Jours Pâles se définit entre cassure et continuité. Cassure parce qu’il est né des cendres d’Asphodèle, le projet de Spellbound constitué avec Audrey Sylvain, qui n’aura cependant accouché que d’un seul album et qui a presque été « tué dans l’œuf » ; le musicien nous confie en effet dans cet entretien que le duo s’était déjà séparé avant même la sortie de l’album. Mais, surtout, continuité, puisque Jours Pâles est la suite logique de ce qu’il avait entrepris avec la création d’Asphodèle et que le musicien – aussi connu pour être le chanteur de groupe de black metal Aorlhac – avait encore beaucoup à exprimer et à extérioriser au sein de cette nouvelle entité qui porte le nom de l’unique opus de sa précédente collaboration.
Le premier album Eclosion incarne ainsi parfaitement son nom. Spellbound a ici autant cherché un refuge où consigner ses tourments et ses maux qu’une liberté de composition et d’expression totale qu’il ne pouvait retrouver au sein d’Aorlhac, projet collectif et thématiquement articulé autour de l’Occitanie médiévale. Pour autant, Jours Pâles n’embrasse pas uniquement une stylistique extrême, tout comme il ne se résume pas à être exclusivement sombre et mélancolique. C’est une œuvre complexe, quoique musicalement fluide et protéiforme, qui reflète le regard dépouillé de tout manichéisme que Spellbound porte sur sa création comme sur son propre vécu.
« Le nom Jours Pâles, repris du titre du premier album d’Asphodèle, était totalement pour signifier que même s’il y a une cassure, puisque cet aspect duo n’est plus, il y a aussi une vraie continuité : je suis toujours aux manettes au niveau des compositions et la trame de fond reste la même. »
Radio Metal : Jours Pâles est un projet solo dans la continuité assumée d’Asphodèle, qui était une collaboration avec Audrey Sylvain. Est-ce que le nom même de ce projet, Jours Pâles, qui est aussi le nom de l’unique album d’Asphodèle, veut signifier que les racines thématiques et musicales sont les mêmes ?
Spellbound (chant & claviers) : C’est tout à fait ça. Pour reconstituer un contexte temporel, lorsque je suis revenu dans le Cantal, en 2017-2018, il y avait un énorme creux dans ma vie. C’est là que ça a commencé à super bien marcher avec Aorlhac, avec la sortie de L’Esprit Des Vents. Nous avons commencé à faire beaucoup de concerts et, en parallèle, il y a eu la rencontre avec Audrey Sylvain. Asphodèle s’est entièrement créé autour de cette rencontre. Le projet était totalement porté par ce duo. Et pour ne rien cacher, même si je ne l’aborde pas souvent ainsi en interview, avant même la sortie de l’album d’Asphodèle, le projet était mort. Ayant passé quasiment un an sur Asphodèle et sur la création de ce projet en duo avec Audrey, ça a été un peu compliqué à gérer lorsqu’il s’est terminé. Quand je monte un projet, ce n’est pas pour faire un one shot. Pour moi, il y avait une idée de continuité derrière et une envie de faire plusieurs albums. Quand ça s’est arrêté, pour X raisons qui ne sont pas forcément intéressantes, je me suis dit : « Ce n’est pas possible, il faut absolument qu’il y ait un lien et que je trouve quelque chose. » Le nom Jours Pâles, repris du titre du premier album d’Asphodèle, était totalement pour signifier que même s’il y a une cassure, puisque cet aspect duo n’est plus, il y a aussi une vraie continuité : je suis toujours aux manettes au niveau des compositions et la trame de fond reste la même. C’est évidemment un peu moins le cas musicalement puisque ce n’est plus axé autour de ce duo et de ces voix féminines et masculines qui se partageaient quasiment tous les titres sur le premier album d’Asphodèle, mais il y avait clairement cette intention et cette idée de continuité.
Tu nous dis que lorsque l’album d’Asphodèle est sorti, le projet était déjà terminé. Était-ce un choix de ne pas le présenter comme tel, c’est-à-dire pas en tant qu’album unique ?
Je pense que les gens ont vite compris que ce serait un album unique, même si l’idée derrière Asphodèle n’était pas que ça soit un album unique. Ça l’a été par la force des choses et, personnellement, j’ai eu envie d’opérer cette continuité avec Jours Pâles et je me suis dit que la trame de fond était la même. C’est même moins contraignant maintenant, puisque la seule personne avec qui je peux me prendre la tête et à qui je dois rendre des comptes, c’est moi [rires]. Même s’il n’y a plus ce duo – j’insiste sur le fait qu’Asphodèle, c’était Audrey et moi –, il n’y aurait jamais eu Asphodèle sans cette rencontre et il n’y aurait donc jamais eu Jours Pâles.
Quel regard portes-tu aujourd’hui sur cet opus : le perçois-tu avec beaucoup de satisfaction ou, au contraire, avec des regrets ? Comment est-ce que tu le situes ?
