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Interview   

La double vie de Mark Tremonti


Tremonti - photo credit Carlos AmoedoLe guitariste-chanteur Mark Tremonti n’est pas près de se faire oublier dans l’actualité. En juin dernier il sortait son deuxième album solo Cauterize, neuf mois plus tard il est de retour en studio pour enregistrer le cinquième opus d’Alter Bridge, pendant que le frère jumeau de Cauterize, Dust est sur le point de voir le jour. Les deux albums ont en effet été enregistrés lors d’une seule et même session, profitant au maximum de sa collaboration avec le producteur Michael ‘Elvis’ Baskette. « Nous n’avions pas spécialement prévu de sortir deux albums, nous avions juste prévu d’enregistrer beaucoup de chansons, » nous expliquait-il l’an dernier, décidant au final de répartir ces vingt chansons de façon équilibrée sur deux albums de dix titres.

Nous avons à nouveau rencontré Mark Tremonti pour évoquer cette entreprise particulière (mais qui semble se démocratiser, cf. Sixx: A.M. ou Five Finger Death Punch) et les rapports entre les deux albums mais aussi faire un bilan plus général sur cette escapade solo et la mettre en perspective avec ses autres groupes, Alter Bridge et Creed. Notamment sur ce qu’a impliqué le fait de passer de guitariste à frontman.

Tremonti press shot 2012 October 11, 2012 © Ashley Maile

« C’est une industrie musicale qui change constamment, donc nous faisons appel à notre meilleur jugement. Nous sommes notre propre maison de disque, donc chaque décision est la nôtre. »

Radio Metal : Tu es sur le point de sortir Dust, qui provient des mêmes sessions que Cauterize sorti l’an dernier. N’est-ce pas un peu frustrant, en tant qu’artiste, d’avoir à attendre autant de temps avant de sortir ces chansons alors qu’elles étaient déjà prêtes il y a un an ?

Mark Tremonti (chant & guitare) : Ouais, c’est dur mais je suis content de l’avoir fait parce que je ne voulais pas que ces chansons soient oubliées et j’aime l’album ! C’est juste que j’avais l’impression que vingt chansons, c’était trop pour que les gens puissent les digérer en une fois. Je voulais m’assurer que toutes ces chansons aient l’attention qu’elles méritent, donc j’ai décidé de les séparer en deux albums de dix chansons très équilibrées dynamiquement. Je ne voulais pas sortir les dix meilleures chansons sur un album et les dix plus faibles sur un autre. Car je n’ai pas le sentiment que ne serait-ce qu’une de ces chansons devrait être considérée comme une face B. Je n’enregistre pas de chanson qui ne me passionne pas, donc j’ai voulu que toutes ces chansons aient une chance. Et s’il y avait deux ballades, l’une irait sur un album et l’autre sur le second. Pareil avec les chansons énergiques. La date de sortie approchant, je suis maintenant surexcité de le sortir. C’est comme avoir un tout nouvel album. Je suis à nouveau enthousiasmé par ces chansons, c’est presque comme si j’avais une double vie !

Etant donné l’état de l’industrie, n’y a-t-il eu personne pour te dissuader de sortir deux albums ?

Non parce que l’industrie change énormément. Il n’y pas vraiment eue d’influence extérieure sur nos décisions liées au business. Tout ça est de notre fait. C’est une industrie musicale qui change constamment, donc nous faisons appel à notre meilleur jugement. Nous sommes notre propre maison de disque, donc chaque décision est la nôtre. Avec cet album qui sort sur Fret21, nous avons eu une liberté totale de prendre toutes les décisions que nous voulions, tous les choix que nous souhaitions faire avec notre musique. Mais pour être clair, même depuis les débuts de Creed nous avons toujours été assez libres de faire ce que nous voulions avec notre musique ; nous avons eu le choix de tous nos singles et, depuis le premier jour, personne ne nous a jamais dit comment écrire la musique, donc nous avons eu de la chance !

La dernière fois, tu nous a dit que « le grand visage que tu vois [sur l’artwork de Cauterize], c’est un gros monstre qui sort de l’océan et attrape un morceau de soleil pour brûler les impuretés de la race humaine. » Et on retrouve ce monstre sur la pochette de Dust. Qu’est-ce qu’il symbolise cette fois-ci ?

Cette illustration représente les conséquences de la destruction causée par ce monstre après le premier album, donc Dust arrive après qu’il ait cautérisé la Terre. Et les chaînes symbolisent le fait que la Terre est désormais débarrassée de ses impuretés. Cauterize représentait la brûlure des impuretés du monde, le cautérisant pour le purifier et Dust, ce sont les cendres qui restent après ce processus. Même si les chansons ne sont pas liées entre elles, nous voulions quand même lier les titres et les artworks.

