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Interview   

Marillion n’a pas froid aux yeux


Steve Hogarth - photo by Freddy BillqvistLe chanteur Steve Hogarth, en tant que Britannique, est visiblement touché par la trajectoire qu’emprunte son pays depuis plusieurs années, le voyant petit à petit s’éloigner de l’idéal qu’il s’en faisait et de ses valeurs, paralysé, selon lui, par la peur. F.E.A.R. (« peur » en anglais), acronyme aux premiers abords provoquant de Fuck Everyone And Run (« Envoie chier tout le monde et fuis »), dont il nous explique le sens et le message ci-après, est justement le titre du nouvel album de Marillion, dans lequel il laisse une large place à ses inquiétudes et critiques socio-politiques. Et même lorsque ça ne touche pas ce genre de sujet, on devine tout de même une forme d’angoisse sous-jacente à d’autres thèmes, comme les au revoir constants de la vie sur la route.

En résulte un album grave, constitué de cinq chansons, dont trois pièces fleuves de plus d’un quart d’heure chacune. Ainsi, il nous explique non seulement ce qu’il avait à exprimer et pourquoi il avait tant à dire, mais également comment, en partant d’improvisations, le groupe en est arrivé à assembler ces longs morceaux découpés en chapitres, se fichant éperdument de toute considération commerciale.

Marillion - photo by Freddy Billqvis

« Si tu es fidèle à toi-même, si ça se vend, super, si ça ne se vend pas, tant pis. Mais si tu n’es pas fidèle à toi-même et que ça ne se vend pas, alors tu es vraiment un con, parce que tu as créé quelque chose que tu n’aimes même pas toi-même et que personne d’autre n’aime [rires]. »

Radio Metal : F.E.A.R. comprend une majorité de très longues chansons, qui durent plus de quinze minutes. Qu’est-ce qui vous a poussés, d’un point de vue créatif, à développer ces énormes chansons ?

Steve Hogarth (chant) : Nous écrivons en jammant. Nous avons toujours fait cela. A la vieille époque, nous jammions et enregistrions sur une stéréo. Maintenant nous jammons et enregistrons via ProTools en multipistes. Nous faisons cela pendant des semaines et des mois, et les jams deviennent cette énorme source de musique. Notre producteur jette ensuite une oreille aux jams, et cherche de petits accidents heureux où quelque chose d’intéressant se passe. Il a créé une énorme bibliothèque privée dans Soundclound, nous écoutions tous et mettions nos trucs préférés dans des dossiers, et les chansons étaient ensuite écrites à partir de ça. Voilà donc comment nous fonctionnons. C’est très lent. J’avais beaucoup à dire sur cet album, j’avais beaucoup de paroles, et donc les chansons s’allongeaient sans cesse pour s’accorder avec ce que j’avais à dire. J’avais écrit beaucoup de paroles, il y avait aussi pas mal d’idées musicales très différentes et donc les paroles et chapitres musicaux ont été arrangés ensemble. Donc contrairement à ce que tu pourrais considérer être une structure de chanson contemporaine, où tu as des couplets et des refrains et un [pont] au milieu, c’est plus comme de la musique classique dans un sens, parce que ça commence avec un thème, ensuite ça part ailleurs, et ailleurs, et encore ailleurs… Et la seule continuité qu’il y a ce sont les paroles et l’idée de la chanson. Donc la réponse courte, c’est que j’avais beaucoup de paroles, donc les chansons devaient être longues.

Votre album précédent, Sounds That Can’t Be Made, comprend aussi des chansons assez longues. N’est-ce pas ironique que juste avant de faire des chansons parmi les plus longues que vous ayez jamais faites, vous aviez un album acoustique qui s’appelait Less Is More ?

[Rires] Je suppose que c’était déjà dans le titre, en un sens. L’idée de faire l’album acoustique, c’était juste de nous accorder une pause dans la composition, pour être honnête. Et nous pensions que nous nous amuserions simplement avec notre propre musique en essayant de la réécrire, réarranger différentes chansons, différents accords. C’était aussi l’occasion de remettre d’aplomb quelques trucs que nous ne sentions pas comme il faut dès le début. Il y a une chanson intitulée “Interior Lulu” dont nous n’avons jamais été vraiment contents. Donc c’était l’occasion de revenir là-dessus, et de la réécrire, de dire : « OK, voilà une autre version de cette chanson, dont nous sommes davantage satisfaits. » Et nous avons fait la même chose avec “Hard As Love” de Brave et, en fait, je préfère la version acoustique, j’aime les accords de piano, c’est beaucoup plus intéressant. Mais ouais, nous l’avons appelé Less Is More parce que nous voulions tout épurer, ce qui est assez inhabituel pour nous. Normalement, notre musique est plutôt dense.

