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Interview   

Me And That Man : les vacances de Nergal


Me And That Man, le nouveau projet du leader emblématique de Behemoth, Nergal, en association avec John Porter, musicien anglo-polonais, est très loin du son massif de sa formation black/death. Ici, c’est en voix claire, à nu, comme il le dit lui-même, accompagné de guitares épurées, que Nergal nous revient, avec ce Songs Of Love And Death, qui ne cache pas son inspiration, puisée notamment chez Leonard Cohen, mais aussi les Nick Cave et autre Johnny Cash.

Bien au-delà de l’éternelle modestie teintée d’auto-dérision qui anime les deux musiciens, c’est un entretien des plus authentiques que le duo nous livre, de la genèse de ce projet, de ses inspirations, des craintes et des apports de chacun, jusqu’à sa concrétisation et aux espoirs que les deux hommes nourrissent pour l’avenir du groupe. Sans compter une anecdote croustillante sur les retombées de la popularité de Nergal en Pologne…

« J’imagine que les gens qui escaladent des pics de sept mille ou huit mille mètres, dès lors qu’ils commencent à avoir de l’assurance, ils meurent. Il faut donc avoir du respect pour l’inconnu, et il faut rester curieux de ce qu’il y a derrière les portes. »

Radio Metal : Apparemment le point de départ pour ce projet était la chanson « The Highwaymen » que vous avez faites avec deux autres polonais. Mais comment vous vous êtes rencontrés au départ ?

Nergal (chant & guitare) : Je suis content que tu aies révisé ! [Petits rires] Car peu de gens savent ça. Le gars qui s’appelle Maciej Maleńczuk, qui est un artiste indé polonais reconnu, m’a appelé et m’a dit : « Hey, est-ce que ça te dirait de faire partie de cet album de country sur lequel je travaille ? » Je suis là : « Ouais, ok. J’ai dans l’idée de faire ‘The Highwaymen’ en polonais. » J’ai tout de suite pensé à John, l’autre gars a appelé Gienek Loska – tu n’es pas obligé de mentionner ces nom parce que tu vas te casser les doigts et la langue, ou peu importe, tu vas devoir te faire du mal pour comprendre le polonais, donc ne le fais pas [rires]. Et ensuite, nous avons fini par collaborer mais nous ne nous sommes jamais rencontrés en studio. Nous avons donc fait seulement une chanson, sans se rencontrer. Je dirais que deux ans plus tard, j’ai appelé John, nous sommes allés dans un restaurant, nous nous sommes posés, nous avons parlé et avons dit : « Hey, ça te dis de jammer et voir où ça peut nous mener ? » « Pourquoi pas. » Ainsi nous avons tout de suite commencé à jammer sur des chansons.

Nergal, quelle a été ta relation à la musique folk et country ? Tu as notamment déclaré que tu t’es rendu compte que tu avais le blues dans le sang…

J’ai du sang bleu ! Tu as mal compris [rires]. C’est la première chose, vous devriez en savoir quelque chose, les Parisiens. La seconde chose est que j’espère que je n’ai rien à voir avec la country [petits rires]. Je viens d’une cave… En fait, j’ai rampé hors d’une cave, donc je suis loin de ça. Nous jouons différents styles, nous jonglons avec différentes formes et genres de musique, donc nous jouons et flirtons avec tout ça. Je veux dire que nous qualifier de country n’est pas très…

John Porter (chant & guitare) : Je ne sais pas d’où ce truc avec la country est venu ! Car il n’y a pas du tout de country ! C’est trop heavy pour être de la country, à moins que nous ayons découvert une nouvelle forme de country [petits rires], peut-être.

Nergal : Non, nous avons découvert la cunt-ry [rires]. C’est ça le truc. Tout est une question d’étiquetage. Nous ne sommes pas très bons pour faire ça, donc les gens essaient toujours de nous mettre en boite, et il n’y a pas de souci avec ça, vous avez besoin de le faire, mais pas nous. Nous sommes simplement contents de jouer de la musique simple et cool que nous aimons et c’est tout.

La musique de Me And That Man est plus dans la continuité de ce que John fait. Aurais-tu été suffisamment à l’aise pour faire ça seul ?