Il n’y a pas de regrets, il n’y a pas d’amertume. Il y a une certaine nostalgie. Asphodèle s’est fané, si je puis dire. Partant de ce constat… Mon, je ne regrette rien, car sans Asphodèle il y a beaucoup de choses qui ne se seraient pas passées dans ma vie. Grâce à Asphodèle j’ai rencontré ma compagne. Grâce à Asphodèle je me suis mis à composer en dehors d’Aorlhac et ça faisait longtemps que je cherchais à matérialiser tout ce que je ne peux pas dire au sein d’Aorlhac. Aorlhac est très centré sur des thématiques recherchées et bornées, si je puis dire, et ça faisait un moment que je cherchais à développer d’autres thèmes et d’autres choses plus personnelles. C’est très bien qu’Asphodèle se soit créé. Ça s’est terminé comme ça s’est terminé, et il n’y a pas d’amertume. Évidemment, comme je le disais au début, lorsque je crée un projet ce n’est pas pour un seul album ou pour que ça se termine, donc il y avait la volonté de créer quelque chose qui allait durer dans le temps. Mais la continuité s’appelle Jours Pâles et, au final, je ne regrette rien. Pour moi, il n’y a rien qui arrive par hasard. Le projet s’est terminé, j’enclenche sur Jours Pâles, et c’est comme ça que ça doit être.
Le ton et les mélodies sont assez différents d’Asphodèle sur ce premier opus de Jours Pâles, avec un côté un peu plus lumineux, une accroche rock qui est davantage prononcée. C’était une évolution musicale qui était déjà prévue quand tu pensais à Asphodèle ?
Pas du tout, car Asphodèle s’est créé du néant. Il y avait le duo avec Audrey et après il a fallu chercher des musiciens. Pour ça j’ai été aidé par le label Les Acteurs De L’Ombre et une fois qu’Asphodèle s’est terminé, je suis reparti de zéro. Je n’avais aucune compo et il n’y a pas eu de chutes du premier Asphodèle utilisées pour l’album de Jours Pâles. J’ai simplement repris une guitare et j’ai figé des instantanés de vie ainsi que des choses plus profondes et plus ancrées dans ce nouveau projet. Pour le côté rock, un peu plus prononcé, comme tu le dis, je ne suis pas forcément d’accord, parce que pour moi – et ça ne s’est pas décidé, ce n’était pas quelque chose qui était prévu – l’ensemble de l’album est beaucoup plus chargé et beaucoup plus metal que ne pouvait l’être Asphodèle. Après, c’est vrai qu’il y a peut-être une intention rock sur certains riffs ou sur certains passages, mais dans l’ensemble c’est un album un peu plus extrême.
« Je fais la musique que j’aimerais entendre, comme tous les musiciens. Je n’aimerais pas faire un album deux cents pour cent extrême. Il y a différentes intentions, il faut qu’il y ait des couleurs différentes. […] Il faut que ça respire. »
Le côté rock c’est surtout sur les dynamiques de certains morceaux…
Dans ce sens-là oui, parce qu’Asphodèle, avec ce duo, la voix d’Audrey Sylvain, etc., on était beaucoup plus portés par des ambiances… oui rock, pas pop… J’ai du mal à définir le style sur Asphodèle autant que sur Jours Pâles. J’avoue que j’ai vraiment du mal à définir les styles. En tout cas, il n’y avait rien de prévu, à l’époque Asphodèle, vis-à-vis d’un prochain album.
Tu as déjà commencé à en parler, mais tu élabores tes compos à partir de la guitare ?
C’est clairement ça. Je suis un très mauvais guitariste, c’est pour ça que je délègue et qu’il me faut absolument des guitaristes. Cependant, toute l’intention de départ, toutes les structures partent de moi avec une guitare. Au départ, j’ai plutôt une formation de batteur qui me sert davantage dans la rythmique et pour cet aspect très rythmé et agressif des grattes, mais effectivement, à la base de quasiment chaque chanson, je me pose et j’essaie de trouver les meilleurs riffs possible que j’agrémente en fonction.
Justement on a l’impression que tu as vraiment l’intention d’avoir des riffs entêtants dans Jours Pâles. Certains riffs rappellent un album comme Projector de Dark Tranquillity qui joue fortement sur l’accroche. Est-ce intentionnel ce côté accrocheur ?
Pas du tout ! [Rires] Dans Jours Pâles il n’y a pas grand-chose de réfléchi ou d’élitiste, c’est très viscéral. Autant dans les thèmes abordés que dans ma manière de composer. J’ai des influences au niveau de mes écoutes, bien sûr, et j’ose espérer qu’elles sont un tout petit peu digérées quand même, depuis le temps, mais encore une fois je ne suis pas un bon guitariste. Je n’ai pas appris la guitare en singeant des groupes ou en apprenant des partitions. Je ne sais pas vraiment quelles sont mes influences. J’écoute du metal comme de la chanson française ou de l’électro. Et une guitare n’a que six cordes. Pas que, mais tu comprends ce que je veux dire. Forcément des riffs peuvent se retrouver, mais il n’y a pas grand-chose de réfléchi, c’est assez spontané et je ne peux pas mettre de références en avant. Tu cites Projector, or j’adore Dark Tranquillity, je suis un gros fan. Je suis un gros fan de Mikael Stanne. C’est d’ailleurs en partie à cause de – ou grâce à – Mikael Stanne que je me suis mis au chant extrême quand j’avais 16 piges. Mais il n’y a rien d’intentionnel. Si, je pourrais citer Lifelover ! Si au tout début j’ai pu prendre la gratte pour faire des power-chords et des mélodies, c’est sur des trucs de Lifelover. C’est toute cette scène rock dépressive scandinave, Lifelover, Apati… Ce genre de trucs.
