L’exercice de l’interview sert bien sûr à comprendre l’œuvre de l’artiste, le faire réagir sur divers sujets liés à sa musique mais c’est aussi une superbe et unique occasion pour explorer les méandres de sa personnalité qui, directement ou indirectement, influence sa musique. Or, la personnalité passe forcément par d’autres sujets que la musique, dont les idées politiques.
Difficile de trouver sujet plus épineux que la politique. Épineux car pouvant facilement dévier et provoquer un débat houleux. D’ailleurs, notre objectif lorsque nous abordons ce genre de sujets n’est pas de provoquer le débat. Ce n’est tout simplement pas notre métier, les Anne-Sophie Lapix ou autre François Lenglet (pour ne citer que les stars montantes du journalisme politique télévisuel) sont là pour ça et sont autrement plus compétents que nous. Mais, simplement, le fait de dévoiler les idéaux politiques des musiciens nous intéresse car cela nous renseigne sur la manière dont ils perçoivent le monde et le monde est généralement, au bout du compte, ce qu’ils mettent en musique.
C’est ainsi que Mille Petrozza (Kreator) nous donnait son sentiment sur la promotion de la réussite de l’Allemagne face à la crise qu’il juge comme étant une propagande, que Jaz Coleman (Killing Joke) nous offrait sa critique de la société actuelle qui nécessite selon ses convictions d’être abolie pour laisser place à un monde plus foncièrement humaniste et écologique, que Jon Schaffer (Iced Earth) nous exposait son analyse économique de ce qu’il appelle un « faux capitalisme » et un système monétaire qu’il qualifie de frauduleux, empêchant un capitalisme et un libre échange sains ou que Craig Locicero (Forbidden) dénonçait l’inaction des peuples face à leur déchéance prochaine et dénonçait les dérives du Patriot Act signé par George W. Bush en octobre 2001.
Sauf qu’il peut arriver que tout ceci aille un peu loin. Exemple : l’interview récente de Varg Vikernes. On ne va pas vous cacher que nous savions pertinemment le potentiel de dérapage du personnage étant donné les convictions peu recommandables qu’il a déjà affichées par le passé. Mais nous espérions peut-être, au fond, qu’il fasse preuve d’un peu plus de subtilité qu’il n’en a en réalité fait. Quoi qu’il en soit, notre principe numéro un en tant que média, et cela indépendamment de notre domaine qui est la musique, est de présenter nos informations de manière authentique. Nous croyons fermement que c’est l’une des bases d’un journaliste de qualité que de présenter la vérité sans aménagement.
Mais pour la première fois en cinq ans d’activité – et d’apprentissage sur le terrain du métier, serais-je tenté de dire – nous nous sommes posés des questions face à la violence de propos jugés proprement intolérables par quiconque possède un minimum de valeurs humaines. Notre éthique, en premier lieu, nous a fait nous poser de sérieuses questions en opposition à notre conscience journalistique qui voudrait que nous publions tout. Notre mémoire, ensuite, s’est souvenue que certaines personnes on été condamnées par la justice pour tellement moins que les propos que nous nous apprêtions à publier. C’est ainsi que nous avons demandé à Gaël, notre avocat – que nous remercions au passage pour le temps qu’il a pris sur ce dossier – d’étudier le cas de cette interview et vérifier si des risques existaient pour nous si nous laissions les propos tels quels. Ce qui en est ressorti est que les risques d’une assignation en justice et d’une condamnation étaient trop forts pour nous permettre de jouer avec le feu. La législation a tranché le dilemme.
Les textes de lois sont plutôt clairs. Il n’y a déjà aucune contestation possible sur le caractère infractionnel des propos du musicien, entres autres incitant à la haine raciale, tels que définis dans l’article 24 de la loi de juillet 1881 relative à la presse. Certes, Vikernes est responsable des propos que le média qui est le notre rapporte et diffuse et qui n’engagent que lui, mais la jurisprudence fait la distinction entre les infractions commises en direct et celles commises après enregistrement. Le fait que ces propos aient été tenus hors hypothèse de direct suppose que le directeur de la publication du média a un contrôle sur ce qui doit être publié. Du fait de ce pouvoir dont il dispose, sa responsabilité peut être engagée et la simple publication des propos serait jugée comme une infraction.