D’ailleurs, de quoi parles-tu cette fois-ci dans les chansons ?

Ça parle d’expériences de vie, principalement, des vies de personnes qui m’entourent, d’amis et de la famille, et puis ce que l’on voit aux infos. « My Last Mistake » parle d’une mauvaise influence dans ta vie, quelqu’un qui te traîne à terre et dont tu as du mal à te débarrasser ; ça pourrait être une métaphore pour une mauvaise habitude ou aussi une addiction. « Betray Me » parle évidemment de trahison et de la fragilité de la confiance et de la loyauté. « Once Dead », c’est plus une histoire de science-fiction à propos de quelqu’un qui a vécu et qui est mort de nombreuses fois et a vu plusieurs générations d’hommes. « Unable To See » parle de la façon dont la vie peut te faire des sales coups mais la musique a toujours été mon échappatoire. Et ainsi de suite ; chaque chanson est différente !

Tremonti - Dust

« Une bonne part des influences speed metal avec lesquelles j’ai grandi n’avait pas sa place dans Alter Bridge ou Creed. Là, c’est ma grande opportunité de le faire ressortir. C’est vraiment quelque chose qui m’avait manqué. »

Dirais-tu que ton groupe solo, et au bout du compte ces deux albums, représentent de façon plus fidèle qui tu es musicalement et en tant qu’artiste qu’Alter Bridge ou Creed ?

Lorsque tu fais un projet solo, c’est assurément plus ta vision pure mais j’apprécie faire tous les groupes et avoir recours aux différents modes d’expression. Ce qui fait que c’est vraiment différent, c’est d’abord que je me retrouve à chanter. J’ai la possibilité de chanter exactement la mélodie telle qu’elle devrait être selon moi. Ceci dit, j’ai toujours été un gros compositeur de mélodies dans tous mes groupes, donc ce n’est pas hyper différent. Les mélodies vocales sont pour moi la partie la plus importante de chaque chanson. Même lorsque je ne chante pas dans un groupe, une grande part de mon job, c’est d’écrire des mélodies de chant. Dans Alter Bridge, la plupart du temps, je présente une partie à Myles et il aura une mélodie en place et il chantera la mélodie que j’ai écrite. D’un autre côté, il écrit aussi des parties de guitare. Donc nous écrivons nos parties chacun de notre côté et nous les marions. Donc si j’ai écrit une mélodie, il chantera cette mélodie de la même façon que je la chanterais, si ce n’est qu’il peut atteindre des notes plus élevées ! [Petits rires] Donc il donnera une tonalité plus haute aux chansons que moi ; pour moi, il faudrait les descendre d’un ton.

Une autre chose, c’est qu’une bonne part des influences speed metal avec lesquelles j’ai grandi n’avait pas sa place dans Alter Bridge ou Creed. Là, c’est ma grande opportunité de le faire ressortir. C’est vraiment quelque chose qui m’avait manqué. Le côté speed metal de ma personnalité représentait probablement une très grosse partie de qui j’étais lorsque je me développais en tant que musicien. Lorsque tu es dans un groupe, tout le monde doit pouvoir s’y retrouver et ils n’étaient simplement pas fans des trucs speed metal.

C’était frustrant pour toi ?

Ce n’était pas frustrant. Je comprenais mais il y a plein de fois où j’ai des parties que j’adore vraiment et que j’essaie de temps en temps de balancer dans des chansons d’Alter Bridge qui ne sont jamais retenues. Donc c’est l’occasion parfaite pour moi de sortir ces chansons.

Qu’est-ce que ça a fait de passer de guitariste à être frontman ?

Je pensais que ça allait être bien plus dur que ça l’était ! Une fois que j’étais sur scène, je me sentais comme je me suis toujours senti, surtout dans la mesure où j’ai l’habitude d’avoir un micro sur scène pour chanter les chœurs, même si là, je suis bien plus concentré sur mon chant que sur ma guitare. Maintenant, la plus grande différence est que lorsque la chanson s’arrête, je dois endosser le rôle du gars qui parle entre les chansons. C’est le plus gros changement, devenir ce showman qui maintient l’attention du public. J’apprends en essayant et faisant des erreurs, en montant sur scène et me lançant, et en regardant faire d’autres mecs qui ont de l’expérience pour voir ce qui fonctionne. Ce n’est pas quelque chose pour laquelle tu peux t’entraîner à la maison, tu dois y aller et le faire avec l’expérience. J’ai donc appris sur le tas.

Est-ce que tu dois adapter tes parties de guitare lorsque tu dois chanter par-dessus ou vice versa ?

