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Interview   

Molybaron en route vers les sommets


Molybaron est un groupe franco-irlandais qui vient de sortir son deuxième album The Mutiny, et il est en train de mettre tout le monde d’accord. Le groupe propose un metal alternatif qui fait mouche quasiment à chaque morceau : riffs catchy et accrocheurs, refrains qui restent en tête un moment, grosse production. Molybaron frappe très fort, et il serait bien dommage de passer à côté ! Les albums de cette qualité qui génèrent un tel plaisir auditif, mêlé à un effet de fraîcheur et de surprise, ne sont pas si fréquents. Les bonnes nouvelles s’enchaînent d’ailleurs pour le groupe, avec une signature chez le label Inside Out toute récente, mais aussi avec le manager Richard Gamba pour son travail avec Gojira, preuve que le vent souffle fort dans le dos de Molybaron.

Steven, un des guitaristes, nous parle de la génèse de cet album qui est enregistré depuis 2019, de leur évolution depuis leur précédent opus, des ondes positives sur lesquelles le groupe surfe en ce moment, ainsi que du featuring avec Whitfiled Crane, chanteur d’Ugly Kid Joe.

« C’est absolument sans aucune envie de dire que nous allons créer un style, parce que ça serait idiot, mais c’est surtout que nous sommes emmerdés parce que nous ne savons pas où nous foutre, ni comment nous définir. »

Radio Metal : Dans un premier temps, peux-tu nous présenter l’historique du groupe, qui finalement est assez récent, et nous dire où vous en êtes en ce moment avec la sortie du nouvel album The Mutiny?

Steven Andre (guitare) : Nous sommes un groupe récent, mais nous avions chacun des groupes avant et une bonne expérience musicale à droite à gauche, donc nous ne sommes pas des cannetons du premier jour [rires]. Molybaron, c’est un groupe que nous avons formé avec Gary en 2015. C’est arrivé suite au fait que Gary voulait former son propre projet. Il avait déjà eu quelques groupes et nous avons été mis en relation grâce à un pote en commun. Nous avons eu une première ossature du groupe qui était avec un chanteur, un batteur, un bassiste, etc. Nous avons dû nous séparer un peu de toute cette ossature, et suite à de nombreuses reformations, nous avons fini par rencontrer Seb, qui est devenu notre bassiste. Nous avons ensuite eu un premier batteur, nous avons sorti notre premier album – nous nous sommes rencontrés en 2015, mais le groupe s’est vraiment lancé en 2017 à la sortie de ce premier album –, nous avons fait pas mal de concerts, etc. et nous nous sommes séparés de ce batteur. Puis nous avons rencontré Camille, qui est devenu notre batteur attitré depuis deux ans. Nous sommes maintenant au complet. Nous avons sorti notre second album, The Mutiny, comme tu l’as dit. Nous sommes très contents des retours et de ce que nous en lisons.

Apparemment, l’album était prêt depuis un certain temps…

L’album était prêt depuis très longtemps, c’est-à-dire que lors de notre tournée européenne en octobre 2019, nous jouions déjà presque soixante-quinze pour cent des morceaux de cet album sur scène ; même quand nous avons joué au Metaldays, nous n’avons joué presque que des morceaux du nouvel album sur scène. Mais nous avions pas mal de choses dans l’ombre à régler, nous avons dû trouver un batteur avant que Camille n’arrive, donc ça a été assez compliqué, puis il y a eu cette pandémie qui est tombée. Nous nous demandions ce que nous allions faire de cet album qui était prêt, auquel nous croyions dur comme fer, nous en étions fiers, mais putain, si nous ne pouvions pas tourner, qu’est-ce que nous allions faire ? C’était super frustrant, mais tout le monde est dans le même cas. Nous avons donc fini par nous lancer, car de toute façon nous n’avions pas le choix, nous allions bien voir ce que ça donnerait. Le plus gros point faible dans l’histoire, c’est que nous ne pouvons pas vraiment le défendre sur scène, mais vu que c’est pareil pour tout le monde, on peut se dire que ça n’est pas si grave. Nous allons peut-être pouvoir parce que ça commence à rouvrir, mais au moment où nous avons sorti l’album, nous n’étions sûrs de rien, nous ne savions pas si l’album allait passer une année blanche.

Il vient de sortir officiellement, mais trois ou quatre morceaux et clips sont sortis l’année dernière.