N’est-ce pas un risque, de nos jours, avec la capacité de concentration très courte qu’ont les gens aujourd’hui, de sortir un album avec seulement cinq chansons pour soixante-dix minutes de musique ?

C’est un risque colossal, ouais ! Mais pour être honnête, faire de la musique tout court est un risque, de nos jours, n’est-ce pas ? Parce que le boulot de n’importe quel artiste est toujours un risque. Tu ne peux jamais être sûr qu’il y aura un quelconque succès commercial. La meilleure façon de gérer le problème est de l’ignorer complètement et d’être pur et vrai. Si tu es fidèle à toi-même, si ça se vend, super, si ça ne se vend pas, tant pis. Mais si tu n’es pas fidèle à toi-même et que ça ne se vend pas, alors tu es vraiment un con, parce que tu as créé quelque chose que tu n’aimes même pas toi-même et que personne d’autre n’aime [rires]. Donc tu dois simplement être fidèle à toi-même et ne pas penser à l’état du marché. Faire un album en 2016 sans même une chanson de trois minutes dessus, c’est un peu un suicide commercial. Ce serait du suicide commercial pour les Pet Shop Boys, mais Marillion est différent, parce que nous avons une fan-base partout dans le monde, qui nous écoute, qui nous prend au sérieux. Ils se moquent de si la chanson dure trois minutes ou quinze minutes, ils sont intéressés. Donc nous sommes très, très chanceux d’être aussi libres sur un plan créatif.

Tu as mentionné les jams que vous avez faits, comment l’album a-t-il été assemblé à partir de ces jams ?

Vraiment, la réponse brève à cela est notre producteur, Mike Hunter. Il a pris les accidents intéressants qui sont arrivés pendant tous les jams, et c’est vraiment lui qui a arrangé les chansons. Il arrangeait la musique par lui-même jusque-là, et ensuite il nous jouait ses idées d’arrangements, et nous entrions en jeu ou alors il disait : « OK, je pense que ça va vraiment bien avec ça, et ça va bien avec ça, mais on pourrait faire une partie pour joindre ces trucs ensemble. » Donc ensuite nous repartions tous en studio, nous apprenions ce que nous avions fait dans les jams, et ensuite nous essayions vraiment intentionnellement de créer des changements et des moments musicaux. Ce groupe est vraiment obsédé par les changements d’accords et de tonalité. Tu ne rencontreras personne qui passe autant de temps sur un putain de changement d’accord que Marillion. Nous passons des jours sur un changement d’accord. Donc c’est une chose sur laquelle nous sommes très concentrés et à laquelle nous prêtons beaucoup d’attention. Donc c’était l’engagement de Mike – il est diplômé en musique, donc il est lui-même assez pointu dans le domaine – autant que le nôtre ; il était vraiment le sixième membre du groupe dans ce processus.

Marillion - F.U.C.K.

« Il y a deux pulsions humaines de base. Il y a l’amour, et tous les bons trucs viennent de l’amour, et il y a la peur, et tous les mauvais trucs viennent de la peur […], et il me semble qu’à ce moment de l’histoire, la peur a pris le dessus, et ce n’est pas bon. Il est temps pour nous de réaliser, vraiment, que nous sommes tous pareils. Je veux dire que c’est évident, mais nous ne semblons pas nous en apercevoir. »

Tu as dit que c’était un album de protestation. Les paroles de Marillion ont toujours eu une dimension politique et sociale. Qu’est-ce qui est différent cette fois-ci ?

