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Interview   

Lordi, à la vie, à la mort !


Les Monstres sont-ils immortels ? C’est ce que nous avons tenté de savoir lors de notre rapide rencontre avec Mr. Lordi, à l’occasion de leur nouvelle tournée européenne. Après plus de seize ans de carrière, son gang d’outre-tombe vient défendre son neuvième album : Sexorcism. Un groupe très productif, qui a su rester dans sa veine, fidèle au même état d’esprit depuis ses débuts, défiant les épreuves de la vie, malgré les années qui passent, mais aussi les critiques qui semblent aiguiser son sens de la provocation et son humour plus qu’autre chose.

Changements de line-up, départ d’un monstre pour l’éternité… Mr. Lordi nous raconte sa vie de « fan boy » des 80’s & 90’s et joue volontiers au jeu des préférences. Mais nous parle aussi de son implication et de l’avenir de Lordi. Un avenir plutôt radieux, fait de Kiss, d’amour et de rock n’ roll. Alors : « Would you love a Monsterman ? »

« Ça m’a pris dix ans rien que pour mettre le pied dans cette foutue porte, et je suis comme un putain de chewing-gum dans les cheveux ! Ce groupe ne s’arrêtera jamais jusqu’à ce que je crève ! »

Radio Metal : Comment se sent un monstre après plus de vingt-cinq ans de carrière dont quinze sur les routes et en studio ?

Mr. Lordi (chant) : C’est une bonne chose que tu parles de ça… Les dix premières années de ma carrière, je ne sais pas d’ailleurs si on peut parler de carrière, on peut plus parler d’une obsession, tu peux appeler ça une folie, parce que les dix premières années ont servi à mettre le train en marche. Mais les quinze dernières ont été bonnes ! Moi heureux, moi ok ! Je me sens bien ! [Rires] Et je dois dire que, chaque année qui passe… Quand le premier album est sorti, avant la sortie du deuxième album, des gens disaient déjà : « Oh bon sang, ils font un deuxième album ! C’est bon les gars, on a compris la blague, on a déjà ri à cette blague, arrêtez ! » Donc à chaque année qui passe, je suis de plus en plus heureux de dire : « Allez vous faire foutre ! » J’ai déjà dit il y a quinze ans la chose suivante : « Lordi ne s’arrêtera pas tant que je ne serai pas mort ! » Ça m’a pris dix ans rien que pour mettre le pied dans cette foutue porte, et je suis comme un putain de chewing-gum dans les cheveux ! Ce groupe ne s’arrêtera jamais jusqu’à ce que je crève !

Vous êtes revenu avec un neuvième album en seize ans sur le thème général de l’horreur, où trouves-tu encore les ressources pour écrire ?

Comme toujours, c’est juste que je suis un gros « fan boy » de beaucoup de merdes [petits rires]. Enfin, pas au sens littéral, mais d’un tas de choses. Je prends inspiration dans toutes les choses où j’ai toujours puisé mon inspiration. C’est toujours le même micro-filon qui m’intéresse et ça m’éclate toujours autant ! Ce sont des films d’horreur, ce sont mes groupes préférés : c’est Kiss, Twisted Sister, Alice Cooper, U.D.O., King Diamond, ça me passionne toujours ! Par exemple, le nouvel album, Sexorcism, est une combinaison… Non pas une combinaison, mais le résultat de mon écoute de Creatures Of The Night de Kiss et de mon visionnage des films L’Exorciste et Conjuring. Cet album est ce qu’on obtient quand je regarde ces films et écoute beaucoup Creatures Of The Night. Et si j’ai écouté Creatures Of The Night pendant la création de cet album, c’est parce que Kiss a renfilé ses costumes de la période Creatures Of The Night pour sa dernière tournée. Comme je le disais, je suis un putain de « fan boy », donc toutes ces choses se mélangent de manière bizarre dans ma petite tête, et maintenant c’est sorti et ça s’appelle Sexorcism !

Y a-t-il d’autres albums qui ont été réalisés sur des combinaisons d’idées ?

Ce n’est pas conscient, je n’y pense pas. J’ai juste réalisé, pendant que j’étais en train d’écrire Sexorcism, que si certains accords et certaines lignes harmoniques sont ce qu’ils sont sur cet album, c’est parce que j’ai beaucoup écouté Creatures Of The Night, surtout des chansons comme « Saint And Sinner », « Danger » et « Creatures Of The Night » ; elles ont le même type d’accord. Car j’ai jammé sur ces chansons, en regardant comment les riffs et les accords fonctionnaient. Par exemple, le riff principal de « Sexorcism » est le résultat des jams que j’ai faits sur « Creatures Of The Night » et « Danger » [chante les riffs de guitare]. C’est comme ça que ça se passe.