Non, et je ne le suis toujours pas. Mais la vie est remplie de défis ! J’imagine que les gens qui escaladent des pics de sept mille ou huit mille mètres, dès lors qu’ils commencent à avoir de l’assurance, ils meurent. Il faut donc avoir du respect pour l’inconnu, et il faut rester curieux de ce qu’il y a derrière les portes, c’est toujours sympa et excitant d’explorer ce qui se cache derrière. C’est le sentiment que ça me procure. Je ne dis pas que je suis un gagnant au départ, mais je le suis par mon attitude. Peut-être que je suis complètement nul là-dessus ! Je n’en sais rien ! Mais je suis surexcité et dingue de ce projet, et ce que je fais me passionne. Rien n’est simulé, il n’y a pas de gimmick, pas de conneries ici. C’est comme c’est. Laissons les gens s’y faire, d’une certaine manière. Je m’y fais moi-même du mieux que je peux [petits rires].

John, Nergal étant tout d’abord un musicien de death metal, avais-tu des préjugés à son encontre ?

John : Non parce que je pense être quelqu’un d’ouvert musicalement, donc je n’ai aucune prédisposition pour qui que ce soit, sauf que je ne suis pas vraiment un grand fan de musique pop. Mais aussi, voilà le truc : si une chanson est bonne, alors elle est bonne, n’est-ce pas ?

Nergal : Vrai.

John : Ca n’a pas d’importance qui la chante, absolument pas. Donc je n’avais pas de préjugé. Je savais juste qu’il était cet « enfant terrible » (en français dans le texte, NDLR) qui, de temps en temps, secouait l’establishment en Pologne. Donc je pensais, quoi qu’il en soit, que ce serait assez cool de le rencontrer, de voir quel genre de personne il est. Donc j’ai été à notre première rencontre pour voir qui il est ou, disons plutôt, qu’est-ce que c’est, peu importe [petits rires].

« Je pensais que ce serait assez cool de rencontrer [Nergal], de voir quel genre de personne il est. Donc j’ai été à notre première rencontre pour voir qui il est ou, disons plutôt, qu’est-ce que c’est [petits rires]. »

Pouvez-vous nous dire comment a fonctionné le processus de travail, la composition, etc. entre vous deux ?

Nous avons balancé pas mal d’idées entre nous et parfois nous emportions certaines de ces idées avec nous à la maison, nous travaillions sur les chansons, les paroles, etc. avec une approche plutôt organique, pareil avec l’enregistrement.

Nergal : Ouais, je pense que ça fonctionne comme ça : nous délirons avec des idées, nous faisons du ping pong avec elles entre nous, ensuite nous finissons dans un studio à les enregistrer en démo et à discuter, pour savoir si nous aimons ou pas, ou nous modifions des choses, ou retirons quelque chose des compositions, et voilà. C’est super organique, très simple. Il n’y a pas de philosophie là-dedans, vraiment, et il n’a pas à y en avoir, je suppose.

John : Et il n’y a pas tellement de règles.

Nergal : J’aime ce projet du fait que c’est super simple. Et tu sais quoi ? Nous recevons plein de… Bon, « plein », pas vraiment mais nous recevons des critiques comme quoi c’est presque primitif, et je me dis, c’est un compliment en fait !

John : Il y a ce vieil adage : moins c’est mieux, n’est-ce pas ?

Nergal : D’un autre côté, si les critiques viennent de ceux qui écoutent du progressif, alors, automatiquement, ça nous met dans une position… Par exemple, John a trouvé ce terme génial hier : « Hey, peut-être qu’on joue tout simplement du rock régressif ?! » Bingo ! Nous avons trouvé ! Donc s’il vous plaît, il n’y a pas de country, pas de blues… Me And That Man joue du rock régressif, et à l’occasion de la musique cunt-ry [rires]. J’adore !

Qu’est-ce que chacun de vous a apporté au projet et à ces chansons ? Quelles sont vos forces respectives que vous avez amenées à ce projet ?

John : Ou « faiblesses respectives » [rires]. Nous avons mis sur la table, apporté à ce projet, ce que nous avions. C’est à peu près tout. Personne n’essayait d’être meilleur que l’autre. Nous avons apporté nos idées, les avons partagées, et c’est devenu le projet.

Nergal : Oui. En fait, je suis conscient de mes faiblesses.

John : Putain mais de quoi tu parles ?