Nous avons sorti trois singles avant de sortir l’album. Nous nous sommes rendu compte que ça donnait vachement de traction à un album avant qu’il ne sorte et surtout, ça permet vraiment aux gens de se focaliser sur ce morceau. Quand tu lances un album, tout est un peu noyé, alors que si tu lances un premier morceau, tu le laisses mariner et les gens ont le temps de l’assimiler, de l’apprendre, puis tu en relances un deuxième, etc. Nous sommes plutôt contents d’avoir fait cette démarche. Quand l’album est sorti nous étions déjà dans une bonne position : en un mois, nous avons atteint 1,7 million d’écoutes sur Spotify, juste pour l’album, c’est quand même vraiment bien ! Les chiffres ne font qu’augmenter, tout ne fait que monter, donc nous sommes particulièrement contents.

Quand tu dis que l’album était prêt, qu’est-ce que tu veux dire par là ? J’imagine que vous connaissiez les morceaux, que vous les aviez déjà, mais quand les avez-vous enregistrés ? L’album était-il déjà prêt, enregistré, mixé, masterisé depuis longtemps ?

L’album a été enregistré en fin 2018, début 2019. Nous avons tout enregistré chez Gary, mais c’est un éternel insatisfait, et jusqu’à la dernière seconde, il continuait à modifier, à en rajouter, à en retirer, mais c’est aussi ce qui fait que les morceaux soient aussi bien, si je peux me permettre de le dire : ils ont été travaillés, pensés, réfléchis dans tous les sens. Il a fallu lâcher le bébé à un moment, et dire : « On va le laisser vivre, sinon on va y passer une vie. » Tu peux vraiment passer une vie entière à modifier une chanson et arriver à la fin de ta vie sans avoir obtenu ce que tu voulais. A un moment, il faut dire stop.

« Entre les deux albums, il y a eu pas mal de concerts, et il y a surtout eu une affirmation de sa part sur le fait qu’il était le chanteur et qu’il allait enfin pouvoir utiliser sa voix comme un instrument. Peut-être qu’il a poussé plus loin cette intention sur le second album que sur le premier album, parce qu’enfin il utilise sa voix et a des choses à dire. »

Je pense que la réponse est facile, mais comment avez-vous pris les retours super positifs ?

Je n’ai pas envie que ce que je vais dire sonne prétentieux, parce que nous ne le sommes vraiment pas, mais nous y croyons tellement, Gary a tellement mis de son âme, de tout ce qu’il pouvait, que nous y croyions déjà énormément. Nous avons déjà vu sur scène ce que ça donnait, quand nous avons joué au Metaldays, sur la tournée, etc., nous avons vu que les morceaux rendaient bien, que les gens chantaient. Donc quelque part, quand l’album est sorti, je savais que les chroniques seraient bonnes. Ça n’a vraiment rien de prétentieux, mais je me suis dit que c’était normal. Je veux dire, l’album est bien, les chansons sont bien, enfin, oui c’est normal ! [Rires] J’avais clairement une espèce de foi aveugle, peut-être un peu bête aussi, mais effectivement, quand nous lisons les chroniques, quand nous voyons que nous sommes album du mois dans Rock Hard, quand nous passons dans Metal Hammer avec une super chronique, quand nous voyons que nous passons sur des radios américaines immenses et que les gens disent que c’est génial, que c’est extraordinaire, etc. ça fait toujours quelque chose. Nous avons du mal à nous dire que c’est en train d’arriver. C’est surtout que comme l’album est prêt depuis longtemps, les morceaux ont eu le temps de faire leur chemin en nous, et parfois en les écoutant, nous nous disons : « Putain c’est vraiment un bon morceau, je pense que ça peut marcher, j’ai hâte que les gens l’écoutent. » Nous avons sorti le premier morceau, « Lucifer », qui a cartonné sur Spotify. Nous avons donc sorti un deuxième titre, « Twenty Four Hours » avec le chanteur d’Ugly Kid Joe, qui a super bien marché aussi, et nous avons fait un clip. Chaque période que nous avons traversée a été de mieux en mieux, et quand l’album est sorti, je n’avais qu’une envie, que les gens finissent enfin par écouter l’album au complet.

Avec un album qui est prêt depuis deux ans, de nombreux musiciens seraient déjà passés à la suite. C’est donc une bonne chose qu’il sonne toujours aussi frais pour vous.

