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Interview   

Peter Wiwczarek (Vader) transmet les secrets du feu


Vader est l’un des doyens de la scène extrême polonaise, devenue l’une des plus actives et réputées. Et cela fait désormais trente ans (puisque formé en 1983, bien que le premier album ne soit paru que dix ans plus tard) que le leader du groupe Piotr « Peter » Wiwczarek mène la barque sans sourciller, malgré les changements de line-up, avec sa passion pour moteur, comme il nous le déclare lui-même dans l’entretien qui suit. Trente ans, c’était l’occasion de revenir avec lui sur sa carrière et ce que ce chiffre représentait pour lui. Mais Vader reste un groupe qui va de l’avant, comme l’atteste son dernier album sorti en mai dernier, intitulé Tibi Et Igni et qui propose un death metal plus redoutable et efficace que jamais avec ses teintes vieille école qui rappellent où Wiwczarek prend sa source, les fondamentaux.

Par ailleurs, étant un des tout premiers musiciens de metal extrême à surgir de Pologne, donc ayant vu la scène de son pays et en particulier l’un de ses plus fiers représentants actuels, Behemoth, se développer, il était intéressant d’avoir son avis et son analyse sur cette incroyable « success story » qu’est l’histoire du frontman Nergal. Ce qu’il a volontiers partagé avec nous via des réponses très intéressantes.

« A travers toutes ces années, la passion est ce qui nous a poussés à faire ce que nous faisons. Sans la passion rien n’est possible. »

Radio Metal : L’année dernière marquait les trente ans du groupe. Comment te sens-tu par rapport à ça ?

Piotr « Peter » Wiwczarek (guitare, chant) : D’un côté, je suis un peu surpris à quel point le temps est vite passé, car nous avons été un groupe actif pendant tant d’années et pourtant ce n’est pas l’impression que ça me donne. J’ai l’impression d’avoir à peine commencé il y a un an ou quelque chose comme ça [rires]. Il y a eu beaucoup de travail mais aussi tant d’albums enregistrés, tant de fans, tant de pays visités. Je suis donc fier que, bien que nous venions de Pologne et que nous ayons connu des moments difficiles, nous sommes parvenus à y arriver comme si, grâce à notre passion, nous ne pouvions être arrêtés. En fait, la passion est notre carburant pour traverser tous ces problèmes rencontrés par le passé. Nous aimons simplement ce que nous faisons. Nous aimons la musique. Nous aimons le metal. Nous avons fait ça pendant trente ans et nous avons toujours des fans qui veulent vraiment nous voir et nous attendent chaque année. C’est ce qu’il y a de meilleur. C’est ça notre plus grand succès.

Avais-tu imaginé à tes débuts, il y a trente ans, que ça durerait si longtemps ?

Non. Nous ne pouvions que rêver de ça, tu sais. Lorsque nous avons commencé, rien n’était à notre portée en Pologne. Nous jouions simplement pour des fans qui voulaient écouter de la musique, qui voulaient aller à des concerts et qui suivaient un groupe nommé Vader, et nous essayions d’être comme tous les autres groupes dans le monde. C’était plus comme un rêve. Personne ne s’attendait à ce que, au bout du compte, le rêve devienne réalité [rires]. C’est comme combler une passion, tu sais. Donc, évidemment, je suis content et heureux que, comme je l’ai dit avant, nous soyons parvenus à le faire et d’être toujours un groupe actif. C’est ça le plus important. Le fait que cela fasse trente ans, ce n’est pas si important.

Si tu devais choisir un mot pour résumer tous ces souvenirs et ta carrière, lequel serait-il ?

Je l’ai mentionné juste avant : la passion. A travers toutes ces années, la passion est ce qui nous a poussés à faire ce que nous faisons. Sans la passion rien n’est possible.

Votre nouvel album s’intitule « Tibi Et Igni », ce qui signifie « Pour toi et le feu ». Peux-tu expliquer la signification de ce titre et pourquoi l’avoir choisi en latin ?

