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Interview   

Last In Line : Vivian Campbell renoue avec son héritage


Vivian Campbell - Last In LineCertains auront peut-être été surpris de voir Vivian Campbell refaire cracher sa Les Paul au son des premiers albums de Dio, lui qui avait abandonné le heavy metal suite à son éviction inamicale du groupe en 1986, pour faire un rapide tour chez Whitesnake, s’acoquiner avec Lou Gramm (Foreigner), enregistrer un premier album avec Riverdogs et finalement atterrir chez Def Leppard chez qui il officie depuis 1992.

A cette époque, « j’ai tourné le dos » au heavy metal confesse-t-il dans l’entretien qui suit, en expliquant les raisons mais aussi pourquoi et comment il a voulu renouer avec ces premiers albums de Dio dont, pendant des années, il n’a pas voulu entendre parler. Car c’est cette envie de retrouver le guitariste « furieux » qu’il était et cette alchimie qu’il entretenait avec ses compères de l’époque qui l’a poussé à fonder Last In Line. Et ce qui fut un projet « simplement pour le kiff », sans « ambition d’aller plus loin », a fini par engendrer un nouvel album, intitulé Heavy Crown. Campbell nous raconte donc l’histoire de cet album mais aussi sa propre histoire avec cette musique, évoquant aussi bien la conception des trois premiers albums de Dio que sa relation avec feu Ronnie James Dio.

Seulement quelques jours avant cet entretien, le 23 janvier dernier, le bassiste de Last In Line Jimmy Bain décédait à l’âge de 68 ans sur la croisière Hysteria On The High Seas organisée par Def Leppard. C’est donc un Vivian Campbell encore bouleversé par la perte d’un ami que nous avons eu au téléphone, et naturellement le sujet s’est immédiatement imposé de lui-même.

Last In Line

« Lorsque Ronnie [James Dio] a commencé à chercher un guitariste, Jimmy [Bain] a mentionné mon nom […]. Sans cette opportunité, je ne suis pas sûr si nous aurions cette conversation aujourd’hui. »

Radio Metal : Comment vas-tu ?

Vivian Campbell (guitare) : Pas très bien, ça n’a pas été une bonne semaine. J’ai perdu mon bon ami [Jimmy Bain]. Ça a été une étrange année, tu sais. Nous avons déjà perdu beaucoup de monde ce mois-ci et là, ça m’a vraiment atteint.

Je suis vraiment navré pour ce qui est arrivé à Jimmy, c’est terrible. Que s’est-il passé au juste ? Car, s’il était sur la croisière, j’imagine qu’il était en forme lorsqu’il est monté à bord, n’est-ce pas ?

Eh bien, tu sais, Jimmy était un performeur et il ne voulait pas nous laisser tomber. Il ne voulait pas laisser tomber ses amis. Il croyait vraiment en cet album, Heavy Crown. Nous étions tous très, très contents du résultat et Jimmy, en particulier, en était très, très fier ainsi que de son implication. C’était un concert important pour nous. Jimmy ne se sentait pas bien, mais il voulait le faire, donc… Il était prévu que nous donnions deux concerts. L’un a Miami mercredi dernier au soir, que nous avons heureusement fait et qui fut finalement le dernier concert de Jimmy. Nous étions censés jouer sur le bateau le dimanche mais comme tu le sais, Jimmy est mort samedi soir, donc à la place, nous avons simplement… Tu sais, nous étions tous en état de choc, et nous le sommes toujours, mais dimanche matin, nous nous sommes levés et avons organisé au pied levé une commémoration pour Jimmy. Nous avons montré quelques vidéos de l’album et quelques photos. Vinny [Appice], Andrew [Freeman] et moi-même nous sommes simplement assis sur scène et avons raconté des histoires à propos de Jimmy et nos souvenirs. C’était en fait très cathartique, c’était une bonne façon pour nous de faire face, en partie, à la douleur.

Est-ce que l’organisation a pensé à arrêter la croisière ou bien était-ce important que le show se poursuive ?