Sans parler strictement de metal, qu’est-ce qui t’a intéressé dans les autres registres musicaux que tu as mentionnés ? Tu as parlé de chanson française notamment, on t’a parlé de rock… Qu’est-ce que tu écoutes et qui, selon toi, pourrait influencer ce que tu fais dans Jours Pâles ?
Je pense que c’est un peu un mélange, pas de toutes mes influences mais de tout ce que je peux écouter. Je fais la musique que j’aimerais entendre, comme tous les musiciens. Je n’aimerais pas faire un album deux cents pour cent extrême. Il y a différentes intentions, il faut qu’il y ait des couleurs différentes. Pour les voix, il y a des passages parlés, il y a des passages hurlés, il y a des passages chantés en clair. Je ne me verrais pas faire une musique extrême de A à Z. Il faut que ça respire. C’est comme ça que je le conçois. Et si Asphodèle était très dirigé par ce duo vocal, cette continuité entre les deux projets dont je parle correspond à cette envie perpétuelle de mêler les genres et de faire une musique qui peut avoir des sursauts, des soubresauts et différentes couleurs.
Ça explique les partis pris instrumentaux comme le jeu de basse au premier plan, qui peut rappeler Shining notamment – je dis ça évidemment aussi parce que Christian Larrsson est un ex-membre de Shining. C’est pour ça qu’il y a une « prise de risques » sur la façon de composer et de proposer ta musique ?
Oui, je peux concevoir que ce soit une prise de risques et je peux concevoir que les puristes… On connaît les metalleux. Je n’aime pas les catégories. Cette basse en avant dont tu parles était voulue depuis Asphodèle et c’est comme ça que je la conçois. Pour moi, hormis pour des styles vraiment techniques, la basse n’est pas assez en avant dans le metal. Alors certes, si tu l’enlèves du mix, le rendu sonore sera maigrelet, mais je voulais une basse qui puisse être en avant pour compléter des parties guitares qui sont justement parfois teintées rock, c’est-à-dire que je ne joue pas toujours sur la dualité des grattes. Il n’y a pas tout le temps deux grattes en même temps. La basse est un véritable apport à ce niveau-là. Elle remplit bien l’espace et je voulais qu’elle complète les mélodies et non pas qu’elle singe la guitare en faisant les mêmes rythmiques. Sur l’album, il y a des passages qui, je pense, ont été enregistrés par Christian Larrsson en quelques jours seulement. Il a une vision de la basse qui est énorme et c’est en plus un technicien hors pair. Il reprend du Meshuggah tranquillement. Pour lui, Jours Pâles est forcément plus dans l’intention et dans le feeling que dans la pure technique. Mais c’était important pour moi d’avoir cette basse hyper en avant, et ce n’est pas quelque chose qui changera, je pense. Ça complète très bien les lignes de guitares et je ne veux pas d’une basse qui ne serait là que pour servir exclusivement le propos sonore sans qu’elle puisse se détacher dans des parties propres.
« C’est un peu cliché de dire ça, mais je ne compose que par rapport à ce que je vis. Du coup c’est très viscéral. Avec cet album j’ai juste expectoré et déversé toutes les haines et frustrations, toute la tristesse que je garde généralement en moi et c’est pour ça que la musique qui intervient à ce moment-là et est si importante. »
Par rapport au chant, il y a plusieurs phases distinctives, des passages prononcés au sein même de certaines chansons. Ça donne parfois l’impression que tu appuies un récit. Est-ce que c’est le cas ? Est-ce que c’est aussi une invitation pour l’auditeur à lire les textes en même temps qu’il écoute l’album ?
Au niveau de la diction, je n’ai pas fait en sorte qu’on puisse me comprendre. Je pense qu’il faudra quand même le livret à côté pour la plupart des gens, car je ne pense pas que le chant soit si intelligible que ça. Il y a une sorte de fil conducteur et de trame au niveau des thèmes de Jours Pâles : c’est simplement la bande-son de ma vie. C’est un peu cliché de dire ça, mais je ne compose que par rapport à ce que je vis. Du coup c’est très viscéral. Avec cet album j’ai juste expectoré et déversé toutes les haines et frustrations, toute la tristesse que je garde généralement en moi et c’est pour ça que la musique qui intervient à ce moment-là et est si importante. Au niveau des différents styles de voix il n’y a pas de récit mais il y a une intention plutôt de compléter. Comme je l’évoquais tout à l’heure, je ne veux pas que ce soit extrême tout le temps, Il faut des passages plus calmes, etc. C’est pareil pour la voix : des passages se sont prêtés au chant clair et la plupart du temps à au moins deux voix extrêmes en même temps. J’ai plusieurs styles vocaux extrêmes, donc je me dis parfois qu’un seul chant ne suffirait pas. Pour appuyer l’aspect un peu agressif, il y a toujours un mélange de voix et c’est rare sur l’album qu’il n’y ait qu’une voix, même extrême.
Tu disais que ton chant n’était pas très intelligible, mais on a quand même l’impression que par rapport à ce que tu peux proposer sur Aorlhac notamment, là il y a une intention de le rendre plus intelligible. Est-ce que tu as fait un travail par rapport à ça ?
