Encore aujourd’hui, les personnes en charge du business et/ou du marketing d’un groupe ont une mauvaise image auprès de certains amateurs de musique. Comme s’il n’était pas possible d’être artiste et d’avoir une vision ou une stratégie ou ne serait-ce qu’un peu d’exigence financière. Comme si se préoccuper des questions d’image et d’argent ternissait l’art.
Il y a aussi cette croyance selon laquelle le marketing est la science qui sert à manipuler le « grand public » à l’esprit faible et à la sensibilité artistique médiocre pour les pousser à passer à la caisse. Alors que, sincèrement, en connaissez-vous tant que ça, autour de vous, des gens qui aiment telle oeuvre parce que leur télé ou un encart publicitaire le leur dit ? En plus de prendre une majorité de la population pour des idiots, cette croyance sert à se placer au-dessus des autres, suggérant que « on ne me la fait pas ». Jamais même. Alors que, tout puriste que nous sommes, nous aimons tous tel ou tel album, livre, film, jeu ou encore des tableaux populaires, pas grâce à la publicité, mais parce que certaines œuvres, certes aidées par la chance, par un heureux bouche à oreille ou effectivement par le marketing, ont la capacité de fédérer. L’exposition médiatique ne transforme pas un mauvais artiste en génie.
Si le marketing a ses excès, il n’en reste pas moins qu’un moyen. Et une nécessité, comme nous le rappelle Nicolas Delestrade, bassiste de Novelists, qui assume pleinement et avec enthousiasme la tâche de gérer le marketing et le business du groupe. A l’occasion de la sortie du premier album Souvenirs, nous avons discuté avec lui de l’équilibre à trouver pour un groupe et un musicien entre l’artistique, le travail de l’instrument et le marketing.
« Il y a plein de mecs qui composent de la super musique et qui pensent encore que le label va venir et dire : ‘Ouais, on prend ta musique et on s’occupe de tout ! Ne t’inquiète pas, on te prend à zéro et on va faire en sorte que tu sois une super star !' »
Radio Metal : En ce qui concerne le nom du groupe, Novelists, qui signifie « Romanciers », est-ce que ça vient d’un amour pour la littérature ?
Nicolas Delestrade (basse) : Non, pas vraiment. En fait, avant, j’avais un groupe (A Call To Sincerity, NDLR) avec le chanteur [Matt Gelsomino] et le deuxième guitariste [Charly Kelevra], et on avait une musique qui s’appelait « The Novelist ». On était en train de faire du brainstorming pour trouver un nom au projet et je ne sais plus qui était venu avec cette idée, mais ça nous a tous convenus parce que c’était un peu dans l’idée de ce qu’on voulait faire sur ce projet, le fait de raconter des histoires, sans essayer d’avoir une image particulière, en essayant de rester le plus honnête possible.
Vous avez une trajectoire assez particulière. Vous sortez aujourd’hui votre premier album seulement et pourtant vous avez déjà une bonne fan base, avec 36 000 fans sur Facebook, et vous êtes signés sur Nuclear Blast, un label prestigieux. Comment vous l’expliquez ?
Comme je t’ai dit, j’avais un groupe avant, ça a duré quatre ans, et quand on a démarré Novelists, j’ai rencontré les deux frères, le guitariste et le batteur [Florestan et Amael Duran] qui composaient pas mal de musique. J’ai écouté leurs musiques, je leur ai dit : « Je trouve ça vraiment bien ce que vous faites. Moi, je ne suis pas très bon pour composer de la musique, par contre, je sais comment fonctionne le milieu, la scène metal, etc. Du coup, voilà ce que je peux vous apporter : ma connaissance de l’industrie. Et vous, vous vous occuperez de tout de ce qui est musique. » Du coup, ça s’est super bien passé parce que chacun avait son rôle et ne marchait pas sur les plates-bandes de l’autre. Moi, je m’occupais de tout ce qui était l’image du groupe, le marketing, etc. et eux s’occupaient juste de la musique, ce qui nous a permis d’être très rapides et efficaces sur les sorties de musique, etc. Je ne sais pas trop comment l’expliquer mais je pense qu’on avait tous un peu d’expérience dans différentes spécialités et qu’on a tout mis en commun, et ça a fait un truc qui a fonctionné.
