Mastodon n’a jamais aussi bien porté son nom qu’avec Hushed And Grim : un double album aussi massif que percutant. Comment en sont-ils arrivés à une telle œuvre près de vingt ans après Remission ? Certainement que l’expérience joue, justement, mais c’est surtout une concordance d’événements, entre une pandémie leur ayant offert du temps et la perte de leur manageur et ami Nick John en 2018 ayant engendré chez eux un immense afflux émotionnel. Hushed And Grim s’impose d’emblée comme un hommage, du titre à la pochette, en passant évidemment par la musique, leur outil de communication et de partage par excellence, y compris pour se parler entre eux.
C’est avec le batteur-chanteur Brann Dailor que nous avons décortiqué la conception d’Hushed And Grim, ce qu’il symbolise pour Mastodon et sa place dans l’œuvre globale du groupe. Il nous parle évidemment de Nick John et, plus généralement, de son rapport personnel à la mort, lui qui avait déjà rendu hommage à sa sœur décédée durant son adolescence à l’occasion du monument « Crack The Skye », mais aussi de sujets plus légers, parmi tant d’autres, comme l’influence du cinéma ou de sa passion pour les clowns…
« Notre seul moyen de gérer notre deuil, c’est de prendre nos instruments et de jouer. Je crois que c’est comme ça que j’ai toujours géré les situations tragiques dans ma vie. J’en reviens toujours à : ‘Au moins, j’ai ma batterie.’ […] Nous ne sommes pas très doués pour parler de nos sentiments entre nous, alors nous nous disons ce que nous ressentons via nos riffs et nos paroles. »
Radio Metal : Vous êtes sur le point de sortir Hushed And Grim, votre premier double album. Ces dernières années, vous avez perdu à la fois votre manager de longue date, Nick John, et votre tour manager, Bob Dallas. La biographie promotionnelle mentionne également que cet album « s’est nourri de l’une des périodes les plus sombres de la carrière du groupe, car chaque membre a connu un deuil personnel ». Qualifierais-tu Hushed And Grim de libération émotionnelle, ce qui expliquerait le volume de musique écrit pendant cette période ?
Brann Dailor (batterie & chant) : Je pense que oui. Je ne vois pas comment le décrire autrement. Comme tu le sais, rien ne se fait dans le vide. Nous écrivions de la musique et des paroles alors que les membres du groupe vivaient des situations douloureuses. Nous ne pouvions pas vraiment éluder ces questions et parler de l’actualité ou ce genre de sujets. Nous parlons de ce que nous connaissons, nous écrivons sur ce qui se passe dans nos vies, et c’est généralement ce qui en ressort. Mais je dirais que le volume de musique sur cet album est probablement davantage dû au fait que nous avions beaucoup plus de temps pour nous concentrer sur l’écriture et l’enregistrement. Nous n’avions rien de prévu, il ne se passait rien. Cela nous a donné une année de plus pour nous poser et travailler sur l’album, alors que nous étions déjà en train d’écrire quand tout s’est arrêté. Pendant le confinement, nous ne nous sommes pas vus pendant environ quatre mois. Nous sommes restés à la maison, comme nous étions censés le faire, mais je crois que tout le monde travaillait séparément sur de la nouvelle musique à ce moment-là. Quand nous nous sommes retrouvés à la fin de l’été 2020, nous avions encore plus de choses à dire. Nous avions déjà toute cette musique et nous en avions désormais encore plus. Nous avions quelque chose comme vingt-deux chansons sur lesquelles nous essayions de nous concentrer. Nous avons réussi à réduire ce nombre à quinze, mais nous ne pouvions pas faire mieux ! [Rires]
Depuis son décès en 2018, vous avez rendu plusieurs fois hommage à Nick John, avec votre version de « Stairway To Heaven » rebaptisée « Stairway To Nick John », lors du livestream avec la chanson « Skeleton Of Splendor », et aujourd’hui avec l’artwork de Hushed And Grim, où il est représenté au centre de l’arbre. Peux-tu nous parler de l’importance de Nick et de son impact et de son influence sur le groupe ?
Il était comme un cinquième membre du groupe, mais sans faire partie du groupe. Il était avant tout notre plus grand soutien et notre plus grand fan, mais il était aussi l’un de nos meilleurs amis – et l’un de mes meilleurs amis personnels. Je lui parlais tous les jours au téléphone. Je lui parlais davantage qu’à mes parents. Il travaillait sans relâche pour Mastodon. Il se donnait à cent pour cent pour le groupe ; sa principale préoccupation dans son boulot et dans sa vie, c’était Mastodon. Sans lui, nous n’en serions pas là aujourd’hui. C’est lui qui nous a permis d’arriver là où nous en sommes. Je n’ai pas de mots assez positifs pour parler de lui. C’est une perte absolument énorme pour le groupe. Nous n’avons pas seulement perdu un de nos meilleurs amis, mais aussi un membre à part entière de notre équipe et de notre groupe. C’était difficile de faire un album sans lui. Avant, si nous trouvions un riff pendant une répétition, je l’enregistrais sur mon téléphone et je le lui envoyais immédiatement en disant : « Mec, écoute ce riff ! » Et puis il m’appelait et nous en parlions pendant une heure. C’était l’un des meilleurs gars au monde et il nous manque terriblement.
