Le rock’n’roll est un style musical authentique, honnête, énergique et primaire. Ce côté brut explique sans doute pourquoi il est méprisé par certains fans de musique qui ont tendance parfois à le réduire une musique simpliste. Pourtant, pour faire de la musique et donc de l’art, doit-on forcément naviguer dans les eaux troubles de la complexité ? Sûrement pas pardi ! L’art n’oblige aucunement à la prise au sérieux… AC/DC, Airbourne, Motörhead et consorts : tous proposent un art, le rock’n’roll, situé aux antipodes de la prétention et de la superficialité. Leur musique vient du coeur et des tripes et le public peut sentir que le moteur de tous ces artistes est la sueur, la joie et le partage.
Trois caractéristiques qui prennent toutes leurs dimensions en live et que l’on retrouve d’ailleurs chez nos petits français de Sticky Boys. Proposer des albums carrés tout en gardant en tête que le plus important pour le groupe reste l’interaction live : tel est l’objectif des Sticky Boys qui viennent de sortir le bien nommé Make Art, leur deuxième album. On en parle avec Alex, le guitariste/chanteur du combo, dans l’entretien qui suit.
« Ce qui nous pousse c’est l’échange avec le public quand t’es sur scène. Ça nous a toujours botté et c’est toujours le cas aujourd’hui. »
Radio Metal : Première question, quelle est la signification de Sticky Boys ? Est-ce que cela représente des gros gamins bien collants ?
Alex (chant/guitare) : Ouais ça peut être ça ! (rires) Nous on a imaginé ce nom-là quand on sortait beaucoup beaucoup dans des bars, on était un petit peu des oiseaux de nuit, on était indécrottables et on avait tendance à beaucoup transpirer à cause de ce qu’on pouvait ingurgiter si tu veux. Donc voilà c’est parti de ça, on ne pensait pas aux gamins mais ça peut…
Avec l’activité du groupe qui a pris de l’ampleur, vous avez toujours du temps pour ça ?
Ah non on a moins de temps pour ce genre de petits passe-temps… (rires) Quand on a l’occasion on n’est pas les derniers à sortir, loin de là, mais c’est vrai que quand on est pris comme en ce moment on n’a pas trop le temps pour ce genre de petites virées.
Vous semblez faire sans arrêt des concerts entre deux albums, est-ce la scène qui vous inspire pour écrire vos compositions ?
Exactement, c’est vraiment ça. J’ai même envie d’aller plus loin en disant que c’est pour ça qu’on fait ça. On a pu rencontrer d’autres groupes ou musiciens qui appréciaient vraiment d’aller en studio, qui imaginaient le son qu’ils allaient pouvoir avoir et tout ça… Nous on commence à s’y mettre mais c’est vrai que ce qui nous pousse c’est l’échange avec le public quand t’es sur scène. Ça nous a toujours botté et c’est toujours le cas aujourd’hui.
Pour vous ce n’est pas envisageable d’écrire un morceau que vous ne joueriez pas sur scène ?
Euh, non…
Parce qu’il y a des morceaux très bons qui ne sont pas forcément jouables sur scène…
Ouais c’est vrai. Ce n’est pas encore au goût du jour écoute… On pourrait, le truc c’est que le deuxième album, même s’il a été plus réfléchi que le premier, a été fait en très peu de temps quand même. On a arrêté la tournée fin octobre, on avait bien quelques petites idées ici et là mais c’est surtout sur novembre-décembre qu’on a tout bouclé et en février on rentrait en studio. L’idée c’était de retranscrire l’énergie qu’on pouvait avoir, à savoir de garder un trio avec une basse bien présente. Après il n’est pas exclu qu’on ait d’autres envies, il suffit d’en avoir envie et d’avoir un peu de temps pour ces pistes-là. Après je ne sais pas du tout, c’est pas prévu mais je ne peux pas te dire que ça ne l’est pas non plus si tu vois ce que je veux dire. Au jour d’aujourd’hui on en est là ! (rires)
Vous êtes apparus dans des publicités, pour Converse et la SNCF, mais aussi dans un film, comment tout ça s’est produit ?