Alors dilemme : doit-on publier l’interview ? Partiellement en évinçant les questions qui ont amené des réponses plus que litigieuses ? Très sincèrement, sans cette barrière législative, il est très probable que nous ayons fait le choix de publier toutes les réponses telles quelles – si ce n’est, peut-être, en se dispensant de quelques gratuités hors raisonnement. Car on estime que c’est notre devoir de journaliste de montrer la réalité des choses. Comme je le précisais dans l’introduction de la dite interview : « toute idéologie, quelle qu’elle soit, est bien mieux à la lumière où elle peut être combattue, si nécessaire, que terrée dans l’ombre où elle peut progresser hors d’atteinte. » Je le crois fermement. Bien entendu, nous comprenons l’objectif, légitime, de la loi qui est de protéger le lecteur d’un discours nauséabond et d’éviter toute forme d’adhésion chez certains ayant des prédispositions pour y adhérer (environnementales ou familiales, par affinité de personnalité ou par idolâtrie) ou une faible capacité de prise de recul ou de critique ou, tout simplement, par fainéantise intellectuelle.
Sachez d’ailleurs que le célèbre magasine anglais Terrorizer avait également réalisé des coupes – cependant nous ne savons pas dans quelles proportions – dans leur entretien avec ce même personnage paru dans le numéro de décembre 2011, chose qui a profondément déplu à Vikernes. Voici sa réaction :
« Personne ne leur a offert l’option d’imprimer uniquement des parties de cette interview, ils rompent donc leur contrat avec moi. […] Peut-être qu’ils et d’autres comme eux apprendront à ne pas rompre leurs contrats avec moi à partir d’aujourd’hui. S’ils impriment l’entretien quoi qu’il en soit, censuré ou non censuré, ou une quelconque image de moi, ils le font sans mon consentement. A cause du manque de respect qu’ils m’ont témoigné, je ne travaillerai plus avec Terrorizer Magazine dans le futur. Ils récoltent ce qu’il sèment. » (V.V.)
Mais n’en déplaise à Vikernes, c’était leur droit – et peut-être même leur devoir en tant que journalistes et selon les lois britanniques – de non seulement procéder à la publication mais qui plus est sous cette forme. On comprend bien qu’il aurait aimé voir ses propos reproduits en intégralité, mais que ce soit Terrorizer ou Radio Metal, nous n’allons pas risquer une condamnation pour ses beaux yeux. On comprend bien aussi qu’il souhaite contrôler les messages que les médias véhiculent à son propos. D’ailleurs, s’il souhaite répondre aux interviews uniquement par e-mail c’est sans doute dans cette optique, en plus d’éviter d’avoir à répondre à toute contradiction du journaliste pouvant le mettre en mauvaise posture. Quant au « contrat » qu’il évoque, un journaliste n’a aucun contrat si ce n’est avec la vérité et les contraintes que lui impose le droit de son pays. La liberté d’une presse indépendante se doit d’être défendue.
Compte tenu des risques qui ne méritaient pas d’être pris, nous nous sommes donc pliés à la loi en retirant soigneusement les passages faisant potentiellement l’objet d’une infraction, en prenant un soin tout particulier à préciser le caractère de ce qui a été retiré et à conserver la base des raisonnements politiques – lorsque c’était possible, autrement nous avons tout retiré – de notre interlocuteur.
Sauf qu’on s’est bien rendu compte, après coup, qu’un discours et un raisonnement inacceptable est devenu, par voie de conséquence, acceptable, comme en atteste un certain nombre de réactions d’adhésion dans les commentaires. Tout ceci est bien délicat, car autant nous comprenons la législation, autant nous nous rendons compte que le caractère acceptable des propos tels que présenté après censure (appelons un chat un chat) peut facilement – et peut-être plus facilement que sans censure, ce qui est difficile à évaluer – attirer vers l’inacceptable en arrondissant les angles et « facilitant le passage de la pilule ». De plus, tout ceci tend a ranger sous le tapis certaines maladies de notre société. Ce n’est probablement pas en fermant les yeux sur certains symptômes qu’on pourra correctement soigner cette dernière.
