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Interview   

Le manifeste de Watain


« Je veux être capable de communiquer avec les gens, nous avons des choses à dire, ce n’est pas qu’une question d’obscurité ineffable » : venant d’un groupe à l’ésotérisme aussi revendiqué que Watain, le propos aurait de quoi surprendre. Il faut dire que les Suédois se sont fait une place dans la scène black metal grâce à leur sens de l’atmosphère et leur agressivité mélodique à la Dissection certes, mais aussi grâce à leur imagerie ténébreuse et leur satanisme professé. Auraient-ils, après près de vingt-cinq ans d’existence, mis de l’eau dans leur vin (de messe) ? Ce n’est pas de ça qu’il est question, nous explique Erik Danielsson, chanteur, bassiste et compositeur principal du groupe : son septième album, The Agony & Ecstasy Of Watain, propose du Watain dans son essence la plus pure et n’a absolument rien à cacher.

Aimable et loquace, Danielsson nous répond avec franchise en sirotant un verre de vin : de la genèse de ce dernier album au style de vie des musiciens en temps de pandémie, il évoque son histoire et sa manière d’appréhender son art. Et il s’agit toujours finalement de définir, redéfinir et expliciter ce qu’est l’entité Watain…

« Le live, ça n’a rien à voir, c’est de l’ordre de la libération totale, de l’extase, de la possession, un tourbillon de force et d’énergie. Le studio, ça ressemble plutôt à de la magie, c’est comme élaborer un sort, c’est une approche plutôt rituelle de la musique. […] Rien ne remplace les concerts, à part peut-être mourir, mais comme je ne l’ai pas encore fait… »

Radio Metal : Ces dernières années ont été difficiles pour tout le monde, notamment les musiciens qui jouent live. Pour un groupe comme le tien, pour lequel les concerts semblent si importants, comment ça a été de ne pas pouvoir jouer pendant si longtemps ?

Erik Danielsson (chant & basse) : Ça a été assez fantastique, à vrai dire [rires]. Je vis comme un nomade depuis que j’ai seize ans, je n’ai jamais passé un été entier chez moi depuis cette époque-là, par exemple. J’ai trouvé ça très bon pour l’inspiration et la créativité d’avoir l’occasion de tout mettre sur pause pendant un moment et de se concentrer sur le groupe et notre vie ici. Nous vivons tous dans les bois, dans un petit village. Nous avons donc eu le temps de nous occuper de certaines situations, de nous débarrasser de certains problèmes, et de passer un peu de temps seuls à nous poser des questions importantes auxquelles nous n’avions peut-être pas eu le temps de réfléchir lorsque nous voyagions en permanence. Je crois que ça nous a fait du bien, honnêtement. Ça nous a aidés du point de vue créatif, l’album en est un très bon exemple.

Vous avez sorti quelques chansons depuis Trident Wolf Eclipse, notamment une cassette intitulée Corona Mortis que vous avez enregistrée et sortie vous-mêmes, de façon complètement DIY. C’était comment de revenir à une manière aussi directe de faire de la musique, en dehors de gros labels, etc. ?

Nous avons toujours aimé cette approche, c’est celle que nous avons toujours eue. Nous nous y sommes tenus tout au long de notre carrière de bien des façons, mais en ce qui concerne le fait de sortir de la musique en particulier, je crois que ça nous manquait un peu, cette communication directe avec les gens qui veulent acheter quelque chose, préparer les enveloppes, les timbrer, faire des flyers… C’est quelque chose qui nous tient vraiment à cœur, mais que nous n’avons pas le temps de faire lorsque nous passons notre temps en tournée et à d’autres activités. Nous avons fait ce projet pour couvrir certains frais que nous avons eus au début de la pandémie. C’était une chouette manière de continuer à avoir un peu d’activité alors que nous nous retrouvions et commencions à prendre conscience qu’il était temps de nous remettre à composer de nouvelles chansons.