Nergal : Ouais mais tout est une question d’en avoir conscience. Je sais simplement ce que je peux faire avec mes capacités mais ça n’enlève rien de ma passion dans ce que je fais. Tu vois ce que je veux dire ? D’une façon ou d’une autre je vais parvenir à injecter cette passion dans la chanson et l’album. Tu sais quoi ? Je le sais depuis un petit moment maintenant, et je n’essaie pas de concourir avec quiconque ou quoi que ce soit, car le monde est rempli de shredders, de super chanteurs et ainsi de suite. Est-ce que tu imagines qu’on mette Yngwie Malmsteen ici dans le groupe ? Ou putain, Whitney Houston qui chanterait dans ce groupe ? Tu vois où je veux en venir ? Ce n’est pas une question d’à quel point tu es un génie dans ce que tu fais. C’est le cœur que tu mets dans cette entité, et c’est ce pour quoi nous sommes ici. C’est tout. Voilà ce que c’est.

John : Whitney est morte, non ?

Nergal : Ouais…

John : [Rires] Ce n’est pas le meilleur exemple !

La musique de Me And That Man est évidemment très différente de Behemoth. Mais dirais-tu que ce ne sont que deux faces d’une même pièce, d’une certaine façon ?

Nergal : Oui. Nous avons même vu des commentaires où des gens disaient qu’ils voyaient un lien entre ce que je fais dans mon groupe principal et ce que je fais là. J’imagine qu’il y en a un. Mais d’un autre côté, c’est différent. Mais ça reste moi. Le personnage de scène, c’est la même personne, simplement avec tout le matériel et tout, et les circonstances ne sont pas les mêmes, mais c’est le même gars, celui qui est assis en face de toi.

John : On ne peut pas attendre d’une personne de rester tout le temps au même endroit. C’est comme si quelqu’un ne partait jamais en vacances [rires], genre « non, j’ai peur de l’avion » ou peu importe. Et ce qu’il fait dans ce projet, je pense, une partie ira dans ce qu’il fera dans ses prochains projets. Surtout musicalement, personne n’est le même une fois qu’il a été ailleurs. Exactement comme je suis certain qu’on retrouvera un peu de ça dans les choses que je vais faire plus tard. C’est donc du gagnant-gagnant à tous les niveaux.

Nergal : Après tout, nous apprenons l’un de l’autre, nous auront appris de cette expérience, ça ne fait pas de doute.

Et qu’avez-vous appris l’un de l’autre dans ce projet ?

John : J’ai découvert son substitut au sucre, en fait ! C’est plutôt bon. Je ne connaissais pas avant, donc c’est la plus grosse chose que j’ai appris dans ce projet [petits rires].

Nergal : Et j’ai apporté un peu de chaos dans sa vie, j’imagine [rires].

John : C’était un vrai processus d’apprentissage !

« Nous chantons à propos de nos ombres, en un sens, que ce soit en étant suivis par nos ombres ou en courant après nos ombres, à essayer de les rattraper. »

Il y a de toute évidence une intimité dans cette musique. N’est-ce pas plus difficile de jouer et chanter ce type de musique, où tu es peut-être plus vulnérable, que d’être derrière un gros mur du son ?

Nergal : Eh bien, oui, d’une certaine façon c’est le cas. Car, en gros, tu es nu. C’est ta voix, brute, sans delay additionnel, sans réverbération et ce genre de conneries. Ce n’est que ta voix et une guitare acoustique, ou un crunch, peu importe. Il n’y a donc pas tellement de couches dans cette musique. De fait, tu es dépouillé, tu es nu, pas de frime ! Allez ! Et d’un autre côté, c’est simple parce que la structure est simple. Rien que deux accords font une chanson et quelques mots clefs font toute une histoire. C’est juste quelque chose d’une autre nature. Mais ça a du sens ici et ça a du sens là-bas.

Behemoth devient toujours plus gros et audacieux, et tu as toi-même dit que tu avais besoin de Me And That Man pour l’équilibrer et ne pas devenir fou avec Behemoth. Dirais-tu que ce projet était vital pour toi ?

Très rafraichissant et très revitalisant, ça c’est certain.

John : Ce sont des vacances, n’est-ce pas ? [Rires]

Nergal : Ouais, dans un sens. C’est simplement bon d’aller ailleurs et puis revenir d’où tu viens, juste pour voir les choses sous une perspective différente. C’est cool, j’aime ça !

Behemoth est super heavy mais dirais-tu – et John, tu y as fait allusion – que Me And That Man est également heavy mais différemment ?

John : c’est bien plus heavy que je ne pensais que ça le serait ! [Petits rires] Mais ça s’est avéré être une bonne chose. Ouais, bien sûr, il n’y a rien de sorcier là-derrière. Si tu mets ce gars-là dedans, alors ce sera forcément un peu plus heavy.