Ainsi, ayez-en vraiment conscience. Ayez conscience que Varg Vikernes est un personnage profondément antisémite. Quand vous voyez le mot « riches » dites vous qu’il pense automatiquement « Juif », peuple qu’il considère, avec des cheminements de pensée tordus, comme la plaie de l’Europe. Ayez conscience que Varg Vikernes est un personnage profondément raciste. Dites-vous que, sur certaines répliques, il parlait de certaines ethnies comme des « créatures », pour reprendre son terme, pour expliquer son dégoût de se mêler à eux et, plus encore, toujours selon ses termes, de se « reproduire » avec eux. Ayez conscience de ses apologies sans équivoque de crimes barbares qui ont terni l’Histoire de l’Homme. Ayez conscience de ses appels à la violence meurtrière et à la haine primaire de l’autre. Toute, ou presque, sa pensée politique et idéologique est fondée sur cette vision. Comment alors porter crédit à ses raisonnements et diagnostiques, à moins de porter également crédit à ses points de vue ? Posez-vous vraiment la question avant de clamer : « Je suis d’accord à 100% avec lui ». Après quoi, si vous persistez, que peut-on dire si ce n’est que depuis que l’homme est homme celui-ci tend à la diversité, qui a fait sa richesse et son savoir, et que ne pas l’accepter n’a jamais mené à autre chose qu’à la barbarie et la sauvagerie. L’Histoire en est témoin.
Que l’on soit bien clair, cette dernière remarque ne remet pas en cause la légitimité des réflexions politiques et sociétales – Ô combien délicates – sur les problématiques d’immigration et d’intégration et leurs conséquences éventuelles – positives comme négatives – sur un pays – quel qu’il soit d’ailleurs. Car, à l’inverse, associer automatiquement, aveuglément et sans fondement ces questions à du fascisme, comme certains médias ont eu le scrupule de le faire encore récemment, est clairement un abus qui n’aide notamment pas à combattre les vraies idées racistes et antisémites en les noyant dans un flot de malhonnêteté intellectuelle.
Le tout est de raisonner sainement en ayant connaissance et conscience des paramètres. Le tout est aussi d’abord de se poser des questions sur soi-même avant de machinalement pointer les « autres » du doigts, qui qu’ils soient : immigrés, riches, politiques, chinois ou notre voisin de palier. Car, souvent, il s’avère que nous sommes, nous-mêmes, par nos comportements, par nos choix, par nos actes, à l’origine de nos propres problèmes. Et les paramètres pour mener à bien nos réflexions, c’est bien entendu, en partie par le biais de la culture (littérature, musique, cinéma, etc.) mais aussi d’une presse consciencieuse, indépendante et libre que vous pouvez les obtenir.
J’ajouterai seulement, pour finir car nous nous sommes déjà bien assez éloigné de notre périmètre pour un média qui ne cherchait qu’à explorer la personnalité d’un musicien, que quelle que soit l’idéologie de Varg Vikernes, celle-ci ne doit pas pour autant vous rendre coupable ou rendre coupable qui que ce soit d’apprécier sa musique. Combien d’auteurs de grandes œuvres ont été par bien des aspects des enfoirés notoires… De là à dire que l’œuvre de Burzum peut prétendre à la grandeur… Je vous en laisse juge.
Merci Radio Metal, grâce à vous et cette interview, j’ai décidé de voter FRONT NATIONAL aux Législatives.
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Spaceman, j’me posais quelques questions sur deux trois « détails » :
« toute idéologie, quelle qu’elle soit, est bien mieux à la lumière où elle peut être combattue, si nécessaire, que terrée dans l’ombre où elle peut progresser hors d’atteinte ».
J’avais déjà lu cet efficace condensé lors de ton échange épistolaire (et pis scolaire) avec Vikernes, et comme là tu relances le gimmick, j’ai pas pu résister : t’y crois vraiment à ces vastes conneries ?
Ignores-tu que, dans les faits, on ne voit que ce qu’on veut voir ? Tu as toi-même pu le lire dans les commentaires qu’a ramassé l’interview ; quoique tu aies exposé (en les édulcorant, certes) les propos de Vikernes, nombreux sont les lecteurs à ne voir que la « CENSURE ». Dès lors, les mots de Vikernes passèrent (quelle surprise) pour libéraux, toi pour un suppôt de la pensée politiquement correcte, Régis (votre Collard à vous) pour un exégète paranoïaque, et enfin le texte des lois, pour un vieux diktat capricieux, pour ne pas dire un décalogue facho-bolchevique.