[Réfléchit] Je pense que ce qui est différent c’est que cet album est beaucoup plus centré sur l’Angleterre, ce qui arrive à l’Angleterre et le sentiment général sur l’Angleterre. A la fois “El Dorado” et “New Kings”, qui sont comme des chansons sœurs, ont été inspirées par un pressentiment inquiétant, un sentiment de nervosité concernant l’ouragan qui arrive vers l’Angleterre. C’est quelque chose que je ressens depuis les dix dernières années, depuis la guerre en Irak, en vérité. Après la guerre en Irak, j’ai complètement perdu foi en mon pays. J’étais assez fier, sans trop le montrer, d’être anglais, jusqu’à la guerre en Irak. Ensuite, pour moi, c’en était assez, j’avais honte. Parce qu’il était évident pour moi, depuis le tout début, que cette guerre était basée sur un mensonge. Je ne pense pas que la vérité sur cette guerre ait encore été révélée. Elle finira par l’être, mais qui peut bien savoir ce que Tony Blair manigançait ? C’était plutôt honteux. Nous avons beaucoup de sang sur nos mains suite à cette guerre, beaucoup de sang d’innocents. Donc cette perte de foi que j’avais en mon pays et dans les institutions du pays, les médias, les journaux, j’ai même perdu foi en la BBC… Ils ont en quelque sorte amené à ce sentiment que quelque chose allait changer en Angleterre, que l’âme du lieu était en décomposition, et “El Dorado” est venue de ça. “New Kings” est vraiment à propos des banquiers, les gros sous, et l’élargissement du fossé entre les riches et les pauvres dans le monde. Et ces deux chansons ensemble s’entrecroisent un peu comme des chansons sœurs. “Living in F.E.A.R.”, la troisième chanson, est comme une antidote à cela. C’est une chanson hippie qui dit : « Il doit y avoir un meilleur moyen de vivre que dans la peur. » Parce qu’il y a deux pulsions humaines de base. Il y a l’amour, et tous les bons trucs viennent de l’amour, et il y a la peur, et tous les mauvais trucs viennent de la peur. Notre politique étrangère vient de la peur, notre égo vient de la peur, notre ambition vient de la peur, l’insécurité vient de la peur, et il me semble qu’à ce moment de l’histoire, la peur a pris le dessus, et ce n’est pas bon. Il est temps pour nous de réaliser, vraiment, que nous sommes tous pareils. Je veux dire que c’est évident, mais nous ne semblons pas nous en apercevoir.

L’album s’appelle F.E.A.R., qui est un acronyme pour Fuck Everyone And Run. Même si, comme tu l’as dit toi-même, ce n’est pas fait pour être offensant, pourquoi avez-vous choisi de donner à ce titre une dimension provocante ?

Tout d’abord, cela semblait être le bon titre pour cet album du fait des thèmes des paroles. Ça semblait résumer ce que je disais dans “El Dorado”, “New Kings” et “Living In F.E.A.R.”. Donc ce que je dis vraiment avec ce titre, je ne le crie pas, je ne le hurle pas, ce n’est pas un titre punk. Quand je le chante dans la chanson “New Kings”, je le chante très doucement en voix de tête, très tendrement, avec beaucoup de tristesse, et ce que je dis vraiment, c’est : voici ce que nous faisons en ce moment, voici l’humeur dominante du monde, et n’est-ce pas une honte que nous en soyons arrivés là ? Je parle des banquiers qui ont présidé à cet effondrement du capitalisme de l’Ouest, et on leur a donné d’énormes bonus et ils sont partis en yacht pour vivre à Monaco, pendant que les contribuables et nos enfants doivent payer la facture pour ces milliards de milliards de dollars de déficit qu’ils ont créés. On dirait que les personnes tout en haut de la pyramide ne sont pas responsables de ce qu’ils font. C’est injuste et quelqu’un devait en faire la remarque. Et j’ai à présent atteint un âge, en tant qu’artiste, où, je pense, si je dis quoi que ce soit, que ça devrait être important.

Tu as déclaré que vous n’étiez plus le genre de groupe qui essaie d’écrire de la musique positive, donc vous n’avez plus à vous en soucier. Cela veut-il dire que vous vous en étiez souciés par le passé ?

Oui, je pense que nous nous en sommes… Pas souciés, c’est peut être un peu trop fort, mais il y avait toujours le sentiment de ne pas vouloir écrire un album complet plein de pessimisme et négatif. Nous avons fait un album qui s’appelait Brave, il y a des années, et c’était un album très sombre et troublant, contenant beaucoup de chansons plus lourdes. Et nous avions une chanson qui s’appelait “Made Again” à la fin, qui est une chanson très joyeuse sur le fait de se réveiller un beau matin et se sentir bien par rapport à la vie. Nous sentions que nous devions la mettre à la fin de l’album juste comme une sorte d’apaisement, et nous l’avons fait, mais il n’y a pas de chanson de ce genre sur ce nouvel album. Il n’y a pas de délivrance, vraiment, sur celui-ci. Donc peut-être que nous avons ressenti cela à un moment.

Ne penses-tu pas que les gens ont en fait besoin de musique positive par les temps qui courent ?

Ouais, mais il y a déjà suffisamment de groupes qui font ça, n’est-ce pas ? Ce n’est pas comme s’il y avait pénurie de [il chante une mélodie joyeuse un peu idiote]. Donc nous ne nous inquiétons pas. Ça ne manquera à personne si nous ne faisons pas ça.

