L’image médiatique de Timo Tolkki s’est considérablement dégradée au fil des années. Inutile d’en rajouter sur le clash avec Stratovarius et sur la dégradation publique de sa santé mentale. Depuis, il a multiplié, non sans un acharnement presque pathétique, les projets éphémères tels que ce Revolution Renaissance qui n’a que peu convaincu ou ce Symfonia, supergroupe d’un autre temps dont l’album et les prestations scéniques nous avaient montré avec effroi que le speed metal mélodique avait terriblement vieilli et que tout y avait été dit. Et c’était sans compter sur cette idée, certes intéressante, mais légalement farfelue et d’un goût douteux vis-à-vis de ses anciens collègues, de remonter le line-up originel de Stratovarius pour sortir un disque. Disque dont nous n’avons pas de nouvelles depuis plus de six mois. Pas de jugement ici sur ces choix artistiques, mais le fait est que la sauce n’a tout simplement pas pris, l’homme le reconnaît lui-même : « Ça n’avait plus aucun sens d’essayer de ‘conquérir’ le monde du metal alors qu’il était évident que les gens n’étaient pas assez intéressés. Entendons-nous bien, ce n’est pas grave si ça n’intéresse pas. »
Récemment, le guitariste se lançait dans un nouveau projet, consistant à proposer ses services en matière de mastering et de mixage avant, quelques jours plus tard, de publier un communiqué annonçant son probable retrait de la sphère musicale, du moins en tant que compositeur. Un communiqué vulnérable, touchant et visiblement sincère quoique, au vu de l’image de personnage mentalement fragile dont il aura du mal à se défaire, il est difficile de ne pas douter de la véracité de certains événements parfois surréalistes qu’il décrit. Difficile aussi de ne pas sourire face à l’introduction de son raisonnement, certes logique, selon lequel c’est un gâteau qui l’aurait convaincu de prendre cette décision. Néanmoins, et c’est le plus important, sa conclusion globale évoquée plus haut est pleine de bon sens, bien qu’il n’y ait jamais à se réjouir qu’un artiste en arrive à un tel aveu d’échec.
« Je ne sais pas combien d’entre vous ont envie de lire ce qui va suivre et pour parler franchement, je m’en moque un peu, mais j’écris simplement quelques pensées matinales concernant Symfonia et d’autres événements qui se passent dans ma vie.
Tout commença à partir d’un gâteau. Je me suis dit que cela devait être une sorte de blague céleste et c’était peut-être vraiment le cas, mais lorsque deux fans m’ont tendu un gâteau Symfonia à la fin du dernier concert de la tournée sud-américaine, après avoir passé trois nuits dans un motel froid à quinze dollars la chambre dont les murs recouverts de béton gris rappelaient ceux d’une prison de Santiago du Chili et après avoir volé pendant 28 heures pour arriver sur un autre continent et jouer devant des publics allant de 100 à 350 personnes, j’ai commencé à me dire que c’était peut-être ça. Le gâteau me disait d’une manière amusante : ‘Hey Timo, ne vois-tu pas que c’est la fin ?’
Et j’ai commencé à réellement remettre toute ma carrière de musicien en question. C’est arrivé en juin.
Il y a tout juste un an, je m’envolais pour la Suède pour enregistrer trois chansons démo que j’avais composées en espérant enregistrer quelques voix d’Andre [Matos, chanteur de Symfonia]. Je suis resté six jours sur place et, de ce séjour, j’ai réussi à obtenir de lui environ six heures de chant. Entre les allers-retours au supermarché, les changements de couches et moi essayant de résoudre une partie de leurs disputes conjugales, j’ai commencé à me demander si, après tout, c’était vraiment une bonne idée.