Est-ce que c’est important pour un groupe de musique d’avoir quelqu’un qui ne s’occupe pas que de la musique mais aussi de tous les à-côtés ? Est-ce que c’est indispensable, selon toi ?
Pour moi, c’est indispensable maintenant, oui. Il y a plein de mecs qui composent de la super musique et qui pensent encore que le label va venir et dire : « Ouais, on prend ta musique et on s’occupe de tout ! Ne t’inquiète pas, on te prend à zéro et on va faire en sorte que tu sois une super star ! » Mais ça ne marche plus du tout comme ça ! Tu as toujours besoin d’avoir un mec qui gère, comme tu dis, tous les à-côtés parce qu’un label, un management ou tout ce que tu veux, avant de te signer, de toute manière, il vont avoir besoin que tu fasses tes preuves tout seul pour leur montrer que tu en as envie et que tu ne vas pas abandonner au bout de six mois parce que eux, ils ne vont pas signer un deal sur cinq albums avec quelqu’un qui va abandonner au bout de six mois. Je pense qu’ils attendent tous d’avoir un groupe qui se démerde très bien tout seul pour ensuite le chopper et donner le coup de pouce en plus. Je pense vraiment que c’est primordial maintenant d’avoir au moins une personne dans le groupe qui est dédiée à ce côté-là. Personnellement, je suis conscient de ne pas tellement être un musicien dans le groupe, enfin, je suis musicien mais je suis bassiste et je ne compose pas tellement. Mon domaine, c’est plutôt l’aspect marketing, je fais le mix, la production, etc. ; moi, c’est vraiment plus l’emballage du produit.
Il y a quand même pas mal de musiciens qui ont tendance à vouloir rejeter ce côté-là et vraiment se concentrer sur leur musique. Or, ça a l’air de quelque chose d’assez naturel pour toi. D’où t’es venu ce goût pour la communication, le business, etc. ?
J’ai démarré un groupe il y a six ou sept ans, on était comme tous les autres groupes, on n’y connaissait rien, on démarrait avec nos compos pourries en les mettant sur MySpace, on communiquait super mal, on était super mauvais. Il y a eu quatre ans avec ce groupe-là, et au fur et à mesure, j’ai réalisé qu’il fallait qu’on fasse tout tout seul parce que de toute manière on n’aurait de l’aide de personne. Le truc, c’est que moi, j’ai été élevé dans une famille très « école de commerce / école d’ingénieurs », assez droite, portée sur la rigueur, etc. Ce n’est pas que ça m’a plu, mais c’est surtout que c’est dans cet aspect-là que j’étais plus doué. Alors qu’il y a des mecs qui seront plus sur le côté « artiste », moi j’étais plus porté là-dessus : voir le groupe comme une entreprise et le faire fonctionner comme tel. Et c’est vraiment l’expérience, à force d’avoir un groupe pourri, d’en avoir marre de n’être écouté par personne et de vouloir trouver des solutions pour que ça marche, au bout d’un moment, tu comprends un peu comment ça fonctionne.
Vu le background familial que tu as, comment le fait que tu aies envie de t’investir dans un groupe de musique, qui plus est de metal, a été vécu par ta famille ?
J’ai le background que je t’ai expliqué mais, à côté de ça, j’ai une famille qui est super ouverte d’esprit. En gros, le leitmotiv sur lequel j’ai été élevé, c’est : fait absolument ce que tu veux mais soit bon dans ce que tu fais. J’aurais pu être coiffeur, mon père n’en aurait eu rien à foutre, du moment où j’aurais réussi en tant que coiffeur. Ils ont toujours été super ouverts. Ce n’est pas une famille vraiment intéressée par la musique, c’est plutôt via les potes avec qui je traînais quand j’étais gamin que ça m’ait venu. Ce n’est pas leur truc la musique mais ça a quand même été une famille très à l’écoute et ouverte. Ce n’est pas le genre de famille qui ne comprend pas pourquoi tu vas dans ce milieu-là, qui essaie de te faire devenir médecin et tout.
Est-ce qu’il y a des personnes qui t’inspirent en termes de communication et de business ?