Vous avez enregistré l’album avec Tore Stjerna, un collaborateur de longue date du groupe. Vous l’avez fait dans son studio, qui est une ancienne église, et vous l’avez enregistré live. Est-ce que cet endroit et cette manière de faire vous tenaient particulièrement à cœur ?

Oui. Nous avons toujours été très conscients du fait que nous voulons un environnement approprié lorsque nous créons. Notre salle de répétition ressemble à notre mise en scène de concert ; nos lieux de vie, où nous écrivons et composons beaucoup de notre musique, ressemblent aussi à l’enfer [petit rire]. J’aime être entouré de choses qui me parlent d’un point de vue créatif. Le studio est peut-être l’endroit le plus important, c’est vraiment là que nous peaufinons les chansons et leur donnons leur forme finale. Évidemment, il faut que ce soit un lieu inspirant, selon moi en tout cas. Nous avons eu la chance de pouvoir transformer cette vieille église en le genre d’espace où ce type d’album doit être enregistré. C’est ce que nous avons fait et c’était fantastique. Je ne voulais plus partir, je voulais juste rester là-bas. En plus de ça, enregistrer live, ce qui était une nouvelle façon de faire pour nous, dans ce genre d’environnement, tous ensemble dans le même espace avec l’église entière éclairée à la bougie… C’était très intense, il y avait cette impression d’urgence et d’intensité qui était parfaite pour ce que nous allions enregistrer.

Est-ce que c’était une façon de retrouver l’ambiance des concerts à un moment où vous ne pouviez pas en faire ?

Je crois qu’il reste une grande différence entre le studio, les répétitions et les concerts. Le live, ça n’a rien à voir, c’est de l’ordre de la libération totale, de l’extase, de la possession, un tourbillon de force et d’énergie. Le studio, ça ressemble plutôt à de la magie, c’est comme élaborer un sort, c’est une approche plutôt rituelle de la musique. Ce sont deux faces différentes. Je les aime toutes les deux et elles se complètent. Mais je n’irais pas jusqu’à dire qu’enregistrer live était un substitut des concerts, parce que rien ne remplace les concerts. Je ne crois pas, à part peut-être mourir, mais comme je ne l’ai pas encore fait…

« Le feu de Watain brûle toujours, lent et fort et violent et solennel et agité et sauvage. Il a toutes ces qualités à la fois qui continuent à évoluer. Même si nos propres destins personnels sont individuels, et pas liés directement à Watain, Watain sera toujours notre centre. »

Vous travaillez avec Tore depuis toujours. Est-ce que c’est important pour vous de vous entourer de personnes que vous connaissez bien et qui savent comment vous travaillez ? Comment cette collaboration a-t-elle évolué au fil des années ?

Oui, c’est important pour moi de travailler avec des gens qui nous connaissent bien. Watain est un groupe assez étrange, particulier de bien des manières, il a besoin qu’on comprenne et connaisse bien de quoi il en retourne. Ce n’est pas simplement une histoire de musique et des autres choses normales que font tous les gens qui sont dans des groupes, il y a plus, il y a un objectif plus élevé, plus sacré et plus puissant derrière tout ce que nous faisons. Ça prendrait très longtemps de faire en sorte que quelqu’un d’autre comprenne ça suffisamment bien pour que nous puissions travailler ensemble en studio, or le temps qui nous y est alloué est toujours limité. Quoi que tu fasses, ça finit toujours par être assez stressant, donc je n’ai pas envie de perdre deux semaines à faire la connaissance d’une nouvelle personne. Je préfère travailler avec quelqu’un qui nous connaît depuis le début. N’importe qui d’autre serait un peu une perte de temps pour nous. Je considère que travailler avec quelqu’un depuis aussi longtemps, c’est un grand privilège. Une collaboration longue permet de se connaître de mieux en mieux, de comprendre la créativité de l’autre, d’avoir conscience d’un passé créatif en commun, ce qui a énormément de valeur. Imagine si nous devions travailler avec quelqu’un qui ne sait pas trop ce que nous avons fait par le passé, ou quels sont nos talents musicaux exactement. Ce serait bizarre, ça n’aurait aucun sens. Je crois que nous avons beaucoup de chance de pouvoir bénéficier d’une aussi longue collaboration.

