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Live Report   

Korn Monumental : quand Korn bouscule le paradigme


Un concert est une expérience sensorielle et sensuelle. Au-delà de l’ouïe, c’est tout le corps qui vit l’événement : le toucher avec les vibrations des basses dans tout le corps, le contact avec le sol, avec autrui ; la vue, profiter de l’exceptionnalité de l’instant, de ces échanges fugaces ; le goût de la transpiration, l’odeur des fumigènes et des autres corps… c’est tout l’être qui résonne lors de ces moments. Il y a aussi quelque chose du rituel, de la communion païenne d’un ensemble qui s’unit pour partager le moment présent, se projeter dans l’autre pour y voir une représentation de soi, nos miroirs et nos doubles, et créer un souvenir qui sera réinventé et revisité par notre inconscient. Ce sont toutes ces sensations et ces expériences qui donnent corps à un concert.

Korn, comme bon nombre de groupes depuis le début de la pandémie, a décidé d’offrir à ses fans un concert virtuel exceptionnel : Korn Monumental. Le ton est donné, l’événement se veut avant-gardiste, novateur. Le concert sera diffusé depuis le plateau de Stranger Things : The Drive-Into Experience à Los Angeles, un drive-in immersif basé sur la série Netflix Stranger Things. Un mélange de morceaux rares et de classiques de Korn, ainsi que la présentation en direct de nombreux morceaux de l’album le plus récent de Korn, The Nothing, que le groupe n’a pas réellement pu faire vivre sur scène. Mais Monumental est un concert virtuel. Comment créer une expérience monumentale alors que je suis chez moi, avec un environnement qui m’est familier ? Comment vivre un moment hors du commun alors que l’expérience sensorielle sera limitée ?

Quinze minutes avant le concert, nous nous connectons pour prendre en cours un reportage sur les coulisses du concert. La setlist est dévoilée. Reginald « Fieldy » Arvizu porte une veste Adidas, iconique, old school. Jonathan Davis et Brian «Head» Welch évoquent « Ball Tongue ». Ils répètent là où les voix ont été enregistrées vingt ans plus tôt. Pour James « Munky » Shaffer, c’est aussi un challenge. Retrouver les habitudes, les effets utilisés sur les versions albums de titres qui n’ont que très peu été joués en live. Selon Jonathan Davis, avec ce concert, ils ont voulu faire les choses en grand, proposer une expérience de concert en streaming différente pour offrir aux fans et à eux-mêmes un moment hors du temps, hors de notre temps, et recréer l’énergie qui nous fait actuellement défaut. A les voir partager ce moment, s’amuser, le rythme cardiaque, l’anticipation monte et le compteur défile. Moins de cinq minutes avant le concert.

Ce reportage, cette explicitation de la démarche et ce partage avec les fans s’avèrent d’autant plus précieux qu’après, il n’y aura plus d’échange. Korn Monumental s’avère un concert étonnamment silencieux, comme si nous n’étions pas seuls à être dans notre bulle, le casque sur les oreilles. Pendant la quasi-totalité du concert, les membres du groupe sont ainsi chacun restés dans l’espace scénique qui leur était alloué, chacun dans son propre cheminement circulaire.

Le concert démarre par l’intro. Ces notes de Korn II ou Untitled (2007) s’accordent avec l’ambiance, la caméra qui s’envole telle une grande roue au-dessus de Los Angeles, la pleine lune alors que le groupe prend place sur scène. Autre choix qui crée à la fois une proximité en suscitant l’anticipation et la reconnaissance et une distance en rappelant la virtualité de l’événement : les titres s’affichent sur l’écran. Le premier choc est la qualité du son. C’est tellement propre, carré, lissé… c’est beau mais cela peut perturber la quête d’une expérience plus organique, plus âpre, tangible… pour autant, la voix de Jonathan Davis résonne avec une puissance émotionnelle qui ramène vers le moment partagé.