Niveau musique, je suis vraiment impressionné par ce que fait Periphery d’un point de vue marketing. Ils gèrent super bien leur image. Je trouve qu’ils ont vraiment été intelligents. Ils ont signé un contrat en leur faveur en attendant d’avoir plusieurs offres, en essayant d’être du côté du « fort » sur le contrat parce que souvent, tu as le label qui vient et te demande si tu veux signer un contrat, et toi, tu es un petit groupe, tu dis « bah ouais ! » et tu signes n’importe quel contrat pourri. Avant de signer le contrat de Nuclear Blast, je me suis vraiment rappelé tout ce que j’avais lu là-dessus, les interviews de Misha Mansoor, le guitariste-leader de Periphery, qui parlait de comment la signature avec leur label c’était passée. Je m’en suis vraiment inspiré, le fait de se mettre dans la position du groupe qui sait ce qu’il vaut et qui ne va pas se vendre pour cinquante euros. On a montré au label qu’on savait ce qu’on valait et du coup, ça nous a permis de négocier un contrat équilibré et qui n’est pas juste bon pour le label, ce qui est le cas pour la plupart des groupes aujourd’hui. Comme je t’ai dis, pour la plupart des groupes, le label arrive, il propose n’importe quel contrat, les mecs sont tellement contents parce qu’ils attendent ça depuis années qu’ils signent n’importe quoi. Nous on a vraiment essayés de ne pas faire ça. Donc, niveau marketing, dans la musique, je pense que c’est Periphery qui m’impressionne le plus.
« Le public de base ne se rend pas du tout compte de l’aspect marketing d’un groupe. Ils ont l’impression que le groupe marche parce qu’il fait de la bonne musique […] mais une énorme partie, c’est aussi tout le marketing. »
Les musiciens qui sont connus pour gérer le business de groupe, c’est en général ceux qui ont la plus mauvaise image auprès des gens. Je pense à des personnes comme Lars Ulrich qui a beaucoup contribué au développement de Metallica pour le côté business, et il est très mal vu par une partie du public, tout comme quelqu’un comme Gene Simmons de Kiss, etc. Comment tu l’expliques et qu’est-ce que tu aurais à répondre aux critiques qui sont faites en général à ces personnes ?
Je pense qu’en fait, le public de base ne se rend pas du tout compte de l’aspect marketing d’un groupe. Ils ont l’impression que le groupe fait de la bonne musique et que le groupe marche parce qu’il fait de la bonne musique. La bonne musique représente une partie du pourquoi un groupe va marcher mais une énorme partie c’est aussi tout le marketing. Concrètement, si tu fais de la bonne musique mais tu ne forces pas les gens à s’y intéresser, ils ne vont pas essayer d’aller chercher ton groupe par eux-mêmes, ils ne connaissent pas, ils s’en foutent complètement. Du coup, tu es obligé de faire du bourrage de crâne pour leur montrer : « Tiens, écoutes tel truc, tu vas bien aimer. » Si tu sors juste de la bonne musique sans avoir du marketing derrière, ça ne marchera pas du tout. C’est comme si tu sortais un produit, je ne sais pas, une boisson qui est super bonne, si tu ne l’as fait pas goûter aux gens, ils ne le sauront pas. Donc tu as besoin de faire de la pub, de mettre des mecs dans la rue qui font goûter la boisson, etc. Pour moi, c’est la même chose. C’est une des parties les plus importantes mais le public ne s’en rend pas du tout compte parce que ça ne les intéresse pas du tout et du coup, forcément, tu n’es pas aussi bien vu que l’artiste qui s’en fout, qui crache sur toute l’industrie du disque mais parce qu’il a derrière des gens qui eux, s’occupent de ce côté marketing.
Comment définis-tu la limite entre la bonne publicité qui fait découvrir le groupe au monde, le rend présent, etc. et le matraquage publicitaire exagéré ?