La croisière était presque terminée et nous étions au milieu de l’océan, donc… C’est ça le truc. Je veux dire que c’était une croisière très étrange, globalement. Ce n’est pas comme faire un concert sur la terre ferme. C’est un contexte très particulier. Les gens sont venus du monde entier pour y participer. Le navire avait une feuille de route. Et même si nous l’avions voulu, le navire n’aurait pas pu revenir au port plus tôt. Il y a des timings à respecter pour qu’un navire se mette à quai et pour qu’il quitte le port. Ca nécessiterait des circonstances encore plus extraordinaires que ça pour pouvoir modifier le planning. En outre, comme je disais, nous étions en mer et le show devait se poursuivre, d’une manière ou d’une autre. Tout était bizarre. Je veux dire que Joe Elliott de Def Leppard a complètement perdu sa voix. Et pourtant, tout le concert de Def Leppard devait quand même se faire. Si nous avions été sur une tournée normale en terre ferme, nous aurions annulé le concert. Mais, du fait que nous étions sur un bateau avec quelques centaines de gens venus de partout dans le monde pour nous voir, nous étions obligés de donner un concert avec Def Leppard. Donc, nous avons fini par mettre en place un concert improvisé très abrégé avec des chanteurs invités. J’ai un peu chanté, Phil Collen a un peu chanté, Eric Martin (Mr. Big) et Kip Winger (Winger) ont chanté et puis le chanteur qui a vraiment sauver la mise, c’était en fait Andrew Freeman de Last In Line, et ça a donné de supers versions de chansons de Def Leppard [petits rires]. Donc, tu vois, c’était un concert très bizarre sur une croisière très bizarre. Mais lorsque tu es coincé en mer, tu ne peux pas faire grand-chose. Il fallait que nous continuions à jouer pour les gens. Et pour ce qui est du décès de Jimmy, tu sais, ça n’allait pas forcer le navire à se mettre à quai plus tôt. C’est quelque chose qu’ils ne pouvaient pas faire.

Je sais que Vinny s’est plaint que la nouvelle ait fuité avant même que vous ayez pu contacter la famille. Dirais-tu qu’il n’y a plus de respect avec internet ?

Ouais, je crois que les gens n’y font pas attention. Je ne pense pas que ce soit délibéré, c’est juste que les gens n’ont pas la prévoyance de penser à la famille. C’était aussi une partie du problème dans le fait que nous étions en mer. Je veux dire que personnellement, je n’avais aucun réseau téléphonique, alors que certaines personnes oui. Mon téléphone ne fonctionnait pas lorsque nous étions en mer. Malheureusement, j’ai découvert que c’était quelqu’un de l’équipe de Def Leppard qui a fuité la nouvelle. Il a envoyé un SMS à quelqu’un et ce quelqu’un se trouvait être en train de diner avec quelqu’un d’autre, et ce quelqu’un d’autre l’a dit à une autre personne et cette personne l’a posté sur Facebook, donc… C’est malheureux. Je ne pense pas forcément que c’était un acte de malveillance. C’est juste que c’est très triste que ça se soit passé ainsi, que sa famille ait dû découvrir via des potins sur internet qu’il était décédé. Je pense que le truc à propos des réseaux sociaux, c’est que très souvent les gens répandent les nouvelles pour de mauvaises raisons. Ils veulent être les premiers à partager les mauvaises nouvelles et ça a plutôt tendance à être une question d’égo de la part de la personne qui fait le post que la considération pour la personne qui est décédée ou pour la famille.

Quels sont les plus forts souvenirs que tu garderas de Jimmy ?