Ce qui a tout déclenché c’est la SNCF, c’était le pur hasard. C’était à l’époque de MySpace, on reçoit un message de la SNCF qui cherche un groupe pour une pub façon caméra cachée, on se renseigne et on s’aperçoit que les conditions sont cools, que le projet nous intéresse. Ça nous faisait une bonne visibilité et on prenait un bifton en plus, ce qui n’est pas dégueulasse, donc voilà du coup ça s’est fait. Partant de là nous c’était cool, on l’a assumé et c’est en partie grâce à ça qu’on a pu jouer au Hellfest en 2011, on avait fait la soirée d’ouverture. C’est comme ça qu’on a rencontré du monde, que Converse nous a contacté car ils nous avaient vu dans la pub SNCF et avaient trouvé ça cool. On les a rencontrés et là encore le projet nous séduisait donc on a dit oui. Quant au film c’est complètement différent puisqu’on connaissait les réalisateurs Philippe Appietto et Nathalie Sauvegrain. On avait déjà fait des photos avec elle, on l’avait rencontré lors d’une de ses expos photos. Il se trouve qu’ils sont en couple dans la vie et avaient pour projet depuis longtemps de monter un film. Il leur fallait un groupe de hard rock dans le film qui jouait lors d’un concert et ils ont fait appel à nos services.
Cette expérience cinématographique vous a plu ?
Ouais, ça nous a plu. Après on est limité, on n’est pas acteurs même si on a quelques répliques, on joue notre propre rôle, un groupe de rock qui déboule, qui monte son matos et qui joue. Cette expérience était géniale parce que déjà tu rencontres du monde et puis c’est enrichissant car tu apprends énormément. Personnellement je n’avais jamais assisté à un tournage de film sur plusieurs jours, je n’avais jamais vu comment s’organisaient les journées et les différents rôles de chacun : la régie, les chefs opérateurs, le perchiste… C’est vraiment une espèce de microcosme quoi !
« L’idée c’était de retranscrire l’énergie qu’on pouvait avoir, à savoir de garder un trio avec une basse bien présente. »
C’est le genre de journée peut-être même encore plus longue qu’une journée de concert pour un groupe…
Ça se vaut un peu en fait. Là on était sur place, tout le film se passe dans le même lieu, les comédiens arrivent aux heures où ils ont des tournages et ils passent beaucoup de temps à attendre. Après pour les techniciens ça rigole pas du tout, mais toi t’es présent, tu peaufines sans arrêt avec le réalisateur, le cadreur ou autre. Quand tu fais un concert, tu pars le matin à six heures, tu te tapes six heures de route, t’arrives, t’as à peine le temps de bouffer un sandwich que tu fais tes balances, après avoir bien sûr déchargé le camion, puis tu attends ton concert… Ça se déroule pas de la même façon mais je ne saurais pas te dire ce qui est le plus long.
Pour revenir sur la SNCF, c’est vrai qu’elle semble se bouger niveau publicité pour modifier son image et pour ça elle fait plus appel à des groupes locaux qu’à des artistes de variété super connus. Il y avait même un groupe d’electro lyonnais qui avait fait un DJ set dans un train Lyon-Paris.
Je ne sais pas si tu as vu mais, il y avait ce spot où l’on apparaissait, mais aussi d’autres caméras cachées la même journée à la Gare de Lyon. Notamment un mec qui est fan d’arts martiaux qui se fait piéger, il descend de son train et il y a une dizaine de gars déguisés en moines shaolin et une dizaine déguisés en ninja qui font une simulation de combats sous ses yeux ! C’était très très bien foutu, après ils avaient un sacré budget, le réalisateur était une pointure à priori. Tout était fait pour que ça soit réussi et que ça fonctionne.
Votre nouvel album s’intitule Make Art, quel est le message de ce titre ? Que même du rock avec un petit côté punk reste de l’art, avec tout le travail que cela implique ?
C’est plutôt le contraire en fait ! Quoique c’est un peu ça aussi. On a fait le constat à force de faire des dates à droite à gauche que le mot « artiste » apparaît régulièrement, loge artiste, pass artiste, fiche artiste… Et on s’est dit que l’art finalement on y est confronté tous les jours bien malgré nous, nous notre seule volonté c’est de faire du rock ‘n’ roll et puis de jouer très fort. Bon on s’assagit petit à petit, on joue moins fort. Bref on constate tout ça et on se dit que faire quelque chose autour du thème de l’art ça peut être amusant. C’est un peu à double sens. On a beau faire ça, on fait quand même de l’art, et même temps, on a beau faire de l’art, on en fait comme des cochons ! Voilà ! (rires)
Quels sont vos goûts artistiques en dehors de la musique ?