La limite, pour un groupe comme nous, elle est financière, de toute manière, parce que la pub et faire du marketing, ça coûte de l’argent et au bout d’un moment, on ne peut pas faire comme Justin Bieber et se payer des encarts publicitaires partout ou dans tous les magazines, etc. Pour nous, c’est vraiment une limite de fric. Après, moi, le seul truc que j’essaie de faire, c’est de cibler correctement les audiences que j’essaie d’aborder avec la publicité, parce que si tu cibles des gens qui ont cinquante ans et qui, à priori, écoutent du jazz, ils n’en auront rien à foutre et puis, de toute manière, ça ne t’apportera rien, car ta pub sera inutile. J’essaie juste de cibler des gens qui sont déjà fan de ce style-là, qui sont un peu dans le milieu metal. En gros, l’idée, c’est juste de leur faire écouter un aperçu. Ce n’est pas de les matraquer dix fois avec la même pub, c’est de faire écouter un aperçu. Comme ça, si les mecs aiment bien, ils feront l’effort d’eux-mêmes d’aller écouter. Mais si personne ne leur fait écouter une première fois, ils ne peuvent pas savoir que ça leur plaît parce qu’ils n’en n’ont jamais entendu parler.
L’aspect business et les à-côtés du groupe, pour ceux qui ne le savent pas, c’est très chronophage. Comment parviens-tu à trouver l’équilibre entre ça et puis bosser ton instrument ?
A la base, j’ai mon boulot, je produis de la musique. Ça se passait bien niveau temps et là, ces six derniers mois, j’ai réalisé que je n’avais plus le temps de faire les deux parce que le groupe commençait à prendre des proportions qui étaient trop importantes. Du coup, j’ai décidé d’arrêter mon boulot pour un petit moment pour pouvoir vraiment gérer le groupe sans avoir à me préoccuper d’autre chose. En gros, à partir de ce mois-ci, je n’ai plus de boulot et je suis à cent pour cent sur le groupe. Du coup, maintenant j’ai le temps, je peux m’en occuper. Mais c’est vrai que jusqu’à maintenant je n’avais pas eu énormément de temps. En fait, je bossais, je faisais mon boulot et dès que j’avais fini, je devais m’occuper du groupe. Et lorsque j’arrivais au concert, je n’étais pas le mec qui connaissait le mieux les morceaux ! Surtout que nos musiques sont assez techniques, donc c’était un peu compliqué. Bon, c’est aussi pour ça que j’ai décidé de me mettre à la basse, parce que je savais que ça allait être le plus simple, c’est beaucoup moins technique que ce qu’ils font à la guitare et comme ça, ça me laisserait du temps pour le reste. Maintenant, vu que je n’ai plus de boulot, je vais avoir le temps de vraiment bosser l’instrument.
Votre musique est assez personnelle mais malgré tout, c’est dans un registre qui est finalement très dans l’air du temps, avec des côtés deathcore, mathcore, djent, des passages très mélodiques, etc. Et c’est vrai que c’est un style qui fonctionne très bien en ce moment, tu citais par exemple Periphery tout à l’heure. Comment expliques-tu le succès d’un style comme celui-là aujourd’hui, qui n’est pas forcément ce qu’on imaginerait marcher, étant donné les côtés violents et techniques qui peuvent rebuter ?
Oui, bon, après, le succès est quand même assez relatif. En fait, il y a eu l’explosion du metalcore pendant des années et je pense qu’on est arrivé à un stade où les gens en ont eu un peu marre d’entendre toujours la même chose, parce que le metalcore, ce n’est pas des musiques très évoluées, ce n’est pas très riche, ça tourne un peu en rond. Les gens ont cherché quelque chose d’un petit peu différent, de plus riche, et la nouvelle vague de metalcore-prog-moderne apporte quelque chose d’un peu… En fait, la technicité de cette nouvelle vague apporte un peu plus de richesse aux morceaux. Pour moi, c’est une musique plus intelligente. C’est super prétentieux parce que tu parlais de Novelists à la base, du coup ça voudrait dire que je pense que Novelists fait de la musique plus intelligente, mais je pense que c’est de la musique plus réfléchie que le metalcore de base et, surtout, qui se base moins sur uniquement l’image du groupe. Je pense que la plupart des groupes de metalcore sont devenus plus connus parce qu’ils avaient des chanteurs beau gosses avec des tatouages et des jeans déchirés que pour la musique elle-même. Et je pense que le public de base à voulu revenir vers de la musique un peu plus intéressante et c’est ce qu’apporte la nouvelle vague, parce que ce sont des musiciens plus talentueux pour la plupart. Quand tu écoutes Northlane, Periphery, Intervals, Monuments et tout, ce sont des mecs qui savent jouer.