Le pire, c’est qu’en ayant l’attention rivée sur la dite « censure », on se dit que de l’autre côté, du côté des censurés, on trouvera enfin les apôtre de la « liberté » ; que Varg est notre Che à nous, un authentique et preux baladin prêt à sabrer Coca-cola, Oussama et ses crucifiés (oui sabrer, j’aime ce verbe (j’hésitais pour le coup avec « biffler »)).
Comme c’est notre libérateur, on s’interdit d’analyser les raisons pour lesquelles Varg pense ainsi (cf. son antisémitisme voilé, son racisme latent etc), on se voile la face quant au pathos qui charge certaines de ces idées (le moment où il parle des anciens de la scène Black Metal, on dirait carrément un chiard qui s’est pété le crâne en se curant le tarin), et enfin, les conséquences économiques, sociales, morales, politiques (et sodomites, il va de soi) de telles déclarations.
Bref, on lit, dans la plupart des commentaires compatissants à l’égard de Varg, toute la servitude volontaire, toute l’ignorance assumée et la condition avachie de l’amertume. Deux trois lascars nous ont pété la gueule, et curieuse alchimie de l’aigreur : Varg incarne alors les lendemains oniriques où nous vivrons tous libres, gambadant près des gazelles, sans violence (même la viande sera dévorée sans agression, un peu à la manière d’un leng t’che). Varg est ce rêve que l’on caresse du bout du prépuce, et qui nous permet, en somme, de rester toujours plus passif. Pas besoin de comprendre : Varg est là, et l’espoir nous porte.
D’un autre côté, on peut légitimement penser qu’il faut défendre nos terres, car on est bel et bien envahi : saviez-vous qu’il y a « de plus en plus d’étrangers dans le monde » (pour reprendre l’autre) ?
Par conséquent Spaceman, lorsque tu écris (et réécris) « toute idéologie, quelle qu’elle soit, est bien mieux à la lumière où elle peut être combattue, si nécessaire, que terrée dans l’ombre où elle peut progresser hors d’atteinte », si tu entends par là qu’il suffit d’exposer quelque chose pour que tout le monde l’observe, l’examine, l’étudie, et remarque la supercherie, hum… vaste programme… et vaste connerie.
Encore une fois, on ne voit que ce qu’on VEUT voir ; le corps et les instincts font leur travail dans l’ombre, et la conscience suit, la conne, en croyant que c’est elle qui fait tout. En clair, tout ce qu’on attend, c’est que quelqu’un pense quelque chose qui entre en rapport, de près ou de loin, avec nos petites préoccupations. Démonstration par l’absurde : si Heidegger n’avait pas été nazi, QUI l’aurait lu ? QUI aurait pu s’intéresser à ce foutu (et génial) dasein ?! Finalement, on attend l’assentiment des uns, et des autres, une meilleure formulation de nos idées en friche.
Par ailleurs, si tu crois réellement que la conscience de quelqu’un l’aidera à départager le bon grain de l’ivraie, conclusion identique : vaste programme… Un marteau a toujours été plus efficace qu’une longue argumentation (mon laïus en est la preuve en acte).
D’où les conséquences des positions respectives :
a) soit l’on croit, idéalement, que l’on peut parler et changer les esprits des gens, et ainsi tomber dans l’échange entre sourds et paranos, d’un côté la bonne conscience paternaliste du « je sais que tu es raciste, et c’est un état larvaire de la pensée, mais tu sais, je vais t’aider à en sortir ; avec moi, tu vas connaître les Lumières (= tu seras mon Candide, tu vas vivre mes Confessions, et pis Sade dans ton cul) » ; de l’autre, l’hystérie pubescente de l’étron bachelier, cherchant à démontrer sans relâche que la liberté s’acquiert dans un combat sans relâche contre les forces du mal, fussent-elles des lois permettant la moindre de ces libertés.
b) Soit l’on se pose, une bonne fois, et pense que merde, dans un état de pensée où dix voix de crétins valent plus qu’une voix expérimentée, le dialogue n’a qu’une prise bien limitée : seuls importent les affects, les peurs, et les fantasmes. Bref, le pathos en musique marchera toujours, et Varg, comme Christophe Maé, son exact inverse, est un vrai entrepreneur : aimez-vous, détestez-vous, deux secteurs en extension perpétuelle.
