attention à tout ça. D’une, parce que je n’ai pas eu le temps ni l’envie. J’essaie de rentrer dans une dynamique où je ne m’attarde plus trop sur ce genre de choses. Je lis les chroniques, je vois ce qu’il se passe de temps en temps quand je me connecte. Je ne me connecte plus beaucoup aux réseaux sociaux, je gère juste les pages de mes groupes respectifs mais je n’y traîne plus en tant que personne. C’est quelque chose qui m’a un peu gonflé, donc j’ai lâché l’affaire. Donc je n’ai pas trop prêté attention aux retours. J’ai eu quelques personnes qui m’ont contacté, via le Bandcamp notamment. Il y a eu quelques personnes qui ont soutenu le groupe en prenant du merch, c’était top, mais je n’ai pas ressenti plus d’engouement que ça. Après, j’ai l’impression aussi que c’est une musique un peu de niche. C’est un groupe qui n’est pas forcément établi sur scène, donc il est peut-être moins identifié. Cela dit, Fin De Règne, nous en parlions déjà la dernière fois, c’est un album un peu particulier, c’est un truc que j’ai pondu et je suis très vite passé à autre chose. Je suis très vite rentré dans la composition du nouvel album. Quand il est sorti, nous avons très rapidement embrayé avec mon nouveau guitariste. Nous ne nous sommes pas du tout concentrés sur les retours que pouvait avoir Fin De Règne. Nous nous sommes concentrés sur notre nouveau matériel et nous avons avancé, il fallait que nous avancions.

La pression est donc avant tout artistique, tu t’en tiens à ta route sans trop te soucier du public et des retours…

En aucun cas. Je vais peut-être modérer mon propos : il peut y avoir un échange. D’ailleurs, je rencontre plein de gens qui ne sont pas forcément en phase avec ma vision de la musique, et quand il y a un échange constructif, je suis pour, je suis à l’écoute. Après, me baser là-dessus pour faire de la musique, c’est quelque chose que je ne fais pas. Je ne veux pas que ça interfère, en tout cas. Pour Hyrgal, ce n’est certainement pas le cas. Je ne ferai jamais quelque chose en fonction de chroniques, ou si je vois que les gens trouvent que ce n’est pas assez à leur goût, je ne modifierai en rien mon plan de base. C’est indéniable.

« Comme je dis toujours, on ne triche pas avec la musique du diable. »

Ce troisième album a l’air taillé véritablement pour le live, niveau production on dirait même qu’il a été enregistré en condition live. C’était voulu ? La dernière fois tu nous a dit que tu voulais le faire d’une manière « bien particulière »…

Ce disque n’a pas été enregistré live, par contre nous avons tout fait nous-mêmes. De l’enregistrement, au mix, au mastering, à la confection de l’artwork, c’est uniquement nous. Mes quatre musiciens, avec Rémi Serafino à la batterie, qui est le batteur de Svart Crown, il y a Mathias Nagy qui est aussi le guitariste de Gorgon et Alexis Chiambretto qui était déjà là avec moi au Hellfest et sur Fin De Règne. Nous avons travaillé nous quatre, et avec Tryf qui est aussi notre ingé son de Svart Crown, qui nous a grandement aidés sur le mix et sur le master. Nous avons travaillé en petite équipe, qui est en fait l’équipe live, car Tryf fait notre son et nous jouons la musique. Ça s’est enregistré de manière traditionnelle, instrument après instrument. C’est vrai que la dynamique du live nous branche de plus en plus ; je pense que ce sera le cas sur le prochain. Mais je suis content que tu dises ça, car s’il a cette dynamique live, ça veut dire que c’est un disque qui vit et que nous ne nous sommes pas trop plantés. Je suis content, c’est bien.

Hyrgal est ton projet solo, mais tu as deux nouveaux membres depuis 2021 et j’ai l’impression qu’avec ce nouvel album, c’est plus que jamais un en train de devenir un véritable groupe, un collectif…