Tu as déclaré que Nick « avait beaucoup inspiré Hushed And Grim ». Peux-tu développer la façon dont cette inspiration s’est manifestée ?
Je crois que ça se résume à la perte de quelqu’un, et à cette nostalgie permanente pour cette personne qui était si présente dans ta vie et qui disparaît. Ça te laisse comme un trou béant dans l’estomac. Pour nous, le seul moyen d’essayer de remplir ce trou est d’écrire et de jouer de la musique tous ensemble. Notre seul moyen de gérer notre deuil, c’est de prendre nos instruments et de jouer. Je crois que c’est comme ça que j’ai toujours géré les situations tragiques dans ma vie. J’en reviens toujours à : « Au moins, j’ai ma batterie. » Je peux jouer de mon instrument ou je peux écrire avec les gars et me plonger dans mes émotions de cette façon. Non seulement ça, mais je peux aussi intégrer ce qui s’est passé et essayer de transformer mon chagrin de façon productive. Ce qu’on entend sur Hushed And Grim, c’est un groupe qui essaie de gérer cette tragédie, de trouver un sens à ce qui s’est passé et d’exprimer à voix haute ce que cette personne signifiait pour nous, afin que le monde entier puisse l’entendre. Nous ne sommes pas très doués pour parler de nos sentiments entre nous, alors nous nous disons ce que nous ressentons via nos riffs et nos paroles. C’est comme ça que nous nous parlons. C’est comme ça que nous communiquons ce que nous ressentons à propos de Nick John et de cette situation – à travers la musique. Malheureusement, nous n’allons pas nous asseoir dans une pièce et discuter de ce qui s’est passé. Ça ressortira dans les paroles.
Vous avez utilisé beaucoup de métaphores par le passé, tandis qu’aujourd’hui, les paroles semblent plus transparentes et plus faciles à interpréter. Aviez-vous besoin de communiquer plus clairement ?
Les choses dont nous parlions étaient si immédiates et si récentes que j’ai le sentiment que nous n’avions pas assez de temps pour les métaphores. Une approche plus directe était presque une nécessité pour parler de ce qui se passait à ce moment précis. Je pense que, quand tu as le temps de réfléchir à quelque chose qui t’est arrivé dans le passé, il est peut-être plus facile de formuler des métaphores et de faire preuve de subtilité. Mais si les choses arrivent alors que tu es en train de composer l’album et d’écrire les paroles, alors que les émotions sont tellement récentes, les paroles deviennent un peu plus littérales.
Votre album précédent, Emperor Of Sand, évoquait des thèmes tels que la mort et la survie, à travers des paroles inspirées par les diagnostics de cancer d’amis et de membres de la famille du groupe. Diras-tu que Hushed And Grim n’est pas seulement une continuation de cela, mais peut-être aussi l’envers de ce que vous évoquiez sur Emperor Of Sand ?
Je ne suis pas certain de le considérer comme ça. Ce n’est qu’une coïncidence si nous avons poursuivi le même chemin émotionnel. Après Emperor Of Sand, je pensais que nous en avions fini avec tout ça, mais j’imagine que tout ça n’en avait pas fini avec nous. Et voilà où nous en sommes.
« J’ai l’impression que je vais décevoir une partie des fans de batterie si je ne fais pas quelque chose de dingue dans chaque chanson, et je ne veux pas les décevoir, mais je ne supporterais pas d’écouter une chanson confuse juste parce que j’avais envie d’ajouter une tonne de roulements. »
« Crack The Skye » évoquait le décès de ta sœur, survenu alors que tu étais adolescent. Il semblerait que tu aies beaucoup été confronté à la mort. D’un point de vue spirituel, quel a été l’impact de tout ça sur toi ? Comment ton rapport à la mort a-t-il évolué au fil des années, entre ton adolescence et aujourd’hui ?
J’ai sans doute plus réfléchi à la mort qu’une personne ou un adolescent moyen. Avant la mort de ma sœur, je n’ai pas souvenir d’y avoir pensé très souvent. Quand tu es ado, ce n’est pas une chose à laquelle tu penses, parce que tu te sens invincible. Mais quand Skye est décédée, j’ai commencé à y penser tout le temps. J’y pensais énormément, principalement parce que j’étais curieux de savoir ce qui lui était arrivé : où était-elle ? Où est passée l’énergie qui était avec moi chaque jour de ma vie jusqu’à présent ? Qu’est-il arrivé à son corps ? Où est-elle allée et que lui a-t-on fait ? À quoi a ressemblé l’autopsie ? Le funérarium ? Je n’ai jamais été quelqu’un de religieux ; je n’ai pas été élevé comme ça. Mon père était bouddhiste. Ma mère n’était pas tout à fait catholique, ou plus ou moins, mais nous n’allions pas à l’église ou quoi que ce soit. En termes de religion, je suis un observateur externe. Je ne suis pas croyant.
