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Interview   

Melted Space : espace de rencontres


Aucun artiste faisant de l’opéra metal ne ressemble à un autre, dans la mesure où cette appellation ne fait pas référence à un registre musical mais à un concept général d’album dont le fil rouge est une histoire interprétée par plusieurs chanteurs. Il s’agit d’un tout autre travail que celui de la réalisation d’un album traditionnel puisqu’en plus de l’écriture de la musique et des textes, l’auteur et les interprètes doivent se concentrer sur leur manière d’intégrer leurs parties musicales dans une histoire. Il s’agit donc d’un exercice intéressant qui permet souvent de faire sortir certains musiciens de leur zone de confort. En l’occurrence, le projet de Pierre le Pape, Melted Space, est un opéra metal intégrant sur ce nouveau disque The Great Lie quelques influences de metal extrême. Pierre a donc fait appel à des chanteurs tels que David Vincent (ex-Morbid Angel), Attila Csihar (Mayhem) et Niklas Kvarforth (Shining) que nous étions curieux de découvrir dans un tel contexte.

En plus de parler musique dans cette interview, on parle donc d’écriture, de mise en scène, de psychologie de personnages ou de jeu d’acteur. Et évidemment, passage obligé pour tout album estampillé « opéra metal », on parle du casting, élément vendeur mais aussi potentiellement traître de ce type de projet. Un casting incluant notamment l’incontournable en la matière, Arjen Lucassen, s’aventurant lui aussi en dehors de sa zone de confort, puisque présent ici en tant que simple invité.

« C’est un exercice de style pour eux (les invités) car ça leur faisait faire quelque chose dont ils n’ont absolument pas l’habitude. »

Radio Metal : Votre nouvel album s’intitule The Great Lie, à quel mensonge faites-vous allusion avec ce titre ?

Pierre Le Pape : Cela fait référence à un mensonge de certains protagonistes de l’histoire fait à l’un des deux héros, ce qui mène à la fin tragique de l’album.

Avec des morceaux comme « Listen To The Song Of Despair », « A God Is Dead », « Hopeless Crime » ou encore « Lost Souls From The Other Side », l’album semble beaucoup parler de désillusion, de rêves brisés… D’où vient ce ton assez sombre ?

C’est vrai qu’au départ je n’aime pas trop les histoires qui finissent bien car je trouve ça trop classique on va dire. J’ai essayé de construire l’album de façon à ce que l’on sente en permanence une espèce de destin qui s’abat sur les héros, de telle façon qu’à la fin quand cela finit vraiment mal on ait vraiment l’impression qu’en fait ils n’ont jamais eu le choix et que le sort était jeté dès le début. C’est vraiment une volonté de ma part de présenter les choses sous un angle assez fataliste.

Attila Csihar de Mayhem, David Vincent de Morbid Angel, Niklas Kvarforth de Shining, il y a sur l’album plusieurs invités qui viennent d’univers musicaux assez sombres. Penses-tu que le thème de l’album nécessitait d’avoir des invités issus de ce type de registre ?

En fait dans ma façon de voir les choses, tout part de l’histoire. Une fois que j’ai écrit l’histoire, je me suis demandé quel caractère je voulais donner à chaque personnage et donc quel était le chanteur idéal pour l’interpréter. Je voulais des grands méchants marquants avec un charisme naturel tels que l’on peut avoir dans le cinéma, comme Dark Vador par exemple. Le nom des différents chanteurs m’est apparu assez naturellement. Après j’ai eu la chance qu’ils acceptent de participer, c’est un exercice de style pour eux car ça leur faisait faire quelque chose dont ils n’ont absolument pas l’habitude. C’est ça aussi qui les a intéressés, changer un petit peu de registre par rapport à ce qu’ils ont fait dans leur carrière. Cela m’a permis de mettre en avant le côté théâtral de l’opéra metal.

On n’aurait pas forcément imaginé des artistes de l’opéra metal assez symphonique. Leur as-tu présenté le projet comme de cette façon, qu’ils pourraient faire quelque chose de très différent ?

Je leur ai plutôt proposé notre univers d’opéra metal très orchestré et ce travail de comédie leur a plu tout de suite, cela les amenait vers quelque chose qu’ils n’avaient pour la plupart jamais fait. Je me souviens que David Vincent m’a appelé un soir sur mon téléphone, ça m’a fait vraiment bizarre, pour parler de la psychologie de son personnage. Il avait pas mal réfléchi à la question. C’est vrai que du coup on a pu faire un vrai travail, un travail d’acteur presque. Que ce soit Attila, Niklas, Mariangela, tous se sont vraiment investis dans l’enregistrement et ont fait suivre le projet, l’ont partagé. On a pu avoir un véritable échange, très enrichissant en plus, sur comment interpréter au mieux tous ces personnages et en même temps faire en sorte que tout cela serve l’histoire au maximum.