Il y en a plein ! Ça fait trente-cinq ans ou quelque chose comme ça que je le connais, du coup on a beaucoup d’histoires en commun. Nous avons été colocataires pendant des années lorsque nous étions dans Dio. J’ai plein d’histoires au sujet de Jimmy, tu sais [petits rires]. Mais la chose qui me vient à l’esprit, nous étions dans une radio de Los Angeles, KLOS, et c’est là que l’idée de « Hear n’ Aid » était née. C’était juste après que « We Are The World » était sorti avec Michael Jackson et toutes les célébrités qui y avaient participé. C’était exactement comme ça que l’idée était née. Jimmy et moi faisions une interview pour un DJ de rock sur KLOS et il nous a demandé : « Comment se fait-il que personne dans la communauté hard rock n’ai été invité à participer à ‘We Are The World’ ? » Nous avons répondu que ouais, nous faisons du hard rock, et même si le genre rencontrait beaucoup de succès et vendait des millions d’albums, à cette époque, c’était toujours marginal, tu vois. Tu n’obtenais pas de Grammy ou n’était jamais nominé pour un album de hard rock à cette époque. Nous étions un peu les parias de l’industrie musicale et Jimmy, là, sur un coup de tête, a suggéré : « Tu vois, on devrait en faire une, juste pour la communauté hard rock ! On pourrait appeler ça ‘Hear n’ Aid’. » [Petits rires] C’est donc ainsi que l’idée et le nom étaient nés, Jimmy a sorti ça de nulle part. Et il blaguait ! Il plaisantait complètement mais, tu vois, lui et moi partagions un appartement, nous sommes rentrés chez nous cet après-midi-là et sur le chemin du retour, nous nous disions : « Mais tu sais, on pourrait vraiment faire ça ! » Alors en rentrant chez nous ce soir-là, nous avons écrit la chanson. Nous l’avons apportée à Ronnie et au départ, Ronnie n’était pas du tout intéressé parce que nous étions en plein en train de faire l’album Secret Heart. Et, je ne sais pas, il a fini par changer d’avis une semaine plus tard. Finalement, nous avons terminé la chanson et nous l’avons enregistrée, mais voilà comment elle est née. Je veux dire que Jimmy essayait juste d’être marrant, il avait juste balancé une blague et cette blague est devenue tout le projet « Hear n’ Aid ».

Last In Line

« La promesse qu’il nous a faite à l’origine était que ce serait un groupe et que nous travaillerons ensemble pour un but commun […]. Wendy Dio ne partageait pas cette opinion et Ronnie l’a laissée détruire le groupe. Voilà le problème que j’avais avec Ronnie. »

En fait, il est celui qui t’a présenté à Ronnie James Dio. Donc, dirais-tu que d’une certaine façon, c’est lui qui t’as donné la carrière que tu as aujourd’hui ?

Eh bien, absolument, ouais. Si je devais ma carrière à quelqu’un, ce serait à Jimmy pour l’opportunité. Ceci dit, je crois que lorsque l’opportunité s’est présentée, j’étais préparé. On dit de la chance que c’est le croisement de l’opportunité et de la préparation. J’étais très, très dévoué à mon art et à mon métier lorsque j’étais adolescent, je me consacrais pleinement à mon instrument et je pense que Jimmy, lorsqu’il m’a entendu pour la première fois jouer dans Sweet Savage, c’est ce qu’il a remarqué. Et je serais vraiment éternellement reconnaissant envers Jimmy d’avoir fait passer l’information à Ronnie. Lorsque Ronnie a commencé à chercher un guitariste, Jimmy a mentionné mon nom, donc, comme je le disais, je lui dois beaucoup pour ça. Sans cette opportunité, je ne suis pas sûr que nous aurions cette conversation aujourd’hui.

Parlons maintenant de Last In Line, ton nouveau groupe formé en 2012. Qu’est-ce qui a déclenché l’envie de reformer ce line-up en particulier ?

