Quand on pense à la France en tant qu’étranger, se sont souvent les images de la tour Eiffel, des croissants ou du bon vin qui défilent. Mais nous, Français, ne pouvons mettre de côté certains symboles emblématiques hexagonaux plus originaux comme le fameux jingle de la SNCF qui nous annonce la voie à prendre ou le retard des trains ! D’ailleurs saviez-vous qu’un beau jour d’été, le célèbre David Gilmour est lui-même tombé sous le charme de ce jingle ? Le guitariste emblématique des Pink Floyd se baladait en effet dans le sud de la France et s’est soudainement senti inspiré par ces quelques notes. Plus tard, il décidera même de composer un nouveau morceau basé sur ce thème.
Profitant de cette histoire cocasse et à l’occasion du concert exceptionnel de David Gilmour prévu le 17 septembre dernier au Théâtre Antique d’Orange, la SNCF a mis en place un concours intitulé ‘David Gilmour Experience’ pour valoriser la sortie de son nouvel album solo, Rattle That Lock, prévue le lendemain. Une quarantaine de privilégiés avaient ainsi la possibilité d’écouter en avant-première l’album dans le train qui emmenait ces chanceux au concert donné par le patron des solos progressifs et psychédéliques. Invitée par la SNCF, notre fine équipe a pu vivre pleinement cette ‘David Gilmour Experience’ pour vous raconter en détails ce périple.
Artiste : David Gilmour
Date : 17 septembre 2015.
Lieu : Théâtre Antique
Ville : Orange [84]
Le rendez-vous est fixé à la gare de Lyon à 8H afin de retrouver les gagnants du concours organisé par SNCF ainsi que les représentants de l’entreprise qui nous accompagneront pendant la journée à l’instar des autres médias invités. Après une brève présentation de la manière dont va se dérouler la journée, il est temps pour notre petit comité de prendre le train (en première classe) pour gagner Orange avec le nouvel album du musicien dans les oreilles. Dans notre wagon, les équipes de BFM TV sont de l’aventure à l’instar des représentants de la SNCF évoqués ci-dessus et du label Sony. Pour l’occasion le wagon est décoré à l’effigie de la ‘David Gilmour Expérience’ avec des affiches dédiées à son nouvel opus. En ce début de voyage, l’atmosphère est assez silencieuse et nous profitons tous du petit-déjeuner offert par la SNCF.
Nous commençons l’écoute de l’album vers 9H30 et chacun a le droit à son casque. Malgré quelques petites interférences dans le son (à cause de problèmes de réseau), le début de l’album est très convaincant avec l’intro « 5 A.M. » de plus de trois minutes très bien composée par Gilmour. Cette dernière est suivie de la chanson « Rattle That Lock » qui comporte les notes du jingle de la SNCF. Lors de cette première écoute, ce sont les morceaux « Dancing Right In Front Of Me » et l’épique « In Any Tongue » qui marquent avant tout nos esprits. Le très jazzy « The Girl In The Yellow Dress » apporte pour sa part une touche d’originalité à l’album. Le plutôt funky « Today » et l’instrumental « And Then… » viendront clôturer un album réussi où l’on peut retrouver les bases de Gilmour, avec notamment la marque de fabrique que sont ses longs solos mélancoliques et ses parties instrumentales très prenantes. On a là un album bien pondu et une production très bien assurée.
Peu habitué à laisser voir ses balances, le musicien a interdit les photos et les portables. Après une petite attente, le temps que les musiciens descendent de leurs voitures aux vitres teintées et signent des autographes, nous entrons dans l’arène pour le début de ce moment privilégié. Sur scène le groupe a l’air très décontracté devant ce théâtre magnifique et presque entièrement vide. Nous sommes en effet une soixantaine à être présents. Le phénomène le plus marquant des premières minutes de ces instants privés réside dans la qualité incroyable du son. Un son véritablement impressionnant dès les premières minutes. Il faut dire que l’espace est sans conteste propice au développement d’un son optimal avec cette pierre ancienne présente dans une arène ronde. Entendre ces notes de musique dans un cadre aussi somptueux est aussi magique qu’original et donne une sensation d’un immense privilège. Dans quelques heures, nous serons près de dix mille à être massés devant cette figure emblématique du rock qu’est David Gilmour.