Exactement. Il n’a jamais été aussi « groupe » que ça, c’est vrai. Je pense que c’était le moment de le faire évoluer dans cette forme-là. Je reste bien sûr la tête pensante et le principal compositeur, mais avec ce nouveau line-up, pas mal de choses se sont passées humainement et philosophiquement, il y a un gros lien, donc ça a ajouté quelque chose en plus que je n’avais pas forcément avant où j’étais un petit peu tout seul, surtout sur Fin De Règne où j’ai fait ma petite tambouille avec mes guitares et nous avons fait le disque. Là, il y a eu un truc un peu plus profond qui s’est passé en termes de réflexion, sur ce que représentait ce style de musique pour nous, pourquoi nous le faisions et où nous voulions aller. C’est un album qui marque un tournant pour le groupe, c’est définitif, tant en termes philosophiques, esthétiques que spirituels. À tous les niveaux, c’est un album qui marque un tournant. Ça a été complètement différent, y compris la manière de voir les morceaux. J’ai pratiquement tout composé très vite et nous avons beaucoup réarrangé ensemble. Rémi est arrivé le dernier et, je trouve, a sublimé les morceaux à la batterie. Nous avons eu de longues discussions sur ce qu’il avait envie de faire en tant que batteur et s’il cherchait à aller dans cette voie-là. Je pense qu’il a validé le propos avec ce qu’il a fait sur le disque. Nous avons donc tout fait nous-mêmes, il a enregistré ses parties de batterie de son côté, et nous avons fait nos guitares chez moi, paumés dans la montagne. Le chant, pareil, nous avons tout fait nous-mêmes. C’est un album à cent pour cent DIY.

Tu voulais Fin De Règne plus tranchant que Serpentine. Cette fois, avec cet opus, on a l’impression que tu souhaitais être encore un peu plus tranchant et renouer encore davantage avec l’énergie du black metal des années 90… Est-ce le cas ?

Complètement. Ça a été le leitmotiv de ce disque. D’une part, parce que c’est un disque que j’avais envie de faire depuis longtemps, depuis l’époque du split avec Bâ’a et Verfallen. J’avais dans l’idée de rendre comme une espèce d’hommage à une certaine vision peut-être traditionaliste de ce style de musique qui m’est chère. Je comprends que des gens s’en foutent et décident de passer outre, mais pour moi c’est hyper important. Comme je dis toujours, on ne triche pas avec la musique du diable. Donc ça me semblait important de renouer avec une manière de faire et de rendre hommage à ces groupes qui font qu’aujourd’hui je performe et j’ai envie de jouer cette musique-là. Je n’avais pas envie de rentrer dans cette case de post-black ou quoi que ce soit. Je m’aperçois avec le temps qui passe, avec ces dernières années, que ce soit pendant l’élaboration de Fin De Règne ou même du dernier, qu’il s’est passé beaucoup de choses dans ma vie qui ont changé beaucoup de choses au niveau de ma spiritualité, ce qui fait que j’ai une vision du black metal et je veux lui rendre hommage dans ma musique. Donc c’est vrai que c’est un album brut de décoffrage, beaucoup plus cru et noir que ceux d’avant.

Tu utilises l’appellation « métal noir », nous avons parlé à pas mal d’artistes ces derniers mois qui utilisent cette expression pour évoquer le black metal à la française. On a l’impression de vivre une période de reviviscence du métal noir français inspiré des années 90. Perçois-tu un engouement autour de ça ?

J’espère qu’il est là. Je ne sais pas si je le perçois, parce que comme je t’ai dit, j’ai un mode de vie assez isolé. Je ne vais pas trop voir ailleurs. Je suis vraiment dans ma baraque, paumé, je vais faire mon taf et basta. S’il y a un engouement, tant mieux. C’est vrai que je vois quand même beaucoup de groupes apparaître sur notre scène française. Je pense qu’il y a un engouement pour le black metal, en règle générale, que c’est un mouvement qui fascine de plus en plus. Par contre, est-ce qu’il y a un véritable engouement pour ce black un peu tradi-90’s, je ne sais pas, je pourrais pas te le dire. Je sais qu’avec les personnes avec qui j’évolue – des amis, des membres de mes groupes, des amis à moi qui ont aussi d’autres groupes – c’est le cas. Nous avons vraiment ce besoin – comme tu dis, cette crise de la quarantaine – de revenir à nos premiers amours. Maintenant, est-ce que c’est le cas sur toute la scène française, je sais pas du tout. J’espère que c’est le cas, parce que pour moi c’est la base du truc. Après, c’est vrai que je vois aussi beaucoup ce milieu et ce style artistique évoluer et muter vers quelque chose qui, personnellement, ne me correspond pas. C’est pour ça que je veux, au sein de mon projet, rendre cette espèce d’hommage et montrer d’où nous venons.

« Nous nous sommes autant radicalisés sur la musique qu’en tant que personne, spirituellement, avec ce nouveau disque. »

Ce nouvel album n’a pas de nom. Quel est le sens que tu mets derrière ça ?