Ça vient de plusieurs choses. Tout d’abord, en début 2011, je suis parti en tournée avec Thin Lizzy en tant que guitariste. Tu sais, Scott Gorham a appelé, Def Leppard ne faisait pas grand-chose cette année-là et Scott m’a demandé : « Est-ce qu’on peut t’emprunter quelques mois pour jouer avec Thin Lizzy ? » Et j’ai tout de suite sauté sur l’occasion. En parlant de lorsque j’étais adolescent, pendant mes années formatrices, Thin Lizzy a eu une énorme influence sur moi. La musique de Lizzy, les guitaristes de Lizzy, Gorham lui-même et Brian Robertson, et en particulier, grâce à Thin Lizzy, j’ai découvert mon plus grand héros de tous les temps Gary Moore. Donc, en ayant pu monter sur scène et jouer avec Scott Gorham et Brian Downey et jouer « Black Rose », « Emerald » et toutes ces chansons géniales, j’ai terminé la tournée en étant vraiment reconnecté à ma première passion dans la vie, qui est de jouer de la guitare rock. Ça fait vingt-quatre ans désormais que je suis avec Def Leppard et le gros, gros challenge dans Leppard, c’est surtout le chant. Nous sommes un groupe énormément porté sur le chant. Mais les parties de guitare ne sont pas aussi stimulantes que, disons, ce que je jouais avec Dio au début de ma carrière. J’ai donc trouvé ça palpitant de me reconnecter à l’instrument.

Après cette tournée, l’une des premières choses que j’ai faites, c’était d’appeler Jimmy et Vinny Appice. Nous nous sommes retrouvés dans une pièce, nous avons jammé et joué, et c’est tout ce que nous avons fait. A ce stade, ça faisait vingt-sept ou vingt-huit ans que nous n’avions pas joué ensemble. C’est ridicule d’avoir laissé passer autant de temps mais l’alchimie du groupe original était complètement intacte. Dès que nous avons commencé à jouer, la connexion était là, j’ai commencé à avoir la chair de poule et j’étais surexcité, tout comme Jimmy et Vinny. Une chose menant à une autre, Jimmy a dit que ce serait super si nous avions un chanteur pour compléter le line-up. Mais même là, nous ne faisions que parler de jouer en salle de répétition et nous n’avions aucune ambition d’aller plus loin que ça. Du coup, Vinny a appelé Andrew Freeman qui à l’époque vivait à Los Angeles, il n’habitait pas loin. Andrew est venu en voiture, il s’est présenté, s’est levé, a commencé à chanter et c’est là que j’ai eu l’idée que nous donnions quelques concerts. Car Andrew était un chanteur vraiment, vraiment passionné, puissant et solide qui était capable de faire de supers interprétations de chansons de Ronnie et, pour autant, il n’avait pas la tonalité de Ronnie Dio. Il sonnait complètement différemment et nous avions justement besoin de quelque chose de différent. Et voilà, nous avions le groupe d’origine et cet indéniable son de Dio des débuts que nous créons, et puis le chanteur qui faisait quelque chose de différent par-dessus. Nous avons donc juste parlé de faire quelques concerts, jouer les chansons que nous avions écrites avec Ronnie issues des trois premiers albums de Dio. Et nous n’avons rien fait de plus, tu vois, nous répétions, nous donnions quelques concerts dans le sud de la Californie et ensuite nous ne nous voyions plus pendant six mois pour finalement repartir faire quelques concerts supplémentaires.

Ensuite, en 2013, nous avons été en Angleterre, nous avons fait quelques concerts là-bas et un festival. Plus tard cette année, on nous a offert l’occasion de jouer au Japon, au Loud Park Festival, et c’était après ça que nous avons reçu un appel de notre management disant qu’on nous offrait un contrat avec Frontiers Records, nous demandant si ça nous intéressait de composer et enregistrer de la nouvelle musique. Et pour être honnête, nous n’avions absolument pas réfléchi à ça. C’était vraiment un truc à mi-temps mais en voyant que quelqu’un nous offrait l’opportunité de le faire, nous avons décidé de tenter notre chance et nous avons été au studio de répétition pour faire un album, en étant complètement dans le même esprit dans lequel nous étions lorsque nous avons fait Holy Diver, c’est-à-dire en essayant d’envoyer ça aussi vite que possible dans un environnement plus ou moins live. C’est ressorti exceptionnellement bien. Je veux dire que nous nous doutions que ça allait être un bon album mais il a dépassé nos attentes. C’était un énorme plaisir de retravailler avec ces mecs et également avec Jeff Pilson qui a fait un formidable boulot sur la production de l’album. Comme je l’ai dit, Jimmy était extrêmement fier de cet album et sa contribution est partout sur cet album. C’était super de le voir avec cette flamme dans les yeux à nouveau, cette étincelle de vie qu’il n’a peut-être pas eue depuis pas mal d’années. Nous étions tous surexcités à différents niveaux et c’était un plaisir total de le faire, et nous en sommes immensément fiers.