Au bout d’une petite heure de balances, il est temps pour le musicien et ses acolytes de retourner en coulisses. Les images plein les yeux nous finissons par ingurgiter le repas préparé par la SNCF avant l’ouverture des portes prévue à 20H. La nuit commence à tomber dans la ville d’Orange et les lumières du théâtre resplendissent de plus belle. Plusieurs portes pour rentrer dans l’enceinte s’ouvrent devant nous et après trente minutes de file d’attente, nous parvenons à nous faufiler dans ce théâtre plein à craquer. Les agents de sécurité ne sachant plus où donner de la tête, et au prix de quelques bousculades, nous arrivons au huitième rang où se trouvent nos places, bien heureux d’être arrivés à temps et très impatients que le concert commence.
Les lumières s’éteignent à 20H45 et les musiciens arrivent sur scène. Un énorme hommage leur est rendu dès le début juste avant un grand silence au moment où Gilmour commence à tapoter les touches de sa guitare sur l’intro de son nouveau disque, « 5 A.M. ». Une grosse entrée en matière avant que ne retentissent les quatre notes de la SNCF qui annoncent « Rattle That Lock ». Un morceau vraiment très réussi et très agréable à écouter qui donne le sourire à tout le public. La sonorisation est impressionnante et le théâtre est chaud bouillant. Après le nouveau morceau « Faces Of Stone » , présent en troisième place du nouvel opus solo de David Gilmour, le guitariste Phil Manzanera (Roxy Music) démarre l’intro du mythique « Wish You Were Here ». Premier morceau des Pink Floyd exécuté ce soir qui prouve que le chanteur n’a rien perdu de son grain incroyable toujours aussi juste et pur. Le concert part comme vous vous en doutez sur de très bonnes bases et Gilmour nous présente « A Boat Lies Waiting », nouveau titre dont les chœurs et la mélodie de piano sont superbes. Un morceau composé aussi bien d’effets de guitare que de bruits quelconques, une des griffes du génie Gilmour.
Le théâtre est plongé dans un noir complet et des bruits de pièces et d’une caisse résonnent dans l’arène. Une intro de basse et voilà « Money ». Forcément un des plus grands moments du concert avec l’un des hits les plus mythiques du vaste répertoire de Pink Floyd. Le morceau est extrêmement bien interprété, tout en décontraction. Les superbes parties de saxophone et de guitare qui composent cette chanson sont magistralement retranscrites et font réagir tout le public dont beaucoup de connaisseurs chantent le morceau. Un grand moment suivi par le morceau qui apparaît juste après « Money » sur The Dark Side Of The Moon (1973), le magique « Us And Them ». L’émotion est au rendez-vous pour ce moment littéralement incroyable où toute la scène est recouverte d’une lumière bleue. Le silence s’est fait dans le public, sans doute submergé par la mélancolie de la musique et de l’instant. Car on ne va pas se le cacher, plus d’un fan présent a dû lâcher sa petite larme à un moment du set. Et comme si cela ne suffisait pas, la nouvelle chanson « In Any Tongue » vient parfaire cette séquence émotion avec son refrain bien appuyé par les choeurs des deux choristes et un solo final à couper le souffle. La cloche retentit et c’est « High Hopes », le dernier morceau de The Division Bell, qui achève ce premier acte. Là encore, on peut parler de moment émotion tellement ces huit minutes qui composent ce morceau nous emmènent loin. Que ce soit la guitare sèche de Gilmour ou la partie de piano, tout est réuni pour un moment exceptionnel.
Comme au théâtre ou dans les comédies musicales, nous avons le droit à un entracte. Moment nécessaire pour se remettre de toutes ces émotions transmises par ces neuf musiciens talentueux. Ces derniers ouvrent la deuxième partie du set avec « Astronomy Domine » tiré du premier album des Pink Floyd The Piper At The Gates Of Dawn (1967). Une douche de lumière bleue, rouge et orange arrose la scène. Très bonne interprétation d’un des morceaux les plus psychédéliques de Pink Floyd. Le public devient en transe au moment où le synthé fait retentir le début du classique « Shine On Your Crazy Diamond (part I-V) ». La lumière tamisée éclaire la scène et les premières notes de guitares de Gilmour résonnent, avec un projecteur fixé sur lui. Le public extrêmement réceptif donne de la voix et au moment où le refrain arrive toute l’audience reprend en chœur le « Shine On Your Crazy Diamond ». Le tout pendant dix minutes hors du temps.