Ça vient aussi du fait que personnellement, j’écoute vraiment beaucoup de musiques différentes, et Gary n’en écoute quasiment pas. Il écoute beaucoup de musiques de films, et quand il revient à l’album, il a une espèce d’écoute neuve qui n’est pas du tout influencée par d’autres groupes de metal, c’est assez rigolo ! C’est arrivé que nous soyons en répét en train de jammer, qu’il fasse un riff et que je lui dise : « Ça c’est du Alter Bridge ! », sans qu’il s’en rende compte, car il n’écoute pas Alter Bridge. Ce qui fait que quand il retourne sur l’album, il a une approche complètement pure qui n’est pas du tout influencée par tout ce que tu peux écouter, par les groupes que tu écoutes en ce moment, etc. Quand tu es musicien, tu es forcément influencé de manière inconsciente par ce que tu écoutes, ton envie du moment, etc.

En parlant du style musical : j’ai le sentiment que vous mélangez beaucoup de choses. Comment, en tant que groupe, définiriez-vous le style musical dans lequel vous évoluez ? Si tu devais donner une ligne directrice à ce que fait Molybaron, comment la décrirais-tu ?

C’est vraiment la malédiction du groupe, c’est très compliqué ! Je ne suis pas très fan des millions d’appellations qui existent dans le metal. Il y aura toujours quelque chose de nouveau et chaque jour quelqu’un inventera un nouveau style juste parce qu’il aura rajouté un coup de batterie à un moment où il n’y en avait pas avant. Pour Molybaron c’est un peu compliqué, parce que comme je te dis, Gary n’écoute pas de musique, du coup il n’est pas influencé par quoi que ce soit. Il reste un peu bloqué sur les Metallica, etc., même si en vrai il s’est beaucoup ouvert, mais il n’en écoute pas au quotidien. Moi, j’écoute énormément de musiques différentes, tous styles confondus, comme les autres dans le groupe, même si je suis quand même plus metal. C’est compliqué de nous définir parce que nous ne savons pas trop à quoi nous pourrions nous affilier. Ça n’est pas une question d’avoir envie de dire que nous sommes différents, au contraire, ça nous emmerde parce que ça nous cause beaucoup de problèmes. Quand nous cherchons des concerts, généralement on nous dit : « Vous n’êtes pas assez metal » ou « Vous êtes trop metal », « Pas assez violents » ou « Trop violents ». C’est très compliqué parce que dans notre créneau, nous avons du mal à trouver un groupe auquel nous raccrocher, pour que nous puissions dire : « Ok, on ressemble un peu à ça. » Au niveau du style, nous avons fini par parler d’alternative metal ou de modern metal, parce que nous ressemblons un peu à Alter Bridge, c’est en chant clair, c’est groovy, mais en même temps avec des breaks qui tabassent un peu, des petits solos par ci par là, des grosses mélodies aussi, une grosse basse en avant… C’est absolument sans aucune envie de dire que nous allons créer un style, parce que ça serait idiot, mais c’est surtout que nous sommes emmerdés parce que nous ne savons pas où nous foutre, ni comment nous définir.

« Il y a vraiment quelque chose de cathartique dans le fait que Gary écrive ses textes. Ça lui permet d’exorciser tout ce qu’il ressent, de parler sur des sujets qui l’interpellent, qui l’intéressent. Il n’y a absolument aucune envie là-dedans de donner des grandes leçons, de faire les grands prêcheurs de masse. »

J’entends un peu de Muse, mais à chaque fois par petites touches, peut-être un peu de System of A Down aussi…

Dans plein de commentaires sur nos vidéos YouTube, nous lisons des gens nous dire que nous leur faisons penser à System Of A Down. J’aime beaucoup System Of A Down, mais je ne suis pas un inconditionnel non plus, et les autres n’écoutent pas System Of A Down. C’est ce qui est assez rigolo. Pourquoi pas, mais je ne sais pas.