On sent qu’au fil des années que les albums reflètent souvent l’humeur de l’artiste, comme par exemple la noirceur de l’album To Beast Or Not To Beast après les départs consécutifs d’Awa (claviers) et Kita (batterie), et le décès d’Otus (batterie). Avec Sexorcism, on sent que le groupe va mieux, n’est-ce pas ?

Oui ! La chose marrante est que depuis To Beast Or Not To Beast, c’est le line-up qui a survécu le plus longtemps dans l’histoire de Lordi, ce qui est génial ! Et je ne vois aucun signe m’indiquant que ce ne pourrait pas être l’ultime line-up. Et j’en suis vraiment heureux, comme tout le monde. Enfin ! Après, je ne sais pas, onze membres… Je ne sais pas combien de gens sont passés dans le groupe…

Douze !

Douze ? Merci. C’est beaucoup, c’est trop ! Parce que tu espères toujours que le line-up sera le dernier mais je ne peux pas le décider, et le groupe ne peut pas décider si quelqu’un veut partir, ou si quelqu’un s’avère être un trou-du-cul et doit partir [petits rires]. Tu vois ce que je veux dire ? Mais oui… To Beast Or Not To Beast et Deadache sont les albums que nous avons écrits, ou tout du moins que j’ai écrits dans un [état d’esprit assez sombre]. Je ne suis pas du tout une personne dépressive mais… Par exemple, pendant l’écriture de Deadache, j’ai souffert d’un énorme burn-out, et il est clair que ça s’entend dans ces chansons, au moins au niveau des mélodies. Et « Monster Keep Me Company » est vraiment une chanson qui montre ouvertement comment je me sentais à l’époque. Et pour To Beast Or Not To Beast, c’était évidemment très tourmenté, parce que tout d’un coup deux membres s’en allaient ; c’était la seconde fois en très peu de temps que deux membres quittaient le groupe quasi en même temps, puis deux nouveaux membres sont arrivés, et puis un qui est mort, putain, au milieu de tout ça ! Donc bien sûr que ça influence le résultat. Mais aujourd’hui, pour Sexorcism, la vie est belle, les oiseaux chantent, le soleil brille, Kiss, rock… [Rires].

« J’accepte, j’aime, j’adore, j’idolâtre tous les line-up de Kiss, mais pour moi, pour l’enfant que j’ai été, Kiss est le Kiss des années 80. […] Pour moi, personnellement, et je dis bien personnellement, le line-up de Revenge est le vrai line-up de Kiss. »

Cela fait maintenant six ans et quatre albums que vous tournez avec cette formation, ce qui fait d’elle la formation la plus longue et la plus productive. Avez-vous trouvé votre équilibre avec cette formation ? N’avez-vous pas peur du syndrome Kulick/Carr, où l’histoire retiendrait plus facilement le line-up de The Arockalypse par exemple ?

Explique-moi ce que tu entends par le syndrome de Kulick/Carr.

Les fans de base du groupe te diront que Kiss, c’est Ace Frehley, Peter Criss et basta.

Pas moi ! Pour ma part, j’accepte, j’aime, j’adore, j’idolâtre tous les line-up de Kiss, mais pour moi, pour l’enfant que j’ai été, Kiss est le Kiss des années 80. Pour moi, c’est Bruce Kulick et Eric Carr, puis comme Eric Carr n’est plus de ce monde, c’est Eric Singer. Pour moi, personnellement, et je dis bien personnellement, le line-up de Revenge est le vrai line-up de Kiss. Ça ne veut pas dire que je ne respecte pas Vinnie Vincent ou Ace ou Peter, loin de là. Mais je pense que ça dépend de chacun, d’où tu as posé ton ancre dans l’histoire de Kiss, où tu as eu cette première étincelle pour Kiss (si on parle de Kiss). Mais maintenant je comprends ta question ! Mais pas de souci. Je m’en fous, ils peuvent penser ce qu’ils veulent. C’est un monde libre, on peut bien penser ce qu’on veut. Mais il n’y a strictement aucune chance que nous revenions à un line-up passé.