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Beaucoup de richesse dans ton commentaire (espèce de capitalistico-philosophico-metalleux de) Fucktoy, comme d’habitude. 😉
« toute idéologie, quelle qu’elle soit, est bien mieux à la lumière où elle peut être combattue, si nécessaire, que terrée dans l’ombre où elle peut progresser hors d’atteinte ».
Bien sûr qu’il faut avoir les outils intellectuels pour pouvoir combattre des idées, pour pouvoir affirmer ses propres propos/convictions et expliquer que les idées nauséabondes sont négatives par essence. Là tu vas me dire, mon cher Fucktoy, « mais qui es-tu pour dire/juger que telle idée est nauséabonde et pas une autre » et là je te répondrai, car tu as les mêmes valeurs que moi, que l’extrêmisme – ou plutôt dans ce cas l’antisémitisme – quel qu’il soit n’a apporté sur cette Terre qu’encore plus de malheur. Et rien que pour ça on se doit d’être actif par la pensée et non passif/fataliste en le combattant.
Il faut (toujours) essayer de (faire) raisonner.
Je comprends bien ton discours, fidèle Fucktoy, et tu penses simplement que la conscience n’est pas présente chez tous et en cela tu as raison. En somme tu as le regret d’une personne intelligente qui, lucidement, sait très bien qu’il y a des combats plus vains que d’autres…
Mais si la vie n’avait vraiment pas de sens, tous les intelligents anxieux parmi nous se seraient déjà suicidés et si dénoncer l’antisémitisme était « juste une opinion comme une autre », beaucoup d’intelligents anxieux parmi nous se seraient déjà suicidés… à cause d’une trop grande misanthropie.
Il faut essayer de combattre la fatalité et de révolutionner les systèmes (de pensée etc.)… car, justement, nous sommes nés pour penser alors autant se servir de ce qu’on a dans la tête pour des « causes justes ».
😉
Varg est un antisémite et ça le regarde. Mais, comme tout bon antisémite, il a eu dans sa vie des « tournants » qui ont construit son raisonnement/argumentation. Et je pense que l’un de ces tournants réside dans un seul terme : frustration.
Varg est simplement un mec intelligent qui a mal tourné comme tout un chacun on aurait pu mal tourner si on avait eu un parcours, une éducation etc. différente. Varg, c’est le Mohammed Merah du black metal : juste un mec normal qui s’est retrouvé endoctriner avec un système de valeurs/pensée à la con.
D’ailleurs, comme il est malin le Varg, il préfère les mails parce que si le journaliste est pas trop con il est capable de le mettre en face de ses contradictions dans le cadre d’une interview téléphonique…
Or ça, Varg il aime pas. Car accepter la contradiction, c’est pas la qualité principale d’un extrémiste… Un extrémiste il croit qu’il y a certaines choses « simples » alors que dans les faits les choses sont toujours plus compliquées qu’il ne le pense.
En fait, pour te compléter Amaury (et je sais que tu aimes ça, être complété), je pense certes, d’une part que « les outils intellectuels pour pouvoir combattre des idées » ne sont pas donnés à tous (enfin, pas donnés, faut dire qu’y’en a qui les refusent catégoriquement). ET d’autre part, que QUAND BIEN MÊME ils auraient ces outils, ces derniers sont très généralement vains, tant les échanges d’arguments ont faible prise sur les pensées des uns et des autres.
Du coup, je pourrais me rapprocher de ces dits-extrémistes, pour qui « les actes » font tout. Mais bon, faut se poser un instant, et relire autre chose que des philosophes : Machiavel (en fait, encore un philosophe, à SA manière, ce qui fait toute la différence).
Lorsque Machiavel compare le peuple, voire toute la vie politique, à un fleuve en crue, il veut montrer très schématiquement qu’il y aura toujours des dégâts à prévoir lorsqu’on veut faire cohabiter des gens ensemble. MAIS (tout est dans le « mais »), on peut construire des digues, et empêcher un surplus de dégâts.
Tout ça pour dire quoi ? Qu’il faut non pas traiter « le mal » par « le mal » (jolie phrase à dire, et bien conne dans les faits), mais traiter « le mal » EN AMONT. Grosso modo, traiter l’extrémisme, la frustration avant qu’ils deviennent irréversibles ; construire les digues qui retiendront, autant que possible, les débordements.
Alors je suis d’accord avec toi sur cette idée, très belle et pour le coup, très occidentale, qu’il faut surtout pas succomber au fatalisme.