Nergal : Je ne sais pas, peut-être que j’aurais pu aller à fond metal mais…

John : Ah, mais quel intérêt ? [Petits rires]

Nergal : Ouais, c’est bien la question…

John : C’est un reflet de nos caractères. Ce n’est évidemment pas dans la veine de Behemoth, avec un mur de son, de la perfection, du note à note à note… C’est juste… Tu peux vraiment entendre la collaboration entre deux personnes, d’où nous venons. D’un seul coup, tu as ce genre de petite atmosphère à la Behemoth, tu as plein d’overdubs et autres, et ensuite ça revient à quelque chose de très simple. Donc c’est un échantillon très équilibré de ce que nous sommes en tant que musiciens, je pense.

On pouvait voir avec The Satanist que tu ouvrais ta musique à de nouveaux territoires. Mais là, tu prouves vraiment que ta fibre artistique va bien au-delà du metal, ce dont, probablement, peu de monde se doutait. Est-ce important pour toi de ne pas te contraindre artistiquement ?

Nergal : Je ne peux pas contrôler les gens, ce qu’ils en disent, mais mes actions parlent pour moi. Je ne fais que des choses qui me représentent. Donc évidemment, en faisant ça, je mets en évidence mon ouverture d’esprit et ma liberté artistique, et ce que les gens en feront, je ne le contrôle pas du tout. Mais oui, tout est une question de liberté, c’est pour ça que nous sommes là.

Tu es connu en tant que vocaliste de death metal mais, en fait, tu chantes sur cet album. Etait-ce un défi de le faire ou bien tu t’es tout de suite senti à l’aise ?

Ouais, c’était un défi, et ça l’est toujours. John a fait ça la majeure partie de sa vie, donc c’est dans ses gènes, dans son sang, alors que moi, je dois encore apprendre et ce processus ne s’arrêtera probablement jamais si je veux continuer à faire ce genre de musique. Mais c’est cool ! J’ai quarante ans, je commence une nouvelle chose maintenant – j’ai commencé il y a quelques années mais… C’est cool ! C’est bon d’être tout neuf et vert, en train de débuter dans quelque chose que tu ne connaissais pas avant, c’est bien !

Au niveau des paroles, ça reste très noir, au mieux mélancolique. Quels genres de thématiques est-ce que vous évoquez et comment les abordez-vous ?

[Avec une voix sinistre] Dépression, suicide… [Rires] Misanthropie, isolation… [Rires]

John : Désolation et violation… la fin du monde est pour maintenant…

Nergal : Analation… Non, c’est, je veux dire…

John : Mais c’est quand même un peu ça, non ? C’est un peu tout ça parce que nous chantons à propos de nos ombres, en un sens, que ce soit en étant suivis par nos ombres ou en courant après nos ombres, à essayer de les rattraper. Et donc nous traversons tout plein de petites émotions même tous les jours, toi et n’importe qui ici. C’est juste que nous, nous pouvons les mettre sous une certaine forme et chanter à leur propos. [Avec une voix plaintive] « Oh, regardez-moi, je suis tellement pauvre, s’il vous plaît, ayez pitié de moi ! » [Rires] « Il fait si sombre ici ! »

Nergal : Non, je dirais qu’en général, nous avons pas mal de vitalité, mais trouvons que, ceci étant… C’est juste que je ne peux imaginer, je ne sais pas, « Cross My Heart And Hope To Die » comme chanson qui parlerait de fleurs et d’arc-en-ciel. Ce serait contradictoire. Ça n’irait pas. Donc nous faisons ce qui semble convenir à la musique. Donc si un jour nous montons un groupe de reggae, ce que je n’espère pas, nous parlerons de fleurs et de soleil qui brille.

John : En souriant…

Nergal : Que des choses positives et naïves.

John : Mais c’est un peu le vieux cliché, n’est-ce pas ? Le truc, c’est que pour une raison, qui est assez évidente, la souffrance semble faire ressortir le meilleur en quelqu’un, que l’on aime ou pas, car alors, tu traverses vraiment quelque chose. Il y a une philosophie dans le sens où le mauvais amène du bon et vice versa, car lorsque tu es dans une mauvaise situation, tu dois faire quelque chose, alors que lorsque tu es dans une bonne situation, tu arrêtes de faire quoi que ce soit. Il faut trouver cet équilibre.