Un autre groupe avec lequel j’ai fait une affiliation, c’est Noir Désir. C’est peut-être lié aux intentions dans la voix, ce qui est assez amusant en voyant que votre chanteur n’est pas français, mais irlandais…

Peut-être sur le second album. Il faut savoir que sur le premier album, Gary n’était pas chanteur à la base. Pendant un an et demi, nous en avons cherché un et Gary a enregistré sa voix pour donner des intentions au chanteur à auditionner, et au final, nous avons fini par lui dire : « Gary, tu chantes juste. Travaille ta voix et chante ! » Sur ce premier album, ça n’a pas forcément été très agréable pour lui parce qu’il n’était pas chanteur, et il s’est retrouvé frontman et chanteur, il m’a refilé toutes les parties de guitare complexes pour se focaliser sur la voix… Entre les deux albums, il y a eu pas mal de concerts, et il y a surtout eu une affirmation de sa part sur le fait qu’il était le chanteur et qu’il allait enfin pouvoir utiliser sa voix comme un instrument. Peut-être qu’il a poussé plus loin cette intention sur le second album que sur le premier album, parce qu’enfin il utilise sa voix et a des choses à dire.

J’imagine que vous êtes tous parisiens, Gary est-il aussi avec vous sur Paris ?

Gary est basé à Paris, puisqu’il il est graphiste, il travaille à distance avec ses boîtes. Il ne parle quasiment pas français, il faut le savoir, nous ne parlons qu’en anglais dans le groupe. Seb vit à Paris, moi je vis en banlieue très proche et notre batteur, Camille, vient de Lille. Nous avons un studio dans Paris que nous louons à l’année. Nous faisons des répét assez régulièrement et à ce moment notre batteur descend de Lille.

Comment travaillez-vous les textes ? Y a-t-il des des concepts particuliers, une idée directrice ? Les paroles ont l’air assez sombres, peut-être que je me trompe…

Non, tu ne te trompes pas du tout ! C’est Gary qui écrit les textes. Vu qu’il parle anglais et que c’est sa langue natale, c’est beaucoup plus simple pour lui. J’avais essayé au début d’écrire des textes, et ça sonnait comme un Français qui écrit des textes : un peu ridicule ! [Rires] Il n’y a qu’un morceau pour lequel j’ai écrit le texte sur le dernier album, « The Lighthouse ». Sinon, Gary écrit sur des choses qui le perturbent et qui sont importantes pour lui. Je sais qu’il a écrit les textes pour le premier album quand Trump était en train d’arriver au pouvoir et il avait besoin de décharger toute sa haine et tout ce qu’il avait en lui avec ce qui s’est passé. Le premier album a plus été axé là-dessus. Pour le deuxième, il y a placé toutes ses angoisses sur l’addiction, sur la politique, sur les dangers des réseaux sociaux, etc. Il y a vraiment quelque chose de cathartique dans le fait que Gary écrive ses textes. Ça lui permet d’exorciser tout ce qu’il ressent, de parler sur des sujets qui l’interpellent, qui l’intéressent. Il n’y a absolument aucune envie là-dedans de donner des grandes leçons, de faire les grands prêcheurs de masse, « On va vous ouvrir les yeux », non, ce n’est pas trop le genre. Pour Gary c’est plus : « C’est ce que je ressens, je vois les choses comme ça et je vais le chanter, et puis si t’es pas content, pas de souci, on en parlera. »

En termes de composition musicale, avec ce melting-pot d’influences dont tu m’as parlé, comment fonctionnez-vous ? Est-ce que chacun apporte sa patte, et c’est ce qui fait ce mélange ou est-ce que quelqu’un a le lead là-dessus ?

Il faut savoir que quatre-vingt-dix pour cent de l’album a été composé par Gary. Il travaille les morceaux, les met en place, et il y passe énormément de temps. Comme je l’ai dit, il a vraiment mis son âme et tout son être dans ces albums. Il arrive que nous soyons en studio en train de jammer, que je balance un riff et que nous décidions de l’enregistrer, ou j’enregistre chez moi un riff que je lui envoie, puis nous le travaillons, etc., mais principalement, c’est Gary qui enregistre le plus gros chez lui. Ensuite, souvent il nous envoie les morceaux, nous lui faisons des retours et discutons du morceau, nous essayons de trouver le meilleur des deux mondes, etc. Par exemple, je sais que sur le morceau « Animals » il y avait un refrain qui était fait, j’ai composé le couplet et le pont, puis nous avons essayé de coller les trucs en en discutant, en s’envoyant des audios, etc. Nous avons réussi à composer le morceau au fur et à mesure, et généralement ça avance comme ça.