La chanson “The Leavers” examine l’impact d’une vie passée sur la route pour ceux qui sont toujours en train de dire au revoir. Est-ce quelque chose dont tu as souffert en tant qu’artiste qui part en tournée ?

Ouais ! Ça m’a pris longtemps pour identifier ce qui n’allait pas chez moi. Je commençais à me sentir émotionnellement épuisé. Et, bien sûr, le fait d’être chanteur est épuisant émotionnellement parce que tu parcours toute une gamme d’émotions tous les soirs en chantant pendant deux heures et demie de ta vie tous les jours, tu te ruines, ce qui est un peu contre-nature. Mais aussi, j’ai réalisé que pendant un moment c’était le fait de dire au revoir qui m’usait. Je veux dire qu’il y a le gros au revoir où tu quittes ta famille, ta femme et tes enfants, et c’est déjà assez épuisant. Mais ensuite, avec chaque nouvelle journée, tu démarres la journée dans un nouveau pays ou une nouvelle ville, inévitablement, tu rencontres des gens. Ça peut être simplement quelqu’un qui fait les sandwichs ou quelqu’un qui s’occupe de ta loge, ou des fans, ou qui que ce soit. Tu rencontres des gens au quotidien, qu’ensuite tu quittes. Donc il y a cette sensation permanente que tous ceux que tu es amené à rencontrer te sont ensuite arrachés quand tu t’en vas vers le prochain lieu. Donc j’ai essayé de faire une chanson sur ce sentiment. Aussi, j’écrivais cette chanson autant pour l’équipe que pour le groupe, parce que pour l’équipe, c’est encore pire. Nous les groupes, nous partons en tournée, nous arrivons à la fin de la tournée, nous rentrons à la maison, et nous commençons à travailler sur un nouvel album ou peu importe. Mais l’équipe part sur une autre tournée, donc ils ne s’arrêtent jamais vraiment. Et il y a des gens que je connais dans notre équipe qui n’ont pas vraiment de vie parce qu’ils n’ont simplement pas le temps d’en avoir une, ou ils ont une copine et ça dure six mois et ensuite c’est fini parce qu’ils ne peuvent simplement pas faire perdurer la relation. Donc je voulais écrire une chanson pour notre équipe, sur le bus de tournée, sur cette fête qui fait rage, qui se passe dans le bus. Parce que les bus de tournée sont un peu comme une fête, parce que la seule occasion que les équipes ont de se détendre, c’est après la fin du show, alors ils peuvent boire un coup – ils ne boivent pas de la journée –, ils peuvent se détendre, se délasser. Donc tu montes dans un bus la nuit et tu as une fête, et cette fête se balade à travers les rues, à travers champs et au-delà des frontières. J’ai pensé que ce serait plutôt intéressant d’écrire une chanson sur une fête mobile.

Marillion - photo by Freddy Billqvis

« Je ne pense pas du tout avoir le ‘fardeau de l’excellence’ sur mes épaules. Je pense que les gens qui ont cette sensation sont de toute façon habituellement des psychopathes. Tout ce que j’essaie de faire, c’est d’être un artiste, dire ce que je ressens, essayer de dire quelque chose d’important. »

Comment tous ces différents thèmes sont-ils liés sur F.E.A.R. ?

Je veux dire, “The Leavers” se tient un peu à part des autres chansons. “New Kings” et “El Dorado” parlent de comment la démocratie est compromise par des histoires de gros sous, comment l’Angleterre s’est égarée, à quel point, à mon avis, elle devrait avoir honte d’elle-même. “Living in F.E.A.R.”, c’est comment tu pourrais choisir de vivre, c’est l’antidote à ces deux chansons. “White Paper” est encore une fois assez personnelle, mais c’est sur le fait de vieillir, c’est la peur d’arriver à un point dans ta vie et de finir de grandir, ne plus être le centre de l’attention, tout ne tourne plus autour de toi, même si c’est écrit d’une manière un peu mythique, ce n’est pas aussi simple, mais pour simplifier, c’est sur le fait de vieillir. Donc voilà à peu près tout. Je n’ai jamais ressenti le besoin d’essayer de forcer ces paroles dans ce qui pourrait être un album concept. Mais je pense qu’il y a un sentiment sous-jacent à cet album.

Tu as dit précédemment que tu avais atteint un âge à présent où, si tu disais quelque chose, ça devrait être important. As-tu peur de quitter l’industrie musicale sans avoir laissé ton empreinte sur le monde ?