Last In Line - Heavy Crown

« La chose en particulier que j’ai fini par accepter, c’est que là où je suis le meilleur dans ma vie, c’est lorsque je joue vraiment, vraiment furieusement une Les Paul. »

On sait que tu n’étais pas en bon termes avec Ronnie James Dio et toi-même avais reconnu que même lorsque vous faisiez de la musique ensemble, vous n’aviez jamais eu une très forte relation. Donc, dirais-tu que c’était plus un désir de retrouver cette alchimie que tu avais avec ces musiciens plutôt qu’un hommage à Ronnie James Dio, comme les gens le percevaient initialement ?

Absolument, ouais. Ça n’a jamais été fait en hommage à Ronnie. C’était fait pour le fun, pour la musique, simplement pour jouer les chansons. Les chansons sont vraiment super et ces albums ont résisté à l’épreuve du temps. Nous l’avons simplement fait pour le kiff. C’était juste quelque chose d’amusant à faire et dont nous sommes fiers. Nous sommes également très, très fiers de ces premiers albums de Dio. Je pense qu’on peut dire que le groupe n’a pas eu la reconnaissance qu’il méritait. Ces chansons ont été principalement composées avec le groupe, avec Jimmy notamment. Jimmy a composé plus que n’importe qui, en fait. J’ai également écrit beaucoup de ces chansons, idem pour Vinny Appice. C’était vraiment un travail collectif avec Ronnie. Et c’est ce que Ronnie voulait. Je veux dire que lorsque le groupe s’est formé, Ronnie nous a dit, à Jimmy, Vinny et moi, qu’il voulait un collectif ; il ne voulait pas être un artiste solo, même s’il y avait son nom sur l’album. Il a appelé ça Dio pour la reconnaissance du nom, car il était de loin le mec le plus connu et c’était son contrat solo qui a financé l’enregistrement des premiers albums. Mais nous créions en tant que groupe et c’est ce que Ronnie souhaitait au départ. Malheureusement, après quelques années, son ex-femme et manageur Wendy Dio ne partageait pas cette opinion. Elle voulait que Ronnie soit un artiste solo et elle n’a pas arrêté de le pousser dans cette direction et, au final, c’est ce qui a mené à la séparation du groupe du début.

Et d’ailleurs, comment expliques-tu que tu ne t’entendais pas tellement avec Ronnie ?

Parce qu’il a permis que ce que je viens de dire puisse arriver ! Parce que la promesse qu’il nous a faite à l’origine était que ce serait un groupe et que nous travaillerons ensemble pour un but commun, et si d’ici au troisième album nous avions du succès, il ferait en sorte que la situation soit équitable pour nous. Jimmy, Vinny et moi avons travaillé pour moins que notre équipe de tournée. Le groupe a vendu des millions d’albums, nous vendions des milliers de billets de concert partout dans le monde, des concerts complets, nous étions sur scène à jouer des chansons que nous avons composé avec Ronnie et pourtant on nous payait moins que l’équipe de tournée, et nous n’avons rien eu pour les albums, donc… [Petits rires] Nous avons littéralement sué sang et eau pour créer ces trois supers albums parce que nous pensions travailler pour un but. Et la raison pour laquelle nous pensions ça, c’était la promesse qu’il nous a faite lorsque le groupe a été formé. Comme je l’ai dit, Wendy Dio ne partageait pas cette opinion et Ronnie l’a laissée détruire le groupe. Voilà le problème que j’avais avec Ronnie.