J’aurais pu te poser la même question au sujet de Watain : vous êtes le même trio depuis le début et vous jouez plus ou moins avec les mêmes personnes depuis des années en live. Comment vous avez grandi ensemble, d’adolescents à musiciens expérimentés ?

Nous nous sommes rencontrés il y a vingt-cinq ans, il y a longtemps… Håkan, Pelle et moi qui formons le groupe, nous considérons toujours cette trinité comme quelque chose de central pour Watain. Nous honorons cette communauté créative qu’il y a entre nous à ce jour, et je crois que ce sera toujours le cas. Bien sûr, nos vies changent, mais ce qui est intéressant, c’est que nous avons tous évolué certes, mais tous autour de ce feu qu’est Watain. D’autres gens se réunissent avec nous autour du feu depuis leur propre coin du monde et leur propre coin de la nuit, ils nourrissent le feu avec leur propre carburant, leurs propres qualités particulières. C’est pourquoi le feu de Watain brûle toujours, lent et fort et violent et solennel et agité et sauvage. Il a toutes ces qualités à la fois qui continuent à évoluer. Même si nos propres destins personnels sont individuels, et pas liés directement à Watain, Watain sera toujours notre centre, d’une certaine manière. C’est pour cela que nous avons aussi beaucoup de respect et d’humilité pour ça, nous le considérons comme quelque chose de sacré.

Est-ce que les autres, Håkan et Pelle, composent ou participent à l’écriture des paroles ?

J’écris les paroles du début à la fin. Parfois, nous discutons du titre des chansons, par exemple, mais les paroles, c’est mon truc, c’est ce que je fais. Sur cet album, je ne joue d’aucun instrument, ce qui était une raison supplémentaire pour que j’écrive toutes les paroles. En ce qui concerne la musique, c’est un peu différent, mais disons que j’en compose la majorité aussi, peut-être quatre-vingt-quinze pour cent.

Cet album est présenté – au moins à la presse – avec un manifeste, quasiment un avertissement. C’est la première fois que vous faites ça. Pourquoi as-tu pensé que c’était le moment de déclarer vos intentions de manière aussi claire ?

Parce que j’en ai marre d’être mal compris. J’en ai marre qu’on déforme mes propos, et j’en ai marre des soupçons infondés. Je veux que ce que veut Watain et ce que nous sommes là pour incarner soit un peu plus clair. J’aimerais que plus de groupes le fassent, pour être honnête, j’aimerais que plus de groupes soient en mesure de proclamer leurs intentions au-delà de faire de l’argent, s’occuper, et travailler. J’aimerais que plus de groupes aient une idée de ce qu’ils foutent là, à la base. C’était mon intention avec ce manifeste. Je crois que l’idée vient du fait que j’ai toujours été un grand fan de la musique noise et industrielle qui a émergé en Europe au début des années 1980, ça me fascine. C’était très underground, discordant, radical et controversé au point que de nos jours, les gens n’en pourraient plus s’ils en avaient connaissance. Les gens avaient vraiment envie de s’exprimer par des moyens très radicaux. Ils écrivaient souvent ce genre de manifestes, c’était vraiment quelque chose, dans cette scène. Je crois que ça a été l’une de mes motivations pour prendre mon stylo et écrire ce texte. Et puis j’adore écrire, surtout autour de la création d’un album, j’écris toujours comme un dingue à ce moment-là. Donc j’avais beaucoup de notes qu’il faisait sens de rassembler. J’y ai travaillé un peu et c’est devenu un manifeste. Je suis content qu’il existe.