Finalement, on a un peu l’impression que cette nouvelle vague a un peu été créée soit en contestation, soit en développement de l’ancienne. Est-ce que tu penses qu’avoir des courants comme ça, qui sont très populaires et qui le deviennent presque trop, n’est pas nécessaire pour l’avancée de la musique, dans la mesure où lorsqu’un style devient trop populaire, un ras-le-bol se créer et une nouvelle vague apparaît pour apporter quelque chose de plus ?
Je ne sais pas. Ce que je regrettais un peu avec le metalcore, c’est vraiment que j’ai eu l’impression qu’on a eu des années à avoir les mêmes albums qui sortaient en boucle. Pour moi, ce sont de mauvaises années. [Réfléchi] Je ne sais pas. Peut-être. Après, les groupes comme Periphery, je ne pense pas que ça a été influencé par toute cette vague metalcore, par contre ça a peut-être amené plus de public vers cette nouvelle vague parce que c’était des gens fatigués de la vague metalcore, ça c’est vrai. Ca a peut-être popularisé ça parce que les gens cherchaient autre chose.
« La plupart des groupes de metalcore sont devenus plus connus parce qu’ils avaient des chanteurs beau gosses avec des tatouages et des jeans déchirés que pour la musique elle-même. Et je pense que le public de base a voulu revenir vers de la musique un peu plus intéressante et c’est ce qu’apporte la nouvelle vague. »
Votre musique est un mélange assez cohérent entre différentes choses. Comment est-ce que vous arrivez à ce compromis musical, à mélanger tout ça et en faire quelque chose de cohérent ?
Je pense que ce qui rend cohérent l’ensemble, c’est la voix, d’une part, et les ambiances. On fait beaucoup d’ambiances de lead de guitare avec énormément de reverb et de delay, et qui font que tu peux mettre n’importe quel riff par-dessus, il y aura toujours ce fond qui nous ressemble et qui est un peu notre… Enfin, on essaie de faire en sorte que ce soit notre identité, cette espèce d’ambiance, d’atmosphère qu’il y aura toujours derrière et qui va un peu lisser le tout et le rendre très cohérent, alors que des fois, on a des riffs neo metal et des fois on a des riffs super techniques. A mon avis, c’est ça, ce sont vraiment les ambiances et les voix qui rendent le tout homogène.
Votre premier album s’appelle Souvenirs. C’est un peu paradoxal parce que quand on pense « souvenirs », on pense « nostalgie », hors c’est votre premier album. Est-ce que ce paradoxe était voulu ?
Non. On l’a réalisé après, ce n’était pas quelque chose à laquelle on a pensé sur le moment. En fait, l’album s’appelle Souvenirs parce qu’à chaque fois qu’on écoutait nos musiques, on réalisait qu’on avait justement ce sentiment de nostalgie dont tu parles, une sorte de mélancolie. On trouvait que c’était un peu l’identité du groupe, que ça revenait assez constamment dans toutes nos musiques. Du coup, on s’est dit que le titre de l’album allait mettre ça en évidence, le fait qu’il gravitait autour de cette émotion-là.
C’est un album qui est assez référencé dans les thèmes, car il y a des références scientifiques, d’autres mythologiques, etc. D’une part, quel est le lien entre tous ces thèmes, s’il y en a un, et quelle est leur source ?
Il n’y a pas de lien entre les paroles des musiques. Concrètement, c’est juste Mattéo qui, quand il a envie d’écrire, écoute toutes les pré-prod et il se dit : « Aujourd’hui, c’est comme ça que je me sens. » Par exemple, s’il est dans un jour où il est plus énervé, il va écrire sur la musique qui sera plus énervée que les autres. Du coup, ça correspondra avec l’atmosphère de la musique mais il n’y a pas tellement de thèmes ou de concept autour des paroles. C’est vraiment tout ce qui lui passe par la tête. Tout ce qu’il ressent sur le moment, il le pose et il met en forme. Après, les références, je pense qu’on aime bien le côté imagé et pas un titre super bateau, directement compréhensible. On aime bien que ça ne soit pas non plus tiré par les cheveux mais un petit peu imagé.