Le concert commence par « Victimized », que Ray Luzier souhaitait jouer en live. Un choix intéressant, qui nous renvoie à 2013, à The Paradigm Shift, ce moment charnière où « Brian Head» Welch réintègre le groupe après huit ans d’absence et où Korn « fige » ses membres. On attend la fin de la chanson, mais le groupe enchaîne sans temps mort avec « Cold ». La voix grunt de Jonathan Davis explose littéralement sur les couplets où il chante quasi seul, donnant à sa performance une profondeur et une intensité qui donnent des frissons. Même à travers l’écran.

Basse à la verticale de Reginald « Fieldy » Arvizu, cordes phosphorescentes, le kilt de Jonathan Davis qui va boire face à la batterie après chaque chanson, les pansements sur les mains de James « Munky » Shaffer… les connaisseurs de Korn sont en terrain connu et les titres s’enchaînent : « Insane », « Falling Away from Me », « You’ll Never Find Me », « Thoughtless », que des titres forts, puissants. Ce silence entre les titres est néanmoins étrange malgré le plaisir évident à écouter des morceaux aimés. Puis vient le moment d’apaisement avec « Throw Me Away » porté par la voix hantée de Jonathan Davis. On n’avait plus entendu ce titre en live depuis 2011. Apaisement bienvenu avant une autre surprise, « Justin » !

C’est à partir de ce moment que les membres du groupe commencent à interagir un peu entre eux : James « Munky » Shaffer va vers Ray Luzier, Reginald « Fieldy » Arvizu s’adosse contre Brian « Head » Welch. Il y a aussi quelques regards vers la caméra, et donc vers nous, amorce d’un lien, mais toujours ce silence et les titres qui s’enchaînent.

« Here To Stay », chanson culte, première chanson du groupe à intégrer le Hot 100, et oui, Korn est bien là pour rester, avec une identité qui lui est propre, forgée depuis vingt-neuf ans. Il y a bien une couleur Korn, un son, cette basse et cette voix d’où naissent l’unité voire l’unicité de Korn. Pour beaucoup, c’est le son de notre adolescence, de notre plongeon dans le metal et tout cela explose – une envie de sauter partout à faire voler notre casque et c’est là que tout s’arrête. La caméra prend son envol, s’arrache à la batterie de Ray Luzier et s’envole vers la nuit sur Los Angeles. Titre. Générique. C’est fini.

C’est l’ascenseur émotionnel, la douche froide. Une heure et onze minutes de show qui ont filé avec fugacité. Korn avait fait le pari de nous faire vivre un moment hors du temps et exceptionnel. Ce miracle est né dans le paradoxe de la fugacité d’un concert où le temps a pourtant semblé suspendu. On s’est sentis coupés en plein élan, de retour dans le réel avec le sentiment que l’on nous avait arrachés trop tôt à un moment qui est fondamental : la fin du concert. Cet instant où les lumières se rallument, où les voix se font à nouveau entendre sans crier, où chacun marche d’un même élan vers les portes désormais ouvertes. C’est un cheminement. Là, le générique nous a coupés de ce retour à la réalité progressif et nous nous sommes pris la porte en pleine tête.

Pourtant, Korn Monumental a réussi son pari. Le groupe nous a offert ce moment hors du temps, avec une setlist exceptionnelle, et où l’intensité de la voix de Jonathan Davis transcende le médium numérique pour faire passer une émotion brute. Un tête-à-tête entre eux et nous, une immersion aussi intense que fugace dans l’univers en perpétuel mouvement de Korn.

Setlist :

Victimized
Cold
Insane
Falling Away From Me
You’ll Never Find Me
Thoughtless
Coming Undone
Throw Me Away
Justin
Black Is the Soul
Freak On A Leash
Alone I Break
Dirty
Can You Hear Me
Ball Tongue
Narcissistic Cannibal
Here To Stay



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