« Nous avions besoin de chansons un peu plus catchy, de mélodies plus entêtantes, de riffs qui soient un peu plus fast tempo, qui fassent bouger la tête. […] Nous allons continuer dans cette direction, parce qu’il n’y a clairement rien de plus cool que de voir un public qui commence à remuer la tête gentiment et finit par chanter. »

J’ai lu qu’entre le premier et le second album, vous aviez cherché à obtenir quelque chose de plus accrocheur et rentre-dedans : était-ce une volonté assumée ?

Oui, complètement. Nous sommes très contents et fiers du premier album, mais à sa sortie, nous nous sommes rendu compte qu’il n’était pas énormément taillé pour le live, les morceaux étaient assez mid tempo, et en live, nous avions du mal à faire bouger les gens, à les faire se remuer. Donc sur le second album, nous avons décidé d’aller un peu plus à l’essentiel, en pensant live quand nous commencerions à composer, à balancer des riffs, etc. Nous avions besoin de chansons un peu plus catchy, de mélodies plus entêtantes, de riffs qui soient un peu plus fast tempo, qui fassent bouger la tête. Donc oui, effectivement, c’était notre ligne directrice sur la composition. Sur tout le travail que nous avons accompli – que Gary a accompli – c’était un de nos souhaits. Vu comment l’album marche et comment les titres ont marché en concert quand nous les avons joués, nous allons continuer dans cette direction, parce qu’il n’y a clairement rien de plus cool que de voir un public qui commence à remuer la tête gentiment et finit par chanter.

J’ai l’impression qu’un pas a été franchi aussi en termes de son. Il était déjà bon sur le premier album, mais pour le second album, vous avez été encore plus loin en termes de travail sur le son ou de moyens mis. Est-ce quelque chose que vous avez travaillé pour avoir un gros son et une belle production ?

Je pense que ça vient du fait que les morceaux étaient là depuis très longtemps et que Gary a pu prendre le temps de composer l’album, et de faire tous les arrangements et ce qu’il faut pour que les morceaux soient le mieux possible. Enormément de morceaux ont évolué, tu trouveras des vidéos des premières versions sur YouTube qui ne sont absolument pas celles du CD, mais peut-être que ça vient aussi du fait que nous avons eu le temps, que Gary a eu le temps de les écouter et de les travailler du mieux possible. Ce qui a changé aussi, par rapport au premier album, ce n’est pas qu’on nous l’a reproché, puisque que toutes les chroniques du premier album ont toutes sensiblement été très bonnes, mais on nous a dit que parfois nous avions tendance à donner de la tête un peu partout, avec des styles trop différents, en passant du chaud au froid, on ne savait pas trop où se positionner dans les morceaux, etc. Alors que sur ce second album, nous sommes restés plus constants dans la trame, avec des morceaux plus catchy, rentre-dedans, et je pense que le live – que nous n’avions pas au moment du premier album – a joué une place prépondérante sur la composition et l’influence que nous avons voulu avoir au moment du deuxième.

Tu parlais tout à l’heure du chanteur d’Ugly Kid Joe, Whitfield Crane. Comment s’est monté ce featuring sur le morceau « Twenty Four Hours » ?

Nous avons joué à la Boule Noire, deux fois, je ne sais plus quelle année – 2018 ou 2019. Il se trouve que Whit était là avec une amie à moi et ils sont venus nous voir en concert. Mon amie venait et elle m’a dit : « Je suis avec Whit d’Ugly Kid Joe. » Nous avons fait notre concert, nous nous sommes donnés à fond, et à la fin elle m’envoie un message me disant qu’elle m’attendait devant avec Whit, parce qu’il a surkiffé et qu’il aimerait nous parler. Nous sortons et le rencontrons, adorable, un petit peu comme il a l’air, c’est-à-dire super cool, à l’aise, qui te met à l’aise, et nous discutons : « Tiens, si ça te dit, on se prend un verre la semaine prochaine, on se tient au courant. » Nous prenons un verre la semaine suivante, dînons ensemble, c’est cool, nous passons une super soirée, et puis : « Tiens, ça te dit, viens en studio, on se fait un petit jam dimanche. » Il est venu dans le studio – il y a une vidéo sur YouTube d’ailleurs –, nous jammons pendant une heure, nous improvisons, il chante, puis : « Tiens, ça te dirait d’apparaître sur le nouvel album qu’on va enregistrer bientôt ? Ça serait cool. » « Carrément, envoie-moi des morceaux. Là je pars, je retourne aux Etats-Unis. » Nous lui avons envoyé des morceaux, il a flashé sur « Twenty Four Hours » et c’était parti ! C’est rigolo, le mec est là, t’es en train de dîner avec lui et il te dit : « Ouais, j’étais avec Alice Cooper et Ozzy Osbourne a débarqué », « Kirk Hammett m’appelle »… C’est assez fou, c’est incroyable. Le kiff serait de jouer avec Ugly Kid Joe et que Whit vienne sur scène pour nous faire « Twenty Four Hours ».