« J’en ai marre d’être mal compris. J’en ai marre qu’on déforme mes propos, et j’en ai marre des soupçons infondés. Je veux que ce que veut Watain et ce que nous sommes là pour incarner soit un peu plus clair. J’aimerais que plus de groupes le fassent, pour être honnête, j’aimerais que plus de groupes aient une idée de ce qu’ils foutent là, à la base. »

C’est peut-être une coïncidence, mais des chansons comme « Leper’s Grace » ou « Septentrion » ont des paroles qui sont elles aussi très directes et qui peuvent aussi tenir du manifeste. Est-ce que tu as l’impression que tu n’as plus besoin d’utiliser autant de symbolisme qu’avant, ou que tu as peut-être besoin d’être parfois un peu plus direct ?

Je n’ai jamais discuté de « Leper’s Grace » avec qui que ce soit jusqu’à maintenant, tu es la première à la mentionner, merci. Pour moi, ce sont des paroles super importantes dans l’album. Je crois que c’est parce que je déteste que les gens se cachent derrière un voile de symbolisme. Attention, j’aime quand il y a du mystère autour d’un groupe, je pense que l’obscurité et le mystère font partie des ingrédients les plus importants dans le metal en général, à mes yeux en tout cas. Mais je pense que c’est aussi important d’être capable de parler franchement et d’être très direct parce que ça permet aux gens d’appréhender un groupe de manière beaucoup plus personnelle. Je veux être capable de communiquer avec les gens, nous avons des choses à dire, ce n’est pas qu’une question d’obscurité ineffable. Il a des choses très concrètes dans cette obscurité que nous avons toujours chantées et auxquelles une voix doit être donnée. Si ce n’était pas le cas, ce ne serait qu’une comédie, du théâtre en quelque sorte. Je crois que c’est ça que je voulais dire avec cette chanson et avec « Septentrion » aussi : parfois il faut être un peu direct, tu ne peux pas te cacher en permanence. Sinon, les gens pourraient s’imaginer que tu te caches derrière quelque chose. Je ne suis pas ce genre d’artiste et je ne veux pas être perçu comme tel.

Sur la chanson « We Remain », il y a Farida Lemouchi (ex-The Devil’s Blood, Molassess) et Gottfrid Åhman (ex-In Solitude, PÅGÅ) en invités. C’est comme si c’était 2012 à nouveau ! La dernière fois que nous avions discuté, tu t’en souvenais comme d’une période très importante pour vous. Est-ce que cette chanson est une sorte d’hommage à ce moment, ou peut-être une manière de le ressusciter ?

Je crois que tu mets le doigt exactement sur l’une des raisons qui font qu’ils sont là. C’est clairement un hommage à peut-être pas cette période, mais en tout cas à cette communion triangulaire qui a existé pendant quelques années sur cette terre entre ces trois groupes, Watain, In Solitude et The Devil’s Blood. Elle existe toujours, plutôt sous la forme d’une amitié qui existera jusqu’à notre mort. J’ai écrit plus de la moitié de « We Remain » en 2012, pendant la tournée avec The Devil’s Blood et In Solitude aux États-Unis en avril. L’une des raisons qui expliquent qu’ils apparaissent sur cette chanson, c’est qu’elle vient de la magie de cette époque. J’étais très inspiré, j’écrivais beaucoup et certaines des choses que j’ai écrites à ce moment-là font partie de mes favorites. J’ai gardé ces paroles pendant si longtemps… J’ai enfin eu une illumination sensorielle une nuit il y a à peu près un an et je suis enfin parvenu à la terminer. Peu après, j’ai eu l’idée de demander à Farida d’y participer, et il me semble que Gottfrid est arrivé peu de temps après. Elle est venue pour un week-end fin août dernier pour faire ses parties et nous avons passé des moments fantastiques avec elle ici. C’était vraiment bien de se revoir à nouveau après des années.

Les paroles à la fin de « Before The Cataclysm » – c’est-à-dire qui précèdent immédiatement « We Remain » – sont très proches de celles de « The Yonder Beckons » de The Devil’s Blood, que tu as toi-même écrites. Est-ce que c’était intentionnel ou est-ce que c’est trop y lire ?