Depuis que tu as quitté Dio, tu as plus ou moins abandonné le heavy metal jusqu’à rejouer ces chansons avec Last In Line…

C’est vrai, oui ! Il y a plusieurs raisons à ça. D’abord, j’ai tourné le dos à ça ; pendant des décennies et des décennies, je ne possédais ou n’écoutais même aucun des albums de Dio. J’ai quitté ce groupe avec beaucoup d’amertume à cause de ce qui s’était passé. Non seulement on m’en a privé mais en plus, ça a été dépeint dans la presse après coup par Ronnie Dio et Wendy Dio comme si j’avais en réalité tourné le dos au groupe parce que je n’étais plus intéressé par la musique. Et donc j’ai été assez stupide pour mordre à l’hameçon et rentrer dans le jeu. C’est vrai que j’écoute plein d’autres types de musique et particulièrement à ce moment de ma vie, j’explorais différents types de musique. Encore aujourd’hui, j’ai une vaste appréciation pour tous types de musiques et je n’aime pas être catalogué dans une chose. En revanche, la chose en particulier que j’ai fini par accepter, c’est que là où je suis le meilleur dans ma vie, c’est lorsque je joue vraiment, vraiment furieusement une Les Paul. J’accepte et j’adopte à nouveau cette musique comme étant mon héritage. Ces premiers albums de Dio sont autant les miens que ceux de Jimmy, Vinny et Ronnie. Nous avons créé ces albums ensemble et ils nous appartiennent à tous. J’ai pris un autre chemin de carrière parce que j’ai été viré de Dio et la façon dont j’ai été viré m’a laissé avec un goût particulièrement mauvais en bouche.

Cet album Heavy Crown n’est pas tant une redite de ce que vous aviez fait avec Dio. Avez-vous essayé d’éviter d’être trop nostalgiques et plutôt aller de l’avant pour voir ce que ce groupe de musicien était capable aujourd’hui ?

Nous n’y avons absolument pas réfléchi ; nous nous sommes contentés d’aller en studio et commencer à composer. Nous avons un certain son ; tous les musiciens ont un son qui leur est propre. Lorsque tu combines les bons musiciens, ça créé le son d’un groupe. Jimmy, Vinny et moi avons le son des premiers albums de Dio parce que c’est ce que nous sommes et le fait d’avoir Andrew, ça donne une couleur différente, comme je le disais plus tôt. Nous n’avons pas commencé à composer en ayant en tête un ordre du jour. En fait, nous n’avions aucune idée particulière, nous nous sommes contentés de jouer. Nous nous sommes retrouvés dans la salle de répétition, Vinny, Jimmy et moi, et nous nous sommes échangés des idées avec lesquelles nous avons joué. C’est également plus ou moins ainsi que nous avons commencé l’album Holy Diver, nous n’avions donc aucune idée derrière la tête.

En novembre, on a appris le départ du claviériste Claude Schnell et tu as expliqué que Claude ne faisait pas partie de l’album Holy Diver et que tu voulais revenir à cette période de créativité qui a démarré avec seulement la guitare, la basse et la batterie. Peux-tu nous dire pourquoi ?

Parce que c’est exactement ainsi que nous avons fait Holy Diver. Il n’y avait pas de clavier. Nous avions un clavier dans le studio lorsque nous composions mais c’était Jimmy qui en jouait et c’était Jimmy qui avait trouvé cette partie toute simple sur « Rainbow In The Dark », cette petite accroche de clavier que Jimmy a joué sur l’album. Claude ne faisait pas partie du groupe Dio originel et ce groupe originel était très, très focalisé sur la guitare. C’est ce que je voulais faire et c’est ce que nous voulions faire pour cet album, revenir à ça. Voilà donc pourquoi Claude n’a pas joué sur l’album Heavy Crown. Evidemment, lorsque nous jouons en live, encore aujourd’hui, nous avons besoin d’un clavier supplémentaire mais pour ce qui est du noyau du groupe, c’est guitare, basse, batterie et le chanteur.