Pas vraiment. Je ne suis pas égoïste au point de vouloir laisser mon empreinte sur le monde. Je ne pense pas du tout avoir le « fardeau de l’excellence » sur mes épaules. Je pense que les gens qui ont cette sensation sont de toute façon habituellement des psychopathes. Tout ce que j’essaie de faire, c’est d’être un artiste, dire ce que je ressens, essayer de dire quelque chose d’important, quelque chose qui soit une réflexion de ce que le monde fait à mon esprit. Je ne dis pas vraiment : « C’est comme ça que le monde est. » Je dis : « C’est ce que le monde me fait, c’est ce que je ressens, et c’est moi en train d’essayer d’y faire face. Jette une oreille. Comment tu te sens ? » C’est vraiment ce que je dis. Donc je n’essaie pas de faire la morale à qui que ce soit. Je dis simplement : « Voilà ce que je ressens. » Donc je ne ressens pas le besoin de laisser une empreinte sur le monde. Si je le fais, super, mais je ne m’attends pas à ce que ça arrive. Et je ne pense pas que cet album soit particulièrement différent de tous les autres, dans le sens où ce serait un énorme changement pour aller ailleurs. J’ai écrit des chansons de protestation auparavant. “Gaza” était sur l’album précédent et c’était une chanson intense qui a provoqué un vif émoi. Ce n’est que notre dernier album, mais je pense que c’est l’un des meilleurs que nous ayons faits.

Tu as fait des rapprochements entre cet album et Misplaced Childhood, Brave et Marbles, qui sont trois albums qui sont parmi vos albums les plus classiques, mais qui représentent également trois ères différentes de Marillion. Qu’est-ce qui rend F.E.A.R. comparable à ces trois albums selon toi ?

Je présume que c’est le fait que la musique soit si épisodique sur la plupart des chansons. Sur trois des principales chansons, la musique est écrite en gros épisodes. Nous avons fait cela auparavant, nous avons fait cela toute notre carrière, mais peut-être ne l’avions-nous pas fait à ce point. Je ne sais pas pourquoi ça semble… Un bon nombre de personnes sont déjà venues me dire qu’ils pensent que c’est d’une manière ou d’une autre là avec Brave et Marbles. Peut-être que c’est juste l’intensité de la chose, la noirceur de la chose. Je ne sais vraiment pas.

Vous avez dit que vous vouliez faire un court-métrage pour chaque chanson de l’album. Est-ce important pour vous à présent de lier la musique aux images ?

Ouais, je pense que ça peut engendrer une plus grande expérience en concert. J’ai des réserves là-dessus, pour être honnête, parce que je pense que c’est une ligne très fine sur laquelle tu marches, que tu peux franchir. Si tu franchis la ligne, alors le public finit par regarder les films, et tu deviens comme le groupe qui joue derrière le film. J’ai été voir Peter Gabriel il y a des années. C’était sur quelle tournée ? Était-ce sur la tournée Upside Down ? Je ne me rappelle pas… Mais bref, il avait ce gros spectacle qu’il avait fait dans un cercle, et il avait tous ces trucs qui se passaient, et après chaque chanson tu étais là à penser : « Oh, je me demande ce qu’il va se passer dans la prochaine ! Que va-t-il se passer ? Est-ce que ce truc va s’ouvrir comme une fleur ou est-ce que quelqu’un va sortir d’une trappe, ou est-ce que quelqu’un va passer sur un vélo ou dans un putain de ballon ou quoi ? » J’ai un énorme respect pour Peter Gabriel, mais ce qui est arrivé est que je me suis retrouvé à attendre le prochain tour, au lieu d’être là : « Quel putain de groupe génial, quel chanteur génial, quelle musique géniale. » J’aurais presque préféré l’avoir vu juste lui sur une scène, dans un club, avec son groupe, jouer, parce qu’alors, cent pour cent de mon attention auraient été sur les musiciens. J’aurais pu dire : « Bordel de merde, quel batteur génial ! Oh mon dieu, quelle chanson, quel super chanteur génial, quel super guitariste ! » Au lieu de dire : « Oh, je me demande si ça va s’ouvrir comme une fleur. Je me demande si le toit va s’en aller et si Dieu va descendre du paradis sur la prochaine chanson. » Donc si tu franchis cette ligne, alors ça arrête d’être centré sur le groupe, donc tu dois faire attention.

Interview réalisée en face à face le 20 septembre 2016 par Valentin Istria.
Fiche de questions : Philippe Sliwa.
Retranscription : Robin Collas.
Traduction : Aline Meyer.
Introduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Freddy Billqvist.

Site internet officiel de Marillion : www.marillion.com

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