Je crois que tu as très bien lu et j’espère que d’autres le feront aussi, parce que c’est comme ça que j’espère que mes paroles seront lues en général. J’espère que les auditeurs les lisent dans le détail parce qu’elles sont remplies de choses comme ça destinées à ceux qui veulent explorer un peu plus avant. Mais oui, exactement, Selim [Lemouchi] est arrivé à la fin de « Before The Cataclysm » pour voler la vedette, comme il le faisait souvent dans la vie. Il l’a fait de manière très belle et c’est une allusion très claire à cette chanson. Ça donne l’impression de la fin d’une ère et de la fin d’une vie, ce qui est en gros le sujet de la chanson. Ensuite, « We Remain » commence, l’album continue, et on découvre que ce n’est pas si simple, qu’on ne meurt pas tout simplement et qu’ensuite plus rien ne se passe. Je ne souscris pas à cette idée barbante. J’ai un système de pensée bien plus élaboré à ce sujet. Mais oui, il y a bien des allusions à The Devil’s Blood dans cette chanson.

Est-ce qu’il y a des groupes actuels avec lesquels tu ressens le même genre d’affinités ?

Pas de la même manière qu’avec The Devil’s Blood et In Solitude. Je crois que chaque relation est unique, d’une certaine façon ; elles se produisent pour des raisons différentes. Ces choses vont et viennent, c’est aussi ça qui fait leur beauté. Il y a des courants qui submergent le monde. Pendant l’espace d’un moment, c’est comme faire l’expérience d’un raz-de-marée ou d’une vague d’énergie, puis cette vague défile et te reste l’impression d’avoir pris part à un rêve ou un mythe. C’est un peu ce que veulent dire les paroles de « We Remain », aussi, comment s’approprier les choses du passé, ce qu’on en garde, ce qui s’est réellement passé.

« Je n’ai jamais dit que je dis la vérité ou une forme de réalité définie. Je parle en langues et je parle dans mon sommeil. »

Par ailleurs, tu as été batteur dans un groupe, No Future, avec entre autres les frères Åhman d’In Solitude. Est-ce que c’est toujours à l’ordre du jour ?

Absolument, mais nous n’avons rien fait ensemble depuis cinq ans. No Future est un peu un mystère, une sorte d’énigme, et c’est ce qui nous plaît là-dedans. Nous ne faisons des choses que quand c’est le bon moment et que les étoiles sont alignées. Mais il y a beaucoup de magie et de créativité dans cette combinaison de personnes. Je crois que personne n’a envie d’abandonner ça, mais tout le monde a aussi ses propres projets. Les frères Åhman sont en pleines aventures musicales fantastiques en ce moment, et Lukas [« Spine » Häger] et Olof [« Crakk » Stolt] viennent de sortir un nouvel album avec Reveal!… Mais il y a un futur pour No Future, c’est certain.

Le titre de l’album, The Agony & Ecstasy Of Watain, suggère une dualité. Est-ce que tu vois ces deux éléments comme des opposés ou comme deux faces d’une même pièce ?

Je ne suis pas sûr que je les voie comme des opposés, mais d’une certaine manière, dans le titre, c’est un peu ce qu’ils représentent. Je voulais suggérer que Watain a ces deux côtés, et que ces deux côtés contribuent à une friction ou une sorte de charge magique qui permet à la magie et à la musique de se produire. Pour moi, dans le titre, « agony » (« douleur extrême ») représente la souffrance humaine, les pensées existentielles, la mort et l’obscurité profonde. De l’autre côté, « ecstasy » (« extase ») représente les pics de créativité, l’inspiration divine, les moments de possession ou de transe, où la différence entre joie et folie n’existe plus. Je ne dirais pas que ce sont des opposés, mais ce sont les pôles d’un spectre émotionnel que contient Watain. Les deux sont partout dans l’album et dans Watain. Ce sont des éléments très importants, je voulais donc un titre qui soit le plus clair et représentatif du contenu de l’album possible. En plus, j’adore les titres d’albums épiques et je ne pouvais pas résister à quelque chose comme ça [rires].