Il n’y a pas eu de travail. Le parallèle au niveau des voix avec le dernier Aorlhac est intéressant parce que là aussi, on m’avait pas mal dit qu’on ne comprenait pas trop mal les paroles dans ce flot d’agressions vocales. J’ai enregistré avec Aorlhac avec un micro statique de super qualité, donc ce n’est pas le même rendu, mais je n’ai pas forcément fait attention quand je l’ai enregistré à cette fameuse diction, ou cherché à être « mieux compris ». C’est pareil pour Jours Pâles, sauf que – même si l’album est très pro dans sa manière d’avoir été géré au niveau du son avec Fred Gervais du studio Henosis qui a fait un super boulot – j’ai enregistré la voix un peu à l’arrache avec un micro qui était une espèce d’ersatz de SM58 et une carte son. Il n’y a pas eu de mon côté une volonté de faire en sorte qu’on puisse me comprendre juste en écoutant les lignes de chant. C’est quand même hyper compliqué de se faire comprendre en gueulant comme je gueule. Pour moi, il y a forcément un peu besoin du livret pour comprendre les paroles dans leur globalité et surtout dans le fond de ce qui est dit, mais si c’est pris et entendu comme ça, c’est parfait. Je crois qu’on me l’a déjà dit, il y a des chroniques qui pointent un peu le bout de leur nez et j’ai effectivement lu que le chant était plus ou moins intelligible. Parfait si c’est le cas. En fin de compte, je remarque que c’est peut-être moi qui arrive naturellement, au fur et à mesure et avec l’expérience, à mieux gérer cet aspect de ma voix.
Chaque chanson se présente comme une image, une scène, un tableau, qui tournent toujours autour de la dépression, même de ses dérivés comme l’addiction et l’ivresse. En quoi ces thématiques-là te parlent et pourquoi tu as choisi ce projet là pour élaborer autour de ça ? Tu parlais de quelque chose de très biographique tout à l’heure…
Lorsque je parlais tout à l’heure de bande-son de ma vie, c’est que j’ai moi-même eu des passages de consommation un peu trop extrême associés à des questionnements sur beaucoup de choses. Forcément cette musique m’aide, et heureusement qu’elle est là, c’est là que je vois à quel point elle gère ma vie dans ses aspects positifs comme négatifs. C’est prégnant et c’est là en permanence. Elle m’aide à gérer tout ça. Je ne veux pas tomber dans les clichés mais chaque chanson est le reflet plus ou moins théâtralisé de ma vie et de ce que je vis au quotidien. C’est très égoïste finalement comme projet – du moins très personnel. En même temps, ce sont des sujets qui peuvent toucher beaucoup de gens et bien que les textes soient plus ou moins évasifs, je pense que beaucoup de gens pourront s’y retrouver. Il y a ce contraste entre quelque chose de très égoïste, très personnel, et quelque chose, pas d’universel – je n’aime pas ce mot – mais qui peut arriver à beaucoup d’entre nous. Que ce soit la perte de proches, des problèmes de plaisirs factices, des problèmes de dysthymies en ce qui me concerne, d’une sorte de voile de fond permanent qui trouble les perceptions au quotidien… Surtout il y a cette opposition entre ça et cette grosse envie d’espoir de renouveau, et de garder au fond de soi quelque chose de positif, de continuer à le chercher.
Justement, thématiquement et musicalement, on sent que le désespoir absolu n’est jamais dit directement dans Jours Pâles. Il passe par des clairs-obscurs poétiques ou alors des figures de style qui peuvent être dans la musique. Est-ce que cet enrobage lyrique fait partie de l’exercice cathartique, et est-ce que c’est pour ne pas perdre de vue cet espoir comme tu dis ?
Exactement, parce que si je me laissais aller, le propos serait encore plus noir. Et en même temps la vie est faite de soubresauts, de rencontres, de couleurs ! Les jours sont pâles mais les jours peuvent parfois être aussi un peu plus colorés, heureusement. C’est un mélange de tout ça que j’évoque. Tout n’est pas que noirceur non plus dans ma vision et dans ce que je vis. Le fait que tout ne soit pas que noirceur et dépression absolue se ressent autant dans ces petits sursauts musicaux un peu plus lumineux que dans ces parties de textes où je dis que le sublime et l’absolu n’attendent que nous. Il y a ce côté « on tend vers »… C’est à l’image de la pochette : un repli sur soi, une volonté de s’éloigner de ses propres failles, car tout n’est pas de la faute du monde extérieur et de la vie en elle-même. Il y a cette volonté de s’extirper de soi-même, de facilités ou de plaisirs factices, parce que quand tu es au fond pour de bon, il y a un truc qui s’appelle l’instinct de survie et que tu as vite envie de taper du pied pour remonter à la surface.
« Les jours sont pâles mais les jours peuvent parfois être aussi un peu plus colorés, heureusement. C’est un mélange de tout ça que j’évoque. »
Tu as évoqué tout à l’heure des évènements heureux et des rencontres. Est-ce que c’est un dépôt qui se fait a posteriori dans Jours Pâles, d’une souffrance qui serait plus ou moins passée et non plus actuelle ? Tu enregistres à un moment, d’après ce qu’on comprend et ce que tu nous dis, où ça va mieux dans ta vie quelque part ?