« On ne va pas se mentir, avoir un groupe à notre époque, si on a envie de faire les choses correctement, c’est clairement un hobby de riches ! En même temps, c’est une passion, c’est extraordinaire. Quand tu te retrouves à l‘autre bout de l’Europe devant cinq cents personnes dans une salle qui viennent te voir à la fin, te demandent des photos, des mediators, alors que t’es personne, c’est incroyable ! »

Comment fonctionnez-vous en termes de gestion. Vous gérez beaucoup de choses vous-mêmes pour le groupe ? Avez-vous un label, des gens qui vous accompagnent ?

Nous gérons absolument tout. Nous avons signé avec Nicolas Ramaget [des Editions Hurlantes] qui est notre éditeur. Nous avons signé avec lui en rentrant de la tournée, en fin 2019, et il gère beaucoup de choses de son côté aussi. Sur le nouvel album, nous avons quand même une compagnie de promotion qui nous aide aussi à promouvoir et tout – sur le premier album nous étions passés par Replica Promotion, c’était super – mais autrement, nous avons toujours tout géré. Nous avons eu des propositions de label fut un temps, que nous avons dû décliner pour une raison ou une autre. C’est-à-dire que dans le groupe, nous recherchons les concerts – je m’en occupe à coups de milliers d’heures d’appels, de mails, etc. – , nous nous occupons du booking, Gary, qui est graphiste, s’occupe des artworks, de faire les photos, etc., je fais de la vidéo et c’est aussi la passion de notre bassiste, donc nous faisons nos montages… Nous faisons tout nous-mêmes, c’est une activité qui est extrêmement stressante et prenante [rires]. C’est là où tu te rends compte que la musique ne prend que cinq pour cent de ce qu’on appelle la musique.

Après, c’est le jeu ! Le temps où un label se baladait dans une cave, voyait un groupe et puis se disait « Je vais les signer, je crois en eux ! » est révolu. C’était Mötley Crüe dans les années 80, mais ça n’existe plus. Ça représente énormément de temps, mais nous essayons de faire les choses le mieux possible, de la manière la plus professionnelle possible, ce qui nous demande beaucoup d’énergie, c’est un travail à part entière. Je sais que pour Gary, du côté community management c’est un enfer sans nom, mais nous tentons de faire au mieux. C’est clairement comme un deuxième boulot, c’est énormément de temps, et d’argent aussi. On ne va pas se mentir, avoir un groupe à notre époque, si on a envie de faire les choses correctement, c’est clairement un hobby de riches ! En même temps, c’est une passion, c’est extraordinaire. Quand tu te retrouves à l‘autre bout de l’Europe devant cinq cents personnes dans une salle qui viennent te voir à la fin, te demandent des photos, des mediators, alors que t’es personne, c’est incroyable !

À propos de concerts, peux-tu citer quelques dates passées qui t’ont marqué ou t’ont fait réellement plaisir ? Et pour la suite, y a-t-il quelque chose de prévu pour défendre cet album ?