Tu as déclaré que « The Howling » évoque « la voix qui nous incite à de grandes actions, nous attire sur des voies interdites de connaissance, crime, extase, transgression ». Tu penses que toutes ces choses sont liées ?

Dans ce cas, ça fait sens de les mettre ensemble dans le même contexte parce que je parle de la voix que nous avons tous entendue mais que nous avons peut-être un peu évitée, ou dont nous nous sommes cachés. En gros, ça parle de faire un pas ou non en dehors de sa zone de confort, en dehors des limites de ce qui est considéré juste, convenable, moralement correct ou légal, d’ailleurs. C’était mon intention lorsque j’ai écrit cette petite chose à propos de « The Howling ». Bien sûr, toutes ces choses que j’ai écrites sont aussi séparées à leur façon, on peut les appréhender de bien des manières différentes. Je crois que tu vois ce que je veux dire, c’est vraiment à propos de la voix qui t’attire vers ce qui est interdit. Peut-être que l’interdit aurait été une manière plus simple de le résumer.

Dans tes paroles, pas seulement dans cet album mais de manière plus générale dans Watain, tu dis souvent que la vie est un rêve ou une intermission, il y a toujours l’idée qu’il y a quelque chose de plus réel derrière, comme dans le gnosticisme. Est-ce quelque chose qui te parle ?

Les paroles sont de vagues idées et émotions dans lesquelles sont mêlées des étincelles de vérité absolue. Mais ce n’est pas l’un ou l’autre, elles sont peut-être des réflexions, ou mêmes des questions. Je ne prétends pas savoir quoi que ce soit mais souvent quand j’écris, je ressens des choses très fortes, je suis bouleversé par des notions qui me viennent à ce moment-là. C’est aussi ce qui me plaît dans le fait d’écrire des paroles, un vers n’a pas à prendre en compte tous les aspects de toi-même ou de la vérité universelle, il peut être concentré sur une seule émotion qui devient souveraine sur toutes les autres. Ce n’est plus que cette seule chose. Ça devient un test, un examen d’une certaine idée depuis un certain point de vue. Ensuite, lorsque c’est pris en dehors de cette singularité et placé dans un contexte où toutes les choses connues sont prises en considération, comme l’état dans lequel est celui ou celle qui écoute par exemple, quiconque lit les paroles le fera à partir de sa propre perspective. C’est là que ça devient intéressant, brillant et radical, et que ça te fait vraiment questionner les choses. Mais je n’ai jamais dit que je dis la vérité ou une forme de réalité définie. Je parle en langues et je parle dans mon sommeil.

Qu’est-ce qui va suivre pour le groupe ? Vous avez une tournée prévue aux États-Unis avec Mayhem. Tout est encore assez hypothétique en ce moment…

C’est de moins en moins hypothétique, à vrai dire. On dirait bien que nous allons faire cette tournée. Nous avons quelques amis d’autres groupes qui y sont allés récemment, et ça fonctionne. C’est un peu différent, mais ça marche. Nous allons faire la tournée avec Mayhem et ensuite, nous ferons quelques festivals après la sortie de l’album le 29 avril. Nous avons quelques festivals de prévus, dont le Hellfest. En septembre, nous ferons une tournée européenne, ce qui sera fantastique. Maintenant, nous retournons au front, c’est comme ça. Que ça vous plaise ou pas, nous sommes de retour [rires] !

Interview réalisée par téléphone le 8 février 2022 par Chloé Perrin.
Retranscription : Emilie Bardalou.
Traduction : Chloé Perrin.
Photos : Evelina Szczesik.

Facebook officiel de Watain : www.facebook.com/watainofficial

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