Je t’avoue qu’à la base on est sensible à pas mal de choses. Ça peut être le ciné, les expos quand on a le temps, Tom est très branché expos photos et j’ai suivi des études d’histoire de l’art donc j’ai fait pas mal d’expos de trucs classiques ou plus contemporains. Voilà, maintenant la réalité c’est qu’aujourd’hui la musique nous prend tellement de temps qu’on a peu le temps pour voir ce qui se fait ailleurs. Déjà en termes de musique, alors changer complètement d’art c’est encore plus délicat. C’est terrible parce que c’est les réponses que j’entendais quand je lisais mes petites interviews de mecs de groupes connus, tu te rends compte que la musique que tu écoutes le plus c’est la tienne, pas par mégalomanie mais parce que ça permet d’avancer et de travailler dessus.
« On a bien conscience de ne pas faire de la musique révolutionnaire. »
C’est important pour vous de maintenir dans votre image cette dualité entre quelque chose de léger comme le rock ‘n’ roll et quelque chose de plus sérieux ?
Disons qu’on bosse assez sérieusement, on répète régulièrement, on consacre pas mal de notre temps à la musique et à côté de ça, si on le fait, ça reste pour se faire plaisir. Parce que partir sur la route entre nous, voir des gens qui ont la banane après ton concert, c’est toujours agréable. C’est une espèce de compromis entre les deux, si c’est pour le faire trop sérieusement et que ça devienne un truc chiant ce ne serait pas l’intérêt non plus, et si c’est pour en faire un truc uniquement rigolard, je ne suis pas sûr que ça soit crédible et qu’on y trouve notre compte non plus. On essaye d’être sur une juste limite, un entre-deux.
Vous dîtes dans votre biographie promotionnelle que cet album est plus personnel, de quelle manière ?
Il est plus personnel parce qu’il ressemble plus à ce qu’on est que le premier. Le premier on l’a enregistré assez rapidement, on avait besoin de prendre des groupes de références, et de fil en aiguille, de date en date, notre son s’est affiné sur scène, notre jeu aussi, la basse est devenue de plus en plus présente et puis on a assumé d’avantage le fait d’être trois. C’est en ça qu’il est plus personnel, on est trois et ce qui est présenté sur l’album on pourra le retrouver sur scène.
C’est vrai qu’en trio, musicalement tu ne peux pas tricher…
C’est ça. Après en studio tu peux en rajouter, prendre cinq pistes de guitare et de clavier si tu as envie, tu peux rajouter des choristes, tu peux faire tout ce que tu veux. Nous l’idée c’était d’avoir un truc brut qui limite est une sortie de console de concert quoi… De retrouver vraiment ce son et cette énergie qu’il y a sur scène, c’est pour ça qu’il est personnel, après on a bien conscience de ne pas faire de la musique révolutionnaire.
On entend souvent que les artistes doivent monter sur Paris s’ils veulent percer, qu’en penses-tu toi qui es parisien ? Est-ce vraiment le lieu idéal pour monter un projet artistique ?
C’est pas mal, après est-ce que c’est mieux j’en sais rien. A Paris t’entends pleins de mecs dire qu’ils vont aller à Londres, à L.A, ou New York parce que c’est là-bas que ça se passe… Où que tu sois t’es jamais content. Je crois que si tu as envie, si tu multiplies tes dates et ton boulot, je ne dis pas que ça marche à tous les coups mais tu dois réussir à en faire quelque chose. Il y a pleins de groupes super connus, pas que sur la scène hard rock ou metal, qui sont issus de pleins d’autres villes de France que Paris et bien heureusement. On est pas des gros parisianistes si tu veux, moi j’ai grandi à Paris, les deux autres ont déboulé là pour boucler leurs études et on s’est rencontré à ce moment-là. Le fait est qu’on a du boulot ici et qu’on habite ici, donc on répète ici. Si on s’était rencontré à Bordeaux ça se serait très bien fait à Bordeaux, enfin j’espère en tout cas…
Interview réalisée par téléphone le 25 septembre 2014 par Metal’O Phil.
Retranscription : Le Phasme.
Introduction : Amaury Blanc.
Site internet officiel des Sticky Boys : www.stickyboys.eu.
Je viens tout juste de les découvrir et ils envoient !
Vu ces messieurs au Pacific rock de Cergy Pontoise ( très cool cette salle d’ailleurs…)et ils déchirent sur scène, je crois qu’ils passent au Hellfest en 2015. Rendez-vous là bas !
Un bon groupe qui se donne vraiment sur scène