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Chronique Focus   

Michael League – So Many Me


Le bassiste Michael League peut se targuer d’être l’un de ces artistes parvenus au succès sans jamais vraiment jouer pleinement le jeu de l’industrie musicale. Rien qui ne l’a empêché d’obtenir quatre grammys, de faire de Snarky Puppy – dont il est le leader – l’un des groupes de jazz-fusion les plus excitants de ces dernières années et de démontrer sa polyvalence et son engagement via le groupe Bokanté à la croisée du blues et de la musique africaine. Si l’on ajoute les multiples collaborations dont celle avec la légende David Crosby, Michael League a tout d’un grand. Il ne lui manquait finalement qu’une œuvre solo, une passerelle plus immédiate avec l’étendue de sa personnalité musicale. La pandémie lui a donné l’occasion de se concentrer sur un projet envisagé depuis l’adolescence : So Many Me est un titre à propos. Michael League s’illustre par une musique moins débridée et plus contemplative, puisant dans les sonorités pop gracieuses des années 80 et 90, Tears For Fears, Talking Heads et Peter Gabriel en tête.

Les premiers indices de la direction musicale choisie par Michael League ont été révélés par le clip vidéo d’« In Your Mouth » et témoignent de la prise de distance de l’artiste avec ses projets précédents. L’album a été entièrement réalisé par Michael assisté du producteur Nic Hard dans son appartement en Espagne. Le confinement a été abordé comme un temps de « pause forcée » qui a mené le musicien à une réflexion sur sa vie et son environnement. Inévitablement, So Many Me se veut ainsi plus éthéré. Michael League a décidé de ne pas utiliser de batterie, seulement des percussions traditionnelles turques, kurdes et marocaines. Un choix qui confère un penchant tribal voire spirituel à l’œuvre et qui permet à Michael – avec la diversité d’instruments employés, tels que le sitar électrique, le guembri marocain, la guitare baritone fretless, le melotron, le minimoog, la basse, etc. – d’entériner son statut de multi-instrumentiste. « Sentinel Species » ne tarde d’ailleurs pas à faire découvrir ces percussions (rappelant brièvement et cocassement le générique d’une certaine émission de télévision le temps de quelques secondes…). Ces dernières forment une colonne vertébrale discrète sur laquelle Michael appose des nappes de clavier, quelques arpèges et un chant caractéristique des années 90 par ce traitement en retrait ou susurré et ces chœurs soyeux. « Me, Like You » accentue cette pop langoureuse, presque « lounge » dans l’esprit. Michael League marche sur les plates-bandes de The XX, du Phoenix des débuts et surtout de Fink. Il n’hésite pas à utiliser le clavier de la même manière sur « Right Where I Fall » : une mélodie entêtante, onirique et mélancolique que les claviers analogiques viennent enrichir subtilement. So Many Me s’accorde tout le temps nécessaire pour ciseler ses atmosphères qui prônent une forme de lenteur comme art de vivre.

So Many Me a toutefois des atouts qui lui sont propres et lui évitent de devenir une énième manifestation d’une pop atmosphérique aux contours génériques. L’utilisation de percussions traditionnelles y est pour beaucoup et accentue l’esprit de transe de certaines compositions sans se perdre dans les confins de la world music. « Since You’ve Been By » et « Fireside » se nourrissent toutes deux d’un groove qui les maintient fermement sur terre, contrastant avec les nappes de clavier presque cosmiques, tandis que le refrain d’« In Your Mouth » flirte de manière toute personnelle avec la science mélodique et rythmique raffinée d’un Toto. Même les accents les plus pop développés sur « I Wonder Who You Know » qui coïncident avec la démarche récente de Steven Wilson ne jurent pas avec l’irruption des rythmiques. « Ever The Actor » utilise ces dernières comme des échos lointains qui confèrent ce qu’il faut de densité à un titre qui brille par son dépouillement. Seul l’émouvant « The Last Friend », acte de tutoiement de la mort, n’y a pas recours en conservant le minimalisme et la sobriété de sa mélodie. C’est cette dimension rituelle qui fait de So Many Me bien davantage qu’une réminiscence de la pop des eighties et nineties. Il y a une essence thérapeutique dans le travail de Michael League.

Si la pop signifie ingéniosité dans le songwriting au service de l’accessibilité, alors on comprend parfaitement pourquoi Michael League l’affectionne au même titre qu’un Steven Wilson. So Many Me est une troisième facette complètement différente de l’artiste, qui complète ses deux projets phares et qui se nourrit intelligemment d’un contexte délétère. C’est un temps de répit musical que le musicien n’aurait pu s’accorder autrement. Encore un argument de poids pour étendre sa culture musicale en dehors des sentiers tracés. La clé pour devenir un meilleur musicien ou un véritable mélomane.

Clip vidéo de la chanson « In Your Mouth » :

Clip vidéo de la chanson « Right Where I Fall » :

Clip vidéo de la chanson « I Wonder Who You Know » :

Album So Many Me, sorti le 25 juin 2021 via GroundUP. Disponible à l’achat ici



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