Évincé du groupe en février 2013, peu de temps avant que Machine Head signe un nouveau (et premier) contrat chez Nuclear Blast pour un nouvel album, Adam Duce, le désormais ex-bassiste des Californiens, a décidé, au 15 janvier dernier, d’engager des poursuites judiciaires contre ses anciens collègues, les menant devant les tribunaux.
En effet, le musicien a chargé, tête baissée, le reste du groupe et son management. Sont invoquées par le bassiste, entre autres, l’atteinte à la marque [ndlr : Head Machine Touring Inc.] et la violation d’un accord de partenariat. Et (par dessus tout), Adam Duce n’hésite pas à poursuivre ses ex-collègues pour diffamation et négligence. D’après le site Courthouse News, rapportant les dires de Duce, il a été exclu du groupe « après avoir mis 21 ans de sa vie en ce dernier » afin de permettre aux autres membres du groupe d’engranger de plus gros profits. Profits ? Comme il fallait le flairer, c’est malheureusement une nouvelle histoire financière qui vient ternir les rapports entre musiciens, qui s’en seraient sans doute bien passé.
Pourtant, à l’époque, Rob Flynn, dans sa lettre expliquant le renvoi du bassiste (lettre jugée diffamatoire par ce dernier car contenant de fausses déclarations tendant à lui nuire, à lui et à sa réputation. Il conteste donc la véracité des faits, non vérifiés, et nie à Flynn la légitimité pour faire ces déclarations), avouait que cette solution était devenue inévitable tant Duce n’avait plus goût à la vie de groupe depuis plus d’une décennie et, toujours selon ses dires, n’aurait jamais quitté Machine Head de lui-même car cela aurait été pour lui synonyme d’échec. Mais selon l’autre co-fondateur de Machine Head, s’il a bel et bien été viré ce n’est pas pour les raisons évoquées comme cela a été rapporté devant le tribunal : « Machine Head a exclu le bassiste et co-fondateur du groupe Adam Duce quelques temps avant la signature d’un nouveau contrat d’enregistrement et a alors faussement prétendu qu’il avait quitté le groupe de metal parce qu’il ‘en aurait eu marre' » Et donc, selon Duce, il a « tout bonnement été éjecté du groupe » et il accuse ses anciens camarades de s’être « imaginé qu’il oublierait plus de deux décennies de dur labeur, de dévouement et d’efforts pour le groupe. »
Enfin, voilà, en substance, les raisons plus matérielles que morales ayant mené Duce devant un juge : « Après avoir reçu très peu de compensations malgré les millions que le groupe engrangeait, le plaignant [Adam Duce] a demandé à examiner les comptes des tournées. Le plaignant a constaté que Joseph W. Huston [manager du groupe], Flynn et la PFM [Provident Financial Management] avaient dilapidé l’argent tout au long du voyage sans consulter le plaignant pour la grande majorité des ‘dépenses’. [..] En dépit de l’augmentation de leur chiffre d’affaire, de leur popularité et des tournées, [Duce] s’est inquiété du peu de revenus qu’il recevait malgré son temps et son travail acharné pour le développement du groupe. […] Bien qu’il ait exprimé ses préoccupations à Flynn, Huston et à la PFM, [Duce] n’a jamais reçu de réponses satisfaisantes. »
A en croire les dires d’Adam Duce, ce dernier aurait été lésé (comme à chaque fois qu’un artiste poursuit en justice ses ex-collègues) financièrement et le serait encore, notamment par l’utilisation de son image pour la promotion du groupe, comme sur le site internet de Machine Head (actuellement en reconstruction) mais aussi par l’utilisation de la marque Machine Head, dont il fait partie à 25% : « Le groupe continue d’utiliser la marque Machine Head pour des enregistrements, des lives et du merchandising, et se produit en tant que Machine Head, alors que le public associe Machine Head à ‘avec Adam Duce jouant de la basse et chantant les chœurs, comme il l’a fait pendant plus de vingt ans' »
Pourtant, sur le thème des « aléas financiers » de la vie d’un groupe, Rob Flynn dans sa lettre ouverte soulignait une chose essentielle : « Être dans un groupe est dur […] C’est le plus dur des putains de trucs que tu auras à affronter dans ta vie, et ça te pourrira l’existence pendant 80% du temps. Cela ressemble souvent à une grande montagne russe, la plus haute et la plus basse d’entre toutes. Il y a des gains et des pertes tous les jours. Être dans un groupe est l’un des plus grands jeux de hasard. Mais quand tu gagnes, quand tu gagnes ces 20%, eh bien… c’est vraiment le salut. C’est ce qui rend le fait de bouffer le sandwich de merde des 80% restants supportable. C’est de là que « ces » histoires viennent. Cela peut être le meilleur boulot que tu aies jamais eu mais, sans conteste, l’un des plus durs que tu aies jamais fait. »
Si ces deux-là sont coutumiers des prises de bec (comme en 2009), il est toutefois regrettable que ce coup-ci, la nouvelle étape se joue devant les tribunaux. Car les histoires juridiques « intra-groupaux » se révèlent souvent être des chamailleries où tout est bon pour taper, titiller et soutirer de l’argent à autrui. Un peu comme ce couple qui, malgré la tristesse de leur séparation, s’enterrera dans des procédures judiciaires pour un simple bout de mobilier. Car quand Duce allègue que Nuclear Blast, Flynn et Huston « ont injustement et volontairement conspiré pour l’expulser et n’expulser que lui du groupe avant de signer le nouveau contrat dans une tentative de l’empêcher de jouir des bénéfices du nouveau contrat d’enregistrement », et ont ensuite « directement attaqué le plaignant sur son éthique de travail », cela va sans dire qu’au-delà des procédures inévitables (le fait qu’aux États-Unis les groupes soient soumis aux mêmes lois que les entreprises, et soient d’ailleurs jugés comme tel, implique nécessairement la présence d’avocats au milieu d’une séparation), la carriole est un peu chargée à outrance et sert de cible subitement facile. Cela aurait tellement pu finir autrement et mieux… En attendant, Machine Head devrait bel et bien faire son retour en studio dès la première semaine de février, mais pas sans cette épine dans le pied.
Je me disais bien à l’époque que l’évincement d’Adam Duce comme ça vite fait n’allait pas être sans problèmes…