J’écris beaucoup de choses en rapport avec la fantasy, des histories fantastiques avec des crânes de cristal, associées à la magie et à l’énergie mystique, qui ont été inspirées par ma grand-mère, qui était à fond là-dedans. Elle se considérait comme étant médium et lisait les cartes de tarot, les runes et les feuilles de thé. Elle avait des livres sur les crânes de cristal. Elle emmenait ma sœur dans une communauté de médiums, Lily Dale, au nord de l’État de New York, où était conservé le crâne de cristal de Mitchell-Hedges. Du coup, quand j’étais enfant et ado, la magie était très présente dans ma vie. J’ai toujours injecté cet aspect dans les paroles de Mastodon – nous avons par exemple une chanson intitulée « Crystal Skull ». La magie a toujours été présente dans ma vie, mais je ne suis pas croyant moi-même. Je suis plutôt un sceptique en la matière. J’ai besoin de preuves solides. En ce qui concerne la mort, j’espère que la lumière s’éteint et que tu sombres dans le genre de sommeil sans rêve qu’on espère vivre chaque nuit, quand on n’a plus conscience du temps et qu’on n’est pas du tout éveillé. J’espère que c’est ce qui se passe.
Mais penser à sa mort prématurée est également terrifiant. Le spectre de la mort est toujours là, particulièrement avec cette pandémie qui a renforcé la conscience de tout un chacun à ce sujet, car désormais, c’est une possibilité pour tout le monde. Beaucoup de jeunes gens doivent sans doute y penser. Peut-être qu’il s’agit d’un rappel : profitez du temps que vous avez, vivez dans le moment présent et appréciez le fait que vous êtes vivants. Je ne sais pas, je pense à la mort tous les jours !
À propos de l’artwork, tu as déclaré que l’arbre « est une vision mythologique de l’au-delà : quand on meurt, l’esprit intègre le cœur d’un arbre », et que « c’est la façon dont on dit au revoir au monde naturel pour passer dans la dimension suivante ». Peux-tu développer cette idée et nous dire d’où elle t’est venue ?
Je ne sais pas d’où elle m’est venue. Elle est simplement apparue dans mon esprit. Elle vient de cet endroit mystérieux où naissent les idées, mais je suis sûr que j’ai été influencé à un niveau ou un autre par un film que j’ai vu ou quelque chose que j’ai lu. Je pense que c’est une idée originale, mais je n’en suis pas certain. Je suis sûr que quelqu’un pourra me corriger et me dire : « Non, ça vient de telle source ! », mais j’ai le sentiment que c’était une idée originale. Comme beaucoup de gens, j’ai du mal à accepter l’idée que peut-être, quand ton temps est venu, la lumière s’éteint et c’est fini. Je ne suis pas allé jusqu’à parler d’au-delà éternel, mais je trouvais que passer par le cœur d’un arbre était une jolie façon de dire adieu au monde naturel, parce que les arbres constituent une excellente représentation visuelle des saisons : les feuilles changent de couleur, tombent et meurent, l’arbre se flétrit puis revient à la vie. J’aimais bien la métaphore et l’idée que l’arbre représente une année de vie. Ça faisait sens. C’était une façon naturelle de dire au revoir à la vie sur terre et de réfléchir à ce que cette vie a pu représenter à travers le cœur de l’arbre, contempler les piliers de la vie et peut-être trouver un peu de rédemption sur le chemin.
L’album couvre un large éventail de styles, de genres et d’atmosphères. Identifierais-tu différents contextes, moments et approches d’écriture en fonction de l’ambiance des chansons ?
Je dirais que, quand quelque chose de différent se présente, nous essayons de l’adopter et de comprendre de quoi il s’agit et la façon dont cela sonne, et de le laisser vivre sa vie plutôt que d’essayer de le modifier pour en faire ce que nous pensons que les gens veulent entendre. Si Brent joue un plan country à la guitare, nous le laissons tel quel. Il n’est pas nécessaire de le modifier, nous le laissons vivre sa vie de plan country. Ensuite, ce dernier entraîne un plan blues, qui entraîne une partie progressive ou quelque chose du genre. « Dagger » est une chanson assez bizarre. Je la trouvais cool et nous pouvions vraiment nous lâcher avec le pont. Il y a des sonorités moyen-orientales à ce moment-là. J’avais de gros morceaux de métal très cool sur lesquels je tapais. Avec cette chanson, j’ai essayé d’expérimenter autant que possible. Je pense que faire un double album nous laisse plus de latitude pour nous disperser un peu et faire des choses différentes. L’ajout du Moog à la fin est assez dingue. C’est presque comme si tu avais moins de contrôle que tu ne le laisses penser quand tu écris de la musique. Parfois, elle prend le dessus, elle fait ce qu’elle veut, et tu n’as plus qu’à la suivre.