Tu me diras si je me trompe, mais lorsque tu es arrivé dans Dio, la plupart des chansons de l’album Holy Diver était déjà écrites, non ?

Non, « Holy Diver » et « Don’t Talk To Strangers » étaient les deux seules chansons qui étaient écrites.

Last In Line

« Lorsque nous avons fait Sacred Heart [petits rires] tout le monde faisait ses pistes et puis partait chacun de son côté. Nous étions comme des rats sur un bateau qui coule. Personne ne voulait être là. »

Comment comparerais-tu la conception de cet album et la conception des trois premiers albums de Dio que vous avez fait ensemble ?

C’était très, très similaire. Comme je l’ai dit, nous voulions aborder ça de la même façon que nous l’avons fait avec Holy Diver et c’était vraiment comme ça. Ceci dit, aucun des trois premiers albums de Dio étaient exactement pareils dans leurs approches. Holy Diver était le plus pur et c’est pourquoi nous avons décidé de suivre cette voie pour cet album Heavy Crown. The Last In Line était un peu plus compliqué. C’était toujours un album vraiment génial et vraiment amusant à faire mais lorsque nous en sommes arrivés à Sacred Heart, il y avait un sentiment très, très différent dans le groupe et une approche très, très différente dans notre manière de composer. Et à ce stade, Ronnie voulait utiliser davantage de claviers et on peut dire que Jimmy, Vinny et moi ne ressentions pas la même chose. Nous n’avons pas la même affinité ou affection pour l’album Sacred Heart que pour Holy Diver ou The Last In Line. Nous avions vraiment l’impression de dévier de ce que le groupe devait faire, autant pour ce qui est de l’utilisation aussi prononcée du clavier que du désir de Ronnie de compliquer plus qu’il ne fallait les arrangements. Ce n’était pas des chansons naturelles, faciles, fluides, comme avaient pu être celles des deux premiers albums. Nous avions l’impression que ça devenait compliqué juste pour être compliqué, pour faire quelque chose de différent ; c’est le désir de Ronnie de faire quelque chose de différent qui nous avait amené sur cette voie. En outre, et plus important encore, à un niveau personnel, c’était durant la conception de l’album Sacred Heart que Ronnie et Wendy se sont séparés pour la première fois et Ronnie était à une période très, très sombre de sa vie. Son humeur avait changée, il était facilement irritable et plus personne ne voulait être constamment en studio, sauf Claude. Alors que pour Holy Diver et The Last In Line, tout le monde était tout le temps au studio, il y avait vraiment un esprit d’équipe, nous étions tous surexcités de ce que nous faisions et par cette musique que nous créions, et tout le monde était là pour se soutenir les uns les autres. Même lorsque tu avais fini tes parties, tu ne partais pas du studio, tu restais pour traîner dans les parages. Lorsque nous avons fait Sacred Heart [petits rires] tout le monde faisait ses pistes et puis partait chacun de son côté. Nous étions comme des rats sur un bateau qui coule. Personne ne voulait être là.

L’album a été produit par Jeff Pilson. Il a d’ailleurs lui-même fait partie de Dio à un moment donné. Etait-ce un critère que vous avez considéré pour le choix du producteur ?

Non, il se trouve juste que nous connaissons Jeff personnellement, et nous connaissons son énergie. Nous avons tenté le coup pour voir ce que ça pouvait donner de l’avoir en tant que producteur. Je n’en avais encore jamais fait l’expérience. Je le connaissais en tant que personne, musicien et ami mais je ne me doutais pas qu’il était aussi talentueux en tant qu’ingénieur et producteur, et je suis vraiment content d’avoir découvert ça. Mais encore une fois, ça n’a rien à voir avec sa relation avec Dio, vraiment, c’était uniquement notre relation personnelle qui a conditionné ça.

Peux-tu nous en dire plus sur la symbolique du nom de l’album « Heavy Crown » ?