Parce que je trouvais que ce n’était pas nécessaire d’avoir un nom. Parce que ce disque-là, en interne, représente une fin et un point de départ. Fin De Règne n’a pas été fait pour rien, comme je disais, c’était un disque que j’avais vraiment envie de faire. Celui-là c’est, pour moi, la renaissance de ce groupe, de cet esprit-là qu’est Hyrgal. Je ne voulais pas mettre de titre, un peu comme un symbole de renaissance, et appeler cet album Hyrgal. Avoir le nom du groupe qui le joue, plus d’une manière comme on pouvait avoir ça sur des démos, par exemple, où le mec arrivait et c’était juste le nom du groupe. Pour moi, c’est un peu cet esprit avec ce nouveau disque : on repart de zéro. Il y a toujours des liens avec le passé, avec ce que j’ai pu faire artistiquement, mais on repart sur quelque chose de neuf, donc je voulais justement symboliser ça avec pas de titre, un artwork hyper sobre, quelque chose de très frontal, de très brutal, sans compromis.

Tu décris ce nouvel opus comme un nouveau point de départ : c’est que tu as déjà la suite en tête ?

Bien sûr. Je pense déjà à l’après. Mais je ne vais pas appréhender le futur de la même manière que je l’ai fait jusqu’à présent. J’ai envie de défendre et que le groupe joue ces nouveaux titres en live, j’ai envie de m’exprimer au travers de ces morceaux. Donc j’ai envie de prendre le temps pour passer certaines étapes en tant que musicien, parce que ça ne paraît pas, mais c’est un album qui est extrêmement complexe à exécuter : il y a beaucoup de subtilités, c’est très technique et très intense, ça demande beaucoup d’endurance. Ce n’est pas évident à exécuter. J’aimerais aussi, en tant qu’artiste, passer certains stades de musicien avec ces morceaux avant de proposer du nouveau matériel. J’ai plein d’idées en tête, j’ai déjà une vision de ce que j’ai envie de faire pour le prochain. Je te disais, j’aimerais bien l’enregistrer live. J’aimerais bien aussi aborder d’autres facettes du groupe en live. Mais je vais prendre le temps, je ne vais pas avoir le même rythme que j’ai eu jusqu’à présent, où j’ai sorti des disques et des EP très rapidement. Maintenant, j’aimerais prendre un peu plus le temps et faire vivre ces morceaux en live, parce que je pense qu’ils ont leur place.

Vois-tu un écart aussi sur le plan thématique avec les albums précédents ?

Le seul lien que je pourrais trouver avec Fin De Règne, c’est ce dont je parle dans ce nouveau disque, c’est ce qu’il se passe derrière la porte qui se ferme après Fin De Règne. Si les gens ont un peu suivi ou lu les textes de Fin De Règne, et notamment le dernier titre, « Triste Sire », quand on lit les paroles de fin, ce nouvel album c’est ce qu’il se passe après. Ça va être le seul lien. Thématiquement, je suis allé dans d’autres univers. C’est un peu compliqué pour moi d’en parler, parce que c’est très vite mal interprété par les gens, je trouve. Globalement, c’est une vision du satanisme qui nous est propre, avec nos influences, et qui est une vision jusqu’au-boutiste. Nous nous sommes autant radicalisés sur la musique qu’en tant que personnes, spirituellement, avec ce nouveau disque. Le lien thématique n’est plus forcément le même que celui des albums d’avant, où c’était plus des constats, des choses vues d’une vision de spectateur, d’analyse de ce qu’il se passe, de choses que je voulais exprimer sur ces disques. Sur ce nouvel album, c’est ce que nous avons au fond des tripes, et aussi certains pactes que nous avons scellés, certaines choses que nous avons faites pour pouvoir faire ce disque. Donc thématiquement, non, je trouve qu’il n’a rien à voir avec ce qui se passait avant. Justement, ça fait aussi partie de la renaissance du groupe. C’est-à-dire que nous abordons d’autres thèmes qui sont radicalement et profondément ancrés dans le satanisme et la propre vision que nous en avons.

L’album est accompagné de la phrase suivante : « Ce nouvel album lève le voile sur nos réelles convictions et notre allégeance à l’opposition du monde de la lumière. L’homme d’aujourd’hui se meurt dans la fange et nous avons choisi d’emprunter d’autres chemins pour rejoindre le royaume des morts ; ceux de la colère, de la libération et de la vérité. » Qu’est-ce que tu appelles le monde de la lumière ?