« Il arrive d’avoir moins de contrôle qu’on ne le souhaiterait. Parfois, suivre les riffs qui te parlent s’apparente à utiliser une baguette de sourcier. »
« Dagger » est certainement le titre le plus spirituel de l’album, avec son atmosphère très indienne ou moyen-orientale. J’imagine que l’approche méditative et transcendantale de ces cultures apporte un sentiment de confort…
Oui, surtout sur cette chanson. Nous voulions vraiment adopter ce rythme et ce côté tribal, un peu comme une transe. J’ai l’impression que nous n’avons jamais fait ça avant. Tu pourrais probablement jouer cette chanson à un fan de Mastodon, et s’il n’y avait pas la voix de Troy, il n’aurait aucune idée de quel groupe il s’agit. J’adore ça [rires]. J’aime beaucoup la musique moyen-orientale depuis que je suis adolescent, je dirais depuis mes seize ou dix-sept ans. Une bonne amie à moi était turque et m’avait fait une cassette du top 40 turc de la fin des années 80. J’en suis tombé amoureux et j’ai commencé à explorer la musique turque, ce qui m’a mené vers le funk et le top 40 iranien, et un peu de musique indienne. Il existe une compilation égyptienne du début des années 90 que j’adore et qui s’appelle Yalla: Hitlist Egypt. C’était une compilation de leurs chansons du top 40 de 1989. Il y a de sacrés tubes là-dedans ! Par la suite, j’ai découvert Passion et Passion — Sources, la bande originale de La Dernière Tentation du Christ par Peter Gabriel, sur laquelle David Bottrill a travaillé. Passion — Sources est sorti sur le label Real World, le label de Gabriel. Du coup, j’ai commencé à acheter au hasard des CD du catalogue de Real World. J’ai été fan de world music pendant assez longtemps, et ça m’est resté. C’est quelque chose que j’essaie toujours d’injecter dans Mastodon. Même le riff de guitare du pont de « Blood And Thunder » rappelle certains éléments de Yalla: Hitlist Egypt.
Avec cette grande variété de chansons, comment avez-vous défini la progression de l’album au fil des deux disques ? On dirait que le deuxième disque penche un peu plus du côté progressif, atmosphérique et psychédélique…
Je ne sais pas. Assembler tout ça a été assez laborieux, pour être honnête. Il y a eu plusieurs versions différentes. La première et la dernière chanson étaient toujours les mêmes, mais tout le reste a été rebattu plusieurs fois. Au final, c’est juste une question de ressenti, d’enchaînement et de placement. Il suffit de se poser et d’écouter l’album encore et encore, et de dire : « Oh, je ne pense pas que cette chanson-ci soit adaptée après celle-là, il faudrait la déplacer ici » ou « C’est trop lent par ici, il faut redynamiser un peu tout ça ». Je trouve que les trois dernières chansons sont des titres épiques qui t’emmènent quelque part. C’est toujours compliqué d’organiser un album, ça ne se fait pas tout seul. Il faut écouter le tout et s’assurer que tout semble à sa place. Au final, la plupart des auditeurs ne l’écouteront sans doute pas de cette façon. Ils choisiront leurs chansons préférées, ils les joueront en aléatoire et en zapperont certaines. Ce n’est pas un problème, mais pour nous qui sommes tellement orientés albums, c’est important de veiller à donner notre propre playlist pour dire : voilà comment nous pensons que l’album devrait être écouté.
Que mets-tu derrière les termes « hushed » [feutré] et « grim » [sinistre] ? L’objectif est-il seulement de décrire l’atmosphère générale de l’album, qui est bel et bien feutrée à certains moments et sinistre à d’autres, ou y a-t-il autre chose ?
Pour moi, « feutré et sinistre » vient du film Autant En Emporte Le Vent. Au milieu du film, un panneau apparaît après que la ville d’Atlanta a été décimée et que les rues sont jonchées de cadavres. Le panneau dit « Feutrée et sinistre, Atlanta » et évoque la scène qui est posée. J’ai toujours accroché à cette formulation ; j’aime vraiment cette phrase, parce que, lorsqu’une tragédie a eu lieu, il n’y a pas nécessairement quelqu’un qui court partout en hurlant que cette chose horrible vient de se passer. Les gens sont en état de choc et ils acceptent calmement ce qui est arrivé. Ça décrit très bien l’ambiance et l’atmosphère chez Nick John quand nous sommes allés le voir pour la dernière fois, alors qu’il était en soins à domicile. Il y avait un lit d’hôpital dans sa maison. Nous avons accepté que notre ami allait mourir d’ici quelques jours et que nous devions lui dire au revoir. C’était très silencieux. « Feutré et sinistre » décrivait parfaitement ce moment. J’ai raconté ça aux gars et ils ont trouvé que c’était parfait, alors nous l’avons gardé.
Pour Hushed And Grim, vous avez collaboré avec le producteur David Bottrill, qui a travaillé avec des artistes aussi différents que Tool, Muse, King Crimson ou Peter Gabriel. Le point commun entre tous ces musiciens, c’est leur sens artistique, et le fait qu’ils ont une identité forte et ont un côté progressif au sens large. Penses-tu que Mastodon a sa place parmi ces artistes et que c’est ce qui faisait de David un bon choix pour cet album ?
