Un nouveau voile noir vient d’être déposé dans la galerie des légendes car Johnny Winter n’est plus. C’est le site American Blues Scene qui s’est fait le premier le porteur de la triste nouvelle, citant pour cela des sources proches qui peuvent bien être la musicienne Jenda Derringer, femme de Rick Derringer, ancien membre du groupe du bluesman – mais aussi de son frère Edgar Winter – dans les années 70. Une information confirmée plus tard par l’entourage direct de l’artiste via un message sur Facebook : « L’icône texane du blues Johnny Winter s’en est allé le 16 juillet 2014 dans sa chambre d’hôtel à Zurich, en Suisse. Sa femme, sa famille et les membres de son groupe sont tous attristés par la perte de cet être aimé et l’un des meilleurs guitaristes au monde. Un communiqué officiel plus détaillé sera diffusé en temps approprié. » Johnny Winter était alors en tournée européenne des festivals, il avait deux jours plus tôt participé au Cahors Blues Festival et devait dès la semaine prochaine repartir arpenter les scènes américaines ; l’exemple même d’un artiste à l’amour inépuisable pour la musique qui aura vécu pour celle-ci jusqu’au bout.
Certes, ceux qui l’avaient vu ces dernières années en concert avaient pu voir ce vieil homme maigre, presque éteint, qui avait besoin d’aide pour monter et descendre de scène, ne passant pas plus de quelques minutes debout, mais dès qu’il maniait sa guitare, le « mojo » fonctionnait toujours et il impressionnait toujours par sa technique, jouant à l’onglet (médiator accroché au pouce, à la manière des joueurs de banjo), mais aussi par cette voix, l’une des plus noires qui ait pu sortir d’un corps aussi blanc. Car Johnny Winter était un homme en noir et blanc, portant dans son corps diaphane d’albinos l’âme de la musique afro-américaine, mais qui, aussi, derrière une musique retranscrivant la chaleur de son Texas natal, fut un homme qui aura terriblement souffert de ses addictions, gardant à vie dans ses chairs la trace de leur passage destructeur, tout en préservant son talent.
Légende parmi les légendes, il l’aura toujours été. Il était, notamment, l’un des quelques artistes encore en activité (et vivant à la différence de Jimi Hendrix, Janis Joplin, la moitié de The Who, Alvin Lee de Ten Years Ater, etc.) qui avaient foulé en août 1969 les planches du festival de Woodstock, et ce petit morceau d’histoire, il semblait toujours l’emmener avec lui, comme une aura. Mais il savait aussi réunir ces légendes. Si dans les années 70 il est parvenu à toucher au plus près l’âme du blues en produisant et jouant pour Muddy Waters, ces dernières années, il s’est aussi efforcé d’en assembler certains morceaux, déjà avec son album Roots en 2011, hommage aux racines du genre avec des reprises de standards de Jimmy Reed, Robert Johnson, T-Bone Walker, Chuck Berry, etc. Une entreprise poursuivie sur son dernier album, Step Back, qui connaîtra une sortie posthume le 2 septembre, qu’il a enregistré avec d’autres porteurs, comme lui, de cet amour du blues : Eric Clapton, Billy Gibbons (ZZ Top), Leslie West (Moutain, un autre de ces vétérans de Woodstock), Joe Perry (Aerosmith), Ben Harper, Joe Bonamassa, Brian Setzer ou encore Dr John pour d’autres reprises de cette musique à qui tous les fans de rock, hard rock, metal et tant d’autres genres doivent tant.
Par-delà ses propres réalisations, Johnny Winter était aussi une inspiration pour de nombreux musiciens, oui, mais aussi, plus simplement pour les simples amoureux de musique, à l’instar de Greg Olliver, à qui l’on doit le fameux documentaire « Lemmy » sur le leader de Motörhead, et qui avait fait de Winter son nouveau sujet pour un nouveau film, déjà présenté dans les festivals depuis mars dernier : « Johnny Winter: Down And Dirty », dont vous pouvez voir la bande annonce ci-dessous, où, à l’écart de la scène, l’on y voit un homme heureux, rieur, qui a toujours cru en ce qu’il faisait, depuis ses débuts en tant que musicien professionnel à l’âge de quinze ans et qui aurait encore pu continuer ainsi pendant des années.
Malgré sa santé fragile, sa faiblesse physique évidente, jusqu’au bout il y aura eu un fleuve inarrêtable en Johnny Winter, comme un Mississippi (État dont sa famille est originaire, comme une bonne partie de ses influences) qui avait besoin de s’écouler à travers ses doigts et sa gorge pour faire vivre le blues sur scène et sur disque à travers les générations et c’est donc cette masse musicale, riche d’une vingtaine d’albums (plus les lives, ses album avec Muddy Waters, etc.), qui vient de disparaître. Dans une interview avec Journalstar.com le mois dernier, il déclarait : « J’espère seulement qu’on se souviendra de moi comme d’un bon musicien de blues. » Mais l’Histoire a déjà décidé depuis longtemps qu’il sera bien plus que cela.
Johnny was so good…
le mec « blanc » qui m’a fait aimé le blues
une légende du blues s,en est allé.repose en johnny
R.I.P.
Malgré le peu que je connaisse de sa discographie j’apprécies se qu’il faisait.
C’est clair que c’est vraiment bien écrit. Chapeau bas, Animal.
Repose en paix, Johnny.
Un article touchant et émouvant retranscrivant parfaitement l’image de ce musicien mythique.