Mais sur la méthode, et je sais que tu me rejoins là-dessus, j’ajoute seulement qu’il faut travailler en amont, construire ces fameuses digues dont parle Machiavel ; lorsque l’inondation est là, on ne peut plus rien faire d’autre qu’attendre sa lente décrue.
Petite réflexion sur la censure… Si on l’enlève pour exposer certains faits choquants comme celui ci ne saurions nous pas, à la fin, désensibilisés de ce genre de propos ? En effet j’ai plutôt l’impression que même si on ne perdait pas de vu le fait que c’est inadmissible on finirait par s’y habituer et finalement ne plus y prêter autant d’attention. Mais d’un autre coté il est vrai qu’il est mieux de blâmer au grand jour ces horreurs plutôt que de fermer les yeux pour éviter les conséquences…
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En fait il fallait tout publier mais faire comme sur les doc top secret de la CIA ou autre services secrets, barrer en noir les phrases « litigieuses »…
…. Je suis déjà dehors…. 😀
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C’est bien dommage que vous ayez du censurer son interview car je suis pleinement d’accord que les idées, même nauséabondes, sont mieux au grand jour, mais bon, la loi c’est la loi donc vous n’aviez pas vraiment le choix.
Par contre, je trouve limite choquant que vous n’ayez pas explicité la reformulation de certains passages (en les mettant entre crochets ou en mettant des […] là où vous avez du virer des propos). D’une part, s’il y a reformulation, ce ne sont plus vraiment ses propos donc c’est dommage de les mettre dans sa bouche sans le préciser. D’autre part en pointant du doigt précisément les passages où « là, je suis désolé mais on ne pouvait juste pas mettre ce qu’il a vraiment dit » ça aurait été plus facile de se rendre compte de l’horreur de son discours même sans le voir mot à mot.
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On aurait pu le faire éventuellement à quelques endroits mais très sincèrement si on l’avait fait partout où on a retiré quelque chose, ça aurait été imbitable. Après, quoi qu’il en soit, ce qui est resté, reste bel et bien ses mots (aller, à une exception près où on a dû reformuler un petit bout de phrase pour ne pas perdre son raisonnement).
Ah s’il n’y a qu’une reformulation ça va (bien que justement, s’il n’y en a qu’une seule j’aurais trouvé ça plus juste de le mettre entre crochets)
Parce que ça pose deux problèmes de reformuler sans le préciser: d’une part lui, s’il demande à faire ça par mail c’est en partie pour qu’il puisse prendre son temps et s’appliquer au niveau de la formulation de ses réponses, donc qu’on lui prête des propos qui ne sont pas exactement sa formulation c’est facheux
et d’autre part, pour radio metal, ça pose le problème que tu décris que son propos devient plus acceptable du fait de la reformulation et de la censure
enfin bon, c’est fait, c’est fait
Ce n’est pas cette reformulation en question qui rend le discours plus acceptable mais bien l’absence pure et simple des passages supprimés. Si tu veux en savoir plus, on a dû reformuler un peu la phrase en question parce qu’autrement on ne comprenait plus le raisonnement du fait de l’absence du passage qui suivait.
Mais virer des passages ça reste une reformulation en soi… et pour ce qui est de virer des passages, je pense que le […] est vraiment primordial justement pour se rendre compte que son propos était différent
Aller, accordé ! 😉 Mais comme je t’ai dis, le faire partout où on a supprimé quelque chose aurait été juste illisible. Enfin, je ne vais pas rentrer dans une explication de chaque passage supprimé, du pourquoi, du comment, des choix, etc. On a passé beaucoup de temps pour faire ça proprement, consciencieusement et en maintenant un maximum de choses possibles et on a expliqué l’essentiel dans l’introduction pour que les gens comprennent que des propos ont été tronqués et quels propos de manière générale étaient concernés (ceux a caractère politique et idéologique).
Tu as la théorie en tête et je comprends bien tes inquiétudes, alors que moi j’ai les faits en tête et crois moi si je te dis que ce n’est pas aussi simple, notamment avec tous les paramètres que l’on a dû prendre en compte (la législation, la volonté d’en laisser le plus possible, la nécessité de ne pas détériorer ce qui restait, etc), sans compter qu’on s’y est pris à plusieurs fois avec des échanges avec notre avocat pour qu’il valide.
