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Chronique Focus   

Immolation – Acts Of God


Des anges qui se battent pour ne pas voir leur chair décomposée par une lumière noire. C’est tout simplement l’artwork – œuvre de l’omniprésent Eliran Kantor – que présente le onzième opus d’Immolation. De quoi dissiper le peu de doutes qui pouvaient exister quant à l’orientation musicale de la onzième livraison des cadors du death metal made in New York. Immolation ne s’était que peu manifesté depuis Atonement (2017) et si l’on prend en compte les dires du chanteur-bassiste Ross Dolan, leur nouvel effort intitulé Acts Of God est censé accentuer le sentiment de désespoir et la noirceur de son prédécesseur. Alléchant, surtout lorsqu’on reconnaissait les qualités d’Atonement et le talent d’Immolation pour livrer un death à la fois old-school et inspiré du doom sous certains aspects. Acts Of God a donc pour dessein de s’enfoncer dans les abysses et de présenter l’état d’esprit d’Immolation dans le contexte qui l’environne : un pessimisme qui confine au fatalisme.

Le délai entre les deux efforts s’explique par la volonté de Ross Dolan et consorts de profiter d’un confort jugé essentiel pour la confection d’une œuvre crédible. Immolation a en outre travaillé avec des visages familiers, dont le producteur Paul Orofino aux Millbrook, aux manettes depuis Failures For Gods (1999). Les arpèges qui ouvrent « Abandoned » honorent volontairement la tradition des progressions harmoniques blafardes, une montée en tension qui aboutit à la violence des blasts d’« An Act Of God ». Immolation ne déstabilisera personne en respectant les canons ancestraux d’un genre dont il est l’un des plus vieux représentants. Une carte d’identité qui se démarque par cet affect pour les accordages gras, les arrangements solennels et les rythmiques brisées. « The Age Of No Light » dévoile une autre force d’Immolation : sa capacité à écrire des mélodies qui s’appréhendent aisément, à l’image d’un Rotting Christ et de son goût pour les musiques « rituelles ». Une caractéristique qui se retrouve à divers endroits de l’opus, notamment « Noose Of Thorns » qui joue essentiellement sur le contraste entre accélérations endiablées et riffing lancinant. Acts Of God semble avoir davantage de conviction lorsqu’il embrasse la lourdeur, à même de retranscrire toute la gravité du propos du groupe.

Immolation a toujours de quoi satisfaire les vétérans dans sa besace. « Blooded » est une sorte de démonstration de puissance qui n’hésite pas à lever le pied pour livrer des parties de guitares dont l’arrangement donne l’impression qu’elles sont soutenues par des chœurs. Sa conclusion effrénée prend l’allure d’un chaos organisé qui fleure bon la sueur de jeune adulte cloîtré dans son garage et dévoué à sa guitare, le son massif en plus. C’est réellement lorsqu’Immolation gagne en pesanteur qu’il captive : la grandiloquence d’« Immoral Stain » communique cette envie de lever les bras au ciel et d’implorer l’Antéchrist, là où les excès de vitesse ne provoquent pas nécessairement l’entrain escompté. Un sentiment qui s’affirme à la découverte des leads de Robert Vigna, qui excellent lorsqu’il s’agit d’illustrer une lente destruction plutôt qu’un marasme frénétique. Les tempos plus lents sont d’ailleurs ce qui permet à Immolation de dépoussiérer légèrement sa formule, à l’instar d’« Incineration Procession » qui s’inaugure par quelques notes de guitare avant de broder progressivement autour. Surtout, Acts Of God souffre de sa longueur : quinze pistes pour treize chansons si l’on omet les deux transitions. Le propos s’en trouve dilué et la réutilisation systématique du même lexique – peu importe les variations de tempo et d’intensité – en vient à épuiser et empêcher l’indélébile. Même la déflagration finale « Apostle » peine à nous revigorer, las de la violence familière des diatribes précédentes.

Acts Of God étale le savoir-faire d’Immolation dès ses premières secondes, un héritage qu’il est impossible de ne pas respecter. Acts Of God n’a que peu de faiblesses et, au-delà des élans de brutalité en forme de châtiment divin, son atmosphère se révèle son plus grand atout, lorsqu’il laisse la désolation et l’accablement s’exprimer. Il ne dégage pas pour autant une force inarrêtable. Son écueil est – comme souvent – un excès de générosité et de pâtir du dispensable. Il suscite presque une forme de frustration, celle née d’une crainte de l’oublier trop rapidement malgré des mérites et une capacité d’immersion indéniables.

Clip vidéo de la chanson « The Age Of No Light » :

Clip vidéo de la chanson « Apostle » :

Album Acts Of God, sorti le 18 février 2022 via Nuclear Blast. Disponible à l’achat ici



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