Est-ce que certains étaient mal à l’aise dans ce jeu d’acteur, as-tu eu besoin de les guider ?

Ils m’ont tous posé des questions pour savoir ce que je voulais, comment je voyais les choses, comment était l’histoire et leur personnage, en sachant que eux de leur côté avait réfléchi à la question. Aucun n’a été mal à l’aise vis-à-vis de ça dans la mesure où je les ai contactés avant de composer, du coup j’ai vraiment pu écrire sur mesure au niveau des tessitures des voix. Vu qu’ils n’avaient absolument pas de problème musical et qu’ils étaient assez confiants, on a vraiment pu se concentrer sur l’artiste en tant que tel.

Tu as collaboré avec l’orchestre de Prague pour cet album, pourquoi ce choix ? Pourquoi si loin en fait ?

Pour plusieurs raisons, j’avais déjà acheté plusieurs de leurs albums, notamment des musiques de film, et je préférais certaines de leurs versions aux originales. Ils ont un son très travaillé. C’est un orchestre qui a fait énormément de musiques de film, comme le Labyrinthe de Pan ou Lawrence D’Arabie. Ils ont déjà collaboré avec Within Temptation, Dimmu Borgir, Septicflesh donc ils ont aussi l’approche de la musique beaucoup plus moderne et du rock. C’était aussi assez étudié dans le sens où si j’avais fait exactement la même chose en France cela m’aurait coûté trois fois plus cher. Ils ont une qualité de son, d’enregistrement, d’exécution avec un prix défiant toute concurrence. Ils réunissaient toutes les conditions possibles.

Cet album a été enregistré en France et à l’étranger, comment avez-vous fait pour maintenir une cohérence dans le son ?

J’ai travaillé avec un réalisateur d’albums qui s’appelle François-Maxime Boutault qui fait pas mal de prods pour Universal Music. Il a un peu été le régisseur technique, il a veillé à la continuité de la qualité du son, à faire en sorte que tout soit cohérent que ce soit dans l’enregistrement des instruments électriques et des voix ou dans l’enregistrement à Prague. Il a vraiment tout coordonné, on a fait un vrai bon travail ensemble.

Est-ce que tu t’inspires d’autres artistes d’opéra metal et comment te différencies-tu par rapport à eux ?

Je suis très, très influencé depuis des années par Arjen Anthony Lucassen (Ayreon, Star One), dans une moindre mesure par Avantasia, que j’aime beaucoup mais voilà, je suis très fan d’Ayreon. Sans forcément m’inspirer, on va dire que les procédés sont assez identiques, il y a une histoire à mettre en scène. Après je me différencie dans le style, j’utilise les codes de la musique extrême, du black, du death, des choses bien plus agressives que ce que l’on peut trouver dans Ayreon ou dans Avantasia.

« Je me souviens que David Vincent m’a appelé un soir sur mon téléphone, ça m’a fait vraiment bizarre, pour parler de la psychologie de son personnage. Il avait pas mal réfléchi à la question. C’est vrai que du coup on a pu faire un vrai travail, un travail d’acteur presque. »

Comme tu le dis, tu insères des éléments black ou death dans ton opéra metal, penses-tu que tous les styles peuvent être intégrés de la sorte ? Du punk ou du grind par exemple ?

Tout dépend de l’histoire en fait. Personnellement je ne suis fermé à rien dans la mesure où c’est justifié par l’histoire ou l’utilisation d’un personnage. Tu évoques le punk ou le grind, pour un personnage chaotique il faut un style très épuré, très direct, très agressif pour symboliser ça. Après c’est vrai que, de but en blanc, ce n’est pas vraiment le style auquel je penserais au départ. Mais pourquoi pas.

Est-ce que tu penses qu’opéra metal signifie forcément grandiloquence ?

Non, pas forcément. Ayreon, par exemple, est créé dans la veine progressive sans jamais utiliser d’orchestre ou d’éléments grandioses et cinématographiques comme je peux le faire. C’est vraiment un style suffisamment ouvert pour que chacun puisse s’exprimer comme il l’entend.

Tu parlais d’Arjen Anthony Lucassen, il se trouve qu’il est présent sur le disque, on a plus l’habitude de le voir en tant que compositeur qu’invité, est-ce facile de travailler avec lui quand ce n’est pas lui qui dirige les opérations ?