Oui et non parce que le voile dysthymique dont je parlais tout à l’heure est quelque chose qui m’a toujours suivi et qui sera là toute ma vie. Le jour où ce n’est plus le cas, j’arrête de faire de la musique, mais j’ai encore quelques albums à faire devant moi [petits rires]. Effectivement il y a cet instantané qui est figé dont tu parles, parce qu’enregistrer un album c’est enregistrer une période de vie. En tout cas, ma musique est très liée à ce que je vis au quotidien. Mais c’est aussi dirigé par des trucs beaucoup plus profonds et ancrés, qui sont là depuis longtemps. Donc il y a ces deux côtés de la même pièce.
La dysthymie justement, tu en parles dans un morceau qui lui est consacré, « Ma Dysthymie, Sa Vastitude ». C’est sans doute le morceau qui emprunte le plus aux ambiances d’Asphodèle.
Oui, « Ma Dysthymie, Sa Vastitude » est un morceau qui démarre avec des arpèges et il y a ce sample. On pourrait autant parler de continuité que de cassure par rapport à Asphodèle. C’est du micro-détail mais sur ce morceau en particulier, il y a quelque chose que neuf personnes sur dix pourraient vraiment savoir mais… Ce sample, tu retrouves la même personne – qui d’ailleurs, je pense, est décédée aujourd’hui – qui parle sur le morceau « Jours Pâles » d’Asphodèle que sur « Ma Dysthymie, Sa Vastitude ». Donc il y a même un lien dans ces micro-détails. En fait, la cassure est très dirigée par rapport au fait qu’il n’y ait plus ce duo féminin/masculin, mais s’il y a des ressemblances et des accointances entre les deux projets, ce n’est pas gênant. Ce n’est pas pour dire « moi je » mais au niveau des compos je gère un peu tout. A moins que je ne change radicalement de style, ce qui m’étonnerait car je tiens à avoir une cohérence, il y aura forcément des liens musicaux et même thématiques, y compris sur les prochains albums.
Puisque tu parles de cette voix samplée qui fait « pont » entre les deux albums, qui est cet homme qui exprime sa souffrance, ses angoisses, son vécu ?
Il est issu d’un reportage de Nils Tavernier. Je ne le connaissais pas du tout avant, je suis tombé dessus par hasard. Le reportage doit durer trois quarts d’heure et place des junkies devant une caméra pour les mettre face à leurs propres addictions. Ce qui m’avait un peu marqué dans ce reportage est le fait que les types l’expriment de manière très crue : « Voilà, ça a niqué ma vie en fait, ça m’a bousillé et je vais finir bousillé à cause de ça. » Ce mec dit clairement que c’est un junkie, qu’il va en crever et qu’il ne fait plus rien de sa vie. C’est ce côté : « Ce n’est pas que je l’assume, c’est que je n’ai plus le choix car je sais que je suis dedans et même si j’aimerais m’en sortir, je ne sais pas comment faire. » Il n’y a pas de déni de l’addiction. Il y a beaucoup de gens qui vont te dire : « Non je n’ai pas de soucis avec l’alcool, non, non, ça va, tout va bien. » Là il y a ce côté : « J’en suis là. » Il y a une sorte de constat.
Un constat quand c’est déjà trop tard.
Dans ce cas-là, oui. A mon avis il était déjà trop tard.
Dans la musique il sert à définir un état limite pour ne pas détourner le regard.
Exactement, c’est comme pour la lassitude. Je me suis tatoué « lassitude » sur le bras pour mieux me rappeler au quotidien que c’est le pire ennemi et qu’il faut absolument la contrer. C’est pareil pour ça, comme tu le dis pour ne pas détourner le regard de ces soucis. Dans le cas de ce monsieur, le reportage date des années 90, je crois, il y a prescription, mais ça sert le propos dans des termes qui me sont propres et qui me sont personnels. En revanche, je ne l’ai pas mis juste pour dire que c’était sur Asphodèle, donc je le place aussi ici. C’est une continuité presque inconsciente que j’ai mise en place.
Puisqu’on parle de ce processus d’autodestruction, notamment par l’alcool, par l’ivresse, par tous ces faux plaisirs comme tu le décrivais tout à l’heure, on a l’impression que ton phrasé, il a l’air de reprendre une intonation mimant l’ivresse à certains moments, ce qui peut rappeler certains groupes de la scène black ou même certains chanteurs de la variété française – comme Jacques Brel notamment. Est-ce que ce sont des références pour toi dans la façon de chanter ou dans le texte ?
Si ce sont des influences, elles sont inconscientes car je n’ai jamais trop écouté Brel. Je pense que si tu as ce ressenti dans la voix, c’est parce que pour la plupart des enregistrements j’avais bu des coups [rires]. Sinon ce n’est pas quelque chose de réfléchi. Quand tu sors des trucs comme ça, c’est à double tranchant, parce que ça va autant te libérer que te ramener à des choses un peu complexes. Se livrer, « vomir tout ça », peut aussi bien être positif que psychologiquement un peu rude, mais c’est un besoin irrépressible. Le positif prend le pas sur le négatif dans cette démarche de vomir et d’extirper quelque chose de soi. Il y a vraiment quelque chose de viscéral et il faut absolument que j’exprime ce que je ne peux pas forcément exprimer au quotidien dans une société « normale » ou dans une vie quotidienne. Comme je le disais, je n’ai pas de plan. Enfin si, mon plan est de porter ce projet le plus loin possible et de l’inscrire dans le temps. Le prochain album sera peut-être fortement nostalgique, car je suis très nostalgique et très esthète, et beaucoup de choses se mélangent dans ma tête. Je sais qu’il y aura une continuité avec ces thèmes-là, ils sont récurrents chez moi, mais le propos peut aussi évoluer. Cependant, le jour où je me sens véritablement mieux, Jours Pâles s’arrêtera probablement.
