Artistes : Metallica – Within Temptation – Gojira
Ville : Arras (France)
Lieu : Grand’Place
Public : 26 000 personnes environ
L’évènement
Metallica est-il vraiment au-dessus des autres ? Ou bien n’est-ce qu’un bon groupe mis sur un piédestal par le grand public et par les années ? C’est bien connu, tout ce qui est vieux est mythique par défaut… Avant de vous apporter (encore une fois) une brillante réponse indiscutable, prenons 2 minutes pour féliciter l’organisation et, plus globalement, la ville d’Arras. Des commerçants chaleureux, des vigiles accueillants (mais efficaces) et qui vous laissent faire votre travail sans oublier des jeunes arrageoises esthétiquement intelligentes. On reviendra !
Le concert avait lieu sur la « Grand’place » d’Arras. Un cadre original qui, pour la 4ème année consécutve, est le théâtre d’événements musicaux massifs : MUSE, RADIOHEAD, PLACEBO, THE CHEMICAL BROTHERS, mais surtout la grande, la vieille… euh la belle (bien que trop canadienne) CELINE DION ! De quoi headbanguer à s’arracher la nuque ! La scène est installée en plein centre de la place et est entourée de centaines de façades baroques. Il y en a qui n’ont pas du regretter de s’être endettés pour s’acheter un appartement ici ! Pour l’anecdote, de nombreux films ont été tournés sur cette place et ses bâtiments donnent l’illusion d’être plats comme un décor de cinéma.
Sur le chemin, nous croisons par hasard le batteur de THE OLD DEAD TREE puis des musiciens d’OMAHA BITCH. Signe avant coureur : dans la file d’attente, un homme, véritable joaillier du dessin animé, vend des exemplaires historiques de PICSOU MAGASINE. Il n’y a pas de doute : cette soirée va être exceptionnelle. Et ça démarre avec les Gojira !
Joe Duplantier (Gojira)
Gojira ouvre pour Metallica, et c’est pour eux que Joe aura quelques mots pendant le concert : « Si nous existons, c’est grâce à Metallica ». C’est un peu la cerise sur le gâteau pour marquer la fin de l’ère « Syrius » et inaugurer une prochaine qui s’ouvrira avec la sortie de leur nouvel album « The Way Of All Flesh ». Le groupe est en pleine forme et très heureux d’être sur scène. Et ça se comprend car cela fait un bout de temps qu’il n’est pas monté dessus ! Le beau temps est aussi au rendez-vous, et le cadre exceptionnel de cette grand place d’Arras finit de poser le décor d’un concert qui s’annonce sous les meilleurs hospices.
Les Gojira commencent avec un « Lizard Skin » qui sonne bien. On pourra remarquer que, pour une première partie de Metallica, le son est correct. Certes on entend beaucoup la grosse caisse de Mario et les basses mais le son est suffisamment correct pour apprécier la musique complexe du groupe. Les classiques sont passés en revue, « Flying Whales », « Clone », « Love » puis arrive une intro au clavier (genre orgue hammond) qui annonce une petite surprise : un nouveau titre du futur album ! Et la surprise se poursuit avec un deuxième morceau, le dénommé « Vacuity », qui passe très bien. C’est du Gojira, avec des rythmes syncopés, de la brutalité et une pincée de mélodie. Entre les morceaux, Mario groove avec ses toms et cymbales le temps que les autres musiciens se reprennent ou changent d’instruments. D’ailleurs un rythme tribal introduira « Wisdom Comes » qui, comme à son habitude, terrasse tout sur son passage. Le temps défile, les chansons aussi, et c’est l’heure de conclure le set avec « The Heaviest Matter Of The Universe » pour laisser la place à Within Temptation.
Un Within Temptation hors de propos
L’intérêt premier de la Hollande est sa législation clémente envers ce que vous savez. Within Temptation vient après. Bien après. « Arrassés », nous allons nous restaurer et profitons encore une fois d’un service irréprochable. Vendeurs souriants et saucisses frites dignes de… enfin, dignes, mangeables quoi ! Un fait extraordinaire car vous avez tous goûté aux étranges hot dogs des festivals au moins une fois. Du coup, Claude et moi-même nous demandons légitimement : où est le problème ? La réponse nous vient de la scène.
Que vient faire la lisse prestation de WITHIN TEMPTATION entre GOJIRA et METALLICA ? La question semble posée par de nombreux festivaliers.
« Sharon et les garçons » arrivent sur scène avec une setlist remaniée par rapport à la tournée « The Heart of Everything ». Oui, remaniée : ils ont changé l’ordre des chansons. Incroyable. C’est donc « Jillian » qui ouvre, à la place de « Our Solemn Hour ». A cet instant du concert, Sharon semble d’ailleurs très en voix. Elle chantera de façon très correcte (pour qui aime la voix de tête) mais quelque peu inégale. Pas de titre d’ »Enter » ou de l’EP « The Dance » à l’horizon du fait de la durée du set. Dommage, mais compréhensible. Ces vestiges des débuts gothiques des néerlandais ne manquent pas de profondeur, mais d’accroche. L’excellente reprise « Running Up That Hill » de Kate Bush manque également à l’appel. La qualité sonore est au rendez-vous. De ce côté-là, on déplorera juste la mise en retrait des guitares et de la batterie.
Scéniquement, Within Temptation est un groupe chaleureux, mais timide. La frontwoman restreint ses interventions entre deux titres. Dommage, peut-être aurait-il fallu enlever une ou deux chansons afin de lui laisser plus de place et rendre ainsi le concert plus vivant ? Qu’à cela ne tienne, nous finissons nos frites et bavons avec classe et distinction devant la mise en valeur vestimentaire de la plastique de Sharon.