Depuis le deuxième album, l’écriture a été ouverte aux autres membres, sans exceptions, car même les « nouveaux » membres ont très vite été crédités sur certaines chansons, sans parler de ton acolyte Tracy Lipp. Préfères-tu écrire et composer à plusieurs ? Cherches-tu la diversité sur un album en permettant aux membres d’écrire ou les pousses-tu à proposer de nouvelles choses ?

Excellente question, mec ! J’adore écrire avec tout le monde, mais il se trouve que je vis à neuf cents kilomètres des autres, je vis dans le cercle Arctique, les autres vivent plus au sud, genre vers Helsinki et Tampere. Donc nous avons déjà une distance physique, et je ne suis pas du tout bon avec tous ces trucs sur internet. Je vis encore dans les années 90 avec un fax, je déteste les conneries d’internet. Donc ça fait une barrière technique. Parce qu’on pourrait facilement dire : « Hey, peux-tu m’envoyer ce fichier par mail ? » Je réponds : « Non ! Je n’envoie pas de fichier, putain non. » Bref. Nous avons toujours fait de la composition ensemble, avec les membres du groupe, mais c’est un peu compliqué parce que nous avons différentes manières de composer. Je veux dire que tout le monde compose, et désormais nous avons un système… J’écris tout le temps, j’écris tellement de trucs que nous devons constamment abandonner pas mal de choses. J’écris des chansons complètes, tandis que les autres composent seulement des riffs et des parties mélodiques, et ils m’envoient ça. Ensuite, je compose ces chansons autour de ces riffs qu’ils m’ont envoyés et je les combine avec les miens. Je me dis : « Tiens, Amen a super riff là ! » Alors je le mets dans telle ou telle chanson, et s’il est meilleur que le mien, je remplace. Voilà généralement comment nous composons de nos jours.

Ceci étant dit, sur l’album précédent, on trouve la chanson « Mary Is Dead » qui a été composée par Mana, Amen et moi pendant que nous étions dans le studio de Mana. Cette chanson est donc née d’un jam. C’est sûrement une des seules chansons de Lordi qui soient venues naturellement, juste en jammant. Mais en général, j’écris tellement de choses, des tonnes de choses. Même si pour cet album, je n’ai fait que vingt et une démos, alors qu’habituellement, c’est dans les quarante à soixante par album. Oui, c’est énorme ! Cette fois c’était bizarre. Car je fais par lot de dix chansons, puis je les envoie aux autres, puis je m’occupe d’un autre lot de dix. Mais cette fois, quand j’ai envoyé les dix premières chansons, tout le monde était là : « C’est bon, on a déjà l’album ! Ça suffit ! » Et j’ai dit : « Non, non, non, non, il y a un deuxième lot qui arrive ! » J’ai donc fait le second lot et c’était marrant que parmi les dix premières démos, cinq chansons aient été gardées, puis cinq autres du second lot. Enfin, peut-être pas exactement puisque je ne sais plus combien il y a de chansons sur cet album, peut-être onze ou douze, peu importe. Ce qui était marrant est que c’était du moitié-moitié entre les deux lots de démos. Mais j’ai des tonnes de trucs qui ne seront jamais enregistrés, même en démo.

Tu comptes faire comme Gene Simmons et sortir ton Vault dans vingt ans ?

J’ai calculé qu’à ce stade, nous avons quelque chose comme quatre cents chansons inédites de Lordi. Toutes ne sont pas bonnes, ce n’est pas pour rien qu’elles ne sont pas sur les albums, mais certaines sont pas mal. Toutes ne sont pas merdiques, mais toutes ne sont pas non plus très bonnes. En revanche, pas pour cet album, ni le précédent, mais nous réécoutons souvent les vieilles démos, toutes, en commençant avec celles de Get Heavy, et même avant ça, et nous nous disons : « Est-ce qu’il y a une chanson qui irait bien à cet album que nous sommes en train de faire ? » Nous avons très souvent fait ça, le fait de prendre une chanson datant de cinq ou dix ans, provenant des sessions d’un autre album, pour l’enregistrer pour un nouvel album si ça colle. Par exemple, « Something Wicked This Way Comes » (To Beast Or Not To Beast, 2013) vient de l’époque Get Heavy. « Who’s Your Daddy » (Arockalypse, 2006) vient de la toute première démo de Lordi de 92. Des trucs comme ça.

Maintenant voici des questions sur les années 80. Meilleur groupe des années 80 ?