Ce serait sans doute prétentieux de dire que nous avons notre place parmi ces artistes, mais disons que j’espère que nous avons notre place parmi eux. C’est mieux comme ça ? J’adorerais être mentionné dans la même phrase que ces gens. Je pense que c’est ce que nous visons. D’un point de vue esthétique et musical, je trouve que nous sommes un groupe unique. Je n’ai pas l’impression qu’il y ait beaucoup de groupes qui sonnent comme nous. Nous faisons notre propre truc. Quand David a accepté de travailler avec nous, il a dit que c’est ce qu’il recherche. Il cherche l’unique, des groupes qui font leur propre truc. Pour lui, c’est ce que nous faisons, et il a vraiment aimé les démos qu’il a entendues et qui allaient devenir Hushed And Grim. C’était l’homme de la situation. Je trouve les chansons légèrement plus progressives qu’Emperor Of Sand, la forme est plus longue et il y a plusieurs mouvements. Parce qu’il a tellement travaillé sur de la world music, nous pouvions insérer ces textures qu’il connaît. Je trouvais que c’était la bonne personne à faire travailler sur ce projet particulier. Et quel type génial ! Nous sommes devenus très amis. J’ai le sentiment qu’il a parfaitement compris à quel point l’album était sentimental, et il savait qu’il était très important de capturer ce sentiment. Il était très axé là-dessus et très franc à ce sujet quand nous étions en studio, et comme je l’ai dit, nous sommes tous les quatre très timides quant à nos sentiments jusqu’à ce qu’il soit temps d’écrire des paroles et de les chanter. Nous sommes timides, mais lui était très ouvert par rapport à l’aspect émotionnel, qui est le cœur de l’album et qui doit être mis en avant en priorité.
« Dire que la capacité d’attention diminue et que les gens ne sont pas capables d’apprécier n’est pas leur faire honneur. Il faut simplement la bonne musique. »
Bill a déclaré que « Quatre-vingt-dix pour cent de ce qui fait un bon producteur, c’est pratiquement d’avoir un diplôme en psychologie », car il faut gérer « des égos fragiles ». Penses-tu que vos égos étaient encore plus fragiles émotionnellement cette fois-ci ?
Je ne sais pas si nos égos étaient si fragiles. Je suis capable de laisser les choses glisser sur moi. Je n’ai aucun problème à ce qu’on me dise que ma prestation n’était pas terrible, que je dois recommencer. Si quelqu’un me dit ça, je me concentre et j’essaie de voir si je peux donner davantage, parce que je veux que le résultat soit aussi bon que possible. Jamais je ne laisserai mon égo se mettre en travers de ça. J’ai dû supprimer quelques roulements pour lesquels je me suis dit : « Oh non, je ne veux pas retirer celui-là ! » Mais parfois, il faut simplifier les choses pour obtenir un plus grand impact émotionnel. J’ai tendance à en faire beaucoup derrière les fûts, mais je crois que nous avons trouvé l’équilibre idéal cette fois-ci.
À quel point dois-tu prendre sur toi pour limiter ton jeu ?
Il m’arrive parfois d’en mettre partout, et quand je retourne dans la salle de contrôle et que je réécoute ce que j’ai fait, je me dis : « Ça ne va pas le faire. Il faut que je me restreigne ». Ce n’est pas difficile pour moi. Je ne vais pas mentir, une petite partie de moi voudrait… J’ai l’impression que je vais décevoir une partie des fans de batterie si je ne fais pas quelque chose de dingue dans chaque chanson, et je ne veux pas les décevoir, mais je ne supporterais pas d’écouter une chanson confuse juste parce que j’avais envie d’ajouter une tonne de roulements. Je préfère jouer ce qui me semble correspondre musicalement plutôt que m’inquiéter de ne pas être sur la couverture du prochain numéro de Batteur Magazine ou quelque chose comme ça.
Apparemment, David avait beaucoup d’idées et a joué un rôle important dans la direction prise par le son…
Nous avons travaillé sans relâche sur les sons et la sonorité de la batterie. Il est très investi et méticuleux, il ne se contente pas de quelque chose de moyen. Ce n’est pas le genre de personne qui va te dire : « Enregistre ça maintenant et on le corrigera plus tard avec des samples. » Nous avons optimisé tous les sons que nous voulions, c’était très organique. C’était un processus très sympa, parce que c’est génial d’avoir quelqu’un qui se préoccupe à ce point de ce que tu fais. Tu veux quelqu’un qui soit avec toi tout du long. Tu ne veux pas d’un producteur qui se pointe après plusieurs semaines et laisse ses ingénieurs faire le travail. David était absolument cet homme-là. Mais pour ce qui est de modifier les chansons par rapport à la démo, il a apporté quelques subtilités, comme une note ici ou là, ou une transition, en rajoutant un élément entre un couplet et un refrain pour nous aider à passer de l’un à l’autre. David a utilisé un peu de solfège. C’est un esprit musical très intelligent, c’était génial de travailler avec lui.