(Je comprends tout à fait, les choses ne sont jamais aussi simple qu’on le voudrait… mais je persiste à croire que même s’il y en avait 15 par phrase, des […] auraient aidé à se rendre compte de l’ampleur de sa connerie, parce que là ça donne l’impression que t’as enlevé juste une ou deux phrases pas jolies et c’est tout ^^
enfin bon, je ne suis plus en train d’argumenter pour dire « il aurait fallu » parce que je comprends que vous n’aviez probablement pas de marge de manœuvre, c’est juste dommage parce que ça aide à une fausse interprétation de ses propos
Oui, je vois ce que tu veux dire. Tu as probablement raison. Après c’est un choix entre la lisibilité et la conscience de l’ampleur des coupes qui, comme tu dis, indirectement renseigne sur celle de sa connerie. Il y avait peut être ne ce serait-ce qu’un juste milieu possible. On fera mieux la prochaine fois. Si prochaine fois il y a… 😉
Le truc c’est que les propos de Varg auraient éventuellement pu être publier dans le cadre d’un débat, avec quelqu’un pour lui répondre. Mais là dans le cas d’un(e?) interview réalisé(e?) par e-mail, il me semble complètement justifié de s’épargner ses errements haineux, débiles et d’un autre siècle.
[Reply]
J’ai juste relevé deux boulettes sur le passage cité de Varg au sujet de son désaccord avec ce qu’a fait Terrorizer :
apprendront (fin seconde ligne), futur (dernière ligne, pas de franglais lol).
Juste que ce mec est loin d’être idiot qu’on soit en accord ou non avec ses idées, donc les fautes, quand on le cite, ça le fait moins.
Ensuite, je dirais que dans un pays avec le score que vient de faire le FN au premier tour, il y aura forcément un pourcentage de personnes qui seront plus ou moins en phase avec l’idéologie de l’ancien détenu. Faut pas vous prendre la tête avec ça et en quelque sorte penser que vous seriez « responsables » de cet état d’âme de certains lecteurs, faut pas se voiler la face non plus en temps de crise où il faut reconnaître que tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes :/
Et à défaut de l’avoir dit dans l’interview en question, un grand merci à l’équipe de RM pour cette publication d’une saveur particulière.
Maintenant j’attends le coup de gueule du SDF face aux Kills ^^
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Merci, c’est corrigé ! 😉
N’empêche que moi j’appelle ça du p*tain de bon travail parce que il faut avouer que vous maitrisez très bien ce sujet (très) délicat et on voit bien toute votre conscience de bon journaliste à travers cet article ! Merci pour ça et bonne continuation 😉
[Reply]
Un grand bravo pour votre article. Vous nous parlez en début d’article de ce qu’est pour vous un journalisme de qualité, je crois que vous y êtes là. Un vrai raisonnement intelligent pour mettre en garde, sans tomber dans l’amalgame facile.
Chapeau !
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Il faut avouer, que si les faf défilaient en tenue de miliciens avec des portraits de Pétain ou autre truc qui fait bander les connards d’extrême droite, ça ferait pas de mal, les gens se rendrait un peu mieux compte.
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Je trouve la notion de censure ridicule.
Interdire l’apologie des idées allant à l’encontre des Droits de L’Homme, c’est à dire des idées racistes, antisémites, homophobes, l’apologie du meutre, de la torture etc… me parait beaucoup plus raisonnable.
OR, là, vous aviez bien fait comprendre au lecteur que Radio Metal n’était en aucun cas rattaché aux idées de Varg Vikernes. Donc le seul responsable, si problèmes juridiques avaient eu lieu, aurait du être Varg. Faire des poursuites parce qu’une radio a OSER diffuser des idées radicales auquel ils ne sont pas rattachés? On nous prend pour des cons.
Pourquoi censurer? La censure, l’interdit attire l’esprit humain. On s’intéressera avec une curiosité malsaine à ce qui a été censuré. Une réplique dans Trainspotting résume bien la chose « Si la vitamine C était illégale, on se shooterait avec. » Beaucoup joue avec la censure pour se faire connaître. Le clip est choquant et doit se faire interdire? Les lyrics sont trop vulgaires, ce qui entraîne le fameux Parental Advisory sur l’album? Parfait, ça attirera plus de monde.
Il faut montrer au monde toute les facettes de l’être humain, cela facilite pour trouver le problème et tenter de le combattre. Essayer de cacher certaines idées, faits ou actes pour éviter de heurter la sensibilité de quelques personnes? Foutaise.