Cependant, les gens ont aimé les démos et je suis donc allé jusqu’au bout de la production de l’album In Paradisum auquel j’ai dû consacrer au moins mille heures de travail. Andre Matos me dit très clairement que ce groupe ne devrait pas faire le moindre concert si ça ne rapportait pas d’argent. J’étais assez d’accord avec lui, même si, en même temps, je savais que les gens considéreraient encore ce projet comme un nouveau groupe et pas le ‘Spartacus of Metal’ où les portes du royaume des superstars s’ouvriraient en un claquement de doigts. Uli Kusch venait et repartait du groupe à cause de sa blessure à la main et au milieu des enregistrements des voix en Suède, il m’envoya un mail me disant qu’il ne jouerait plus jamais le moindre concert de sa vie parce qu’il ‘ne supportait plus l’odeur d’urine dans les loges des coulisses, tout ce désordre, les voyages, etc’. En vain j’ai essayé de lui dire que ce n’était pas ce dont on avait convenu. Il m’a assuré alors que si Symfonia faisait un second album, on pouvait utiliser son nom pour 10 000 euros et prendre Alex Landenburg pour les sessions d’enregistrements. Et dix minutes plus tard arriva un message dans lequel il me disait qu’il voulait aussi que je paie ses frais d’honoraires ce qui ferait un total de 13 000 euros pour l’utilisation de son nom. Je n’ai pas répondu mais j’ai vraiment trouvé ça très dur à avaler.
Ensuite Matos a perdu sa voix en plein milieu de la session d’enregistrements des voix pendant quatre jours et, tandis que j’étais à la recherche de doses de cortisone en plein milieu de la campagne profonde suédoise, j’ai vraiment commencé à penser que ça n’allait pas marcher.
Bref, on a terminé d’enregistrer les voix, on a donné les interviews et on a sorti l’album. Je considère toujours que c’est un bon album. Le tremblement de terre au Japon a aussi un peu perturbé les petits projets de tournée que le groupe avait. Après ça Andre m’a raconté que nous pouvions faire une tournée lucrative en Amérique du Sud et que celle-ci était planifiée par son manager. Apparemment, quelques mystérieux investisseurs étaient entrés en jeu. Rien qu’à entendre le mot ‘investisseur’ j’aurais dû me méfier. J’ai décidé de faire cette tournée et après trente heures de vol Helsinki – Frankfort – Rome – Sao Paulo nous avons atterri uniquement pour nous entendre dire que la tournée était annulée. A ce moment-là j’étais prêt à acheter un billet retour pour la Finlande mais ils ont fini par trouver une solution et il me semble que nous avons fait six concerts. Ce fut la tournée la plus catastrophique et la plus difficile qu’il m’ait été donnée de faire de toute ma carrière.
Le claviériste Mikko Harkin a développé une très forte fièvre et une inflammation des poumons liées à une pneumonie.
Alors, allongé dans l’obscurité d’une chambre d’hôtel d’un Formule 1 à Sao Paulo (le moins cher que vous puissiez trouver ici) je commençais à vraiment avoir des doutes concernant mon avenir en tant que musicien.
Lorsque j’ai eu le chiffre des ventes de Edel Records et les compte-rendus des organismes de réservations pour les festivals de l’été 2012, j’ai décidé d’arrêter là. Ça n’avait plus aucun sens d’essayer de « conquérir » le monde du metal alors qu’il était évident que les gens n’étaient pas assez intéressés. Entendons-nous bien, ce n’est pas grave si ça n’intéresse pas.
Puis j’ai commencé à réfléchir sur ma carrière. Environ trois mille concerts à mon actif, vingt ans, vingt CD, des productions, des clinics, des voyages. Je me suis rendu compte que j’avais fait beaucoup de choses. J’imagine que la plupart d’entre vous sait que je souffre de trouble bipolaire, l’une des pires maladies mentales, mais avec un traitement et un rythme de vie calme, cette maladie peut être maîtrisée bien que jamais guérie. Jouer dans un groupe en tournée est loin d’être quelque chose de « relaxant » et en réalité une vie rock’n’roll en tant que telle est frénétiquement faite de hauts et de bas. Au cours de ces longues tournées avec Stratovarius, alors que la maladie n’était pas encore diagnostiquée, j’aurais pu mourir. Ce n’est pas une plaisanterie.