J’adore le latin [rires]. Ça donne un côté confidentiel. Ça sonne bien. Ça sonne classique. Mais pourquoi cette phrase exactement ? L’album parle du feu et de plusieurs significations différentes. Le feu est quelque chose de très important qui a accompagné l’humanité et la vie. Le feu est créatif et destructif. Le feu est quelque chose qui a rendu la vie possible et qui probablement va [provoquer] sa fin un jour. Et tu sais, pour nous, pour les humains, pour les gens, les hommes, le feu est un symbole. C’est impressionnant. C’est lié aux religions, aux émotions, avec tant d’aspects de la vie et de notre nature. Et c’est pourquoi je me suis intéressé à ce thème cette fois-ci. Le feu, en latin « igni », est le thème et concept principal de tout l’album. Et, tu sais, ce n’est qu’un côté du thème, car « Tibi Et Igni » était la phrase utilisée dans le passé pour informer les messagers qu’ils doivent garder l’information secrète, tu sais, juste : lis la et ensuite brule la, quelque chose comme ça : « Pour toi et le feu ». Et les secrets, et peut-être bien le manque de secret dans notre monde moderne, est aussi quelque chose qui m’a fait réfléchir sur ce problème. Je pense que les secrets, qu’ils soient bons ou mauvais, que nous gardons nous rendent spéciaux, ils font notre caractère. Je ne pense pas qu’il soit bon d’informer le monde et tous les gens alentour de tout ce que tu penses et ressens. C’est comme une sorte de pornographie sur nous-mêmes. C’est un peu philosophique, évidemment, mais ça m’a fait réfléchir et a fait de cette phrase « Tibi Et Egni » un choix parfait pour l’album. Ça a complété le thème sur le feu et la confidentialité.

Musicalement, l’album est très direct. Il y a des chansons courtes et très efficaces, avec un côté assez rock’n’roll. Avez-vous donc des influences hard rock ou rock’n’roll dans votre musique ?

Tu sais, tout d’abord, on dirait que c’est direct mais, en fait, ça ne l’est pas. Tous ces éléments, disons classiques dans la musique et les paroles que j’ai utilisés pour Tibi Et Igni, ont été fait exprès. C’est plus proche de la signification classique du metal du passé, de lorsque nous écoutions ces groupes qui nous influencent nous et tant d’autres groupes, comme Venom, Slayer, Judas Priest, Motörhead, Black Sabbath, tous ces groupes qui ont fait [le metal tel que nous le connaissons]. Ils utilisaient parfois des phrasés simples et des mots simples pour expliquer des émotions et les histoires qui étaient amenées sans détour à l’oreille de l’auditeur. C’était juste de simples histoires, avec parfois juste des émotions qui se dégagent entre les lignes. Ceci est quelque chose que j’adore dans le metal. Bien sûr, les paroles sont plus tard devenues plus « codées » dans la musique et le metal. Car lorsque j’étais adolescent, j’adorais m’approprier et comprendre la force du metal : si un groupe parlait du feu infernal, je voulais le feu infernal et je voulais des démons. Je n’utilisais pas de métaphores. Je n’essayais pas d’utiliser mon imagination de cette manière. Je voulais voir le feu et ressentir l’enfer autour de moi car c’étaient des mondes différents qui me permettaient de me sentir mieux. Lorsque j’étais un jeune homme, j’essayais d’être rebelle. J’essayais de créer dans mon esprit un monde qui était complètement différent de celui que je voyais autour de moi. Évidemment, après des années, j’ai conservé cet esprit dans Vader, en poursuivant le chemin que Vader et moi, en tant que metalleux et musiciens, avons choisi mais tout en étant plus adulte, après avoir vu tant de choses dans le monde. Après avoir fait l’expérience de la vie, j’ai voulu mettre davantage dans la musique que de simples histoires fantaisistes. C’est donc ce que j’ai voulu faire : faire paraître les choses comme si elles étaient directes, car c’est comme ça que ce devrait être. Mais la manière dont tu le prends et le comprends dépend de ta personnalité, de ton âge, de ce que tu aimes et ce que tu veux entendre.

« Behemoth est un bon groupe et Nergal n’est peut-être pas un authentique dingue de metal – en tout cas il n’y ressemble clairement pas – mais il crée de la bonne musique et ça, je crois, est la meilleure chose pour tous ceux qui aiment la musique extrême. »

Joe Petagno, l’illustrateur de l’album, est connu pour avoir fait de nombreuses peintures pour des pochettes d’artistes rock et metal, particulièrement Motörhead. Te sens-tu proche justement de l’imagerie de Motörhead ?

Tu sais, c’est marrant. Je suis un énorme fan de Motörhead et Ace Of Spades est le tout premier album que j’ai acheté avec mon propre argent. C’était il y a des années ! Et bien sûr, je ne m’étais jamais attendu à ce que le même artiste qui a créé le logo de Motörhead coopérerait un jour avec Vader et [travaillerait sur un] album de Vader. C’est donc génial, c’est quelque chose d’incroyable ! [Rires] Ce qui est drôle, c’est que je n’ai jamais imaginé que Joe suivait notre carrière. Je voyais toutes ces supers illustrations et je n’ai pas tout de suite fait le lien avec Joe Petagno. Bien sûr, après avoir reconnu son style, je l’ai simplement appelé et nous avons parlé pendant des heures de choses telles que l’histoire du metal, le passé, l’art et tout ça. Et je lui ai envoyé quelques chansons et paroles du nouveau Vader et Joe a créé quelques ébauches de dessins. A partir des trois qu’il m’a envoyés, j’ai choisi celui-ci. C’était simplement l’explication parfaite de ce que tu peux trouver à l’intérieur. On peut retrouver des parties de ce dont traitent les paroles à l’intérieur et tu peux ressentir les flammes. C’est parfait.