« Le voile dysthymique dont je parlais tout à l’heure est quelque chose qui m’a toujours suivi et qui sera là toute ma vie. Le jour où ce n’est plus le cas, j’arrête de faire de la musique. »
Par rapport à toute cette démarche viscérale, très personnelle que tu décris, même si tu sembles davantage dresser des tableaux, un titre tel que « Le Chant Du Cygne » paraît adressé à quelqu’un en particulier. Est-ce le cas ?
Oui, c’est bien le cas. Il y a deux morceaux qui sont adressés à des personnes en particulier : le morceau « Illunés » qui est adressé à un ami que j’ai perdu et « Le Chant Du Cygne » qui est également adressé à une personne disparue. Ce sont deux textes qui sont beaucoup moins évasifs au niveau des thèmes et qui sont beaucoup plus ancrés dans un vécu. Ils sont adressés directement à des personnes qui ne peuvent plus les entendre.
Tu parlais de développer la nostalgie à l’avenir, mais elle est déjà présente dans Éclosion notamment dans la chanson titre. On a l’impression que tu la vois comme le fait d’être prisonnier de ses souvenirs, est-ce que c’est quelque chose que tu as voulu développer dans cette chanson et dans cet album généralement ?
C’est ce que j’ai voulu développer. Il y a cette nostalgie mais il y a aussi cette impression de vivre dans un endroit et dans un truc qui ne me correspondent pas. Il y a une envie d’aller vers le beau. Vers quelque chose de beaucoup plus simple et de beaucoup plus beau que ce qui est proposé à l’heure actuelle. Il y a cette envie de s’extirper de ces choses et c’est là que la nostalgie entre en jeu, avec des moments passés, des moments vécus. C’est un sentiment un peu complexe qui est autant positif que compliqué à gérer, mais il parsème l’album. Le morceau « Éclosion » en lui-même correspond davantage à cette envie de revenir à une vie plus simple, de fuir cette ambiance délétère, de partir des villes, de construire son propre havre de paix, à la manière du titre « Suivant l’Astre » qui très axé sur l’envie d’aller vers un refuge, une simplicité et de quitter ce marasme ambiant.
Est-ce que c’est aussi dans cette perspective qu’a été pensé l’artwork ? Car on retrouve un peu tout ce que tu dis aussi…
Tout à fait ! La pochette est libre d’interprétation, bien sûr, il n’y a rien d’imposé et il n’y a rien de figé. Je pense tout de même que les gens iront globalement vers la même idée. Il me semble que c’est cette pochette qui m’a fait appeler l’album Éclosion, parce qu’elle m’a vraiment marqué. Elle représente tout ce que je veux dire sur l’album, en une seule image. C’est une nature qui paraît austère mais en même temps presque rassurante, notamment au niveau des luminosités. La personne lovée dans l’arbre semble chercher une sorte d’hibernation, en attendant que les choses passent, chercher une sorte de regain d’énergie. Il y a plein de trucs dans cette pochette. Elle sert complètement le propos. J’espère ne pas me contredire dans les prochaines interviews ou celles passées, mais il me semble bien que c’est la pochette qui m’a fait appeler l’album ainsi. Ça m’a sauté aux yeux quand j’ai vu l’image, je me suis dit « éclosion », car ça m’a tout de suite fait penser à ça.
D’où elle vient cette image ?
Je tâtonnais un peu avec l’artwork car j’avais deux ou trois idées mais que j’étais très focalisé sur la composition et la musique. Tout faire en même temps n’est pas forcément bon. J’avais des premières idées et puis je suis tombé sur cette photo. Je crois que c’est Gérald [Milani] des Acteurs De L’Ombre qui m’a dit : « Tiens, regarde, il y a peut-être ça qui pourrait t’intéresser. » L’image est d’Onodrim Photographie pour ceux qui veulent aller voir ce qu’elle fait ; elle fait vraiment du super boulot. Je suis tombé dessus et j’ai demandé. Le label a acheté la photo, elle sert donc exclusivement à l’artwork de Jours Pâles et nous avons pris deux autres photos pour compléter le propos au sein du livret et sur la cover arrière. Ça s’est passé de manière très simple. Je n’ai pas eu beaucoup d’échanges avec la personne qui a pris cette photo, nous avons juste échangé sur le sens, pour voir s’il y avait un sens commun ou une idée commune derrière. Je voulais savoir ce qu’elle voulait dire et inversement. Sans nous concerter, nous sommes tombés d’accord sur à peu près les mêmes interprétations. Ça a fait sens, j’ai donc dit : « OK, en avant. Je veux cette photo. »
A propos des invités sur l’album, il y a notamment Graf de Psychonaut 4, qui était déjà présent sur Asphodèle, et c’est sans doute le groupe avec lequel Jours Pâles pourrait le plus se rapprocher par son côté hybride. Comment s’est fait le contact avec lui ?