L’année prochaine, j’aurai 46 ans. Cet automne, j’ai pris la décision de me retirer quelques temps du monde de la musique et de me concentrer sur autre chose. J’ai une femme formidable et une fille qui s’avère être aussi une chanteuse de classe internationale. J’ai recommencé à donner des cours de guitare. Je prends beaucoup de photos. En d’autres termes, je vis une vie assez normale.
Je prends vraiment conscience des marques que les années m’ont laissé et je me rends compte qu’il est mieux pour moi de prendre le temps de me reposer et de soigner ces blessures. Il y a beaucoup à faire. L’industrie de la musique est actuellement dans un sale état et ça ne va pas en s’arrangeant. D’ici quelques années on découvrira quelle forme cela prendra. Peut-être qu’un jour j’en ferais partie, peut-être pas. Pour l’instant je n’en sais vraiment rien.
Alors, qu’en est-il de mon avenir ? Si cela vous intéresse, la seule chose que je puisse dire pour l’instant, c’est qu’il est possible que je n’enregistre plus jamais quoi que ce soit. Pour certains d’entre vous, cela peut être un soulagement. Je ne sais pas ce que l’avenir me réserve mais je désire remercier chacun de ceux qui m’ont soutenu pendant ces vingt-deux années. Pour vous qui ne m’avez pas encouragé et qui vous moquez de moi en permanence comme à Stratoboard (ce qui m’a réellement attristé principalement par le manque de respect pour un groupe qui fut ma vie pendant vingt-deux ans et qui joue encore 80 % de mes chansons alors qu’il ne reste plus que deux mecs dans le groupe appelé Stratovarius) je souhaite également vous remercier parce que sans vous, les gars, je n’aurais jamais pu faire tout ce que j’ai fait. Ce fut une carrière incroyable. J’espère que l’avenir apportera plus de musique mais on dirait bien que ça ne sera pas le cas. Alors maintenant, tout ce que je peux dire, c’est que… J’ai fait mon chemin.
J’espère avoir l’occasion de vous croiser quelque part, prenez soin de vous. »
Traduction : Isabelle
Stratovarius est terminé depuis que Timo Tolkki n’y est plus. Les vrais compositions c’était lui. J’espère qu’il reviendra dans la musique parce qu’aujourd’hui dans le métal ou ailleurs, des talents comme lui on en trouve plus. Toutefois ce qu’il a fait il l’a fait et sa musique demeure au moins pour ceux qui l’apprécie encore.
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Que dire si j’adore le talent de ce compositeur même si celui-ci a une maladie handicapante. respect à vous monsieur TIMO TOLKKI. Vous m’avez donné le goût d’apprendre la guitare…et j’apprendrai à mon niveau pour me faire plaisir quelques morceaux pour vous rendre hommage.
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J’ai adoré les premiers albums de Stratovarius, je les ai vu 3 fois en concert dès leurs début et j’ai adoré, Timo est un grand guitariste, je bosse à la guitare sur ses partitions.
J’ai décroché Stratovarius après son départ. je vois déjà par moi même jouant dans 2 groupes différents au niveau amateur que c’est déjàsouvent très difficile pour les musiciens, alors j’imagine quand on à fait tout ce que lui a fait (tourner avec les plus grands comme Iron Maiden par exemple quand je les ai découverts en 2000, etc…) et se retrouver à tourner comme ça…triste fin
Sûrement sage décision que tu prends Timo 🙂
Long life to the metal!
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Je pense qu’il s’agit là d’une sage décision de sa part.
Il a eu sa période de super créativité où il nous a sorti des chansons fantastiques mais depuis l’aggravation de ses troubles, il était sur une pente descendante très raide.
Profite bien de la vie Timo.
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