Non. En fait, lorsque j’écris et assemble ces chansons que je chante, je m’assure quelle que soit la partie, que je puisse la chanter et la jouer en même temps. Pour certains riffs que j’écris, si je ne peux pas chanter par-dessus tout en jouant, je les utilise comme des riffs seuls, sans chant. C’est la seule chose qui me retient par rapport au chant. Mais parfois… J’aurais toujours un autre guitariste qui pourrait se charger des choses plus compliquées lorsque je chante. Mais tout ce que je fais sur l’album, je le chante et le joue en live. Je n’écris et n’enregistre jamais quelque chose que je ne peux pas reproduire en live.

Tremonti - photo credit Carlos Amoedo

« J’ai énormément de respect pour les mecs qui chantent tous les soirs, parce que c’est un gouffre émotionnel. C’est vraiment physique de chanter sur scène et je ne m’en étais pas rendu compte avant de le faire moi-même chaque soir. »

J’imagine que jouer le rôle du frontman dans Tremonti t’as fait grandir en tant qu’artiste…

Ouais, je pense que n’importe quel défi auquel tu fais face t’aidera à grandir, que ce soit en devenant frontman ou en apprenant à jouer de la batterie ou en s’attaquant à l’enregistrement de la basse sur l’album. Plus tu apprends, meilleur tu deviens ! En faisant ça, j’ai gagné en confiance avec mes prestations live. Je pense simplement que le fait de chanter soir après soir t’aide vraiment à développer ta voix un maximum. En fait, j’ai toujours chanté des harmonies et autres dans Alter Bridge et j’ai toujours un peu abordé les choses de la même façon mais je me sens de plus en plus à l’aise avec ma voix. Donc dès que ça pourra être utile, il est clair que je n’hésiterais pas à utiliser ma voix. Je pense que toute expérience, que tu en aies conscience ou pas, t’aidera à te développer dans le futur. N’importe quel défi que tu t’imposeras te rendra plus fort et te donnera de nouvelles perspectives et expériences à balancer dans ce que tu feras à l’avenir.

Est-ce que tu vois Myles Kennedy un peu différemment maintenant que tu as pu voir ce que ça faisait d’être dans sa position ?

Ouais. Je veux dire que j’ai énormément de respect pour les mecs qui chantent tous les soirs, parce que c’est un gouffre émotionnel. C’est vraiment physique de chanter sur scène et je ne m’en étais pas rendu compte avant de le faire moi-même chaque soir. Et tu es obligé d’être responsable avec ta voix. Tu ne peux pas parler toute la journée, tu dois bien manger, tu dois t’hydrater, tu dois te laver les mains, tu dois t’assurer de ne pas tomber malade, tu dois dormir un max… Tu dois être quelqu’un de responsable, la plupart du temps, lorsque tu es chanteur ou sinon tu seras contraint d’annuler des concerts. Et jusqu’ici, je n’ai jamais eu à annuler de date, je suis assez chanceux à cet égard.

Avec Tremonti, tu ne joues que des chansons de Tremonti et avec Alter Bridge, tu ne joues que des chansons d’Alter Bridge : est-ce important de tracer une limite entre les deux ?

Ouais, je pense que c’est important de bien les séparer. Et de toute façon je ne pourrais pas atteindre ces notes aiguës que Myles est capable d’atteindre [petits rires]. Mais ouais, nous essayons de faire en sorte que ces groupes soient aussi uniques et séparés l’un de l’autre que possible.

Wolfgang n’a pas pu participer à la tournée avec Tremonti à cause d’engagements auprès de Van Halen. Est-ce que tu t’y attendais ?

Ouais, nous savions que si une tournée de Van Halen se mettrait en place, il serait occupé. Il a donc fallu que nous nous trouvions un bassiste de qualité pour prendre sa place, ce que nous avons fait. Nous avons trouvé Tanner Keegan qui est un super performeur et nous nous sommes amusés avec lui en tournée. Mais c’est dur de remplacer Wolfgang parce que c’est un musicien extrêmement compétent techniquement. Il a fait les trucs avec Van Halen, comme je l’ai dit, et maintenant il a son propre groupe, donc dès que nos emplois du temps concorderont, ce sera à lui de voir s’il veut tourner avec nous ou pas.

Tu es actuellement en studio avec Alter Bridge. Comment se passe les enregistrements ?

Ça se passe super bien ! Nous sommes environ à la moitié des guitares et ensuite nous passerons au chant. C’est un album très dynamique. Je pense que nous avons couvert toutes nos bases, donc il y en a assurément un peu pour tout le monde. C’est sûr qu’il y a des trucs bien heavy là-dedans ! Nous envisageons une sortie pour cet automne.

Interview réalisée par téléphone le 7 avril 2016 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Carlos Amoedo (1 & 4) & Ashley Maile (2).

Site internet officiel de Tremonti : www.marktremonti.com



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