Le contact avec Graf s’est fait à peu près comme avec tous les autres musiciens qui sont sur Asphodèle et sur Jours Pâles : j’ai enfoncé des portes. Je n’avais pas de musiciens, mais je rêvais de bosser avec des personnes dont je suis fan. C’est le cas pour Psychonaut 4, c’est aussi le cas pour Shining… Enfin, Shining, je ne suis pas « fan » car le propos me dérange, mais j’aime beaucoup le groupe musicalement. Concernant Graf en particulier, je suis un grand fan de Psychonaut 4, et je l’ai simplement contacté. C’est la magie d’internet ! Internet a des côtés aussi affreux que positifs, en l’occurrence, cela a été le côté positif. J’ai contacté le mec, je lui ai fait écouter, il m’a dit : « J’adore, je le fais » et c’est tout. Encore une fois, quand je parle de continuité pour Jours Pâles c’est parce que je me suis dit : « J’aimerais bien avoir à nouveau ce gars-là parce que sa voix est une voix de tueur. » Je voyais déjà ce morceau-là pour lui (« Des Jours À Rallonge », NDLR). Je l’ai recontacté, et rebelote, le mec a dit oui sans sourciller. Tout s’est fait à distance bien sûr. C’est pareil pour Christian Larsson : ça fait dix ans que j’écoute Morgondagen [Inställd I Brist På Intresse] d’Apati, c’est un album mythique pour moi, et réussir à bosser avec ce mec fait partie de ces petits accomplissements personnels. Pour James [Sloan], c’était un peu différent. Je l’ai rencontré rapidement au Hellfest en 2019 lorsque nous y avions joué avec Aorlhac. Il jouait juste après nous. Nous avons échangé deux secondes avant qu’ils rentrent sur scène, ils ont bien apprécié le set. Après Asphodèle, Stéphane Bayle et pas mal de gars qui étaient sur Asphodèle n’ont pas réitéré l’expérience pour diverses raisons, je n’avais donc pas de guitariste. Je repartais de zéro, j’avais posté un truc sur Facebook et j’ai vu que James avait liké ma publication. Je lui ai parlé en privé en disant : « J’ai vu que tu avais liké, ça te dirait pas que je t’envoie des ébauches parce que je cherche un gratteux », comme nous avions un peu échangé auparavant. Ça s’est fait comme ça. Ça s’est fait de manière très naturelle pour tous ceux qui sont sur l’album : je les ai juste contactés et ça a été un oui franc à chaque fois.
« Je me suis tatoué ‘lassitude’ sur le bras pour mieux me rappeler au quotidien que c’est le pire ennemi et qu’il faut absolument la contrer. »
C’est vrai que si on se réfère à Uada, ils ont l’air d’aimer l’expérimentation aussi et en particulier sur le dernier album sur lequel ils changent un peu de style, donc forcément c’est une expérience qui doit lui parler de jouer dans un projet assez différent de ce qu’il fait.
Clairement. Et avec James, ça a aussi, avant tout, très bien accroché au niveau humain. C’est cool d’avoir des mecs que tu aimes mais il faut qu’il y ait une entente commune, bien sûr sur le style de musique à faire, mais aussi humainement. Je me souviens de nombreuses discussions épiques avec James, alors que lui était en Colombie et moi au fin fond du Cantal. C’est fantastique ! [Rires]. Ces personnes savent qu’elles n’auront pas forcément d’effort de composition à mettre en place parce que la musique est déjà là. Ça leur convient et elles ont toutes des groupes plus ou moins gros et elles doivent donc se dire : « OK, faisons-le, ça me prend moins de temps que si j’avais à m’impliquer dans la composition. »
Tu as quand même voulu garder une voix féminine sur Jours Pâles, avec Lilas Ondine Dupont de Silhouette. C’était un impératif pour toi ?
Ce n’était pas réfléchi : je me suis dit que ça pourrait être cool. Ça vient clairement de mes influences Dark Tranquillity, période The Gallery, où il y a quelques parties, dont le morceau titre, avec une voix féminine. Je pense que j’aurais pu faire cet album sans aucune présence féminine, mais sur ce passage précis de ce morceau (« Eclamé », NDLR), qui était très calme et qui, musicalement, me paraissait un peu long, je me suis donc dit qu’il fallait absolument une voix ou un solo, quelque chose, et donc j’ai opté pour une voix féminine. J’ai rencontré Ondine rapidement. Nous ne nous connaissons pas trop, mais lorsque nous avions joué à Grenoble avec Aorlhac, lors de la tournée en 2019-2020, elle était venue acheter un patch, je crois. Elle m’a aussi été conseillée par pas mal d’autres personnes. Je l’ai contactée, elle a directement accepté et ça s’est fait naturellement. Je ne l’ai pas fait en me disant qu’il me fallait absolument une voix féminine, parce qu’il n’y a plus ce côté duo. Tout vient véritablement de ces références ancrées que je peux avoir. Je cite Dark Tranquillity, mais j’aurais pu en citer d’autres. Et là, ce passage s’y prêtait bien.