Vous avez déjà beaucoup de vidéos, surtout pour un groupe dont c’est le premier album – vous avez déjà trois vidéos pour cet album alors qu’il sort à peine. C’est important aujourd’hui en termes d’exposition ou de démarchage de développer l’aspect vidéo d’un groupe ?
Je pense que c’est super important, oui. Quand on te parle d’un groupe et que tu vas l’écouter, enfin, je ne sais pas toi, mais moi, en tout cas, je vais sur YouTube. Tu pourrais aller sur Spotify ou tout ce que tu veux mais j’ai l’impression que la plupart des gens vont sur YouTube. Et du coup, si tu écoutes une musique et que tu as juste une image en support, c’est très bien, nous on l’a fait avec « Twenty Years », la première musique qu’on a faite et ça a très bien marché, mais si tu peux apporter un super visuel, comme un clip ou n’importe quelle vidéo qui a un peu d’intérêt, ça peut amener les gens à venir revoir la vidéo. Il y en a qui vont venir pour écouter la musique et d’autres qui vont aimer la musique mais la vidéo va vraiment apporter quelque chose, donc ils vont revenir d’autant plus pour la vidéo. Je pense que ça aide aussi à créer un peu l’identité que tu veux pour ton groupe, le type d’image que tu veux – si tu mets des flammes partout et du sang ou alors si tu veux un truc plutôt neutre et honnête comme nous.
Vos clips sont plutôt simples et élégants, et il y a le sens du détail. Je parle surtout pour le clip de « Gravity » qui lorsqu’on le regarde sans trop faire attention paraît plutôt basique : on vous voit jouer et c’est tout. Mais au final quand tu regardes un peu plus dans le détail, il y a des petits effets visuels, etc. Est-ce que c’est ça l’image que vous voulez véhiculer ?
Oui, c’est ce qu’on essaie de faire, un truc très neutre, très simple… Enfin, pas neutre mais simple, qui soit un peu excitant mais aussi assez chic. On ne veut pas du gore, du lourd. On veut quelque chose qui ne prenne pas trop le contrôle sur la musique, parce que c’est quand même elle qui est primordiale, mais un truc quand même intéressant, en restant assez classe parce que la musique, on espère – en tout cas, c’est ce qu’on veut faire -, c’est une musique un peu élégante. Le but, c’est d’apporter quelque chose mais sans non plus être « too much » parce qu’il ne faut pas que ça empiète sur la musique.
On en arrive au sujet le plus important de l’interview : le solo de basse à poil sur le clip de « Echoes » [rires]…
Du coup, ça ne colle pas trop avec le « élégant »… [Rires] En fait, il y a un solo de guitare sur ce morceau qui est un featuring d’un guitariste (Pierre Danel de Kadinja, NDLR) qui est un super pote à nous. Il devait venir pour le shooting de cette vidéo et il était malade au dernier moment. Du coup, on ne savait pas trop quoi faire, on a cherché des idées parce qu’on ne voulait pas que mon guitariste joue le solo, ça n’aurait pas été super vis-à-vis de l’invité sur le morceau. Du coup, on s’est dit qu’on allait faire un truc marrant. On n’a pas voulu que ce soit « too much », du genre le cul à l’air, etc. On voulait juste un truc un peu rigolo mais justement toujours rester dans un équilibre.
Tu n’as pas été trop gêné en faisant le clip ?
Oh non, pour le coup, si tu demandais aux autres du groupe… Moi, je n’en ai rien à foutre [petits rires]. Je suis toujours à me promener à poil H24, donc je n’ai aucun problème avec ça !
J’ai remarqué récemment sur votre page Facebook pas mal d’articles et chroniques de médias allemands. Est-ce que vous avez une relation particulière avec ce pays ?
Eh bien, on a un label et un manageur allemands, donc forcément, ça fait une relation un peu particulière. Et puis l’Allemagne, c’est vraiment un pays incroyable pour tourner. Dès que tu fais des concerts, tu es accueilli super bien, il y a du monde qui vient. Je pense que le metal, en règle générale, a une relation particulière avec l’Allemagne.
Interview réalisée par téléphone le 12 novembre 2015 par Philippe Sliwa.
Retranscription : Nicolas Gricourt.
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