Nergal : Vrai.

« Il y a une philosophie dans le sens où le mauvais amène du bon et vice versa, car lorsque tu es dans une mauvaise situation, tu dois faire quelque chose, alors que lorsque tu es dans une bonne situation, tu arrêtes de faire quoi que ce soit. Il faut trouver cet équilibre. »

Le nom de l’album, Songs Of Love And Death, est un clin d’œil à l’album de Leonard Cohen Songs Of Love And Hate. Qu’est-ce que ceci et Leonard Cohen représente pour vous ?

C’est un classique ! Et tu sais quoi ? Je pense honnêtement que, même si c’est une paraphrase de son titre, ça fait que le nôtre, et même si ça sonne cliché, sonne aussi classique. Donc peut-être qu’on s’en souviendra dans vingt ans. Si les gens se souviennent de cet album, et j’espère que ce sera le cas, ils se diront : « Oh merde, il a ce côté classique dans le titre. » Quand bien même le titre de départ était génial, mais nous avons dû abandonner l’idée. Car le titre original de l’album était Love Is A Dog From Hell mais c’était l’idée de quelqu’un d’autre, nous avons piqué toute l’idée. Donc maintenant nous avons piqué l’idée à un classique mais nous avons déconné avec. Nous avons fait une petite bidouille et ça va faire que ce sera le nôtre. Mais aussi, je vois ça comme un genre d’hommage à Leonard Cohen, pourquoi pas ? C’est une bonne façon de voir la chose.

Dans le nom du projet, je suppose que « Me » fait référence à toi, Nergal, et « That Man », c’est toi, John…

Pourquoi ?

C’est une hypothèse au hasard ! Ce pourrait être l’inverse…

Exactement. Donc laissons ça sans réponse [petits rires]. Jouons avec ça. C’est un nom sympa parce que tu peux jouer avec et débattre à son sujet, c’est cool !

Etait-ce délibéré d’avoir ce caractère anonyme ?

Ouais, parce que la première idée, pour des raisons évidentes, était Darski And Porter. C’était ça au départ. Mais après, c’était trop évident, donc la réaction automatique était : « Mec, c’est putain de cheap ! »

John : Ça manquait vraiment d’imagination. C’était vraiment nul [petits rires].

Nergal : Et puis, lui donner nos noms, même si nous sommes derrière ce groupe, c’est ce côté égocentrique : « Hey, c’est moi ! » Alors que Me And That Man, c’est n’importe qui. Je trouvais que ce nom, avec ce côté anonyme, sonnait cool ! Je ne sais pas, j’aime bien !

John : C’est juste des gens qui font quelque chose [petits rires].

Nergal : Exactement, c’est n’importe qui. Il y a un côté léger, pas prise de tête.

John : Pourtant les gens pensent toujours : « Bon sang, vous ne pouviez pas trouver quelque chose d’un peu mieux pour que ce soit plus intéressant ? »

Nergal : Ouais, même « plus individuel ». Mais je trouve qu’appeler le groupe Me And That Man est bien plus individuel que l’appeler Darski And Porter.

John : Darski, ça sonne un peu tragique. Ça aurait été vraiment dark [rires].

Pouvez-vous nous parler des autres musiciens et chanteurs impliqués dans l’album ? On peut notamment entendre une chanteuse et même un chœur d’enfants…

Nergal : Tout le concept était très ouvert. Donc lorsque nous étions en studio, nous avons juste passé un coup de fil à certains de nos amis, genre : « Hey, ramène toi au studio faire des chœurs et une apparition en tant qu’invité. » Voilà donc comment certaines personnes se sont retrouvées à jouer sur l’album. Ce n’est rien de très sérieux. Nous ne cherchions pas à faire la publicité de l’album avec les noms de nos amis. Pas que ce soit des anonymes, au contraire, certains d’entre eux sont assez connus en Pologne, mais ce n’était pas le but. Le but était d’avoir une assemblée de gens qui se mettent dans le même état d’esprit.

John : Simplement rassembler les gens.

Nergal : Exactement, c’est une question d’unité, en gros. Et ils étaient suffisamment sympa pour venir au studio. Ils seront dans les crédits ; si je commence à mentionner tout le monde, je vais oublier quelqu’un…

John : Et il va s’offusquer…

Nergal : Ouais. De bonnes personnes, de bons amis.