L’album compte deux invités : Marcus King sur « The Beast » et Kim Thayil sur « Had It All ». Comment vous est venue l’idée de faire appel à eux ?
Marcus est un ami de Brent. Il adore son jeu, et nous aussi. Il y avait tellement de travail à faire pour un double album que nous nous sommes dit que nous ferions aussi bien d’inviter quelques amis. Nous avions depuis longtemps évoqué la possibilité de faire quelque chose avec Kim, et nous avions ce gros riff bien heavy, assez lent, qui s’étirait pendant un moment. Nous nous sommes alors dit : « Voyons si Kim voudrait ajouter un peu de guitare par-dessus. » Nous n’étions pas sûrs de ce que nous voulions faire de cette partie. Soit nous la raccourcissions largement, soit il fallait un gros solo de guitare ; nous n’étions pas sûrs. Et puis Kim est arrivé et a posé ce solo dessus, et nous étions là : « Oh, bon sang… » Nous avons adoré. En ce qui concerne Marcus, Brent lui a joué la chanson et lui a montré ce passage. Il a relevé le défi et joué le solo de guitare. C’est l’un de mes passages préférés sur le disque, le solo est superbe. C’est tellement cool d’avoir impliqué des personnes avec qui nous n’avions encore jamais travaillé. Nous aimons toujours avoir quelques invités et impliquer des personnes différentes, surtout quelqu’un comme Kim, qui est tout bonnement une légende. C’est génial de l’avoir sur l’album. Sur cette chanson, on retrouve également Jody Sanders, la mère de Troy, au cor d’harmonie. La mère de Troy a jammé avec Kim de Soundgarden et c’est très cool !
Hushed And Grim montre à quel point Mastodon a perfectionné l’art d’avoir plusieurs chanteurs. Comment décidez-vous qui va chanter quelle partie ? En l’occurrence, à l’exception de « The Beast », qui est principalement du ressort de Brent, le reste semble largement divisé entre toi et Troy…
Ça dépend de l’album et du matériel. Pour celui-ci, il se trouve que j’ai écrit beaucoup de paroles et que j’avais des idées concernant les lignes de chant. Pour nous, c’est une question de qui a une idée et de qui veut chanter. Si tu veux le faire, que tu prends ton stylo pour écrire des paroles, que tu as quelque chose à dire, que tu veux enregistrer la ligne de chant et que tu penses que c’est une bonne idée, puis que tout le monde met son grain de sel pour dire que l’idée leur plaît… Parfois, il n’en faut pas plus. Et puis il arrive que j’aie une idée et que j’essaie de la chanter, mais que je n’y arrive tout simplement pas. Du coup, quelqu’un d’autre va devoir s’occuper de ces paroles, et c’est donc Troy ou Brent qui s’y colle.
« Je regarde davantage de films que je n’écoute de musique. […] Quand moi ou les autres écrivons un riff, il y a toujours un petit film qui se joue dans ma tête pour poser la scène et définir de quoi pourront parler les paroles, ou quel sera le concept. »
Depuis The Hunter, tu t’imposes de plus en plus en tant que chanteur au sein de Mastodon. Quel est le secret pour jouer de la batterie et chanter en même temps sans finir à bout de souffle ?
L’entraînement. Il faut que je m’entraîne en permanence. Il n’y a aucun exercice qui puisse me préparer à ça, il faut simplement que je le fasse. Il faut que je m’asseye, que je m’entraîne et que je joue les chansons. Il n’y a rien que je puisse faire pour me préparer à jouer la chanson, si ce n’est jouer la chanson et chanter en même temps. Du coup, je m’entraîne tout le temps. C’est aussi simple que ça.
Je crois savoir que tu es un grand fan de Phil Collins…
Oui, un grand fan, j’adore Phil Collins. Je le suis depuis des années. Quand j’étais ado, j’avais une cassette vidéo d’un concert de Genesis qui était passé à la télévision belge. Je crois que c’était en 1972. Il avait son petit micro qui descendait et il chantait beaucoup, surtout les chœurs, en fait, mais je me disais : « Waouh, cool ! Jouer et chanter en même temps, ça doit être compliqué. » Mais il donnait l’impression que c’était facile. J’ai aussi regardé des vidéos où Karen Carpenter joue et chante. J’ai regardé les gars de The Romantics, Levon Helm, Night Ranger… Il y a plusieurs exemples, ce n’est pas totalement hors de question. Je choisis mes moments.
Artistiquement parlant, Hushed And Grim est votre album le plus ambitieux depuis Crack The Skye. As-tu le sentiment que vous vous étiez un peu reposés sur vos lauriers après Crack The Skye ou considères-tu qu’il s’agissait d’une autre forme d’ambition ?