Bon, on est d’accord qu’on exclut Kiss de cette rubrique ? Car il y a Kiss qui est au-dessus de tout, et puis il y a les autres, que ce soit bien clair [petits rires]. Parce que je ne peux pas être objectif en parlant de Kiss. Le mec en face de moi qui conduit cette interview porte un T-shirt de Kiss, donc il voit de quoi je parle [petits rires]. Donc, pour moi, le deuxième meilleur a toujours été Twisted Sister.

« [Entre un film d’horreur et un film porno,] je choisirais sans conteste le film d’horreur, parce que les meilleurs films pornos se passent en fait dans ma tête. »

Meilleur album, ou celui qui représente le plus les années 80 ?

Trash d’Alice Cooper, même si ce n’est pas mon album préféré d’Alice Cooper. Mon préféré est Hey Stoopid, mais il est sorti dans les années 90.

Meilleur film des années 80 ?

E.T. ! Mon film préféré de tous les temps.

Meilleure chanson des années 80 ?

Oh, la meilleure chanson… Merde, mec, il y en a tellement ! Bon sang… D’accord, voyons… Ce ne sera pas forcément la même réponse si tu me reposais la question dans deux heures, ou même dans quinze minutes, mais je pourrais dire, par exemple… Les meilleures chansons des années 80 qui me viennent à l’esprit là tout de suite, ce sont : « Me Againt The World » de Lizzy Borden, « The Family Ghost » de King Diamond, « Monsterman » d’Accept… Oh ouais, le premier putain d’album d’U.D.O. « Not For The Innocent », oh pardon, on a dit qu’on excluait Kiss. « Love Is For Suckers » de Twisted Sisters. « Does Anybody Really Fall In Love Anymore » de Kane Roberts. « Life And Death Of The Party » d’Alice Cooper. Putain, cette liste est sans fin ! Je n’arrive pas à choisir.

Passons maintenant aux choix impossibles : Kiss ou Twisted Sister ?

Kiss.

Pepsi ou Dr. Pepper ?

Pepsi.

Pizza ou hamburger ?

[Hésitation] Bur… izza !

Freddy Krueger ou Michael Myers ?

Freddy. Putain, allez quand même!

Game Of Thrones ou Stranger Things ?

Je n’ai pas du tout aimé Game Of Thrones. J’ai regardé la première saison et je me suis dit : « Bordel, mais c’est quoi cette série ? » J’ai vu Stranger Things, et tout le monde me disait : « Mec, tu vas adorer ! » Et je vais être honnête, c’est correct, mais je ne suis pas là « wouhou », comme un dingue de cette série. Peut-être que mes amis m’en ont trop fait la publicité et ont trop essayé de me vendre cette série, parce que du coup je n’ai pas trop compris l’engouement, pourquoi c’était censé être ma nouvelle série préférée ? Ça va, elle est pas mal, mais je préfère largement, par exemple, GLOW, sur le catch. Mais je vais dire Stranger Things parce que Game Of Thrones ne m’a pas du tout branché.

Theaterror ou Demonarchy ?

Demonarchy, clairement.

Film d’horreur ou film porno ?

Oh… Eh bien, si c’est un bon film porno, alors porno. Mais je choisirais sans conteste le film d’horreur, parce que les meilleurs films pornos se passent en fait dans ma tête.

Lovecraft ou Stephen King ?

Je dois dire Stephen King.

Scary Movie ou Wayne’s World ?

Les deux sont assez merdiques. Mais Wayne’s World.

Alive!, Alive II, Alive III ou Alive IV ?

Oh putain mec, va te faire foutre ! [Rires] Alive II ! A cause des morceaux studio et aussi parce qu’il y a « God Of Thunder » et un tas de chansons que j’adore. Je vais te dire quelque chose, l’autre jour j’ai dit à Mana, ou je ne sais plus qui, qu’Alive! m’a toujours paru un peu « eh ? » Alors qu’Alive II est vraiment énorme. C’est un album nostalgique pour moi. Alive III est encore meilleur, il est vraiment cool. Mais si je devais choisir, ce serait clairement Alive II.

Pour finir, il paraît qu’à Halloween, tu t’habilles en être humain…

Ouais, c’est vrai [rires]. D’ailleurs, il y avait une fête d’Halloween, il y a trois ou quatre ans, je pense, et c’était la toute première fête d’Halloween où j’ai été costumé, et j’étais déguisé en Kim Jong-un [rires démoniaques].

Interview réalisée en face à face le 19 octobre 2018 par Quentin Jarod.
Transcription et traduction : Quentin Jarod.

Site officiel de Lordi : www.lordi.fi

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