Ca revient au même de ne pas parler des camps d’exterminations en cours d’Histoire parce que le Ministre de l’Education trouve ça trop trash.
La censure est un truc de con, mes chers amis!
[Reply]
sinon on fait comme aux Etats Unis, on autorise tout et on se retrouve avec des partis et des défilés néo nazis…
Le truc, c’est que voir des néonazis qui défile c’est comme voire des catho qui font des prières de rue contre l’avortement, ça fait une petite piqure de rappel, on peut les repérer, et l’air de rien, le citoyen lambda qui voit un défilé paramilitaire avec toute une bande de faf qui scande leur haine de l’immigré, de l’homosexuel, du métisse, du féminisme, ou je ne sait quoi d’autre sous des drapeau à croix gammée. Bah l’air de rien, ça les condamnerais au groupuscule.
Le probleme c’est que la loi c’est la loi, en tant que journaliste je suis persuadé qu’ils auraient voulu mettre l’interview,mm avec des propos dégueu comme ceux de Varg.
[Reply]
Ah la la…Que c’est beau, un journaliste qui combat le racisme sans même connaître la véritable définition de ce mot. Que c’est beau, de voir un journaliste, qui depuis toujours est un droit-de-l’hommiste, qui prône la liberté d’expression, mais qui aussitôt dérangé par cette dernière, la dénigre… C’est bien vous qui il y a peu, avait témoigné n hommage à Chuck Schuldiner, qui je le rappelle, avait une chanson appelée « Hitler was a sensitive man » … Je ne citerais que Voltaire: « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dîtes, mais je ferais tout pour que vous ayez le droit de le dire. »
[Reply]
C’est Seth Putnam de Anal CUNT pas Shuldiner de DEATH qui à ce genre de chanson. (et on peut comprendre que l’humour grindcore c’est assez particulier, surtout celui d’anal cunt
Hihi, « droit-de-l’hommiste », l’insulte des vrais rebelles.
En fait, toi, tu n’as rien compris 😉 A partir de quel paragraphe tu t’es perdu ?
Rassure moi Guillaume, ton message est cynique ? Rarement vu un tel assemblage de bêtises et d’approximations dans ces sources et pourtant je suis un inconditionnel de la rubrique no comment.
À radio métal, felicititations pour la qualité de cet article. De gros bisous à vous ! 🙂
putin c’est beau!! mais j’ai envie de dire « tant mieux » pour le débat que ça a provoqué tant que les personnes se respectent mutuellement
[Reply]
Super intéressant comme édito. La classe ai-je envie de dire. C’est vrai que l’itw ne m’avait pas choqué plus que cela (et sans que j’adhère ou non à son plébiscite du FN, on s’en fout). Je dis « pas choqué » dans le sens où aucun des propos tenus ne paraissaient si extrêmes.
Aprés, vous avez eu raison de vous protéger et de vous pliez à la Loi sauf que là, la Loi nous emmerde et que je te rejoins, la merde doit être exposée si nous voulons la combattre. Surtout si vous rapportez des propos d’un autre.
Et quand la Loi vaut censure, on en arrive à du grand n’importe quoi. On devrait obliger tout le monde à réécouter l’antisémite Desproges…avant que cela soit interdit par la Loi. Aujourd’hui ses textes l’emmeneraient devant les tribunaux !!!
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« réécouter l’antisémite Desproges » ??????? Je rêve là !!!
Tu as lu ça où toi que Desproges était antisémite ???
Natsume, il ne dit pas que Desproges était antisémite mais il fait référence a un de ses sketch qui, effectivement, aujourd’hui lui aurait valu de sacré emmerdes.
@Natsume : désolé, mais tu es tombé dans le piège :-). Evidemment, Desproges n’était pas antisémite, Spaceman a raison. La teneur de mon propos, si tu relis bien, est sans ambiguïtés. Sans rancunes ?
OK. Autant pour moi, mais c’était pas clair dans la phrase…
Le sketch doit être « les juifs » je suppose… (« j’ai entendu dire qu’il y aurait des juifs dans la salle… etc… ») 🙂
@ WhoDoYouThinkIAm
bien sur que non, aucune rancune… mais Desproges pour moi c’est limite sacré donc j’ai eu tous les poils up en te lisant ^^