Pas vraiment, non [petits rires]. Il faudrait que tu demandes à Andrew. C’est lui qui a écrit les paroles. Ça pourrait être interprété comme une lourde couronne que nous portons, du fait que nous continuons sans Ronnie. J’ai demandé à Andrew de quoi parlait cette chanson et il m’a dit que les paroles sont en fait profondément personnelles pour lui et renvoient à autre chose dans le passé. Ce sont des paroles sur lesquelles il a travaillé pendant des années. Donc je ne crois pas que ça avait été écrit en ce sens mais ça pourrait être interprété comme je l’ai dit. Je me suis juste dit que c’était un titre qui conviendrait bien à l’album, étant donné la position dans laquelle nous étions, tu vois, le fait que les gens allaient nous jugés sur la base des premiers albums de Dio. J’ai donc demandé à Andrew s’il était d’accord pour utiliser ça comme titre d’album et il a dit « bien sûr » mais la chanson, en soi, n’a pas été écrite par rapport à ça.

A quel futur peut-on s’attendre pour Last In Line ?

Eh bien, nous sommes un peu à la croisée des chemins aujourd’hui. Si je ne croyais pas autant en cet album, je dirais que nous en aurions fini et que ça n’irait pas plus loin. Mais, en fait, cet album a été enregistré il y a longtemps, ça fait un moment qu’il est dans les tuyaux et la raison pour laquelle il n’est pas encore sorti est parce que nous attendions tous que nos emplois du temps se libèrent, de façon à pouvoir tourner pour promouvoir l’album parce que nous y croyions tous énormément. Nous ne voulions pas juste sortir l’album et le laisser flétrir. Nous voulions vraiment lui donner sa meilleure chance en allant le promouvoir, en parlant à la presse et en le jouant en concert. J’y crois, Vinny y croit et je sais que Jimmy y croyait énormément. J’estime donc que nous devons à notre défunt frère Jimmy de faire tout ce que nous pouvons pour que cet album soit entendu. C’est sa dernière œuvre mais je pense qu’elle est à égal niveau avec nombre de ses autres grandes œuvres et que ce serait dommage de ne pas faire l’effort de la faire écouter aux gens. Donc nous continuerons assurément à promouvoir cet album ; je t’en parle là tout de suite d’ailleurs. Il est plus que probable que nous allons continuer à donner d’autres concerts. Nous allions faire une tournée en mars, avril, mai… Nous n’allons finalement plus faire cette tournée mais nous allons sans doute donner quelques concerts pour promouvoir l’album. Et pour ce qui est de la personne qui jouera la basse, pour l’instant je n’en sais vraiment rien mais j’aimerais quelqu’un – et je ne veux pas parler de remplaçant – qui serait approprié pour reprendre le flambeau de Jimmy. Quelqu’un qui serait digne de cette place sur scène et de jouer avec ce groupe.

Pour finir, je dois te demander : comment va la santé ? Car tu as été diagnostiqué avec un cancer il y a quelques temps. Du coup, est-ce que tu es complètement guéri ?

Je ne suis pas complètement guéri aujourd’hui mais je vais probablement devoir m’entretenir pour le reste de ma vie. Pour ce qui est de mon cancer, ça ne m’inquiète vraiment pas. C’est juste un désagrément. Ça ne va pas me tuer. Je me sens vraiment très chanceux d’en avoir conscience et que j’ai pu être mis au courant [pour mon cancer] lorsqu’il était à un stade suffisamment précoce. Ainsi, j’ai pu le contrôler, le gérer et garder une longueur d’avance sur lui. Je me sens aussi vraiment chanceux d’avoir les ressources et les médecins qui me permettent ça parce que je sais que ce n’est pas le cas de beaucoup de gens. Donc, je ne m’inquiète vraiment pas pour ma santé.

Interview réalisée par téléphone le 28 janvier 2016 par Nicolas Gricourt.
Retranscription : Daphnée Wilmann.
Traduction : Nicolas Gricourt.

Site officiel de Last In Line : www.lastinlineofficial.com.



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