Je ne dirais pas que nous nous sommes jamais reposés sur nos lauriers. Personnellement, chaque fois qu’il s’agit d’écrire quelque chose, mon ressenti est le même. Nous participons tous, nous proposons ce que nous aimons et nous travaillons dur pour écrire et enregistrer l’album. Tout dépend de l’état d’esprit des membres du groupe et de notre situation personnelle. Quels riffs vont se présenter ? Qu’aimons-nous en ce moment ? C’est une question de timing. En ce qui me concerne, il n’y a jamais eu de moment où je ne me suis pas pointé tous les jours pour faire ce qu’on attend de moi et ce que j’attends de moi. Personne ne peut avoir d’attentes plus élevées à mon égard que moi-même. Je suis quelqu’un de totalement orienté travail. Je mets mes bottes tous les jours et je vais travailler. Je vais au sous-sol et je joue le set tout seul. J’essaie toujours de m’améliorer au chant. Je suis un bosseur. Je veux aider et je veux créer avec mes amis. Il n’y a aucune différence. Les chansons viennent comme elles viennent. Comme je l’ai dit, il arrive d’avoir moins de contrôle qu’on ne le souhaiterait. Parfois, suivre les riffs qui te parlent s’apparente à utiliser une baguette de sourcier. C’est ce que tu aimes à ce moment-là et c’est ce que tu crées.
Vous avez à nouveau fait appel à Paul Romano pour l’artwork, alors qu’il n’avait pas travaillé sur un album de Mastodon depuis Crack The Skye. Est-ce une coïncidence ou vois-tu un lien entre Hushed And Grim et les albums antérieurs à The Hunter ?
Je savais que Hushed And Grim allait être épique, à défaut d’un meilleur terme. Du coup, je voulais faire appel à Paul à nouveau. Je l’ai toujours adoré et nous travaillons très bien ensemble. J’ai juste dit : « Pour cet album, il nous faut Paul. Il est temps de le recontacter. Il nous apporte tellement, le travail va être conséquent et il va se donner à cent pour cent. On va en avoir pour notre argent et ça collera avec la musique. » Je ne pense pas que qui que ce soit d’autre soit aussi en accord avec nous et avec ce que nous faisons. Personne n’a encore vu l’ensemble de l’œuvre, uniquement la section du milieu, mais il y a huit autres panneaux, ce qui est juste dingue, avec cet arbre. C’est vraiment fou. J’avais pensé à lui avant même de réaliser qu’il s’agirait d’un double album. Je n’en avais parlé à personne, mais je l’avais contacté pour lui demander s’il serait intéressé, parce que je sais qu’il lui faut du temps pour peindre à cause de tous ces détails. Je lui ai parlé très tôt de la possibilité de travailler à nouveau avec nous, et il était partant dès le départ. Ensuite, nous avons commencé à discuter des différentes mythologies entourant les arbres. Ce n’est pas une coïncidence, mais je ne savais pas à l’époque que Hushed And Grim allait devenir ce qu’il est devenu. Ça s’est développé au fil du temps, et je lui envoyais sans arrêt les démos pour qu’il se fasse une idée. Nous avons travaillé en tandem au fur et à mesure que les choses avançaient pendant la pandémie et tout le reste. Il avait des ébauches et nous avons échangé sur le symbolisme. C’est un artiste incroyable et c’était le moment idéal pour son retour.
On dit souvent que la capacité d’attention du public ne cesse de diminuer, mais curieusement, en parallèle, de plus en plus de groupes sortent des doubles albums, comme Iron Maiden, qui en a fait deux coup sur coup, Metallica, Nightwish, et aujourd’hui Mastodon. Penses-tu que le public metal n’est pas concerné par ce déficit d’attention, pour ainsi dire, et qu’il y a une véritable demande dans cette scène pour des albums immersifs ?
Je pense que les fans de metal – surtout les fans de prog, de stoner, de doom et de ce genre de style – recherchent l’immersion. Ils recherchent une histoire et de la longueur. Ils veulent s’installer pour écouter, ils veulent une expérience, je crois. C’est ce que moi je veux ! [Rires]. Je n’ai aucun problème à écouter de la musique. Je peux rester assis et écouter pendant une heure et demie. Si c’est de la bonne musique et que je l’apprécie, je suis tout à fait pour. Je veux pouvoir me poser et rester là pendant un long moment. Pour moi, dire que la capacité d’attention diminue et que les gens ne sont pas capables d’apprécier n’est pas leur faire honneur. Il faut simplement la bonne musique. Pour nous, faire un double album était logique. C’était logique qu’il dure une heure et demie. Nous ne voulons pas prendre en compte des questions de temps. En gros, si nous écoutons l’album du début à la fin et que nous regardons notre montre pour connaître l’heure, ça veut dire qu’il n’y a pas besoin de faire un double album. Si c’est trop long, tu le sais – mais il ne nous semblait pas trop long.
« [Les clowns] sont un peu flippants et bizarres, j’aime bien. Quand j’ai emménagé dans ma nouvelle maison, j’ai rassemblé tous les trucs liés aux clowns dans une pièce – c’est ma pièce à clowns. Ils me rendent heureux, j’adore les regarder. »
Quel est le double album le plus emblématique à tes yeux ? Celui qui a eu le plus grand impact sur toi ?