Le monde de la lumière c’est, pour moi, l’ensemble du monde tel qu’il est développé et caractérisé aujourd’hui, que ce soit au niveau social, artistique, humain et relations entre les humains. Plus j’avance dans l’âge, plus je m’aperçois que je suis de moins en moins fait pour ce qui se développe autour de moi. Il y a de plus en plus un refus du monde comme on le connait, avec des manières de faire actuelles qui m’énervent énormément ou me débectent. A un moment donné dans nos vies, au lieu de nous positionner en tant que victimes et de subir cette espèce de pression de l’extérieur dans ce monde qui ne nous convient pas de toute façon, nous avons décidé de réellement basculer et de finalement faire un choix qui était latent pour certains dans le groupe. Depuis très longtemps, nous nous posions des questions, nous ne savions pas quel chemin arpenter, comment appréhender tout ce truc-là. Aujourd’hui, c’est ce que nous avons fait avec ce disque. C’est pour ça que nous nous opposons maintenant réellement à ce monde-là, tant sur le plan artistique que dans notre manière de faire ou dans nos propos. Et ça va être de plus en plus radical et jusqu’au-boutiste. Nous avons choisi d’emprunter ces voies-là, parce qu’il nous semble que pas grand-chose ne mérite d’être sauvé aujourd’hui.

« Plus j’avance dans l’âge, plus je m’aperçois que je suis de moins en moins fait pour ce qui se développe autour de moi. Il y a de plus en plus un refus du monde comme on le connait, avec des manières de faire actuelles qui m’énervent énormément ou me débectent. »

Tu parlais de votre vision du sataniste : est-ce un satanisme comme le faisait Dissection et dont Watain se revendiquait, c’est-à-dire un satanisme à l’interprétation plus libre, contre l’ordre établi, une opposition, et non pas luciférien ou autre ?

Complètement. Après, je ne pense pas que dans ma philosophie j’arbore à fond les trucs à la Dissection, Jon Nödtveidt, etc. Mais oui, c’est une énorme influence dans ma façon de voir les choses. C’est sûr que la vision judéo-chrétienne du satanisme, de l’enfer et de Satan, ce n’est pas du tout le projet et la vision personnelle que nous en avons. Nous utilisons des paroles très imagées, il y a quelques icônes, il y a beaucoup de choses dedans, mais c’est la manière d’écrire que j’ai toujours eue. Dans notre vision quotidienne de ce satanisme-là, nous nous rapprocherions plus de cette opposition à l’ordre, à ce monde et à une façon de penser qu’ont quatre-vingt-dix pour cent des gens et qui ne nous convient pas. Nous avons fait le choix de vivre reculés, d’avoir une sociabilisation avec peu de gens, nous faisons notre musique et basta. Cette opposition commence déjà par là, par un rejet de comment tout ça évolue aujourd’hui. Donc oui, ça s’apparente à ces doctrines et mouvances-là. Il y a une vision du satanisme que nous avons et que nous trouvons très lumineuse. C’est une vision qui nous amène en tant que personnes au quotidien à nous transcender, à nous développer, à nous faire réfléchir, à nous bousculer et à nous faire sortir de notre zone de confort. C’est finalement quelque chose de très lumineux et de très positif. C’est une opposition pleine de fureur, de colère et de rage.

Comme tu es quelqu’un qui crée et produit sur l’instant. Est-ce que sans pandémie et sans confinement cet album, tel qu’il est, aurait existé selon toi ?

Je pense que c’est un ensemble de choses. Ça fait juste partie de l’évolution de ma vie. Je pense que tout élément m’a impacté et m’a amené à faire ce disque tel qu’il est aujourd’hui, et même m’a changé au niveau philosophique et spirituel. Il y a eu beaucoup de choses, il y a eu énormément de déceptions et de désillusions, et en même temps, il y a eu énormément de choses positives. Donc je pense que tout ça a fait que ça a fait ce disque-là aujourd’hui. Des nouvelles rencontres, avec notamment mon nouveau guitariste, beaucoup d’échanges au niveau spirituel… Ça m’a aussi ouvert beaucoup de portes. Nous avons beaucoup échangé sur plein de choses. Ça nous a galvanisés. Je pense que c’est un tout, c’est juste mon évolution dans ma vie qui fait que ce disque tombe aujourd’hui. Je planifie, je compose toujours des trucs, mais pour ce disque, il y avait des choses avec lesquelles je savais où je voulais aller, et il y en a d’autres que je n’ai pas maîtrisées et qui m’ont amené à l’homme que je suis aujourd’hui. C’est donc un ensemble de choses qui font que ce disque est ce qu’il est. Peut-être que s’il n’y avait pas eu le Covid-19, que si d’autres choses s’étaient passées différemment, ce disque n’aurait peut-être pas eu la même gueule. Mais au demeurant, il est ce qu’il est, et il est là à cause de tout ce qu’on a vécu depuis deux ans. Ça paraît con, mais pour moi il s’en est passé pas mal !