Crains-tu que les auditeurs soient déstabilisés par le passage à une seule voix ou bien penses-tu que ce soit intégré qu’il ne s’agisse plus d’un duo et qu’ils doivent passer outre ?
Je pense qu’il y a des gens qui ne vont plus aimer la suite, même si ce n’est pas directement une suite. Ils ne vont pas aimer Jours Pâles si, comme je sais que ça peut être le cas, ils ont aimé Asphodèle pour la voix d’Audrey ou pour ce côté rock/pop/goth, moins metal, et davantage axé sur des voix féminines. Asphodèle était Asphodèle, je n’essaye pas de faire une redite. C’était un projet en duo avec Audrey et quand je parle de cassure et de continuité, c’est parce que j’entends une continuité par rapport à ce que nous évoquions tout à l’heure, mais c’est une cassure parce qu’il n’y a plus cet aspect duo et qu’il n’y sera plus jamais. Ni avec Audrey ni avec quelqu’un d’autre. Je suis en pleine composition du prochain et pour ne rien vous cacher, j’ai douze titres de côté, et je suis très fier et satisfait de ce qui va se passer avec la suite. Il y a pas mal de parties où ça ne va pas être un condensé des deux, mais au niveau musical, il y a beaucoup plus de parties arpégées, beaucoup plus de parties un petit peu ambient, mais il y a quand même aussi beaucoup plus de parties plus extrêmes que sur le premier Jours Pâles. Au niveau des voix, je ne sais pas si les gens l’intègrent, mais ce qui est sûr, c’est que Jours Pâles – même s’il ne faut jamais dire jamais – ne repartira pas sur une dualité ou un duo voix féminine/masculine.
Vu toutes les contributions, comment ça s’est fait pour tout assembler, et je pense notamment au travail que tu as dû faire avec Frédéric Gervais de construction de l’album ? Car comme tu l’as dit, il y a des choses qui se sont passées à distance et c’était des pièces qui venaient d’un peu partout.
Oui, c’est clairement un projet international au niveau du line-up studio. Il y a le bassiste en Suède, le guitariste qui oscille entre l’Amérique du Sud et l’Oregon, Graf qui était en Géorgie, donc c’est assez éparpillé. Ce n’est pas forcément facile, mais ça s’est bien passé et chacun a enregistré ses parties chez lui. Au départ, il y a eu l’enregistrement de la batterie chez Ludovic Tournier vers Lyon, et puis ensuite chacun a posé ses instruments. C’est vrai que du coup au niveau concert ce n’est pas viable, donc il y aura forcément d’autres solutions à terme.
Justement, comment tu comptes t’y prendre pour le live ?
J’aurais adoré et j’espère, dans mes rêves les plus doux, pouvoir regrouper tout ce beau monde sur une même scène, ce serait génial, mais à mon avis, ce serait pour un concert unique car ce n’est pas viable géographiquement. Pour le studio, c’est super cool, et je m’éclate à bosser avec des types dont je suis fan, ou du moins avec qui je m’entends bien et dont j’aime la musique. Pour les concerts, j’ai Alex, qui est le bassiste d’Aorlhac, qui habite sur Clermont-Ferrand alors que je suis dans le Puy-de-Dôme en ce moment, donc nous sommes en train de monter ça. Il m’a trouvé deux guitaristes, lui serait à la basse, et nous démarchons actuellement un batteur. Nous avons donc un line-up constitué localement et qui serait viable pour les concerts. C’est en marche et c’est prévu, et c’est sûr que la période n’est pas top, mais nous attendons que notre heure vienne. Nous bossons les morceaux, nous bossons le set et dès que nous pourrons faire des concerts, nous serons là. C’est prévu.
Un petit mot sur Aorlhac, est-ce qu’il y a des choses prévues ?
Oui, nous sommes actuellement sur le quatrième album. NKS a fait un boulot de fou, donc nous avons les compos, mais je ne vais pas trop en dire pour l’instant car ce n’est pas trop annoncé, même si nous avions annoncé travailler sur de nouvelles compos. En tout cas, les titres sont là, j’ai bouclé les paroles de ce prochain album. Il sera enregistré incessamment sous peu et sortira dans quelques mois.
J’avais entendu dire que vous êtes presque habitués à ce que tout le monde parle du groupe comme [A-OR-LAC] et non pas [A-OR-LLATE], et que vous étiez presque adaptés à cette identité et que ça vous allait aussi…
Écoute, que tu veux que je te dise ! [Rires] J’ai malgré tout aussi du mal avec l’occitan médiéval. Même si les thématiques sont axées sur des éléments un peu recherchés et historiques, je peux comprendre. Durant les concerts, j’essaie à chaque fois de bien épeler le mot « A-Or-Yate », le C se prononçant comme un T. Mais c’est vrai que « A-Or-Lac » c’est huit fois sur dix. Ce n’est pas grave ! Il faudra que nous continuions à éduquer un peu les gens, pas de soucis !
Interview réalisée par téléphone le 18 février 2021 par Jean-Florian Garel & Eric Melkiahn.
Retranscription : Jean-Florian Garel & Eric Melkiahn.
Site officiel de Jours Pâles : www.facebook.com/jourspales
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« Au niveau de la diction, je n’ai pas fait en sorte qu’on puisse me comprendre »….. heureusement vu le niveau des textes.
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