« Tu peux rester dans l’ombre, tu n’énerveras personne ni ne rendras personne heureux, mais tu deviendras une ombre. »

Pensez-vous que cette collaboration pourrait aller plus loin ?

Je n’en sais rien pour le futur, on verra. Nous n’avons pas de vision pour les cinq ou dix prochaines années. Dix ans, c’est long, et j’ai déjà traversé des soucis de santé. Chienne de vie ! Mais pour l’instant, nous avons des plans pour les quelques prochains mois, des plans de tournées, espérons que ça marche bien, nous allons nous éclater, nous allons nous faire de nouveaux fans, nous allons rendre des gens heureux, nous allons en énerver…

John : Espérons que nous allons énerver des gens [rires].

Nergal : Ouais, c’est comme ça que ça fonctionne ! Ça arrive automatiquement, rien qu’en restant toi-même, en gros. Tu peux rester dans l’ombre, tu n’énerveras personne ni ne rendras personne heureux, mais tu deviendras une ombre.

John : C’est ça le truc, tu ne peux pas contenter tout le monde, donc la meilleure chose et la plus sensée est juste de faire ton propre truc.

Nergal : Joue ton propre jeu, comme on dit [petits rires].

Nergal, tu es devenu populaire en Pologne, surtout depuis que tu as été un juré dans l’émission de télé The Voice. Penses-tu que les gens en Pologne attendaient quelque chose de ce genre de ta part, quelque chose d’un peu plus « mainstream », pour ainsi dire, que Behemoth ?

Je ne sais pas ! Il faudrait qu’on demande aux gens en Pologne !

John : Je ne crois vraiment pas que les gens en Pologne aient réfléchi à ça [petits rires]. Si tu penses aux gens en Pologne, je crois que tout le monde espère qu’il quittera le pays [rires]. « Laissez nos églises tranquilles ! »

Nergal : Donc non, ce que je fais est la derrière chose à laquelle pensent les gens en Pologne [petits rires].

John : [Avec une voix emphatique] « Ecoutez-moi peuple de Pologne! Je viens à vous aujourd’hui ! »

Nergal : “Le pape noir est de retour!” Non… je ne sais pas. C’est ça qui est le plus cool dans le fait d’être artiste : dans tous les cas, tu ne fais que ce que tu veux faire. Certaines personnes adoreront, certaines personnes détesteront, certaines personnes seront indifférentes.

John : Tu dois certainement être plus populaire hors de Pologne qu’à l’intérieur du pays.

Nergal : Peut-être…

John : J’en suis sûr car il est ce qu’on peut appeler une célébrité, dans le sens où tout le monde le connait, mais combien le vénèrent en tant que fans ? C’est autre chose.

Nergal : Tu sais, parfois, lorsque je suis de mauvaise humeur et que les gens vont à ma rencontre dans la rue, ils me demandent un autographe, je leur demande le titre de mon dernier album, et ils sont là : « Euh, désolé… » Et ensuite ils font une recherche sur Google mais c’est trop tard. C’est ce qui arrive lorsque je veux être méchant.

John : C’est genre quand des gamins viennent pour des autographes, n’est-ce pas ? Les parents sont à côté… Et ils ne savent rien sur ce que tu fais !

Nergal : Je me souviens, j’étais chez moi, à Sopot, il y a environ trois ans, j’étais assis seul – ou avec un ami, je ne me souviens plus maintenant –, dehors, sur la terrasse d’un café, et il y a un enfant qui vient me voir, il avait dans les cinq ans. Il est venu me voir, il me souriait, je lui ai souri en retour parce que je comprends qu’il veut peut-être une photo ou un autographe, tu ne dis jamais non aux enfants, tu es gentil et poli, tu leur donnes ce qu’ils méritent. Et ensuite il se met à dire : « Est-ce que tu es Nergal ? » « Oui, c’est moi ! » « Est-ce que tu sortirais avec ma mère ? Elle est assise là-bas ! » Et elle était assise dans un autre café de l’autre côté de la rue…

John : [Rires] Elle se préparait…

Nergal : J’étais, genre, choqué, bon, pas choqué mais comme « uh ! », sans voix ! Et je suis là : « Ouais, je vais y réfléchir, passe lui le bonjour. » [Rires] Mais ouais, ça m’est arrivé une fois.

Interview réalisée en face à face le 17 janvier 2017 par Aline Meyer.
Fiche de questions : Philippe Sliwa & Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.
Photos : Oskar Szramka.

Site officiel de Me & That Man : www.meandthatman.com

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