Pour la dernière question, nous n’avons rien de prévu pour l’instant, et s’il y avait quelque chose, je ne pourrais pas vraiment en parler [rires]. C’est compliqué. Nous sommes dessus, mais c’est un travail de tous les instants ! Sinon, sur les dates qui nous ont marqués, notre deuxième date était à l’Elysée-Montmartre, assez incroyable ! Un nouveau groupe, Gary chanteur pour la première fois de sa vie qui se retrouve devant mille personnes à l’Elysée-Montmartre. C’était assez prenant, assez cool ! La date du Metaldays a aussi été assez grandiose. Nous avons quand même fait trente-deux heures de voiture pour une demi-heure de concert, mais c’était le feu, les gens étaient complètement fous, ça faisait des circle pit à gogo, à la fin j’ai sauté dans la foule, il y avait une foule de deux mille personnes… Sinon, toute la tournée a été merveilleuse, nous avons joué dans treize pays. Quand tu te retrouves en Europe de l’Est, un mec qui a juste trois dents t’accueille dans une salle qui est une espèce de truc un peu en ruine, c’est sold out et les gens sont complètement fous, à la fin ils viennent te vandaliser tout ton merch, c’est incroyable ! Après ils viennent te proposer des verres dehors, c’est gigantesque. Notre dernière date que nous avons faite à Rotterdam était sold out aussi, c’est fou, juste d’y penser… Quand nous sommes rentrés de la tournée, j’étais dans le tour bus et il y avait Gary à côté de moi, et il me dit en anglais : « Comment on va faire pour vivre maintenant ? » Du coup je rigole et il me dit : « Non, je suis sérieux, maintenant qu’on sait, comment on va faire ? » Nous avons déjà fait des concerts et des mini-tournées de deux ou trois dates, mais faire une tournée comme ça, traverser toute l’Europe, se réveiller le matin en Autriche, jouer en République tchèque le soir et le lendemain se dire qu’on est en Bulgarie et qu’après on sera à Vienne, c’est dingue, c’est phénoménal !

Penses-tu que le fait que votre chanteur soit irlandais pourrait vous aider à l’international ? J’ai l’impression que vous avez déjà touché l’international…

Oui. Déjà grâce aux festivals que nous avons faits en Europe, et aussi le fait que notre chanteur soit anglophone et que notre promoteur mette pas mal le paquet sur la promotion UK et US aide à ce que la sauce prenne, et je pense que ça fonctionne. Quand nous avons cherché notre chanteur pour le premier album, recherche qui aura duré un an et demi, notre plus gros défi a été de trouver un chanteur qui n’ait pas d’accent français. Nous, on ne se rend pas compte, mais Gary m’expliquait qu’il n’y avait rien de pire qu’un chanteur qui chante avec un accent français ou un accent trop prononcé. Il fallait donc trouver quelqu’un avec un accent quasi parfait. La question n’est pas vraiment posée avec Gary, car il a un anglais parfait et un accent irlandais chanté peu reconnaissable – un peu plus à la voix parlée, si un jour tu l’as en interview, tu verras. Mais oui, je pense que le fait d’avoir un chanteur anglophone sans accent nous aide énormément à la conquête d’un public autre que français.

« Il n’y a rien de pire que d’entendre que nous sommes un groupe français qui parle anglais pour se la péter. Non, c’est juste que c’est la langue de Gary. Il est déjà arrivé qu’on nous dise ça sur un festival, nous étions en pleines balances et Gary essayait de mettre en place son matos, arrive l’ingé son, et ils n’arrivaient pas à se comprendre : ‘Pourquoi il parle anglais ?’, parce que c’est sa langue ! »

J’ai l’impression que le metal en France est en train de gagner bonne cote à l’étranger, avec bien sûr Gojira mais aussi d’autres groupes qui donnent une lumière qu’il n’y avait pas il y a dix ans sur ce que pouvait produire la France en termes de metal, qui n’était pas forcément très bien vu. Après, vous vous présentez peut-être comme un groupe franco-irlandais…

Nous ne nous considérons pas vraiment comme un groupe français, ou même comme un groupe irlandais. Nous sommes un peu entre les deux, nous ne savons pas trop comment nous présenter, c’est délicat parfois. Nous avons déjà joué dans des festivals ou des concerts en tant que « le groupe français Molybaron », mais Gary parle anglais. Il comprend le français, mais il ne parle pas beaucoup français, donc quand il est sur scène, il s’adresse généralement au public en anglais, et il n’y a rien de pire que d’entendre que nous sommes un groupe français qui parle anglais pour se la péter. Non, c’est juste que c’est la langue de Gary. Il est déjà arrivé qu’on nous dise ça sur un festival, nous étions en pleines balances et Gary essayait de mettre en place son matos, arrive l’ingé son, et ils n’arrivaient pas à se comprendre : « Pourquoi il parle anglais ? », parce que c’est sa langue ! C’est aussi simple que ça. Il y a effectivement pas mal de groupes français qui sont en train d’émerger. Gojira c’est autre chose, parce qu’ils sont dans une autre sphère, sur une autre échelle, mais il y a énormément de groupes talentueux et de trucs géniaux, par exemple Dropdead Chaos avec Renato au chant, un bon pote à moi, c’est juste dingue, ou des groupes comme Nord, c’est vraiment excellent.