Behemoth est un autre groupe de metal polonais et a eu un succès commercial énorme qui va au-delà de la scène metal. Comment le succès de ce groupe est-il perçu en Pologne ?

Tu sais, c’est un succès mais en fait, c’est davantage le succès personnel de Nergal que celui du groupe. Bien entendu, c’est lié. C’est quelque chose qui s’est produit qui pourrait ne pas être vraiment évident pour les gens en dehors de Pologne. Nergal a eu une sorte romance avec l’une des plus célèbres pop stars [polonaises], une de ces personnes qui aimaient choquer avec des scandales et des conneries dans le genre [rires]. C’était donc le couple parfait, lui étant totalement différent… Tout d’abord, il était en quelque sorte un mec de l’ombre, car cette fille est une sorte de… Je ne sais pas avec qui la comparer… Peut-être à une Lady Gaga polonaise ou quelque chose comme ça ! Mais, tu sais, ceci lui a apporté un énorme succès et c’était une super opportunité pour lui de montrer le potentiel du groupe. Tout ce business de la pop est rempli de gens sans caractère et, parmi eux, Nergal était comme un diamant au milieu des cendres. Certaines personnes avaient d’abord peur de lui, à cause de sa personnalité, mais ensuite ils ont fini par trouver une personnalité originale derrière son caractère. Donc, au bout du compte, certains d’entre eux, nombre de ces personnes, ont essayé, de manière générale, de comprendre le metal. Donc, clairement, et jusqu’à un certain point, tout succès aide la scène dans son ensemble. Mais je ne crois pas que la situation de la musique metal en Pologne ait changé pour autant. Ça a changé que dalle, tu sais. En fait, c’était juste quelque chose qui était intéressant pour les gens qui lisent tous ces magazines de commérage qui parlent des stars et des rock stars et ce genre de merdes. Mais la situation globale de la musique metal n’a au final pas changé. C’est simplement qu’il y a certaines personnes qui en savent désormais plus au sujet du black metal ou du metal extrême et c’est tout. Les médias n’ont pas commencé à soutenir le metal et personne n’essaie de reconnaitre le metal comme une musique normale. C’était toujours des histoires de vénération du diable et des merdes de ce genre.

Et n’y a-t-il pas des fans de metal extrêmes qui sont en colère et estiment que ce type de succès est une trahison pour la scène underground et le message anti-chrétien du groupe ?

C’est difficile à dire. Peut-être que je penserais ceci si j’étais un adolescent. Certaines personnes prennent à cœur le fait qu’un tel lien avec le business ne devrait pas arriver. Mais c’est difficile à dire. Bien sûr, tout dépend de ce que tu attends de la vie. Tout dépend de ce que le succès signifie pour toi. Peut-être que je n’aurais pas fait certaines des choses que Nergal a faites ces années passées mais l’un dans l’autre, il fait toujours de la musique. Il enregistre toujours de bons albums ; il joue toujours la même musique qu’auparavant. Le reste est moins important à mes yeux. Donc, tant que Behemoth reste un bon groupe, qu’il a du succès et qu’il fout le feu sur scène, il ne devrait rien y avoir à dire. La philosophie est venue de l’underground et, tu sais, c’est un peu étrange pour certaines personnes. Nous sommes tous différents et on ne peut pas accuser de trahison des gens simplement parce qu’on n’a pas vécu, disons, ce que Nergal a vécu dans sa vie. On ne peut pas dire ce qu’on aurait fait [à sa place] parce que pour pouvoir le faire il faudrait avoir été dans ses chaussures, alors là on pourrait se faire une idée. C’est ce que je pense. Behemoth est un bon groupe et Nergal n’est peut-être pas un authentique dingue de metal – en tout cas il n’y ressemble clairement pas – mais il crée de la bonne musique et ça, je crois, est la meilleure chose pour tous ceux qui aiment la musique extrême. Il y a survécu. Il ne s’est pas incliné face au succès. Il a travaillé dur pendant des années pour ce qu’il a et je suis certain qu’il le mérite.

Interview téléphonique réalisée le 20 mai 2014 par Metal’O Phil.
Retranscription : Thibaut Saumade.
Traduction et introduction : Spaceman.
Photos : kobaru.pl.

Site internet officiel de Vader : www.vader.pl



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  • il a l’air cool ce gars 🙂

    et ce qu’il dit sur nergal,100 % d’accord : on est personne pour dire que c’est un traitre,on est pas en guerre,il fait ce qu’il veut de sa vie.et en plus,il continue de faire de très bons albums avec behemoth!!

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