The Lamb Lies Down On Broadway, de Genesis. Pour moi, c’est le summum du double album. C’est mon préféré. J’adore cet album et je sais que les autres gars l’apprécient aussi. C’était parfait pour les longs trajets dans ce que nous appelons affectueusement notre boîte à pets – le van dans lequel nous tournions avant. Si tu as un trajet de quatorze heures devant toi, tu t’envoies des doubles albums : tu écoutes The Wall, Physical Graffiti et The Lamb Lies Down On Broadway.
Au fil des années, vous avez établi beaucoup de liens avec les arts visuels, que ce soit avec des films, des séries TV et des comics. Comment cela vous influence-t-il en tant que musiciens ? À quel point le son et le visuel sont-ils liés dans votre conception de l’art ?
Je suis un cinéphile avoué. Je regarde davantage de films que je n’écoute de musique. Je passe mon temps à regarder des films. J’ai grandi comme ça. Mon père nous emmenait au cinéma tous les week-ends, et après la séance, nous discutions du film, des motivations des personnages, de pourquoi telle personne avait fait telle chose, du scénario et de ce que nous avions ressenti. Nous avons vu des films assez sérieux quand j’étais enfant. Nous avons vu Elephant Man quand j’avais quelque chose comme six ans. Ça a eu un sacré impact sur moi. J’ai dû voir E.T. au cinéma vingt-huit fois [rires]. J’adore E.T., c’était un grand film pour moi. Je suis un immense fan de films, j’adore les classiques – donc c’est une énorme influence. Quand moi ou les autres écrivons un riff, il y a toujours un petit film qui se joue dans ma tête pour poser la scène et définir de quoi pourront parler les paroles, ou quel sera le concept, en fonction du ressenti que m’a apporté le riff et de ce film qui est apparu dans ma tête ou auquel je l’ai associé.
Pour moi, le cinéma est sans doute la forme artistique ultime, où toutes les autres formes artistiques sont représentées en une seule fois. Tu as la musique, l’art visuel, l’art dramatique et l’écriture. Le cinéma est la forme artistique suprême. Donc oui, j’adore les films et ils ont une grande influence sur l’art de Mastodon. Quand nous faisions Once More ‘Round The Sun, nous avions 2001 : L’Odyssée De L’Espace et Rosemary’s Baby en boucle dans le salon ; ils passaient tout le temps. Je crois que pour Blood Mountain, nous avions La Montagne Sacrée d’Alejandro Jodorowsky qui passait presque en continu. Pour cet album, nous avions Dune assez souvent, Rosemary’s Baby encore, Le Pont De La Rivière Kwaï et Docteur Jivago. Que des films épiques !
Tu es également sur le point de sortir un livre, Brann Dailor’s 101 Clowns Of The Coronavirus, un recueil de tes dessins de clowns. Pendant la pandémie, tu as dessiné un clown par jour pendant cent-un jours consécutifs. Peux-tu nous parler de ton obsession pour les clowns, de ton histoire avec eux et de ce qu’ils symbolisent pour toi dans cette période bizarre ?
J’ai toujours aimé les clowns, rien que d’un point de vue esthétique. Je les trouvais drôles quand j’étais gamin. À la fin de l’adolescence, j’ai commencé à collectionner les peintures sur velours, un art mexicain à la craie. À Tijuana, ils vendaient des peintures sur velours d’Elvis aux touristes. Mais cette forme d’art a également produit beaucoup de clowns. J’ai commencé à les collectionner et j’en ai plusieurs. Ils sont un peu flippants et bizarres, j’aime bien. Quand j’ai emménagé dans ma nouvelle maison, j’ai rassemblé tous les trucs liés aux clowns dans une pièce – c’est ma pièce à clowns. J’ai beaucoup de clowns dans toute la maison. C’est juste marrant. Ils me rendent heureux, j’adore les regarder. Quand la pandémie et le confinement sont arrivés, j’avais besoin d’un exutoire artistique, alors j’ai commencé à dessiner. J’avais plusieurs idées pour des clowns, donc j’en ai dessiné un une fois et je l’ai envoyé à des amis. J’en ai fait un autre le lendemain et je l’ai aussi envoyé à des amis, et par effet boule de neige, j’ai ajouté des gens à la liste parce que tout le monde était en quarantaine et que mes clowns quotidiens avaient l’air d’illuminer leur journée. C’est devenu important pour beaucoup de gens. Ils ont reçu un clown par jour, et cent un jours plus tard, j’ai dû arrêter parce que je devais retourner travailler avec Mastodon. Mais ça m’a vraiment aidé à traverser la pandémie sans m’effondrer mentalement.
Interview réalisée par téléphone les 20 & 29 octobre 2021 par Nicolas Gricourt.
Retranscription : Emilie Bardalou.
Traduction : Tiphaine Lombardelli.
Site officiel de Mastodon : www.mastodonrocks.com
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