Ce soir on aura en tout cas assisté à un très bon mix des morceaux de Gilmour en solo et de Pink Floyd. « Fat Old Sun » et « Coming Back To Life », extraits respectivement d’Atom Heart Mother (1970) et de The Division Bell (1994), continuent la « partie » Pink Floyd de la setlist. Le musicien choisit en fait de mettre en avant tous les albums des Pink Floyd. « On An Island » extrait de l’album éponyme de Gilmour, fait une petite pause dans la partie Pink Floyd. Il est suivi du nouveau morceau jazzy « The Girl In The Yellow Dress » où la contrebasse apporte une touche originale au rendu. « Today », morceau du dernier album très funky, est le dernier de Gilmour ce soir.
Déjà plus de deux heures de jeu pour le musicien et sa troupe. Le long « Sorrow » extrait de A Momentary Lapse Of Reason de 1987 en impose avec ses très longs moments instrumentaux et ouvre les rappels. Il fallait bien ça avant de lancer « Run Like Hell » où tout le public avance dans le carré or. La fosse est ainsi submergée en entendant les premières notes du thème de « Another Brick In The Wall » (qui ne sera pas joué ce soir). La douche de lumières revient et tout le public donne de la voix et tape dans ses mains, debout, pour ce grand moment. On pourrait penser à une fin de concert enflammée avec Gilmour qui nous remercie et nous souhaite une bonne soirée. Cependant les musiciens sortent de la scène pour laisser place à un entracte.
Quelques minutes plus tard et dans le noir complet, on entend une sonnerie et deux notes de basses mutées. Ils ne pouvaient pas partir sans jouer « Time ». Le public reprend toute la chanson avant que l’hymne de Pink FLoyd, le magnifique « Comfortably Numb », soit joué avec un couplet assuré au chant par l’un des clavéristes. Des frissons nous prennent au moment où Gilmour chante le refrain. Très beau jeu de lumières pour ce dernier morceau avec des effets dans le cercle de fond de scène qui propose des couleurs violette et rose. Le deuxième refrain arrive avec au final un des solos les plus emblématiques de l’histoire du rock. Quelle pureté ! Quelle application ! Après presque trois heures de jeu, la prestation bluffante d’un des plus grands guitaristes de tous les temps arrive à son terme. A presque soixante-dix ans, David Gilmour n’a rien perdu de sa superbe et aura proposé une prestation aussi bien passionnée qu’énergique.
Il est l’heure pour toute l’équipe de rentrer à l’hôtel. Après avoir un peu discuté du concert, c’est tout de même le silence qui règne au moment de rentrer en bus puisqu’on a tous le sentiment d’avoir vécu une journée inoubliable, comme hors du temps. Après une nuit un peu courte et un bon petit-déjeuner, il est temps de partir vers notre train. Arrivés à la gare d’Avignon nous attendons le train sous le soleil… et avec ce fameux jingle de la SNCF qui résonne plusieurs fois dans nos oreilles ! Notre train arrive à l’heure prévue (12H30) à Paris et il est temps pour tout le monde de se dire au revoir après ces deux jours que l’on n’oubliera pas de sitôt.
Setlist :
5 A.M.
Rattle That Lock
Faces Of Stone
Wish You Were Here
A Boat Lies Waiting
The Blue
Money
Us And Them
In Any Tongue
High Hopes
—
Astronomy Domine
Shine On You Crazy Diamond (Parts I-V)
Fat Old Sun
Coming Back To Life
On An Island
The Girl In The Yellow Dress
Today
Sorrow
Run Like Hell
Rappels :
Time
Breathe
Comfortably Numb
Compte-rendu : Philippe Dory (avec Amaury Blanc).
Bizarre SNCF cette envie soudaine SNCF que j’ai de prendre le train SNCF. Y aurait-il SNCF un message subliminal SNCF dans cette chronique SNCF.
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