C’est très facile, les seuls problèmes rencontrés furent des problèmes d’agenda car il était en pleine production de The Gentle Storm. La collaboration avec lui a été possible dans un moment où il n’était pas occupé, ce qui arrive rarement ! [Rires] Après il a été très, très ouvert, il s’est vraiment mis au service du projet, d’autant plus que j’avais spécialement écrit ce morceau pour lui. C’était une sorte d’hommage, j’étais très content quand il a accepté, quand il l’a fait, il m’a redit récemment que ça lui avait vraiment plu, qu’il trouvait la musique belle. C’était le plus beau compliment qu’on pouvait me faire, surtout venant de lui. Du coup, oui, ça s’est très, très bien passé.

A-t-il essayé de t’influencer dans ta direction artistique ?

Non, pas du tout, le morceau était déjà écrit quand je l’ai invité. C’est vraiment l’un des invités sur lesquels je voulais vraiment mettre l’accent, du coup je lui ai présenté un produit fini afin de mettre toutes les chances de mon côté. On a pas mal échangé pour trouver le créneau sur lequel on pourrait enregistrer. On a plus échangé sur l’avancée de son projet et du mien, il y avait un une sorte de parallèle qui se faisait sur la calendrier et après il a pris le projet tel qu’il était. Il m’a demandé carte blanche, de façon à être libre, je lui ai évidemment accordé [rires] et je n’ai pas été déçu !

Est-ce que tu penses qu’un jour il t’invitera sur un album d’Ayreon ?

Je ne sais pas ! [Rires] J’adorerais mais euh… je sais pas ! Je t’avoue que je ne me suis pas posé la question ! [Rires]

Les albums d’opéra metal regorgent souvent d’invités de marque. N’as-tu pas peur que les gens achètent l’album plus pour les invités présents que pour la musique en elle-même ? Ou penses-tu au contraire que cela permet d’attirer les gens vers ce style ?

C’est une question un peu compliquée. Il y a toujours l’aspect vendeur de réunir autant de guests sur un même disque. Après jusqu’à présent sur tous les retours que j’ai sur le premier titre, beaucoup de gens sont très surpris d’entendre des guests dans ce registre-là. Du coup, l’effet d’annonce de tous les noms a quand même été supplanté par le côté musical, beaucoup de gens sont revenus vers moi pour me dire que le premier titre était super et qu’en plus entendre untel ou untel dans ce registre c’était vraiment cool. Pour le moment, ça se passe plutôt bien à ce niveau-là je dirais. La musique est prise pour ce qu’elle est et l’effet médiatique de tous ces noms est aussi pris pour ce qu’il est.

L’écriture musicale est souvent quelque chose d’assez personnelle, comment fais-tu cohabiter ceci avec la multitude d’artistes invités ? Faut-il adhérer à 100% à ton univers pour faire partie du projet ou acceptes-tu les suggestions ?

Je suis justement très ouvert là-dessus. Sur cet album j’ai eu la chance de travailler avec des gens qui ont vingt, trente ans de carrière, j’ai évidemment énormément à apprendre de leur part. Lors des enregistrements chacun avait déjà réfléchi à son personnage, ils m’avaient envoyé des démos, c’était très rigolo de recevoir des mails d’untel ou untel : « J’ai fait une démo, est-ce que ça te convient ? » Il y avait vraiment une volonté de se mettre au service de la musique et de pousser les chansons le plus loin possible. Ça m’a vraiment touché de leur part, car ce sont évidemment des artistes qui sont sollicités toute l’année et avoir un tel degré d’investissement c’était vraiment super pour moi.

Quelles sont les influences cinématographiques et littéraires qui t’aident à créer ton opéra metal ?

Il y a un peu de tout. Il y a pas mal de cinéma, que ce soit les derniers Batman, Le Seigneur des Anneaux, des grandes fresques qui te mettent en immersion pendant deux heures, trois heures, parfois plus. En termes de littérature, je suis très influencé par la Divine Comédie de Dante. Après je suis un gros gamer, les grosses sagas comme God Of War, Castlevania, Zelda me parlent et m’aident aussi à construire soit mon histoire, soit mon univers.

Et à quoi joues-tu en ce moment ?

En ce moment pas grand-chose car je n’ai pas trop le temps ! [Rires] Le dernier jeu auquel j’ai joué était le dernier Batman qui était vraiment excellent mais avec les répètes et la promo qui a commencé je n’ai pas eu le temps de le finir et c’est un gros regret ! J’ai perdu tous mes réflexes et il va falloir que je recommence tout ! [Rires]

Interview réalisée par téléphone le 28 septembre 2015 par Philippe Sliwa.
Retranscription : Alexandre Covalciuc.
Introduction : Philippe Sliwa.

Page Facebook officielle de Melted Space : www.facebook.com/meltedspace.



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