Les fans auront probablement trouvé l’instant magique. Les musiciens sont chaleureux, sympathiques et abominablement niais. Le potentiel tubesque du répertoire des hollandais est indiscutable. On peut critiquer l’évolution musicale, néanmoins ils savent composer de bons hits avec un certain effet scénique. « Stand My Ground » et « Ice Queen » font mouche, comme à l’accoutumée. Mais tout est question de contexte. Les claviers, les backing vocals en playback, l’absence d’un vrai chanteur pour « What Have You Done », la voix de tête, les gargouilles, les mélodies sucrées… Ce n’est pas le ton de la soirée. Paradoxalement, ce quintet bien trop propre fait tâche.
James Hetfield
Oublions les habituelles formulations comme « tout le monde se rassemble pour le plat de résistance », « l’attente est interminable », « beaucoup de monde s’est déplacé » ou encore « il y a une très jolie fille qui a enlevé le haut, ce qui nous permet de patienter un peu »… Vous, lecteurs, y avez droit dans chaque live report…
« Ecstasy Of Gold » commence. Toujours la même intro depuis le « …And Justice For All ». Pourtant, les frissons sont garantis. Entrée en matière sublime d’efficacité avec un « Creeping Death » accéléré, enchaîné à un court interlude de basse annonçant « For Whom The Bell Tolls ». In your face ! Le son est à la hauteur. C’est parti pour 2 heures 10. Les 4 hoursemen se font plaisir. A tel point qu’on a l’impression d’assister à la renaissance de vétérans de guerre. Un show à l’américaine avec son lot d’écrans géants, de flammes, d’explosions (ah… « One »…) et même de feux d’artifices. On pourrait trouver à redire si les 4 hoursemen se contentaient de se reposer sur ces moyens pyrotechniques. Mais t’as pas vu le jeu de scène, mec ! Ce charisme, cette prestance, combinés à des titres tous plus mythiques les uns que les autres, suffit largement. Mais honnêtement, est-ce que vous en doutiez encore ?
Concernant, l’interprétation, nos premières craintes s’envolent assez rapidement : si James « chante » beaucoup plus qu’avant, il sait toujours brailler quand il le faut. Lars Ulrich confirme sa réputation de batteur carré. Non je plaisante… Si l’homme joue vite et technique, il n’excelle pas dans l’art de tenir un tempo. Chose à laquelle nous nous sommes toutefois habitués avec les années. Metallica est « le groupe qui accélère ses morceaux en cours de route ». Cela fait partie du mythe et, dans le même temps, cela l’humanise. Kirk Hammet a le sourire aux lèvres. Papa Hetfield lui a donné la permission de faire des soli en studio… Robert Trujillo est impressionnant bien qu’un peu en retrait. Espérons que cela ne sera pas le cas sur « Death Magnetic ».
A ce propos, l’album sort justement en septembre et « Cyanide » est son représentant ce soir. Un morceau alliant groove, agressivité et une complexité rappelant les premières heures du groupe. Si personne n’espère plus un « Master of Puppets » numéro 2, ce titre respire la fraîcheur et la spontanéité. « Cyanide » reprend les meilleurs éléments de la période « Load », à savoir ce groove et ce feeling rockn’roll, et les combine à une musique plus complexe et plus « iveule ».
On en vient à la setlist :
Creeping Death
For Whom The Bell Tolls
Ride The Lightning
The Memory Remains
Welcome Home (Sanitarium)
Cyanide
…And Justice For All
No Remorse
Fade To Black
Master Of Puppets
Whiplash
Nothing Else Matters
Sad But True
One
Enter Sandman
Last Caress
So What
Seek And Destroy
Le répertoire de ce soir est un message adressé à la grande majorité des fans de Metallica : « Je vous ai compris ! Load pas bien ! Reload pas bien ! St Anger pas bien du tout !!! ». De ces albums, seul l’ennuyeux « The Memory Remains » apparaît. Là où certains vieux de la vieille exécutent un répertoire sans surprise, les Mets réussissent encore à surprendre. Et d’excellentes surprises ! Jugez par vous-mêmes : « Ride The Lightening », « … And Justice For All », « No Remorse »… Pour information sur d’autres dates on retrouve « Damage Inc », « Harvester Of Sorrow » ou encore « Mercyful Fate » avec KING DIAMOND en personne !
Alors, METALLICA est-il mythique simplement « parce que c’est vieux » ? Soyons concis : non. On en prend véritablement conscience lorsque l’on regarde n’importe quelle setlist depuis… depuis toujours. Comment une setlist des Mets peut-elle être mauvaise ? Tant de ressources, tant de titres redoutablement efficaces, même sur des albums moins géniaux, ça fait rêver. James aurait pu annoncer « Fuel », « Ain’t My Bitch », « Battery » ou encore « Am I Evil », il aurait à coup sûr récolté des acclamations. Quel autre groupe pourrait à ce point tirer à la courte paille pour choisir ses titres ?
METALLICA s’est assuré au cours de sa carrière la certitude de ne jamais décevoir sur le papier. Il suffit ensuite que la prestation suive. Et à Arras, c’était le cas.
Allez, avouez… vous n’avez rien retenu de cette pertinente analyse sur ce concert… Vous avez survolé ce live report afin d’obtenir LA réponse. Oui, la jeune fille a bien enlevé le haut. Mais Radio Metal ne cite jamais ses sources.
« Dans la vie il y a ceux qui ont vu Metallica et ceux qui creusent. Toi, tu creuses. »