Question un peu basique sur le format. On est pour la troisième fois consécutive sur un sept titres pour moins de quarante minutes de son. Est-ce qu’il y a une raison particulière ? On pourrait penser à l’attache avec le format vinyle…

Non. Déjà, c’est parce que je n’aime pas faire des disques longs. En tant qu’auditeur, j’aime quand les disques ne sont pas d’une longueur excessive. Il y a des exceptions à la règle. Quand j’écoute The Wild Hunt de Watain – qui est très long, il me semble qu’il fait presque une heure – oui, je me régale, c’est mortel, c’est une tuerie, il y a tous les adjectifs possibles. Mais la plupart du temps j’aime quand les disques sont francs du collier et expriment quelque chose sur un format assez court. Quarante-cinq minutes, pour moi, c’est le maximum. Là, je crois qu’on est à trente-huit ou trente-neuf minutes. Après, je ne me donne pas de limites de format, je fais ce qu’il y a à faire pour le disque que je fais. Je ne vais pas m’amuser à reprendre des vieux titres pour combler une durée alors qu’ils ne servent à rien et desservent le projet artistiquement. Les titres qui ont été composés pour ce disque, c’est ceux-là, et ça fait cette durée-là. Je ne me pose pas trop de questions au niveau de la durée. Ça tombe comme ça et j’aime faire des disques courts. J’aurais très bien pu me dire : « On va en rajouter un pour rallonger », mais je trouve que ça desservait le propos, ça ne servait à rien. C’est un entre-deux, le fait qu’en tant qu’auditeur j’aime bien les formats courts et le fait que ça s’est imposé comme ça, j’ai composé cet album et ça faisait ce temps-là, ça a pas du tout été calculé. Ce n’est pas un élément qui a un intérêt pour moi, ce n’est pas quelque chose auquel je fais gaffe.

Tu disais que tu voulais vraiment porter ce projet sur scène : avez-vous des plans pour le faire en termes de live, des projets de tournées, de festivals, etc. ?

Nous sommes en train de démarcher un petit peu. Il me semble que nous avons encore une date estampillée LADLO au mois de juillet, dans le Centre France. Il me semble que c’est avec Limbes et Corpus Diavolis, mais je ne suis pas sûr, faut que je voie avec Gérald [Milani] si ça se fait toujours. Après, nous sommes en recherche de dates, nous envoyons quelques mails actuellement. Je ne vais pas te cacher que j’attends beaucoup du LADLO Fest, pour que ça scelle quelque chose entre les musiciens, pour voir si c’est réellement le vrai bon point de départ dont nous parlions et que nous ressentons tous. Je pense que je vais plus m’activer à la tâche de recherche de dates après que le LADLO Fest sera passé. J’ai envie de voir comment les morceaux évoluent en live. Une chose après l’autre. Il me semble important de jouer au LADLO et de faire cette date qui avait été annulée à deux reprises. Après, nous allons certainement chercher d’autres dates, nous avons des plans dans différentes villes. J’ai vécu un peu à Bordeaux, et puis Mathias avec Gorgone joue beaucoup. Donc nous essayons de prospecter comme ça, à droite, à gauche. Nous avons quelques plans qui vont tomber, et je pense que nous allons avoir des dates qui vont se booker et vous devriez voir nos bouilles incessamment sous peu.

Tu nous avais parlé de Barathre la dernière fois, un projet de doom/black. Qu’est-ce que vous avez de prévu pour le moment ?

Pour l’instant, c’est un projet qui a été mis en stand-by. D’une part parce que nous manquions cruellement de temps. D’autre part, vu que nous faisons énormément de choses nous-mêmes, au niveau de l’enregistrement, ça demande beaucoup de temps et de logistique, et puis nous avons nos vies à côté aussi. Donc c’est vrai que c’est un projet dans lequel nous ne nous sommes pas encore replongés avec Alexis qui joue avec moi dans Hyrgal. Il a aussi monté son propre projet, qui s’appelle Unholdun qui sort au mois de juillet chez Purity Through Fire – il y a des tracks en avant-première. Il a fait son projet solo de son côté et il a aussi travaillé sur Hyrgal, donc c’est vrai que nous n’avons pas encore remis le pied à l’étrier pour ce projet-là. Nous verrons quand le temps sera opportun pour le faire. J’ai aussi plein d’autres projets à côté, donc nous essayons de prioriser certaines choses. Ça risque de revenir dans les années à venir, mais pour l’instant ce n’est pas encore dans les tuyaux, c’est un peu en stand-by.

Interview réalisée par téléphone le 15 mai 2022 par Jean-Florian Garel.
Retranscription : Antoine Moulin.

Facebook officiel d’Hyrgal : www.facebook.com/Hyrgal

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