Concernant la pochette de l’album, est-ce que tu laisses le libre choix à ceux qui regardent de se faire une idée ou tu peux donner quelques clés d’interprétation ?

Nous laissons libre cours à l’interprétation de chacun. Pour le premier album, nous avons eu tellement de questions : « Qui est ce bonhomme avec l’orbe ? Est-ce qu’il vole ? Est-ce qu’il tombe ? » « Je n’en sais rien, ce que vous voulez ! » En revanche, sur le deuxième album, nous voulions absolument avoir un artwork différent, donc Gary et moi nous sommes mis à chercher. J’avais six mois de recherche d’artwork dans tous les sens. J’avais trouvé le nom de l’album ; j’ai dit à Gary : « J’ai le nom de l’album, c’est The Mutiny. Laisse-le grossir un peu en toi et tu verras, ça sera le nom de l’album. » J’ai eu raison ! Nous voulions quelque chose de différent, de central, de noir et rouge. Gary est tombé sur un artiste russe, Oleg, et parmi ses réalisations, nous sommes tombés sur cette image de l’homme qui se bat avec le loup. Gary me l’a envoyé parmi plusieurs images et je lui ai dit : « Tu sais, celle-là elle me reste pas mal en travers de la gueule, je la trouve marquante. » Nous avons avancé un petit peu, continué à chercher, et à un moment, nous nous sommes dit que c’est de celle-là que nous avions besoin, c’est la pochette qu’il nous fallait. Nous avons acheté les droits. Nous avons eu trois images que nous avons utilisées pour « Animals », etc. Nous sommes ultra contents de cette pochette d’album que je trouve ultra punchy. Quand tu te balades à la Fnac, tu ne vois que ça au milieu des autres disques.

Pour en revenir à ta question, il est vrai que je trouve que ça colle plutôt bien au nom de l’album, The Mutiny, mais laissons aux gens le choix de l’interprétation. Nous aimions bien que ça soit à la fois poétique et un peu violent. On en sait pas trop dans quel sens ça se regarde. Est-ce l’homme ou le loup qui attaque l’autre ? Il a le couteau dans la main gauche ? Cette pochette soulève pas mal de questions qui sont plutôt cool. Gary est graphiste, je suis monteur vidéo, donc l’image c’est mon travail, notre bassiste travaille aussi dans la vidéo et la photographie, donc pour nous, le visuel est super important.

Pour finir, y a-t-il une interprétation ou un sens au nom du groupe, Molybaron ?

Au début, le groupe existait sous un autre nom, mais nous nous sommes rendu compte que ça ne collait pas du tout. Nous nous sommes dit qu’il fallait absolument que nous changions. Nous avons commencé à balancer des mots, des phrases, des trucs que nous aimions bien, venus de films ou de chansons. J’ai balancé pas mal de trucs et parmi tout ce melting-pot, j’ai proposé « baron », parce que j’aime beaucoup Mastodon, qui a un morceau extraordinaire intitulé « The Last Baron ». Nous nous sommes dit que « baron » c’était chouette, et parmi plein de mots, Gary a proposé « Molly », parce que ça vient d’une des paroles de Thin Lizzy, dans « Whiskey In The Jar ». Nous avons collé les deux, Molly Baron. Pour la petite histoire, nous étions partis sur Molly Baron en deux mots, et nous nous sommes aperçus, vraiment à une semaine de l’impression du premier album, qu’un guitariste mexicain ou je ne sais plus trop quoi s’appelle Molly Baron, et il a quatre-vingts ans, mais un truc improbable ! Je m’étais dit que j’allais regarder sur Google, voir si ça existait, et merde ! Du coup qu’est-ce que nous allions faire ? Gary, graphiste, prend sa palette et commence à essayer plusieurs typos et écritures. Au final, nous sommes restés sur Molybaron. Nous nous sommes dit que c’était bien, c’était un peu mystérieux, ça n’existe pas déjà, donc nous sommes partis là-dessus. Nous en sommes très contents, car ça en impose pas mal.

Interview réalisée par téléphone le 21 juin 2021 par Sébastien Dupuis.
Retranscription : Romane Poupelin.

Site officiel de Molybaron : molybaron.com

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